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Radiologie
Doppler transcrânien
Cours de Radiologie
 

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Introduction :

Le doppler est une technique utilisée en routine depuis une trentaine d’années dans le dépistage des lésions carotidiennes extracrâniennes.

Pendant longtemps, la circulation intracrânienne n’était appréciée qu’indirectement et de façon très aléatoire par l’étude vélocimétrique de l’artère ophtalmique.

En 1982, R Aaslid et H Nornes ont démontré qu’il était possible d’enregistrer le signal doppler du segment proximal des artères intracrâniennes grâce au doppler à émission pulsée, en utilisant une sonde de basse fréquence.

Leurs premiers essais cliniques laissaient présager l’importance du futur rôle du doppler transcrânien dans le dépistage et la surveillance du vasospasme cérébral ; il est aujourd’hui utilisé en routine par toutes les équipes prenant en charge les patients après rupture d’un anévrisme intracrânien.

Les champs d’application du doppler transcrânien ne cessent de s’étendre.

En pathologie ischémique cérébrale, il permet d’évaluer le retentissement intracrânien d’une sténose carotidienne ou vertébrale extracrânienne, de dépister une sténose intracrânienne et d’étudier les suppléances intracrâniennes en cas d’occlusion carotidienne.

La détection des microembolies cérébrales peut apporter des informations sur le mécanisme physiopathologique de l’ischémie.

En neuroréanimation, le doppler transcrânien permet de surveiller les patients qui ont un oedème cérébral et peut contribuer au diagnostic de mort cérébrale.

Méthodologie :

A - FENÊTRES ACOUSTIQUES :

Le doppler transcrânien permet d’enregistrer le signal doppler du segment proximal des artères intracrâniennes en utilisant les fenêtres acoustiques physiologiques du crâne.

Deux techniques sont utilisées : le doppler transcrânien dit « à l’aveugle », réalisé à l’aide d’une machine dédiée de doppler pulsé à haute puissance d’émission munie d’une sonde de 2 MHz, et le doppler transcrânien couleur, utilisant une sonde « phased array » de 2 MHz.

Idéalement, l’opérateur se place à la tête du patient, tenant la sonde de sa main droite pour explorer le côté droit et de sa main gauche pour le côté gauche.

Les avant-bras et les coudes sont appuyés sur l’oreiller du patient, ce qui assure une bonne stabilité et un bon confort de travail.

Cependant, l’opérateur peut aussi se placer à côté du patient, comme pour une échographie abdominale ; on demande alors au patient de tourner la tête en fonction du côté exploré.

1- Fenêtre temporale :

Elle est située au-dessus de l’apophyse zygomatique, en avant du tragus et correspond à l’écaille temporale.

Chez les sujets jeunes, la fenêtre temporale est large, alors que fréquemment, chez les sujets âgés, seule la partie postérieure de la fenêtre est perméable.

Enfin, dans certains cas, les ultrasons ne pénètrent pas la boîte crânienne.

Ces échecs, rencontrés surtout chez les femmes âgées, sont dus soit à une hyperostose temporale, soit à une ostéoporose évoluée, les ultrasons ne se propageant pas dans l’os ostéoporotique qui renferme des cavités de résonance.

Dans la série de 834 patients publiée par Boespflug en 1992, la fenêtre temporale est absente chez 23 % des femmes et 6 % des hommes.

Après intervention chirurgicale, la zone de craniectomie constitue généralement une excellente fenêtre acoustique.

2- Fenêtre orbitaire :

Elle est constituée par le canal optique ou le toit de l’orbite.

La sonde est placée sur la paupière fermée, en regard du bulbe cornéen, et orientée en arrière et en dedans vers l’apex orbitaire.

Pour cette exploration, il est recommandé de réduire la puissance d’émission, car les ultrasons sont susceptibles d’induire des cataractes, surtout lorsque l’examen est répété comme c’est le cas dans la surveillance d’un vasospasme.

3- Fenêtre occipitale :

Elle est constituée par le foramen magnum et/ou l’écaille occipitale.

La position assise est préférée chaque fois que possible.

En cas d’impossibilité, le patient est placé en décubitus latéral, avec la tête en hyperflexion.

Cette voie d’abord, qui permet l’étude des vertébrales intracrâniennes et du tronc basilaire, est difficile chez les patients en ventilation assistée dont la mobilisation est délicate.

