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Dermatologie
Vasculites cutanées : physiopathologie, aspects anatomocliniques, classification
Cours de dermatologie
 

 

Physiopathologie :

Le développement d’une lésion vasculaire inflammatoire est dû à des mécanismes complexes, parfois intriqués dont certains sont encore mal connus.

1- Complexes immuns circulants :

Le rôle des complexes immuns circulants (CIC) a longtemps été considéré comme incontournable, selon le « très historique » modèle de la maladie sérique.

Différents antigènes, infectieux (streptocoque, virus des hépatites B et C, parvovirus B 19...), médicamenteux, tumoraux ou autres, induisent la formation d’anticorps avec lesquels ils forment des complexes antigène-anticorps.

La plupart de ceux-ci sont éliminés par les cellules phagocytaires mais lorsqu’il existe une stimulation antigénique répétée ou prolongée, certains complexes immuns (IC), en excès d’antigènes, persistent.

Après s’être déposés sur les parois vasculaires de divers organes, ils activent le complément dont certains facteurs sont chimiotactiques pour les polynucléaires neutrophiles.

Lorsqu’elles sont activées, ces cellules libèrent des enzymes protéolytiques (élastases, collagénases) et des radicaux oxygénés libres qui entraînent une nécrose pariétale.

Cette hypothèse physiopathologique est confortée par la présence de dépôts d’immunoglobulines (Ig) et de complément sur la paroi des vaisseaux et d’IC circulants, parfois cryoprécipitants, dans lesquels l’antigène responsable peut être mis en évidence. Cependant, ceux-ci ne sont pas trouvés dans toutes les vascularites.

2- Molécules d’adhésion :

Ces dernières années, a été mis en évidence le rôle indispensable des molécules d’adhésion exprimées à la surface des cellules endothéliales et des leucocytes.

De nombreuses études in vivo et in vitro impliquent surtout intercellular adhesion molecule (ICAM) 1 et vascular cell adhesion molecule (VCAM) 1, appartenant à la superfamille des Ig, dans la physiopathologie des vasculites, les autres molécules d’adhésion ayant été beaucoup moins étudiées. ICAM 1, présente sur les cellules endothéliales, se lie à l’intégrine CD11b/CD18 sur les polynucléaires et VCAM 1 à son ligand VL4 situé sur les lymphocytes, les monocytes et les éosinophiles.

La migration des cellules circulantes en dehors des vaisseaux est donc favorisée par ces molécules d’adhésion.

Leur expression est augmentée par des cytokines relarguées par ces cellules, en particulier l’interféron a, l’interleukine (IL) 1 et le tumor necrosis factor (TNF) a qui de plus, favorisent l’activation des polynucléaires neutrophiles et augmentent leur adhésivité à la paroi vasculaire.

3- Immunité cellulaire :

Des phénomènes immunitaires à médiation cellulaire peuvent également intervenir.

En effet, des cellules mononucléées (lymphocytes T activés, monocytes, macrophages) sont souvent trouvées au sein des granulomes périvasculaires et l’on constate fréquemment des concentrations plasmatiques élevées du récepteur soluble de l’IL2 et du TNFa au cours de ces vasculites.

4- Anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA) :

Récemment, les ANCA ont été impliqués dans certaines vasculites.

Mis en évidence par Van der Woude dans la granulomatose de Wegener, ces autoanticorps sont dirigés contre des antigènes du cytoplasme des polynucléaires neutrophiles et des monocytes.

Les deux principaux antigènes sont la protéinase 3 (PR3), reconnue par la plupart des c-ANCA et la myéloperoxydase (MPO) reconnue par la majorité des p-ANCA, enzymes contenues dans les granulations primaires de ces cellules.

Un faible pourcentage de p-ANCA reconnaît d’autres constituants des granules primaires (élastase, cathepsine) ou des granules secondaires (lactoferrine).

Il est possible que ces antigènes intracellulaires puissent s’exprimer à la surface des polynucléaires neutrophiles lorsque ceux-ci sont activés.

Détectés par immunofluorescence indirecte, on observe soit une fluorescence cytoplasmique (c-ANCA) soit une fluorescence périnucléaire (p-ANCA).

In vitro, ces anticorps activent les polynucléaires neutrophiles, entraînant leur dégranulation et la production de métabolites oxygénés, facilitent leur adhésion aux cellules endothéliales et la lyse de celles-ci.

Les ANCA anti-PR3 diminuent aussi l’activité des inhibiteurs des protéases (a2 macroglobuline, a1-antitrypsine).

Cependant, si certains ANCA ont probablement un rôle pathogène, d’autres sont sans doute dus à une activation polyclonale des lymphocytes B et sont observés dans différentes maladies immunologiques, sans qu’ils interviennent dans leur physiopathologie.

