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Génétique
Analyse génétique fonctionnelle : complémentation fonctionnelle et dominance-récessivité
Cours de Génétique
 

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Les groupes de complémentation et le dénombrement desgènes :

L’analyse génétique d’un phénomène consiste à dénombrer le nombre de gènes impliqués dans celui-ci, puis à identifier la fonction biochimique de chacun d’entre eux, leurs interactions éventuelles et la régulation de leur expression.

Le dénombrement des gènes impliqués dans un phénomène est l’une des applications du test de complémentation fonctionnelle.

En obtenant le plus grand nombre possible de mutants du phénomène étudié, on diminue le risque de ne pas toucher l’un des gènes impliqués dans celui-ci (à moins que les mutations d’un gène particulier soient létales), puis, en croisant entre eux tous les mutants récessifs, on peut construire des « groupes de complémentation ».

Chaque groupe de complémentation est un ensemble de mutants ne complémentant pas entre eux, donc touchés dans un même gène; par conséquent un groupe de complémentation définit un gène en regroupant tous les mutants (récessifs) mutés dans ce gène.

Le nombre de groupes de complémentation définis par l’analyse fonctionnelle des croisements entre mutants récessifs du phénomène étudié correspond au nombre minimal de gènes impliqués dans ce phénomène.

Ce nombre de gènes peut être supérieur si on considère que le crible de mutants n’a pas été assez efficace (aucun mutant pour certains des gènes) ou si des mutants dominants ont été obtenus (ils ne peuvent être rattachés, par test fonctionnel, à aucun groupe de complémentation).

La complémentation fonctionnelle est un outil de croisement :

Croiser des drosophiles est simple, il suffit de les réunir dans un tube et de les laisser faire, croiser des végétaux est souvent plus laborieux puisque l’expérimentateur va devoir récupérer le pollen pour le disperser sur le stigmate de l’ovaire.

Mais comment croiser entre elles des souches d’organismes unicellulaires comme la levure ?

En effet, l’ensemencement d’une boîte par deux souches haploïdes (de signe sexuel opposé) va conduire à l’apparition de colonies haploïdes parentales, là où les cellules des deux souches n’ont pas été en contact, et de colonies diploïdes là où le contact a permis la fusion cellulaire, sans aucun moyen de distinguer les colonies diploïdes qu’on recherche des colonies haploïdes parentales qui nous indiffèrent.

C’est ici que la complémentation fonctionnelle se révèle être un outil utile et efficace pour l’expérimentateur.

En utilisant deux souches parentales auxotrophes pour des molécules différentes, par exemple la valine pour l’une et le tryptophane pour l’autre, on peut, en les croisant sur milieu minimum, être sûr de ne récupérer que des colonies diploïdes, grâce à la complémentation fonctionnelle dont elles peuvent bénéficier.

Les mutations d’auxotrophie des souches parentales sont ici utilisées comme « marqueurs de sélection de diploïdes ».

Ainsi, dans une étude portant sur des mutants [his–], auxotrophes pour l’histidine, tous les mutants [his–], comme la souche SSR [his+] doivent être porteurs de marqueurs de sélection de diploïdes; de ce fait la souche désignée comme SSR est certes « sauvage » pour le phénotype histidine mais obligatoirement mutée pour le (ou les) marqueur(s) de sélection de diploïdes.

Interprétation fonctionnelle et moléculaire de la dominance et la récessivité :

A - Approche formelle et factorielle de la dominance et de la récessivité :

Il est d’usage de croiser un mutant avec une souche de référence, dite sauvage, afin d’observer le phénotype du diploïde qui en est issu.

Si ce diploïde présente un phénotype identique à celui du parent sauvage, le phénotype mutant est dit « récessif », si le phénotype est identique à celui du parent mutant, celui-ci est dit « dominant », enfin si le phénotype du diploïde est différent, éventuellement intermédiaire, les phénotypes parentaux sont dits « co-dominants ».

Du fait que les phénotypes observés résultent de l’action, ou de l’inaction (en fait, on ne sait pas), de gènes sous-jacents, l’interprétation factorielle de ces observations phénotypiques conduit à considérer que l’allèle sauvage a, selon les cas, un effet dominant ou récessif par rapport à l’effet de l’allèle muté, de même qu’on jugera de l’effet dominant ou récessif d’un hétéro-allèle vis-à-vis de l’effet d’un autre hétéroallèle.

Le même type d’approche formelle et factorielle permet de considérer, en génétique médicale que :

– une maladie génétique est dite récessive quand sa manifestation exige la présence de deux exemplaires mutés du gène impliqué dans cette maladie.