B - RÉALISATION PRATIQUE D’UN DOPPLER TRANSCRÂNIEN À L’AIDE D’UNE MACHINE DE DOPPLER PULSÉ DÉDIÉE (DOPPLER TRANSCRÂNIEN DIT « À L’AVEUGLE ») :

L’identification des artères cérébrales repose sur la fenêtre utilisée, l’orientation de la sonde, la profondeur d’enregistrement et le sens du flux.

Les manoeuvres de compression ne sont plus utilisées pour identifier les artères, mais gardent des applications en tant que test fonctionnel avant certaines interventions sur la bifurcation carotidienne.

Les nombreuses variations anatomiques du polygone de Willis, surtout pour le système postérieur, sont sources d’erreurs et de difficultés d’identification des artères.

1- Par voie temporale :

La voie d’abord la plus utile est la fenêtre temporale.

Le volume de mesure est progressivement déplacé vers la profondeur, par paliers de 2 à 5mm. Le flux de l’artère cérébrale moyenne est capté dans son segment horizontal (M1), de 40 à 65 mm de profondeur.

Son signal est positif car le flux se dirige vers la sonde. Le signal est souvent enregistrable plus superficiellement dans le segment M2.

À 60-65 mm de profondeur, le volume de mesure recouvre la bifurcation carotidienne intracrânienne et le signal est mixte, avec une composante positive correspondant à l’artère cérébrale moyenne et une composante négative correspondant au segment horizontal de l’artère cérébrale antérieure dont le flux s’éloigne de la sonde.

Au-delà de 65 mm, apparaît un signal négatif correspondant au signal de la communicante antérieure dont le flux s’éloigne de la sonde.

En orientant la sonde légèrement vers le bas, le signal du siphon carotidien peut être enregistré : la portion intracaverneuse a un signal positif, alors que celui du segment supraclinoïdien est négatif.

Les sinuosités du siphon carotidien, la profondeur d’enregistrement et l’environnement osseux sont fréquemment sources de difficultés techniques.

Pour capter le signal de l’artère cérébrale postérieure, la sonde est orientée vers l’arrière et le volume de mesure placé à 65-70 mm de profondeur : le flux de la portion P1 précommunicante de l’artère cérébrale postérieure se dirigeant vers la sonde est positif, tandis que le flux du segment P2 postcommunicant est négatif.

Les artères communicantes postérieures, dont le flux est faible dans les conditions normales, ne deviennent enregistrables que lorsqu’elles interviennent dans un circuit de suppléance.

2- Par voie occipitale :

Le signal des artères vertébrales intracrâniennes, capté entre 50 et 70 mm de profondeur, et celui du tronc basilaire, capté au-delà de 80 mm, souvent 90 mm, sont négatifs car le flux s’éloigne de la sonde.

Le signal du tronc basilaire est moins modulé, avec un index de résistance plus bas que celui des artères vertébrales.

Les difficultés d’enregistrement sont liées à l’accès à la fenêtre occipitale, la profondeur et les tortuosités du tronc basilaire.

3- Par voie orbitaire :

L’artère ophtalmique peut être suivie jusqu’à une profondeur de 50 à 60 mm.

À partir de 60 mm, on capte un signal très différent, moins modulé, correspondant au siphon carotidien, de sens positif pour le segment infraclinoïdien et de sens positif pour le segment supraclinoïdien.

Il existe plusieurs sources d’erreurs et de difficultés : enregistrement simultané du segment infra- et supraclinoïdien, parasitage par le flux veineux du sinus caverneux, confusion avec l’artère cérébrale antérieure controlatérale, l’artère communicante postérieure ou l’artère cérébrale postérieure.

C - RÉALISATION PRATIQUE D’UN DOPPLER TRANSCRÂNIEN COULEUR :

Les fenêtres acoustiques utilisées sont les mêmes que pour le doppler transcrânien.

La sonde est placée sur la tempe et on réalise une coupe transversale de la tête de façon à ce que soient vus la ligne médiane, les pédoncules cérébraux sous forme de deux zones ovalaires hypoéchogènes et la voûte crânienne controlatérale.

Après passage dans le mode doppler couleur, on obtient une vue axiale du polygone de Willis, le plus souvent incomplète si l’on n’utilise pas de produit de contraste ultrasonore.

Du côté exploré, on visualise habituellement dans le même plan, l’artère cérébrale moyenne, l’artère cérébrale antérieure et l’artère cérébrale postérieure.

Les siphons carotidiens sont le plus souvent visualisés simultanément en orientant la sonde légèrement vers le bas.

Le tir doppler est ajusté sur l’artère étudiée en réalisant la correction d’angle nécessaire.

Par voie occipitale, il n’y a pas de repères anatomiques : en coupes transversales obliques vers le haut, on visualise le segment intracrânien des artères vertébrales et leur jonction.