Des anticorps anticellules endothéliales ont aussi été trouvés dans certaines vasculites mais leur rôle est encore très flou.

5- Autres :

D’autres mécanismes peuvent aussi être impliqués, en particulier dans les vasculites d’origine infectieuse :

– l’antigène peut se fixer directement au niveau de la paroi vasculaire, entraînant la formation d’IC in situ ;

– certains agents infectieux, en particulier viraux, peuvent infecter les cellules endothéliales ;

– divers antigènes infectieux, en particulier d’origine staphylococcique, pourraient « jouer » le rôle de superantigènes, entraînant une activation polyclonale non spécifique des lymphocytes T et la synthèse de cytokines pro-inflammatoires (IL1, TNFa...).

En fait, il est probable que l’atteinte vasculaire observée dans ces différentes affections soit due à l’intrication et/ou l’association de plusieurs de ces mécanismes physiopathologiques.

Aspects anatomocliniques :

A - ASPECTS HISTOLOGIQUES :

La définition des vasculites étant anatomique, le diagnostic repose sur les données de l’anatomopathologie.

Les lésions associent à des degrés divers un infiltrat et une nécrose de la paroi vasculaire.

L’importance et la formule de l’infiltrat sont variables.

Les polynucléaires neutrophiles sont les principaux éléments observés dans les vasculites leucocytoclasiques.

Le noyau de ces polynucléaires est alors éclaté avec des débris nucléaires dispersés dans la paroi des vaisseaux et le tissu conjonctif voisin.

Parfois l’infiltrat est composé principalement de lymphocytes envahissant la paroi du vaisseau atteint.

Ces véritables vasculites lymphocytaires sont à différencier des infiltrats lymphocytaires périvasculaires n’envahissant pas la paroi vasculaire, n’ayant pas du tout la même signification pathologique.

En fait, les vasculites lymphocytaires pourraient correspondre à un stade évolutif des vasculites leucocytoclasiques marquant le passage à un stade subaigu.

La prédominance de macrophages avec ou sans cellules géantes caractérise les vasculites granulomateuses.

Le granulome peut se situer dans la paroi des vaisseaux ou à distance.

Exceptionnellement, les éosinophiles prédominent dans l’infiltrat.

La nécrose ou dégénérescence fibrinoïde de la paroi vasculaire n’est pas toujours visible du fait d’une atteinte parfois segmentaire ou focale comme dans la périartérite noueuse ou de la minceur de la paroi des vaisseaux atteints associés à un infiltrat particulièrement intense comme dans les vasculites leucocytoclasiques.

Il s’agit d’une modification de la substance fondamentale observée au contact de l’infiltrat notamment lorsqu’il renferme des polynucléaires neutrophiles, à distinguer de simples dépôts de fibrine.

Diverses conséquences de l’atteinte inflammatoire peuvent être observées telles qu’une thrombose secondaire à l’atteinte des cellules endothéliales et à l’inflammation.

Ces vasculites thrombosantes sont difficiles à différencier des processus initialement thrombotiques, provoquant une nécrose colonisée secondairement par les cellules inflammatoires.

L’intensité de la nécrose cutanée témoigne de l’extension de l’obstruction vasculaire.

La disparition des cellules inflammatoires peut laisser place à une sclérose mutilante angiocentrique parfois sténosante.

Une xanthomisation des lésions est possible, notamment en présence de lésions granulomateuses ou au cours de l’erythema elevatum diutinum.

Tous les types de vaisseaux peuvent être atteints dans la peau.

Les vasculites leucocytoclasiques touchent plus les capillaires et les veinules postcapillaires que les artérioles du derme profond ou de l’hypoderme.

À l’inverse les vasculites nécrosantes sont surtout observées sur les artérioles de moyen calibre ; cependant il n’est pas rare d’observer un aspect de nécrose fibrinoïde également dans les vaisseaux de faible calibre au cours des vasculites leucocytoclasiques.

L’étude en immunofluorescence directe d’une biopsie cutanée en peau lésée est d’un apport diagnostique limité.

En effet, la mise en évidence des dépôts vasculaires d’Ig et de complément dépend de la cause et de l’âge de la lésion.

Leur absence ne peut en aucun cas éliminer le diagnostic de vasculite.

À l’inverse, leur présence isolée sans lésion histologique de vasculite n’a pas de valeur diagnostique ; ces dépôts peuvent être également présents au cours des thromboses sans vasculite.

Cette technique d’immunofluorescence directe peut en revanche fournir des éléments d’orientation étiologique.

