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Génétique
Analyse génétique des révertants et des suppresseurs
Cours de Génétique
 

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C - Test de dominance-récessivité d’un suppresseur :

L’analyse d’un révertant de seconde classe, porteur d’une mutation à effet suppresseur, peut se poursuivre par un croisement approprié afin de savoir si l’allèle sua est dominant ou récessif vis-à-vis de son homologue sauvage sui.

Cette question se pose notamment quand on a de bonne raison de penser que la mutation à effet suppresseur touche un autre gène que celui porteur de la mutation directe (suppresseur peu lié ou génétiquement indépendant de la mutation directe).

Chaque révertant de seconde classe est alors classiquement soumis à une analyse par croisement avec une souche « sauvage ».

Il ne s’agit pas cependant de la souche SSR mais de la souche mutante dont est tiré le révertant, souche qui porte l’allèle sauvage sui et qui porte, comme le révertant la mutation directe, ce qui permet d’avoir un diploïde homozygote pour la mutation directe et de tester ainsi le phénotype de l’hétérozygote sua//sui.

Un croisement du révertant avec la SSR introduirait l’allèle sauvage de la mutation directe et empêcherait d’appréhender l’effet ou l’absence d’effet du suppresseur en imposant de toute façon un phénotype sauvage (si la mutation directe est récessive). Ainsi le révertant de deuxième classe val1-1/a, issu du mutant val1-1 (voir tableau 7.1) est croisé avec ce mutant val1-1, soit :

Si le phénotype de ce diploïde est [val+], cela indique que l’effet du suppresseur suaa est dominant sur suai, si le phénotype du diploïde est [val–], cela indique que son effet est récessif et ne peut s’imposer face à la séquence sauvage suai. Remarque.

On a « appris » à tester la dominance d’un mutant en le « croisant par sauvage », et à conclure qu’il est récessif si le phénotype du diploïde obtenu est « sauvage »; ici, on a croisé le révertant par la souche mutante, mais celle-ci est sauvage pour la séquence étudiée (sui) et si la séquence mutée (sua) est récessive, le phénotype du diploïde est [val–] c’est-à-dire « sauvage » du point de vue de l’effet suppresseur. Une illustration du fait qu’apprendre sans comprendre peut être dangereux.

D - Test de complémentation fonctionnelle entre suppresseurs récessifs :

Si deux suppresseurs suaa et suda, sélectionnés à partir d’un même mutant direct, sont récessifs, on peut tester leur allélisme par un test de complémentation fonctionnelle, en croisant entre eux les deux révertants, chacun étant porteur d’une des deux mutations suppresseurs.

Ainsi, en supposant que les suppresseurs soient récessifs, on peut croiser deux révertants val1-1/a et val1-1/d :

Révertant val1-1/a (val1-1, sua a) × Révertant val1-1/d (val1-1, sud a)

La question est alors d’interpréter le phénotype du diploïde en fonction de deux hypothèses alternatives :

– soit les deux suppresseurs sont alléliques et touchent le même gène; dans ce cas les deux allèles suaa et suda sont actifs sur val1-1, et le phénotype est [val+],

– soit les deux suppresseurs ne sont pas alléliques et touchent des gènes différents; dans ce cas ils sont tous deux inactifs vis-à-vis de val1-1, puisque tous deux récessifs face à leurs homologues sauvages respectifs, suai et sudi, et le phénotype est [val–].

Remarque 1. On ne doit pas être surpris de ce résultat où l’absence de complémentation entre suppresseurs aboutit à un phénotype sauvage [val+] alors que la complémentation fonctionnelle aboutit à un phénotype [val–]; à moins d’appliquer le test de complémentation fonctionnelle comme une « recette ».

En effet, lorsqu’on croise entre eux des mutants directs, par exemple [val–], les mutations testées ont un effet direct sur le phénotype, qui sera [val–] en cas de non complémentation (mutants touchés dans le même gène) ou [val+] en cas de complémentation (mutants touchés dans des gènes différents).

Mais ici, dans l’analyse fonctionnelle des suppresseurs, la relation génotype/phénotype est complètement différente; les deux révertants sont porteurs de la même mutation directe val1-1 et le phénotype [val+] n’est assuré que par l’effet des mutations suppresseurs suaa ou suda sur celui de la mutation directe à la condition d’être allélique.

On a « appris » à tester la complémentation fonctionnelle entre mutants récessifs en les croisant entre eux afin de conclure qu’ils étaient mutés dans un même gène si le phénotype du diploïde est muté et dans des gènes différents s’il est sauvage.