Le tronc basilaire n’est souvent étudié que sur un court segment, en l’absence d’injection de produit de contraste ultrasonore.

Des coupes longitudinales peuvent aussi être utiles pour l’étude du tronc basilaire.

En doppler puissance, la cartographie couleur est obtenue à partir de l’amplitude (ou puissance) du signal doppler et non pas à partir des fréquences.

L’image obtenue reflète la quantité de sang présente dans le vaisseau et non pas le flux.

L’échelle de couleur est monochrome et l’image est plus homogène qu’en doppler couleur .

Les avantages du doppler puissance sur le doppler couleur sont l’absence de phénomène d’aliasing, la capacité à détecter des flux lents et à obtenir une image avec un angle de 90°.

En revanche, il n’apporte pas d’informations sur les vitesses ni sur le sens du flux (sauf si l’on dispose d’un mode doppler puissance bidirectionnel).

Le doppler puissance, utilisé en complément du doppler transcrânien couleur, est surtout utile pour l’étude morphologique des anévrismes intracrâniens, des sténoses artérielles intracrâniennes et des collatérales.

D - UTILISATION DES PRODUITS DE CONTRASTE ULTRASONORES :

Les produits de contraste actuellement utilisés sont tous constitués de microbulles libres ou encapsulées.

Le Levovist, seul produit de contraste de ce type actuellement commercialisé en France, se compose de microbulles d’air stabilisées par l’acide palmitique.

Il se présente sous la forme de granules composés de microparticules de galactose associées à une très faible concentration d’acide palmitique.

Les microbulles sont formées par la mise en suspension des granules de galactose dans de l’eau.

Les microbulles d’un diamètre inférieur à 10 µm sont suffisamment petites pour passer le filtre pulmonaire.

Le Levovist augmente l’échogénicité du sang de façon reproductible et dose-dépendante, jusqu’à dissolution totale des microparticules.

L’amplification obtenue en mode doppler est de l’ordre de 10 à 20 dB.

La seule contre-indication du Levovist est la galactosémie.

Le nombre d’échecs d’insonation des artères cérébrales liés à une mauvaise fenêtre acoustique est considérablement réduit par l’utilisation du Levovist.

Par rapport à l’examen de base, l’injection de produit de contraste augmente le nombre de segments artériels visualisés, comme les branches périphériques des artères de la base, la portion distale du tronc basilaire, les artères cérébelleuses postéro-inférieures.

Les modalités d’injection du produit de contraste évoluent.

L’injection d’un bolus unique de toute la dose (300 mg) est aujourd’hui abandonnée, car l’effet de blooming et l’effet de saturation sont trop importants.

La dose peut être injectée en trois à quatre petits bolus ou en infusion lente de 0,5 ou 1 mL/min, ce qui permet de minimiser les artefacts et de rallonger le temps de rehaussement utile du signal jusqu’à 15-20 minutes.

L’utilisation d’une seringue électrique permet de combiner les deux types d’injection, infusion lente entrecoupée de microbolus.

Études vélocimétriques en doppler transcrânien :

A - CRITÈRES VÉLOCIMÉTRIQUES NORMAUX :

Les artères cérébrales présentent un pic systolique aigu suivi d’une décroissance lente des vitesses laissant persister en fin de diastole un flux important.

L’analyse spectrale montre une répartition des fortes brillances aux hautes et moyennes fréquences, avec une fenêtre sombre dans les basses fréquences.

Les paramètres étudiés par le doppler transcrânien incluent la direction des flux, la vitesse circulatoire et la résistance vasculaire.

La direction des flux est indiquée soit par la position du spectre par rapport à la ligne de base, les flux se dirigeant vers la sonde étant par convention positifs, soit par la couleur rouge ou bleu, les flux se dirigeant vers la sonde étant codés en rouge.

Les vitesses circulatoires sont calculées par l’appareil et ajustées selon l’angle que fait le faisceau ultrasonore avec le vaisseau.

Les vitesses peuvent être exprimées en cm/s ou en kHz.

Avec les appareils de doppler « à l’aveugle », lorsque l’on utilise une échelle en cm/s, on suppose que l’angle d’insonation du vaisseau est proche de 0, ce qui est plus ou moins vrai selon les segments du vaisseau exploré.

Une échelle de fréquences exprimée en kHz serait donc plus rigoureuse.

On peut utiliser la formule suivante pour obtenir l’équivalence entre fréquences et vitesses :

V = 39 f, V en cm/s et f en kHz, l’examen étant réalisé avec une sonde de 2 MHz.