Des dépôts d’IgA sur les vaisseaux de petit calibre orientent vers le diagnostic de purpura rhumatoïde tout en sachant que ces dépôts ne sont ni constants, ni spécifiques au cours de cette vasculite systémique.

Des dépôts d’IgG, IgM ou IgA et de complément disposés en bandes granuleuses le long de la jonction dermoépidermique sont évocateurs de lupus érythémateux tout en n’étant pas, là encore, spécifiques, notamment en peau exposée.

Les études comparatives d’hybridation in situ ou de biologie moléculaire en peau atteinte et en peau saine en utilisant des marqueurs d’antigènes de micro-organismes peuvent mettre en évidence de façon sélective la présence de ces micro-organismes dans les vaisseaux pathologiques.

Ces techniques, encore peu utilisées en pratique courante, pourraient apporter une aide diagnostique, notamment au cours des vasculites infectieuses.

B - ASPECTS CLINIQUES :

Les vasculites cutanées ont des aspects cliniques variés avec souvent plusieurs types de lésions élémentaires associées donnant à l’ensemble un aspect polymorphe.

Les lésions purpuriques sont infiltrées, plus ou moins nécrotiques, localisées sur les zones déclives.

Elles sont souvent associées à des lésions érythémateuses ou à des éléments érythématopapuleux ou nécrotiques.

En cas de vasculites chroniques telles que celles observées au cours des cryoglobulinémies associées à une hépatite C, le purpura est parfois masqué par une dermite ocre généralement bilatérale non expliquée par l’insuffisance veineuse.

Les lésions papuleuses peuvent prendre des aspects différents.

Il s’agit tantôt de lésions urticariennes particulières du fait de leur caractère peu prurigineux et de leur persistance dans la même zone plus de 24 heures.

Ailleurs, il s’agit de lésions papuleuses rouge foncé pouvant prendre une disposition annulaire rappelant l’érythème polymorphe, fréquemment localisées sur le tronc, ne prédominant pas sur les zones déclives.

Des lésions papuleuses sont également observées au cours de l’erythema elevatum diutinum.

Cette rare vasculite, d’évolution chronique avec des poussées récidivantes, est caractérisée cliniquement par la présence de plaques, papules ou de nodules rouge sombre, violacés ou jaunâtres, répartis de façon symétrique sur les faces d’extension des membres et les extrémités, respectant le tronc.

Les fesses et la région du tendon d’Achille sont aussi des sièges de prédilection.

Les nodules dermiques ou hypodermiques des vasculites sont de petite taille, à rechercher sur les trajets vasculaires des membres, parfois à peine visibles, toujours palpables.

Ils évoluent parfois vers la nécrose et l’ulcération.

Le livedo prédomine nettement sur les membres inférieurs, pouvant toucher également la face postérieure des membres supérieurs et la moitié inférieure du tronc.

Il est typiquement infiltré et ramifié lors de la phase active de la vasculite.

Il est soit isolé, soit associé à d’autres lésions, en particulier aux nodules dermiques et aux nécroses cutanées.

Les lésions nécrotiques sont rarement isolées, pouvant compliquer toutes les autres lésions vues précédemment.

Elles sont parfois superficielles à l’origine de décollements bulleux, parfois plus profondes donnant des placards noirâtres bordés d’un liseré purpurique.

L’évolution vers une ulcération est fréquente.

Enfin une vasculite peut se manifester par une lésion pustuleuse non folliculaire, souvent entourée d’une aréole purpurique notamment dans la maladie de Behçet ou les entérocolites inflammatoires.

C - CORRÉLATIONS ANATOMOCLINIQUES :

À l’atteinte des vaisseaux de petit calibre du derme correspondent les lésions purpuriques, papuleuses et pustuleuses.

À l’opposé, les nodules traduisent souvent une atteinte des vaisseaux plus profondément situés dans le derme ou l’hypoderme, de plus gros calibre.

Quant au livedo et aux lésions nécrotiques, elles correspondent soit à une atteinte des vaisseaux de petit calibre du derme, soit à une atteinte des artérioles du derme profond ou de l’hypoderme, soit à l’association des deux.

Les vasculites leucocytoclasiques du derme superficiel sont observées dans toutes les vasculites cutanées isolées ou systémiques, n’orientant pas le diagnostic étiologique.

Les vasculites nécrosantes des artérioles de moyen calibre sont évocatrices de périartérite noueuse tout en n’étant pas spécifiques.

En effet, des atteintes des artérioles cutanées peuvent être observées dans les vasculites médicamenteuses, infectieuses et dans diverses vasculites systémiques telles que la maladie de Wegener, l’angéite de Churg et Strauss, la maladie de Takayasu ou la polyarthrite rhumatoïde.