Et c’est exactement ce qu’on a fait ici : si le phénotype est [val+], cela signifie que le diploïde est de phénotype « muté » pour les séquences suppresseurs, c’est-à-dire qu’elles sont actives donc alléliques, car si le phénotype du diploïde est [val–], cela signifie que le diploïde est « sauvage », du point de vue des séquences suppresseurs, les deux allèles suai et sudi complémentant entre elles et, du fait de leur dominance, bloquant l’effet des deux mutations non alléliques suaa et suda.

Remarque 2. Quand les suppresseurs sont dominants, cas le plus courant, il est utile de faire les croisements entre révertants pour étudier la méiose du diploïde et statuer sur l’indépendance génétique des deux suppresseurs, qui est une indication sinon une preuve de leur non-allélisme.

Dans le cas d’une liaison étroite il n’est évidemment pas possible de statuer sur l’allélisme des deux suppresseurs.

E - Propriétés génétiques formelles des suppresseurs :

Il arrive assez souvent que les suppresseurs obtenus chez les révertants se classent en deux catégories :

– des suppresseurs allèle-spécifique et gène non-spécifique, c’est-à-dire capable de supprimer l’effet de la mutation directe et d’autres mutations du même gène mais pas de toutes et, en même temps capable de supprimer l’effet de mutations dans d’autres gènes que celui affecté par la mutation directe,

– des suppresseurs allèle-non spécifique et gène spécifique, c’est-à-dire capables de supprimer l’effet de la mutation directe et de toute autre mutation de perte de fonction de ce gène, y compris donc les délétions, mais incapable de supprimer l’effet de mutations affectant d’autres gènes.

Cependant il y a aussi des suppresseurs qui n’entrent pas dans ces deux catégories qui sont à la fois allèle-spécifique et gène-spécifique, notamment quand la mutation directe est un gain de fonction, mais aussi à partir d’une perte de fonction.

Exemples de mise en évidence, chez la levure, des propriétés allèle spécifique-gène non spécifique ou allèle non spécifique-gène spécifique :

On dispose, chez la levure, de deux révertants [val+] de deuxième classe, issus du mutant val1-1, notés val1-1/e et val1-1/f.

Leurs génotypes peuvent s’écrire (val1-1; suea) et (val1-1; sufa). Une première analyse a montré que les locus des deux suppresseurs suea et sufa, sont génétiquement indépendants du locus du gène VAL1.

On dispose d’un autre mutant auxotrophe pour la valine, lui aussi muté dans VAL1, mais porteur d’une autre mutation notée val1-2 (pas de complémentation fonctionnelle entre ces deux mutants récessifs).

Par ailleurs la souche val1-1 est également auxotrophe pour l’adénine, par mutation dans le gène ADE2, son génotype peut s’écrire (val1-1; ade2-1) et son phénotype [val–; ade–].

En croisant chaque révertant val1-1/e et val1-1/f par les deux souches (val1-2) et (val1-1; ade2-1) on obtient des résultats très différents qui permettent de différencier les deux suppresseurs étudiés en fonction des propriétés génétiques opposées que nous avons définies plus haut en dehors de leur capacité commune à supprimer l’effet de la mutation directe val1-1 (tableaux 7.2 et 7.3).

a) Croisements avec la souche val1-b :

TABLEAU 7.2 CROISEMENT DES RÉVERTANTS val1-1/e OU val1-/f AVEC val1-2.

Comme les suppresseurs sont génétiquement indépendants du gène VAL1, la méiose donne des DP (1/6), des DR (1/6) et des T (2/3) avec quatre types de spores de même fréquence (1/4) :

parental P1 : (val1-1; sua) de phénotype [val+]

parental P2 : (val1-2; sui) de phénotype [val–]

recombiné R1 : (val1-1; sui) de phénotype [val–]

recombiné R2 : (val1-2; sua) dont le phénotype dépend de la capacité du suppresseur de supprimer l’effet de la mutation val1-2, comme celui de la mutation val1-1.

Le fait d’observer dans le premier croisement (tableau 7-2, deuxième colonne) des tétrades avec quatre spores [val–] implique qu’il s’agit de DR, avec quatre spores recombinées et que le phénotype de la spore (val1-2; suea) est [val–], ce qui conduit à la conclusion que le suppresseur suea est spécifique de la mutation val1-1 et ne supprime pas l’effet de la mutation val1-2.

Le fait de n’observer dans le deuxième croisement (tableau 7-2, troisième colonne) que des tétrades avec deux spores [val+] et deux spores [val–], alors que la recombinaison génétique est capable de générer les quatre types de spores, et les trois types de tétrades, implique que le phénotype de la spore (val1-2; sufa) est [val+], ce qui conduit à la conclusion que le suppresseur sufa n’est pas spécifique de la mutation val1-1 et supprime aussi l’effet de la mutation val1-2.