En doppler couleur, la correction d’angle est primordiale pour valider l’échelle de vitesses en cm/s.

Pour caractériser un flux, on prend en compte la vitesse systolique maximale, la vitesse diastolique et la vitesse moyenne.

La vitesse moyenne correspond à la valeur du calcul de toutes les vitesses d’un ou plusieurs cycles cardiaques.

Les vélocités des artères cérébrales postérieures et antérieures sont inférieures à celles des artères cérébrales moyennes. Les indices de résistance (IR) ou de pulsatilité (IP) sont des reflets des résistances du territoire d’aval. Ils sont calculés par la machine selon les formules suivantes :

– IR (Pourcelo) = VS - VD/VS.

Valeurs normales pour l’artère cérébrale moyenne : 0,49-0,63.

– IP (Gosling) = VS - VD/VM.

Valeurs normales pour l’artère cérébrale moyenne : 0,6-1,1.

VS : vitesse systolique maximale (valeur du pic systolique) ; VD : vitesse diastolique minimale (valeur de la vitesse télédiastolique) ; VM : vitesse moyenne (calculée par l’appareil).

Le calcul automatique des indices par la machine n’est possible que sur des courbes vélocimétriques très pures, avec une limite supérieure du spectre bien définie.

Si le signal doppler est trop faible, on peut apprécier les vélocités avec l’échelle des vitesses et calculer « manuellement » les indices.

Le renforcement du signal peut être obtenu par l’injection de produit de contraste, mais il faut éviter l’injection en bolus qui perturbe trop le spectre.

B - PRINCIPES D’INTERPRÉTATION DES DONNÉES VÉLOCIMÉTRIQUES :

Une vélocité élevée peut traduire un rétrécissement localisé par sténose ou par vasospasme, ou refléter une augmentation de débit, par exemple dans une collatérale de petite taille ou dans une malformation artérioveineuse.

Les IR et IP, qui reflètent tous les deux la résistance à l’écoulement, peuvent être utilisés indifféremment. Un IP diminué est observé en aval d’une sténose serrée.

L’augmentation de la pression du dioxyde de carbone (PCO2) dans un territoire ischémié provoque un affaissement du pic systolique et une augmentation relative des vitesses diastoliques.

Dans les conditions où la diastole est élevée, comme dans les fistules artérioveineuses, l’IP est aussi diminué.

L’hypertension intracrânienne entraîne au contraire une augmentation de la résistance vasculaire d’où un IP élevé (supérieur à 1,2), lié à la diastole basse.

L’utilisation du rapport de l’IP du côté pathologique sur l’IP du côté sain (pulsatility transmission index ou PTI) permet de réduire l’influence de la fonction cardiaque : PTI = IP du côté étudié/IP du côté sain.

Les valeurs normales pour l’artère cérébrale moyenne sont de 0,93 à 1,07.

Le PTI est habituellement élevé en cas d’hypertension intracrânienne et en présence d’une sténose de l’artère cérébrale moyenne.

Le PTI de l’artère cérébrale moyenne est significativement abaissé pour une sténose de la carotide interne extracrânienne homolatérale supérieure à 75 %.

Ce rapport perd de son intérêt en cas de sténose carotidienne bilatérale.

Applications cliniques du doppler transcrânien :

A - APPLICATIONS NEUROLOGIQUES :

Dans le cadre général de la pathologie ischémique cérébrale, le doppler transcrânien, en complément du doppler des troncs supraaortiques, a de multiples indications.

Dans l’ischémie cérébrale aiguë, il peut préciser rapidement, de façon non invasive, le niveau de l’occlusion et guider la thérapeutique.

Il trouve aussi une application de choix dans le bilan des sténoses carotidiennes.

1- Évaluation du retentissement hémodynamique intracrânien d’une sténose carotidienne extracrânienne :

* Modification du flux de l’artère cérébrale moyenne homolatérale :

Une sténose carotidienne de moins de 75 % n’entraîne pas de modifications hémodynamiques intracrâniennes.

Au-delà de 75 %, le flux de l’artère cérébrale moyenne est altéré, avec une chute de la vitesse et de l’IP.

Le PTI devient inférieur à 0,92, la baisse du PTI étant d’autant plus importante que la sténose carotidienne est serrée.

L’inhalation de CO2 ou l’injection intraveineuse d’acétazolamide (Diamox) permettent d’évaluer la vasoréactivité cérébrale.

Ces tests dynamiques provoquent une diminution des résistances distales par vasodilatation.