La nature de l’infiltrat a une valeur diagnostique en présence de lésions granulomateuses orientant vers le diagnostic de maladie de Wegener ou d’angéite de Churg et Strauss sans en être spécifique.

En revanche, l’existence d’un infiltrat lymphocytaire ou leucocytoclasique a peu de valeur diagnostique.

Certains auteurs, dans des articles anciens, ont souligné cependant la fréquence de l’infiltrat lymphocytaire dans les vasculites médicamenteuses.

Diagnostic différentiel :

Toutes les lésions purpuriques ne correspondent pas à des vasculites.

A - PURPURAS PAR FRAGILITÉ VASCULAIRE :

Ils sont généralement pétéchiaux ou ecchymotiques, non infiltrés.

Cette fragilité capillaire est constitutionnelle ou acquise.

Lorsqu’elle est constitutionnelle, elle est souvent familiale, se manifestant par l’apparition d’un purpura localisé après des traumatismes mineurs.

Le signe du lacet est habituellement positif.

Elle peut être soit isolée, soit s’intégrer dans des maladies plus complexes comme certains types du syndrome d’Ehlers-Danlos.

Les purpuras acquis par fragilité vasculaire sont de diagnostic habituellement facile du fait de leur topographie très évocatrice et de leur contexte clinique.

– Le purpura de Bateman est formé de taches ecchymotiques de taille variable, volontiers situées sur la face dorsale des avant-bras et des mains, recouvertes d’une peau atrophique et ridée avec des lésions pseudocicatricielles en étoile.

Il est observé dans le grand âge.

Son apparition plus précoce doit faire rechercher un hypercorticisme endogène ou iatrogène.

– La fragilité vasculaire des avitaminoses C est généralisée, s’accompagnant d’asthénie, de douleurs musculaires, d’hémorragies gingivales.

Le purpura cutané y est fréquemment périfolliculaire.

– Au cours de l’amylose, le purpura, en rapport avec la fragilité capillaire liée aux dépôts périvasculaires de substance amyloïde, prédomine dans les zones de frottement, en particulier sur les paupières supérieures et les grands plis.

– Le syndrome des ecchymoses douloureuses ou syndrome de Gardner-Diamond apparaît plutôt chez la femme volontiers névrotique et serait associé à une autosensibilité aux hématies ou à certains de leurs composants.

B - ANGIODERMITES PURPURIQUES ET PIGMENTÉES :

Elles regroupent un certain nombre de lésions dermatologiques bénignes.

La dermite ocre de Favre et Chaix et la dermite purpurique et lichénoïde de Gougerot-Blum sont des manifestations cutanées de l’insuffisance veineuse chronique, localisées aux jambes.

La première se manifeste par des macules purpuriques devenant brunâtres, ocres avec le temps, la seconde donne des papules violines.

Elles sont expliquées par la stase veineuse entraînant une dilatation des capillaires du derme avec extravasation de globules rouges et dépôts dermiques de pigments sanguins.

D’autres signes d’insuffisance veineuse sont généralement présents : télangiectasies, nodules pseudokaposiens, remaniements sclérodermiformes...

Les autres dermites purpuriques pigmentaires sont des purpuras, également souvent chroniques mais d’étiologie inconnue.

Leurs aspects cliniques un peu différents leur ont valu des noms particuliers.

Ils sont cependant très voisins histologiquement, avec une capillarite hyperplasique, un épaississement de l’endothélium et une péricapillarite lymphocytaire contenant des macrophages chargés d’hémosidérine.

– La maladie de Schamberg est localisée principalement sur les membres inférieurs.

Elle est formée de plaques mal limitées, brunes ou rouge orangé, essaimant à la périphérie en points couleur « poivre de Cayenne ».

– L’eczematide-like purpura, observé surtout chez l’homme, est une dermatose purpurique et télangiectasique, débutant souvent aux chevilles puis s’étendant vers le haut, associée à des lésions eczématiformes prurigineuses, d’évolution spontanément régressive. Le prurit est calmé par les dermocorticoïdes.

– Dans le lichen aureus, on observe des macules purpuriques et de petites lésions brun orangé, parfois papuleuses, lichénoïdes, à disposition linéaire.

– Le purpura annulaire de Majocchi apparaît à tout âge dans les deux sexes.

Il est constitué de plaques souvent nombreuses, annulaires, d’extension centrifuge, avec effacement central progressif donnant une zone centrale de teinte jaunâtre et un anneau périphérique constitué de fines télangiectasies et de points purpuriques.

La guérison spontanée est habituelle après quelques mois ou années.