Ainsi les DP, les T ou les DR auront toujours deux spores avec suf a, de phénotype [val+], quelle que soit la mutation val1-1 ou val1-2 présente, et deux spores avec suf i, de phénotype [val–].

Bien évidemment les propriétés génétiques différentielles de ces deux suppresseurs sont vérifiées par des croisements avec de nombreux autres mutants du même gène VAL1, ce qui conduit à la conclusion que le suppresseur suea est allèle spécifique car il n’a d’effet que sur un sous-ensemble des allèles du gène porteur de la mutation directe (ici val1-1 mais pas val1-2).

b) croisement avec la souche (val1-1; ade2-1) :

Ayant démontré, par des expériences annexes, que le gène ADE2 était génétiquement indépendant des autres gènes impliqués dans les croisements, on peut attendre (tableau 7-3) que les méioses du génotype du diploïde donnent des DP(1/6), des DR(1/6) et des T (2/3), avec quatre types de spores de même fréquence (1/4), soit :

parental P1 : (ade2+; sua) de phénotype [ade+]

parental P2 : (ade2-1; sui) de phénotype [ade-]

recombiné R1 : (ade2+; sui) de phénotype [ade+]

recombiné R2 : (ade2-1; sua) dont le phénotype dépend de la capacité du suppresseur sua à supprimer l’effet de la mutation ade2-1, alors qu’il a été sélectionné comme suppresseur de l’effet de la mutation val1-1.

Le fait d’observer dans le premier croisement (tableau 7-3, deuxième colonne) des tétrades avec quatre spores [ade+] implique qu’il s’agit de DR, avec quatre spores recombinées et que le phénotype de la spore (ade2-1; suea) est [ade+], ce qui conduit à la conclusion que le suppresseur suea tout en étant spécifique de la mutation val1-1 peut aussi corriger l’effet d’une mutation portée par un autre gène que le gène porteur de la mutation directe.

Le fait de n’observer dans le deuxième croisement (tableau 7-3, troisième colonne) que des tétrades avec deux spores [ade+] et deux spores [ade–] implique que le phénotype de la spore (ade2-1; sufa) est [ade–], ce qui conduit à la conclusion que le suppresseur sufa, qui pouvait corriger aussi bien l’effet de la mutation val1-1 que celui de la mutation val1-2 (voire l’effet d’une délétion de VAL1 si suf a est un suppresseur non allèle spécifique) se révèle incapable de corriger l’effet d’une mutation dans autre gène, ici ade2-1.

En réalisant des croisements avec des mutants porteurs de différentes mutations du gène ADE2, on peut montrer que le suppresseur suea, qui est allèle-spécifique vis-à-vis de certaines mutations du gène VAL1, est aussi allèlespécifique vis-à-vis de certaines mutations du gène ADE2, ce qui conduit à préciser les propriétés d’un suppresseur allèle-spécifique ou suppresseur gène-spécifique.

TABLEAU 7.3 CROISEMENT DES RÉVERTANTS val1-1/e OU val1-1/f AVEC LA SOUCHE (val1-1 ade2-1)

– Un suppresseur allèle-spécifique (ici suea) supprime l’effet d’un certain type de mutation (val1-1 mais pas val1-2), quel que soit le gène qui les porte, aussi bien le gène porteur de la mutation directe ayant permis d’isoler le révertant (VAL1) que tout autre gène (ADE2).

Son effet est donc attaché au type de mutation affectant le gène plutôt qu’à la fonction du gène lui même.

– Un suppresseur gène-spécifique (ici suf a) supprime l’effet de tous les types de mutations (de perte de fonction) affectant le gène porteur de la mutation directe ayant permis d’isoler le révertant, y compris l’effet de délétions, mais ne supprime l’effet d’aucune mutation dans un autre gène.

Son effet est donc plutôt attaché à la fonction du gène, dont il peut suppléer la perte plutôt qu’au type de mutation ayant conduit à cette perte.

– En conséquence un suppresseur gène-spécifique n’est pas allèle-spécifique et inversement un suppresseur allèle spécifique n’est pas gène-spécifique. Remarque.

Ces définitions et ces propriétés n’ont de sens que pour les suppresseurs extra-géniques, touchant un autre gène que celui porteur de la mutation directe, et le plus souvent quand il s’agit d’une perte de fonction.

Les suppresseurs intra-géniques ne sont ni allèle-spécifique ni gène-spécifique, même s’ils sont séparables de la mutation directe par recombinaison génétique (révertants de deuxième classe, avec suppresseur très lié).

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