L’augmentation des vitesses de l’artère cérébrale moyenne permet de quantifier la réserve hémodynamique.

Chez les patients porteurs d’une sténose carotidienne supérieure à 75 %, la réactivité cérébrale est habituellement diminuée, d’autant plus que la sténose est serrée, mais il existe de grandes variations selon les individus.

* Évaluation des suppléances :

L’artère ophtalmique est une importante anastomose entre la carotide interne et la carotide externe, ce qui explique que son débit soit fluctuant.

Dans les occlusions ou les sténoses serrées de la carotide interne, l’artère ophtalmique, alimentée par l’artère angulaire de la face, branche terminale de l’artère faciale, peut s’inverser et participer à la revascularisation du siphon carotidien et du territoire sylvien.

Certaines variations anatomiques, en particulier lorsque l’artère ophtalmique naît de l’artère méningée moyenne, expliquent que le flux ophtalmique puisse être conservé. Dans les occlusions carotidiennes, l’artère ophtalmique est inversée dans 75 % des cas.

Même lorsqu’elle présente un flux inversé important, l’artère ophtalmique joue rarement un rôle fonctionnel majeur dans la perfusion cérébrale.

La mise en jeu de l’artère communicante antérieure se traduit par une inversion du sens du flux du segment A1 de l’artère cérébrale antérieure du côté de la sténose, et une augmentation des vitesses de l’artère cérébrale antérieure des deux côtés.

Du côté donneur, la vitesse de l’artère cérébrale antérieure est supérieure à la vitesse de l’artère cérébrale moyenne ou supérieure à 1,2 de la vitesse du côté opposé.

La communicante antérieure est deux fois plus souvent mise en jeu que les communicantes postérieures.

Il existe donc une hiérarchie dans la mise en jeu des communicantes qui dépendrait de la morphologie du polygone de Willis.

Si le polygone de Willis est complet, c’est la communicante antérieure qui intervient en priorité.

2- Détection des sténoses et occlusions artérielles intracrâniennes :

Une sténose artérielle intracrânienne se manifeste par une augmentation des vitesses et des modifications du spectre traduisant l’apparition de turbulences.

Pratiquement, il faut retenir qu’un pic systolique maximal supérieur à 150 cm/s pour l’artère cérébrale moyenne est en faveur d’une sténose significative.

Mais l’analyse des vélocités absolues est insuffisante et on tient compte aussi de l’asymétrie des vitesses entre les deux artères cérébrales moyennes et des modifications du flux d’aval.

La sensibilité du doppler transcrânien dans la détection des sténoses de l’artère cérébrale moyenne supérieures à 50 % varie de 75 à 86 % selon les séries.

Elle est moins bonne pour les sténoses de l’artère cérébrale postérieure, de l’artère vertébrale intracrânienne et du tronc basilaire.

Une sténose serrée de la carotide interne extracrânienne peut entraîner une diminution des vitesses de l’artère cérébrale moyenne et masquer une sténose intracrânienne si on ne réalise pas un balayage complet de l’artère en doppler couleur.

Les faux diagnostics positifs de sténose intracrânienne sont le plus souvent liés à des sinuosités de l’artère, à une mauvaise correction de l’angle de tir doppler et à l’enregistrement d’une artère collatérale à flux élevé.

Le critère de vitesse est peu fiable pour le diagnostic des sténoses du siphon carotidien car il n’est pas possible de déterminer précisément le bon angle de tir doppler.

Le diagnostic repose sur l’asymétrie par rapport au côté opposé et à l’enregistrement de turbulences.

Pour le tronc basilaire, des vitesses supérieures à 120 cm/s sont en faveur d’une sténose significative, mais il faut rappeler ici que même en utilisant un produit de contraste ultrasonore, l’exploration du tronc basilaire est le plus souvent incomplète.

Le diagnostic d’occlusion de l’artère cérébrale moyenne peut être difficile car il repose sur un critère négatif, l’absence de signal doppler.

L’enregistrement ou la visualisation des autres artères du polygone de Willis permet d’éliminer un problème technique ou d’absence de fenêtre acoustique.

En cas d’occlusion proximale de l’artère cérébrale moyenne en M1 ou M2, on observe une diminution importante des vitesses au niveau proximal et souvent une augmentation du flux de l’artère cérébrale antérieure homolatérale.

Un amortissement de l’artère carotide interne, avec augmentation de l’IR, peut aussi être mis en évidence.

Si l’occlusion siège à l’origine de l’artère cérébrale moyenne, le diagnostic repose essentiellement sur les signes négatifs et les signes indirects d’amont sur la carotide interne.