C - PURPURA THROMBOTIQUE :

– Le diagnostic différentiel entre purpura thrombotique en rapport avec une thrombose intravasculaire et le purpura des vasculites est parfois difficile sur la simple clinique, avant les résultats de l’examen anatomopathologique d’une biopsie cutanée.

L’existence de placards nécrotiques de diamètre supérieur à 1 cm, entourés d’un liseré purpurique, fait suspecter une thrombose, alors que des lésions plus polymorphes comportant, à côté de lésions nécrotiques, des lésions érythémateuses, du purpura infiltré ou des nodules dermiques orientent vers une vasculite.

Cette distinction n’a pas qu’un intérêt théorique, les purpuras thrombotiques, volontiers extensifs, sont souvent des urgences diagnostiques ; ils relèvent de causes différentes de celles des vasculites.

L’atrophie blanche idiopathique ou vasculite hyalinisante segmentaire (livedoid vasculitis des Anglo-Saxons) est un aspect clinique particulier de thrombophilie.

La lésion primitive est purpurique, évoluant vers une nécrose très douloureuse bordée par un réseau livedoïde.

La cicatrisation, lente, laisse place à des lésions séquellaires, porcelainées et atrophiques avec une bordure télangiectasique et pigmentée.

Les lésions sont limitées aux membres inférieurs.

En histologie, il existe des thrombi hyalins des vaisseaux dermiques sans infiltrat inflammatoire.

Le livedo est inconstant, uniquement localisé dans les zones périulcéreuses ou plus diffus.

L’étiopathogénie de l’atrophie blanche reste obscure, probablement non univoque du fait de la mise en évidence de facteurs variés de trombophilie.

Certaines observations ont été intégrées dans le syndrome des antiphospholipides.

– Les formes aiguës de coagulation intravasculaire disséminée s’installent en quelques heures.

L’état général est rapidement altéré.

Le purpura y est volontiers ecchymotique et nécrotique.

La dissémination des microthromboses peut être responsable de défaillances viscérales variées : détresse respiratoire, choc cardiogénique, insuffisance rénale ou surrénale aiguë.

Les hémorragies, conséquences de la consommation des facteurs de la coagulation et des plaquettes, ainsi que de la fibrinolyse secondaire, sont d’importance variable.

Les principales causes, le diagnostic biologique et le traitement sont détaillés ailleurs.

– Le déficit homozygote en protéine C et, plus rarement, en protéine S est parfois à l’origine de nécroses cutanées extensives néonatales, bordées d’un liseré purpurique réalisant un tableau clinique appelé, à tort, purpura fulminans, terme qui devrait être réservé à la pathologie infectieuse.

Il existe un risque d’hémorragies intracérébrales et de thromboses viscérales multiples.

– Les déficits hétérozygotes ou acquis des protéines C ou S donnent aussi essentiellement des lésions purpuriques et nécrotiques, parfois précédées ou accompagnées d’un livedo, notamment chez la femme obèse après prise d’antivitamines K.

Des lésions purpuriques apparaissent dans les 10 premiers jours du traitement, volontiers sur les régions fessières, les cuisses, la poitrine, s’étendant rapidement.

Il faut arrêter momentanément l’antagoniste de la vitamine K, supplémenter le malade en vitamine K et entreprendre une héparinothérapie à dose efficace pour tenter de diminuer l’étendue de la nécrose qui peut nécessiter secondairement une greffe.

Ultérieurement, le traitement antivitamine K pourra être repris sous contrôle strict, avec une héparinothérapie à dose anticoagulante efficace, en utilisant une antivitamine K à long délai d’action, administrée initialement à faibles doses et en n’interrompant l’héparine que lorsque l’hypocoagulabilité induite par l’antivitamine K est suffisante et stable.

– Les nécroses induites par l’héparine ou ses dérivés apparaissent typiquement entre le cinquième et le quinzième jour du traitement, parfois plus tôt en cas de traitement antérieur.

Elles peuvent s’accompagner d’une thrombopénie, de saignements et de thromboses veineuses et/ou artérielles.

Lorsque l’héparine est administrée par voie sous-cutanée, la localisation des plaques de nécrose aux points d’injection est un argument clinique important en faveur du diagnostic.

Elles peuvent cependant être également situées en dehors des zones d’injection.

L’héparine doit être immédiatement et définitivement arrêtée avec un relais, le plus rapide possible, par les antivitamines K.

– Les cryopathies sont à l’origine d’un purpura nécrotique, localisé préférentiellement sur les extrémités (pieds, doigts, oreilles, nez).

Au cours des cryoglobulinémies, la découverte d’une thrombose sans vascularite est plus souvent observée dans les types I ou II, avec un fort contingent monoclonal devant faire rechercher un myélome.