Dans ce cas chacun des deux parents, qui n’est en général pas atteint est dit porteur sain; il est hétérozygote, porteur d’un exemplaire fonctionnel non muté du gène et d’un exemplaire muté, celui qu’il a transmis à son enfant atteint, conjointement avec la transmission de l’exemplaire muté de l’autre parent;

– une maladie génétique est dite dominante quand la présence d’un seul exemplaire muté du gène impliqué dans la maladie suffit à sa manifestation; a fortiori quand les deux exemplaires sont mutés la maladie est présente, mais peut, dans certains cas, revêtir une forme plus grave, voire différente.

Dans le cas où l’individu atteint n’est porteur que d’un seul exemplaire muté du gène (cas de loin le plus courant), cet exemplaire muté a été transmis par l’un des deux parents, qui est lui-même atteint puisqu’il suffit d’avoir un seul exemplaire muté pour l’être, de sorte que tout individu atteint a, en amont, l’un de ses deux parents atteints, et, en aval, la moitié de ses enfants atteints.

Cela suppose néanmoins que la maladie dominante soit compatible avec la vie et la reproduction, ou bien qu’elle est mortelle mais ne survient que tardivement dans la vie (ce qui est les cas de la plupart des maladies neuro-dégénératives).

Il peut arriver cependant qu’aucun des deux parents ne soit atteint, observation qui présente alors deux interprétations :

– soit l’enfant atteint est porteur d’une mutation de novo, apparue dans la lignée germinale de l’un des deux parents;

– soit l’un des deux parents est porteur de la mutation mais ne présente pas la maladie car la présence d’un allèle muté du gène n’est pathogène que sous différentes autres conditions génétiques et/ou environnementales, conditions qui sont réunies chez l’enfant et mais non chez le parent porteur.

On dit, dans ce cas, que la maladie a une pénétrance incomplète, c’est-à-dire que la probabilité de manifestation, sachant que la mutation pathogène est présente, est inférieure à 1.

Si la présence d’un exemplaire muté suffit, quel que soit le contexte, à la manifestation de la maladie, on dit que la maladie a une pénétrance complète.

Mais une interprétation factorielle n’est pas une interprétation fonctionnelle car elle ne préjuge ni de l’action ni de l’inaction de l’allèle muté puisqu’on ne sait pas s’il s’agit d’une perte ou d’un gain de fonction.

Ainsi, dans l’analyse génétique formelle, celle de Mendel ou des généticiens du début du XXe, on ne fait que « constater » la dominance ou la récessivité des phénotypes (ou des allèles au sein d’un génotype diploïde) sans lui apporter d’interprétation fonctionnelle puisque le gène est encore à ce moment une boîte noire.

Avec la mise en évidence de la fonction du gène, puis le développement de la biologie cellulaire et moléculaire, les phénomènes de dominance et de récessivité sont devenus compréhensibles dans leur causalité fonctionnelle.

B - Les différentes mutations possibles d’un gène et leurs conséquences fonctionnelles :

a) Distinction entre mutations de perte de fonction ou de gain de fonction :

La modification de l’information génétique portée par un gène peut avoir deux types antagoniques de conséquences fonctionnelles :

– soit il s’agit d’une mutation de perte de fonction, par effet quantitatif (sousexpression conduisant à moins ou pas de produit du gène) ou par effet qualitatif (un produit moins actif, voire inactif);

– soit il s’agit d’une mutation de gain de fonction, par effet quantitatif (sur-expression conduisant à plus de produit du gène) ou par effet qualitatif (un produit plus actif), ou par formation d’un produit muté doué d’une nouvelle propriété physicochimique et biologique, qui remplace l’activité antérieure ou s’ajoute à elle (par exemple toxicité dans certaines pathologies dominantes).

b) Distinction entre mutation ponctuelle et non ponctuelle :

La mutation ponctuelle d’un gène est une modification locale de sa séquence d’ADN par substitution d’une paire de base par une autre (SNP : Single Nucleotide Polymorphism) ou par délétion ou insertion d’une, deux ou trois paires de bases. Une mutation ponctuelle peut par conséquent conduire à une modification de l’information génétique portée par ce gène.

Cette nouvelle version du gène constitue de toute façon, qu’elle ait ou non une conséquence phénotypique, un allèle différent de l’allèle d’origine.

Les mutations non ponctuelles d’un gène correspondent soit à des délétions, notamment à l’issue de mutations chromosomiques par CO (méiotique ou mitotique ou interphasique), soit à des insertions, notamment des séquences rétrovirales ou de type transposon, soit à l’amplification d’une courte séquence répétée, en général un triplet.