L’occlusion d’une branche distale de l’artère cérébrale moyenne ne peut être décelée, même en doppler couleur avec produit de contraste.

Une diminution du flux apparaît si trois branches au moins sont occluses.

Une occlusion distale de l’artère cérébrale postérieure se traduit par un flux très résistant dans le segment proximal.

Les occlusions du tronc basilaire sont de diagnostic difficile car il n’y a pas de signe indirect fiable.

3- « High intensity transient signal » (HITS) :

Les HITS sont la traduction de microembolies, qu’elles soient d’origine calcique, athéromateuse ou cruorique. Ce sont des signaux transitoires brefs (< 300 ms), de haute énergie variant de 3 à 60 dB au-dessus du spectre de fond.

Ils se superposent à l’analyse spectrale et donnent un son à type de sifflement, de clic, de chirp ou de pseudoplainte.

Les HITS peuvent être enregistrés avec toute machine de doppler transcrânien, mais il faut une machine dédiée avec un casque de monitoring et un logiciel spécial pour les compter et les analyser.

La durée d’enregistrement doit être d’au moins 1 heure lorsque l’on explore une sténose carotidienne emboligène, car la fréquence des microembolies est faible, généralement moins de cinq par heure.

Dans les prothèses valvulaires cardiaques, le nombre de microembolies étant plus élevé, la durée du monitoring peut être plus courte.

Plusieurs techniques sont en cours d’évaluation pour différencier automatiquement les vrais signaux microemboliques des artefacts, mais les résultats manquent de fiabilité et une relecture de l’enregistrement reste indispensable.

Il s’agit donc d’un examen qui consomme beaucoup de temps.

Dans l’ischémie cérébrale, les HITS peuvent apporter des informations sur la pathogénie de l’accident vasculaire cérébral. Ils sont observés fréquemment, dans 50 % des cas, chez les sujets porteurs d’une sténose carotidienne, alors qu’ils sont beaucoup moins fréquents au décours d’un accident vasculaire cérébral d’origine cardioembolique.

L’enregistrement des HITS permet aussi d’identifier les patients qui continuent à emboliser et pour lesquels on est donc plus enclin à proposer une thérapeutique agressive.

À la différence de ce qui se passe dans le système carotidien, il a été démontré que les HITS étaient plus fréquents au cours des accidents vasculaires vertébrobasilaires d’origine cardiaque que chez les patients porteurs d’une sténose d’une artère vertébrale ou du tronc basilaire.

4- Vols vertébro-sous-claviers :

Le flux du tronc basilaire reste normal chez la plupart des patients qui présentent un vol vertébro-sous-clavier.

Dans un tiers des cas, il existe un prévol ou un vol intermittent, mais une inversion complète du flux est exceptionnelle.

Le maintien du flux basilaire dans le sens physiologique au cours du phénomène de vol vertébro-sous-clavier confirme que la symptomatologie d’insuffisance vertébrobasilaire est beaucoup plus liée à la microangiopathie qu’à l’atteinte des gros vaisseaux.

Durant l’épreuve d’hyperhémie provoquée du bras, la vitesse et le sens du flux du tronc basilaire peuvent être plus ou moins altérés.

5- Étude du parenchyme cérébral dans l’ischémie aiguë :

Grâce aux produits de contraste, le doppler n’est plus réservé à l’étude des flux.

L’imagerie de seconde harmonique permet de détecter des anomalies focales de prise de contraste au niveau du territoire ischémié.

Les premiers essais cliniques ont montré qu’il était possible, au lit du malade, d’évaluer la distribution du produit de contraste en rapport avec la perfusion cérébrale et d’effectuer ainsi une imagerie de perfusion ultrasonore.

B - APPLICATIONS NEUROCHIRURGICALES :

1- Vasospasme :

La détection et la surveillance du vasospasme au cours des hémorragies méningées par rupture d’anévrisme intracrânien restent une des principales applications du doppler transcrânien.

Ce champ d’application est longtemps resté du domaine du doppler pulsé « à l’aveugle », mais des travaux récents soulignent l’intérêt du doppler transcrânien couleur.

L’effet sténosant du vasospasme se traduit par une augmentation des vitesses circulatoires et des modifications de l’analyse spectrale telles que dispersion du spectre, turbulences et même inversion de flux.

En doppler couleur, l’augmentation des vitesses se traduit par une désaturation des couleurs ; le phénomène de repliement spectral se traduit par la juxtaposition de couleurs claires, de sens opposé, et les turbulences sont responsables d’un aspect en « mosaïque de couleur » de la lumière artérielle.