– Les thromboses cutanées associées aux anticorps antiphospholipides peuvent simuler une vasculite avec des lésions purpuriques, érythémateuses, nodulaires, ou un livedo.

Exceptionnellement, elles se manifestent par des nécroses extensives, justifiant le recours aux plasmaphérèses dans les formes résistantes à une anticoagulation efficace.

– Les thrombocytémies essentielles ou secondaires à un autre syndrome myéloprolifératif (maladie de Vaquez, leucémie myéloïde ou splénomégalie myéloïde) sont parfois à l’origine de lésions purpuriques et nécrotiques, généralement associées à d’autres manifestations dermatologiques telles qu’un livedo ramifié douloureux, symétrique et distal, un syndrome de Raynaud, une érythrocyanose, une érythromélalgie, voire des gangrènes distales.

– Le purpura nécrotique de l’hyperparathyroïdie (primitive ou secondaire à une insuffisance rénale chronique) évolue vers des nécroses cutanées extensives de sombre pronostic.

Il existe une calcinose cutanée favorisant la survenue des thromboses des vaisseaux dermiques.

– Les nécroses liées à une oxalose sont exceptionnelles.

D - PROCESSUS EMBOLIGÈNE :

Il doit être évoqué chez un polytraumatisé, en présence d’une athérosclérose ou d’une cardiopathie emboligène, tel un myxome, que le purpura peut révéler.

Chez le sujet polytraumatisé, les embolies graisseuses sont à l’origine de lésions purpuriques prédominant dans les régions axillaires antérieures ou les creux sus-claviculaires, associées à des troubles neurologiques ou psychiatriques.

L’examen ophtalmologique révèle fréquemment des hémorragies conjonctivales ou des dépôts graisseux dans les vaisseaux rétiniens.

Il peut également s’y associer une insuffisance respiratoire secondaire à un infiltrat interstitiel diffus, une insuffisance rénale avec présence de graisses dans les urines. Un diagnostic et un traitement précoces permettent d’améliorer le pronostic.

Chez un sujet athéroscléreux, le diagnostic d’embolies de cristaux de cholestérol sera évoqué devant des lésions purpuriques des membres inférieurs associées à un livedo, des zones nécrotiques et un ou plusieurs orteils pourpres.

Il existe généralement un syndrome algique, les pouls sont conservés.

Des manifestations systémiques peuvent simuler une périartérite noueuse.

Un facteur déclenchant est volontiers retrouvé dans les semaines précédentes : geste chirurgical vasculaire, cathétérisme artériel et/ou mise en route d’un traitement anticoagulant (héparine, antivitamines K) ou fibrinolytique.

La notion de cardiopathie emboligène est souvent méconnue avant l’apparition de lésions cutanées pouvant simuler une vasculite, d’où la nécessité au moindre doute de réaliser une échographie.

Autres manifestations dermatologiques associées aux vasculites systémiques :

A - GRANULOME NÉCROSANT EXTRAVASCULAIRE :

Initialement décrit par Churg et Strauss en 1951 comme une manifestation de l’angéite systémique allergique, le granulome nécrosant extravasculaire a été secondairement décrit dans diverses vasculites systémiques et connectivites.

Il se manifeste cliniquement par des papules ou des nodules de taille variable entre 2 mm et 2 cm de diamètre, souvent multiples, bilatéraux et symétriques.

Leur couleur va de celle de la peau normale au rouge violacé.

Une croûte ou une ulcération centrale est souvent présente.

Rarement, il revêt d’autres aspects cliniques trompeurs tels que des vésicules, des pustules, des plaques arciformes ou une masse indurée.

Les sièges de prédilection des lésions sont les faces d’extension des coudes, des doigts, moins fréquemment les fesses, le cuir chevelu, les faces d’extension des genoux, des mains, des pieds, le cou, les oreilles.

Histologiquement, existe une nécrose fibrinoïde et oedémateuse du collagène entourée d’un granulome contenant des polynucléaires éosinophiles, des histiocytes et des lymphocytes.

Le centre du granulome contient parfois des polynucléaires neutrophiles et des débris leucocytoclasiques.

L’infiltrat peut prendre une disposition palissadique.

Généralement, il n’existe pas de corrélation entre l’aspect clinique, histologique et la nature de la maladie systémique associée.

Cependant, l’éosinophilie serait plus souvent rapportée en cas de syndrome de Churg et Strauss.

B - HYPODERMITE ET PANNICULITE :

Des lésions d’hypodermite et/ou de panniculite ont surtout été décrites au cours de la maladie de Takayasu ainsi que dans la vasculite observée au cours de la maladie de Behçet.