Dans les deux premiers cas, elles conduisent principalement à des pertes de fonction des gènes concernés, dans le troisième cas, il s’agit souvent de gain de fonction, notamment quand le triplet répété est dans une séquence codante (maladie de Huntington).

c) Les différents types de mutations ponctuelles du gène :

La figure 5.3, en rappelant que le gène est constitué d’un ensemble de séquences emboîtées dont la séquence codante n’est que la séquence centrale, précise comment des mutations ponctuelles affectant diverses séquences peuvent avoir des conséquences quantitatives ou qualitatives associées à une perte ou un gain de fonction.

On peut noter cependant que muter un gène, comme le fait de toucher un édifice complexe, conduit le plus souvent, en probabilité, à une perte de fonction plutôt qu’à un gain.

Bien évidemment, seules les mutations affectant la séquence codante touchent la chaîne peptidique et se traduisent par un effet qualitatif; il faut cependant leur adjoindre certaines mutations d’épissage qui, plutôt que de bloquer l’épissage (perte de fonction) peuvent générer un épissage alternatif conduisant à une chaîne peptidique anormale (avec éventuellement gain de fonction).

NB : les séquences 5′UTR (Untranslated) et 3′UTR sont les séquences transcrites, présentes sur le messager, mais non traduites, en amont du codon AUG ou en aval du codon STOP.

Elles ont une fonction biologique puisque la mutation de certaines peut avoir des effets phénotypiques (dystrophie mytonique).

Figure 5.3

Remarque. Les gains de fonction sont une des bases de l’évolution génétique sous jacente à l’évolution des espèces.

Si la fonction du gène muté est modifiée, la fonction antérieure peut être conservée si ce gène existait préalablement en deux copies identiques, ce qui est possible car il existe un mécanisme, le crossing-over inégal, par lequel un gène peut se trouver dupliqué en tandem sur un chromosome; c’est ainsi que se sont formées les familles des gènes α et β conduisant à la synthèse des différents types d’hémoglobines.

On peut alors envisager des mutations survenant sur l’une des copies du gène, sans risque de faire perdre la fonction du gène qui reste assurée par la copie non mutée.

d) Les différents types de mutations non ponctuelles du gène :

➤ Les triplets répétés

Il s’agit d’une classe de mutations tout à fait particulière dont l’existence et les effets pathologiques n’ont été observés que chez l’homme (pour l’instant).

Dans tous les cas il s’agit d’une séquence d’un triplet répété dont la taille (le nombre de répétitions du triplet) est variable et comprise dans une fourchette formant ainsi un polymorphisme multi-allélique de type STR (Short Tandem Repeats) encore appelé microsatellite.

Bien que stable à la réplication, un STR peut, si sa longueur atteint ou dépasse un certain multiple, à la suite d’une mutation ou de processus encore à l’étude, devenir très instable sur le plan réplicatif et être alors sujet à des variations de grande ampleur, contraction ou amplification. Dans un certain nombre de cas, l’expansion d’un triplet répété a un effet pathogène responsable des maladies à triplets (tableau 5.3).

Cet effet pathogène est dominant dans toutes les maladies dites « à triplets » exceptée la maladie de Friedrich, le cas des maladies liées à l’X étant plus complexe, du fait de l’interaction entre l’effet pathogène et l’inactivation de l’X, dans le sexe féminin.

TABLEAU 5.3 LES MALADIES À TRIPLETS.

Selon les cas la séquence répétée est située dans la séquence 5’UTR, entre le promoteur et la séquence codante (syndrome de l’X-fragile : la mutation pathogène entraîne l’extinction du gène), dans la séquence codante (maladie de Huntington, ataxies spino-cérebelleuses : l’expansion du CAG entraîne l’expansion toxique d’un domaine poly-glutamine sur la protéine), dans la partie 3′ non codante de l’ARNm (dystrophie myotonique : effet pathologique en cours d’étude), dans un intron (maladie de Friedrich : l’expansion du GAA provoque l’extinction du gène par blocage de la transcription par formation d’un complexe entre les quatre brins d’ADN, ce qui explique le caractère récessif de son effet).

Ces mutations sont des mutations « dynamiques » à l’origine du phénomène d’« anticipation génique » qui est caractérisé par la progression au cours des générations de la gravité du phénotype (signes cliniques et âge de début des signes) en raison de l’amplification de la séquence lors de sa transmission.

➤ Les insertions d’éléments mobiles

Les insertions d’éléments mobiles, comme les rétrovirus, peuvent inactiver un gène ou déréguler son expression selon leur site d’insertion; c’est pourquoi certains virus comme le HBV peuvent induire des tumeurs dans le tissu hépatique infecté.

➤ Les macromutations

Elles résultent d’accidents majeurs de la réplication ou de la recombinaison par crossingover conduisant, selon les cas, à des déletions d’un ou plusieurs gènes, parfois à leur duplication (crossing-over inégal), et aux diverses anomalies de structures des chromosomes (translocations, inversions, déletions, duplication, fusions centriques).

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