* Vasospasme de l’artère cérébrale moyenne :

L’augmentation des vitesses circulatoires de l’artère cérébrale moyenne est proportionnelle à l’importance du vasospasme.

Une vitesse moyenne comprise entre 80 et 120 cm/s peut correspondre à un vasospasme discret, habituellement non détecté à l’artériographie.

Lorsque les vélocités moyennes atteignent 130 cm/s, l’artériographie montre habituellement un vasospasme modéré.

En utilisant une valeur seuil de 130 cm/s, la spécificité du doppler transcrânien atteint 96 %, avec une valeur prédictive positive de 87 %.

Une vitesse moyenne supérieure à 200 cm/s est en faveur d’un vasospasme sévère susceptible d’entraîner une ischémie cérébrale.

Presque tous les patients avec un vasospasme symptomatique ont une vitesse moyenne supérieure à 200 cm/s.

En revanche, les patients chez qui la vitesse moyenne est supérieure à 200 cm/s ne deviennent pas tous symptomatiques, en raison du développement d’une circulation collatérale adéquate.

Plus que la valeur du pic systolique, c’est l’augmentation rapide des vitesses (supérieure à 50 cm/s en 24 heures) qui est de mauvais pronostic.

Le rapport vitesse systolique de l’artère cérébrale moyenne/vitesse systolique de la carotide interne extracrânienne est aussi utilisé pour quantifier le vasospasme.

Un rapport supérieur à 3 traduit un vasospasme sévère qui contre-indiquerait une intervention chirurgicale, selon Lindegaard.

Un vasospasme siégeant sur les branches distales de l’artère cérébrale moyenne peut passer complètement inaperçu au doppler transcrânien ; seul un vasospasme sévère avec des sténoses distales multiples peut retentir sur le flux de l’artère cérébrale moyenne proximale.

Un vasospasme de l’artère cérébrale moyenne peut être sous-estimé s’il existe un vasospasme sévère du siphon carotidien réduisant globalement les vélocités des artères de la base du crâne.

Les résultats du doppler transcrânien doivent être interprétés prudemment, car il faut garder à l’esprit que les vélocités sont dépendantes de la viscosité sanguine et que l’hématocrite est le principal facteur influençant la viscosité sanguine.

Le traitement médical du vasospasme passe par l’induction d’une hypervolémie qui a pour conséquence une diminution de l’hématocrite, et donc une augmentation significative des vélocités sanguines.

En revanche, en cas d’hypertension artérielle chronique, les vitesses sont plus faibles que chez les sujets normotendus, et un vasospasme significatif peut être présent sans augmentation importante des vitesses.

La présence d’une hypertension intracrânienne peut masquer une augmentation des vélocités liée à un vasospasme, mais l’augmentation des IR attire généralement l’attention et permet d’en prendre compte dans l’interprétation.

* Vasospasme du siphon carotidien, de l’artère cérébrale antérieure et de l’artère cérébrale postérieure, des artères vertébrales intracrâniennes et du tronc basilaire :

Pour des raisons anatomiques et techniques, le vasospasme du siphon carotidien, de l’artère cérébrale antérieure et de l’artère cérébrale postérieure est plus difficile à évaluer que celui de l’artère cérébrale moyenne.

Les critères vélocimétriques classiques de vasospasme sont une vitesse moyenne supérieure à 90 cm/s pour le siphon carotidien, 120 cm/s pour l’artère cérébrale antérieure et 90 cm/s pour l’artère cérébrale postérieure.

Mais si l’on choisit comme valeur seuil 130 cm/s pour le siphon carotidien et l’artère cérébrale antérieure et 110 cm/s pour l’artère cérébrale postérieure, la spécificité du doppler transcrânien augmente considérablement, atteignant 100 % pour le siphon carotidien et l’artère cérébrale antérieure et 93 % pour l’artère cérébrale postérieure.

Pour le diagnostic de vasospasme des artères vertébrales et du tronc basilaire, la spécificité est de 100 % quand les vitesses sont respectivement supérieures ou égales à 80 cm/s et 95 cm/s.

Cependant, les corrélations entre les vitesses moyennes et le diamètre de ces artères sont moins bonnes que pour l’artère cérébrale moyenne, le développement d’une circulation collatérale, l’existence d’une variation anatomique du polygone de Willis ou des problèmes d’ordre technique pouvant être à l’origine de difficultés de recueil et d’interprétation du signal.

Le phénomène de repliement spectral qui survient lorsque l’on enregistre des flux rapides à une grande profondeur, comme dans le cas de vasospasme du segment A1 de l’artère cérébrale antérieure, est très fréquemment source de difficultés pour la quantification du vasospasme.