Les lésions n’ont aucune particularité clinique ou histologique laissant présumer le rattachement à la vasculite.

Elles siègent principalement sur les membres inférieurs formant des nodules de plus grosse taille que celle des nodules des vasculites nodulaires avec lesquelles elles peuvent coexister.

C - PYODERMA GANGRENOSUM :

Des aspects de pyoderma gangrenosum ont été rarement décrits au cours de la maladie de Wegener, de la maladie de Takayasu et de la maladie de Behçet, généralement avec un aspect d’ulcérations torpides.

L’histologie est non spécifique.

D - GRANULOME :

Des lésions granulomateuses sans vasculite ni nécrose centrale peuvent être observées au cours de certaines vasculites notamment au cours de la maladie de Wegener.

Leur aspect clinique est très variable à type de papules, de nodules, d’infiltration sous-cutanée, de tumeur ou d’ulcération chronique.

Tout le revêtement cutané peut être atteint ainsi que les muqueuses adjacentes ; les localisations les plus fréquentes étant le visage, la muqueuse buccale, les seins, le scrotum.

Elles sont de diagnostic difficile en dehors du contexte clinique.

E - THROMBOPHLÉBITE SUPERFICIELLE :

Tantôt de diagnostic évident du fait d’une induration douloureuse d’un cordon veineux, tantôt de diagnostic plus difficile essentiellement histologique devant des nodules inflammatoires, les thrombophlébites superficielles sont surtout observées au cours de la thromboangéite de Buerger, la maladie de Behçet et la polychondrite atrophiante.

F - GANGRÈNES :

Les gangrènes des extrémités, résultant d’une obstruction artériolaire ou artérielle, sont rapportées dans toutes les vasculites touchant les artères de moyen ou de plus gros calibre.

Elles peuvent être d’origine vasculitique, thrombotique ou embolique, ces trois phénomènes pouvant être associés.

G - HÉMATOMES FILIFORMES SOUS-UNGUÉAUX :

Touchant souvent plusieurs doigts, des hémorragies sous-unguéales, en flammèches, sont le plus souvent le signe d’un processus thrombotique (syndrome des antiphospholipides) ou emboligène (myxome cardiaque)

H - SYNDROME DE RAYNAUD :

Lorsqu’il est bilatéral, le syndrome de Raynaud atteint 5 à 30% de la population générale.

Il est aussi classiquement associé à toutes les vasculites.

Cependant, sa prévalence au cours de nombreuses vasculites reste inconnue ; il a peu de valeur diagnostique.

En revanche, un phénomène de Raynaud unilatéral est suggestif d’une obstruction artérielle pouvant être secondaire à une maladie de Takayasu.

Stratégie diagnostique :

Devant un aspect clinique évocateur de vasculite, la nécessité d’une confirmation histologique du diagnostic nous paraît nécessaire étant donné les confusions cliniques possibles avec des manifestations thrombotiques ou emboliques et la définition histologique des vasculites.

Une étude en immunofluorescence directe d’une lésion est souhaitable car pouvant orienter le diagnostic étiologique.

Devant une vasculite confirmée par l’histologie, le clinicien doit apprécier l’extension de la vasculite et en rechercher une cause.

L’interrogatoire et l’examen clinique sont d’une importance primordiale pour apprécier l’extension de la vasculite.

En effet, ils permettent de suspecter ou de mettre en évidence une altération de l’état général, une atteinte articulaire (plus souvent à type d’arthralgies que d’arthrites), une hypertension artérielle, une atteinte digestive (douleurs abdominales, troubles du transit, hémorragies), une atteinte musculaire (myalgies, oedèmes segmentaires, plus rarement déficit), une atteinte du système nerveux central ou périphérique, une atteinte oto-rhinolaryngologique (sinusite, chute de l’audition), une atteinte oculaire ou urogénitale.

La recherche d’une atteinte rénale, cardiaque ou pulmonaire oblige à pratiquer systématiquement un certain nombre d’examens complémentaires : sédiment urinaire, recherche de protéinurie, créatinine, radiographie pulmonaire face et profil, électrocardiogramme complété éventuellement par une échographie cardiaque.

Il est important de répéter les examens urinaires (bandelette urinaire et protéinurie des 24 heures) au rythme d’une fois par semaine à une fois par mois pendant un minimum de 3 mois, voire pendant toute une année.

Le bilan étiologique doit s’acharner à rechercher une cause.

En l’absence de toute symptomatologie clinique orientant vers une cause, un certain nombre d’examens complémentaires seront demandés sytématiquement : numération-formule sanguine, vitesse de sédimentation, transaminases, cryoglobulinémie, anticorps antinoyaux, facteur rhumatoïde, ANCA, dosage du complément total et de ses fractions, immunoélectrophorèse des protéines sériques, sérologies virales (hépatite B et C), anticorps antistreptococciques.

Selon le contexte clinique, ce bilan sera complété par une sérologie du virus de l’immunodéficience humaine (VIH), des hémocultures, une échographie cardiaque ou une ponction lombaire.

Les autres sérologies virales (parvovirus B19, Epstein-Barr virus, cytomégalovirus...), pour certains systématiques, nous paraissent facultatives en raison de l’absence de conséquences thérapeutiques à l’exception de certains cas particuliers (grossesse, collectivités, immunodépression).

En l’absence de cause évidente, un panorex dentaire et le scanner des sinus aideront à la recherche d’une infection focale.

Malgré ce bilan, plus de la moitié des vasculites vues en dermatologie restent de cause inconnue.

Classification :

La classification des vasculites est un casse-tête chinois auquel se sont régulièrement heurtés depuis plus d’un siècle de grands noms de la médecine internationale.

Au fil du temps, de nombreuses entités ont été individualisées en raison de leurs particularités anatomocliniques, évolutives ou étiologiques.

Certaines d’entre elles ont perduré malgré les progrès des connaissances médicales et les vagues successives des nouvelles classifications alors que d’autres ont été inconstamment reprises et cherchent encore leur identité.

En fait, les classifications se heurtent à deux principaux écueils : l’absence de corrélation entre les différents paramètres notamment histologiques et étiologiques et la possibilité de survenue concomitante ou successive chez un même malade de divers aspects cliniques ou histologiques de vasculites.

Étant donné la définition histologique des vasculites, les classifications prenant en compte la description anatomopathologique des lésions, notamment la taille des vaisseaux atteints, ont été régulièrement reprises.

La classification de Fauci apparaît aujourd’hui totalement confuse et obsolète pour plusieurs raisons : exclusion actuelle des vasculites de la granulomatose lymphomatoïde considérée comme une hémopathie, et de l’érythème noueux, regroupement arbitraire de diverses entités dans le groupe des vasculites d’hypersensibilité alors que les vasculites médicamenteuses ne sont pas incluses dans ce groupe, longue liste hétéroclite et incomplète des autres vasculites.

Les critères de classification de vasculites de l’ACR datant de 1990 ne sont applicables que chez des malades ayant déjà un diagnostic histologique de vasculite ; ils ont été établis sur des malades vus en milieu rhumatologique ; aussi sont-ils difficilement applicables en dermatologie.

La classification proposée par Jorizzo en 1993 est difficilement compréhensible du fait de l’intégration dans le groupe des vasculites des nodules rhumatoïdes, proches des granulomes extravasculaires ainsi que de la granulomatose lymphomatoïde et des vasculites nodulaires, de l’individualisation de la réaction lépreuse qui devrait être incluse dans les vasculites septiques et de l’inclusion dans le groupe des vasculites touchant les artérioles de moyen calibre de la granulomatose de Wegener, qui intéresse préférentiellement les vaisseaux de petit calibre.

La classification de la conférence de consensus de Chapel Hill paraît actuellement la plus adaptée du fait de sa simplicité et de la séparation de la périartérite noueuse classique de la polyangéite microscopique qui ont en effet une symptomatologie et une évolution différentes.

Cette classification prend relativement peu en compte les causes des vasculites.

Toutes ces remarques reflètent les limites des classifications actuelles essentiellement issues des données anatomocliniques ainsi que notre relative méconnaissance des aspects étiologiques et physiopathologiques de ces affections qui se traduit par une thérapeutique généralement empirique et aspécifique.

Aussi est-il nécessaire d’avoir une vision pragmatique globale des vasculites et notamment de ne pas les classer trop hâtivement sur les seules données d’un unique examen anatomopathologique, notamment cutané.

La classification proposée dans ce traité privilégie les causes tout en maintenant un groupe de vasculites représentant une entité anatomoclinique définie, généralement de cause inconnue.

Elle est également critiquable sur différents points : un même agent étiologique peut donner des aspects cliniques différents ; ainsi l’hépatite B est-elle responsable de lésions urticariennes correspondant à une vasculite des petits vaisseaux dermiques au stade prodromique et de certaines périartérites noueuses qui pourraient également figurer dans les vasculites infectieuses.

Au cours des vasculites associées aux hémopathies peuvent être impliqués des agents infectieux (exemple : leucémie à tricholeucocytes et tuberculose), des anomalies immunologiques (cryoglobuline, hypergammaglobulinémie...) et/ou des médicaments. Ainsi, selon le proverbe chinois, titre d’un article de Lie : « Plus ça change, plus c’est la même chose »

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