* Causes d’erreur dans le diagnostic de vasospasme cérébral :

Les causes les plus fréquentes de faux diagnostic négatif sont :

– le vasospasme distal ;

– le vasospasme sévère du siphon carotidien ;

– l’hypertension artérielle chronique ;

– l’hypertension intracrânienne.

La cause la plus fréquente de faux diagnostic positif est l’hypervolémie induite.

2- Malformations artérioveineuses :

Les artères qui alimentent une malformation artérioveineuse présentent une augmentation de flux avec des vitesses élevées, une diminution de l’IP et une diminution de la réactivité au CO2.

Le doppler transcrânien n’est pas utilisé en temps que méthode diagnostique mais est intéressant pour la surveillance des malformations artérioveineuses traitées.

3- Anévrismes intracrâniens :

À l’heure actuelle, le doppler transcrânien n’est pas utilisé pour le dépistage des anévrismes intracrâniens en raison d’une résolution spatiale encore insuffisante et de zones mal étudiées, en particulier la fosse postérieure.

Cependant, les travaux récents en doppler couleur avec injection intraveineuse de produit de contraste et l’imagerie 3D laissent augurer un avenir intéressant du doppler dans la pathologie anévrismale cérébrale.

Son rôle dans la surveillance des anévrismes traités, pour contrôler la perméabilité de l’artère traitée, et surtout pour mettre en évidence les reperméabilisations du sac anévrismal, a déjà été montré.

Des auteurs se sont intéressés aux modifications du flux de l’artère porteuse de l’anévrisme : l’artère sylvienne porteuse d’un gros anévrisme a une vitesse systolique plus élevée que l’artère controlatérale et qu’une artère porteuse d’un petit anévrisme.

L’IP d’une artère cérébrale moyenne porteuse d’un anévrisme thrombosé est plus élevé qu’en l’absence de thrombose.

4- Étude de la vascularisation tumorale :

Le doppler transcrânien avec contraste permet d’identifier les tumeurs hypervascularisées.

Les tumeurs de haut grade de malignité présentent souvent un spectre artériel et veineux irrégulier en amplitude et intensité, mais ces anomalies sont peu spécifiques.

C - APPLICATIONS DU DOPPLER TRANSCRÂNIEN EN NEURORÉANIMATION :

1- Diagnostic de mort cérébrale :

L’arrêt circulatoire cérébral se traduit en doppler transcrânien par l’enregistrement de signaux anormaux à type de flux pendulaire ou de pointes systoliques au niveau de la terminaison de la carotide interne intracrânienne.

L’asymétrie entre les deux côtés est fréquente et l’amplitude des complexes est variable selon la ventilation.

L’absence de signal n’est pas un signe d’arrêt circulatoire. Plusieurs grandes études ont montré la grande sensibilité et spécificité du doppler transcrânien dans le diagnostic de mort cérébrale.

À ce jour, en France, le doppler transcrânien n’est pas reconnu sur le plan médicolégal pour le diagnostic de mort cérébrale, mais chez les malades sédatés, lorsque l’électroencéphalogramme (EEG) ne peut être informatif, il est de plus en plus utilisé pour déterminer le moment de l’artériographie, notamment avant un prélèvement d’organe.

2- Surveillance des traumatisés crâniens :

Il a été montré que chez la plupart des patients traumatisés crâniens qui présentent un hématome ou un oedème cérébral, l’IP d’une ou des deux artères cérébrales moyennes est augmenté, ce qui témoigne d’une augmentation de la résistance circulatoire.

En salle d’accueil d’urgence des polytraumatisés, le doppler transcrânien peut donc avoir un rôle pour déterminer les priorités des examens complémentaires radiologiques à réaliser.

Au cours de l’évolution, le monitoring doppler permet de suivre les différents stades hémodynamiques observés après un traumatisme crânien grave : hypoperfusion, hyperhémie et vasospasme.

Conclusion :

Le doppler transcrânien joue, depuis plusieurs années, un rôle majeur dans la surveillance du vasospasme au décours d’une hémorragie méningée et devient de plus en plus utilisé en neuroréanimation pour l’évaluation de l’oedème cérébral, notamment chez les traumatisés crâniens graves et pour le diagnostic de mort cérébrale.

En pathologie ischémique cérébrale, le doppler transcrânien est aujourd’hui réalisé en complément du doppler cervical.

Il permet de déterminer le niveau de l’occlusion, de rechercher une sténose intracrânienne et d’évaluer les suppléances.

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