Le virus varicelle zona (VZV) est un virus à acide désoxyribonucléique
(ADN) appartenant à la famille des herpès viridae.
Il
est responsable de la varicelle lors de la primo-infection et du zona
lors des récurrences.
Ce sont, en général, des infections bénignes.
Cependant, sur certains terrains, des complications peuvent
survenir, nécessitant une prise en charge adaptée.
Varicelle
:
A - PHYSIOPATHOLOGIE :
La varicelle correspond à la primo-infection par le VZV.
Ce zona
infecte uniquement l’homme.
Il appartient à la famille des alphaherpès-
viridae.
Ce groupe est caractérisé par une croissance rapide,
la destruction des cellules infectées et la capacité à rester à un stade
latent dans le périkarion des nerfs sensitifs ou mixtes.
Le VZV est
un virus enveloppé de 150 à 200 nm de diamètre dont la capside
icosaédrique composée de 162 capsomères renferme un ADN
bicaténaire linéaire d’environ 125 000 paires de bases, capables de
coder pour 75 protéines.
Initialement, le virus VZV pénètre les conjonctives et les muqueuses
des voies aériennes supérieures, puis il se multiplie dans les
ganglions lymphatiques régionaux.
Il survient alors une première
virémie du 4e au 6e jour de l’infection qui sera suivie d’une seconde
multiplication virale au niveau d’autres organes, notamment au
niveau splénique et hépatique.
Vers le 14e jour une seconde virémie apparaît, permettant la dissémination virale aux cellules
endothéliales des capillaires et aux cellules épithéliales déterminant
ainsi les signes cutanés.
Le virus varicelle zona gagne ensuite les
ganglions sensitifs par voie neurogène centripète et/ou par voie
hématogène.
Il reste latent toute la vie dans de nombreux ganglions
de l’axe nerveux.
L’ADN du VZV a pu être mis en évidence par
méthode polymerase chain reaction (PCR) et par hybridation in situ,
essentiellement dans les neurones où il persiste sous forme
d’épisome.
Il a été détecté en très faible quantité dans les cellules
du tissu de soutien ganglionnaire neurologique.
Les
mécanismes limitant la transcription durant la phase de latence,
ainsi que ceux induisant une réactivation, ne sont pas connus.
B - ÉPIDÉMIOLOGIE :
Le pic d’incidence de la maladie se situe au printemps.
Sa
contagiosité est importante. En effet, 90 % de la population est
infectée avant l’âge de 10 ans et quasiment 100 % à l’âge de 60 ans.
La mortalité est faible, évaluée à 1,4 à 2 pour 100 000 cas. Audelà
de 45 ans, la mortalité augmente et est de 0,1 à 0,5 %.
Aux
États-Unis, en Grande-Bretagne et dans certains pays asiatiques, on
note une augmentation de l’incidence des cas de varicelle chez les
sujets de plus de 15 ans, ce qui entraîne l’augmentation des formes
graves et de la mortalité.
L’infection est transmise par voie aérienne (gouttelettes de salive).
Elle est plus rarement transmise par contact direct avec les lésions
cutanées.
La contagiosité débute 1 à 2 jours avant le début de la
maladie et se poursuit jusqu’à la disparition des croûtes.
La
fréquence de la varicelle au cours de la grossesse est de cinq cas
pour 10 000 soit 100 à 500 cas par an en France. Une transmission maternofoetale est possible, mais rare.
C - CLINIQUE :
La phase d’incubation est de 14 jours en moyenne. Elle est suivie
d’une phase d’invasion de 1 à 3 jours rarement symptomatique, mais
qui peut se traduire par un fébricule et une sensation de malaise.
Dans sa forme typique, l’éruption se caractérise par l’apparition de
macules érythémateuses sur lesquelles vont apparaître des vésicules
en « goutte de rosée » qui se troubleront dans un second
temps et laisseront place à des lésions ombiliquées.
La taille des
lésions varie entre 5 et 13 mm environ. L’éruption est prurigineuse.
Il existe des micropolyadénopathies.
Du 2e au 4e jour, ces lésions
évoluent ensuite vers le stade de croûtes pour tomber 8 à 10 jours
plus tard, laissant place à des cicatrices rosées.
Des cicatrices
atrophiques pourront persister notamment en cas de surinfection
cutanée. Des cicatrices anétodermiques ou chéloïdiennes sont
possibles.
L’évolution se fait par poussées successives, ce qui
explique la coexistence d’éléments d’âge différents.
L’éruption
touche essentiellement le tronc et la face.
Les localisations au cuir
chevelu, aux paumes et plantes ainsi que l’atteinte des muqueuses,
en particulier de la muqueuse buccale, sont caractéristiques et
permettent d’orienter le diagnostic lors de présentations cliniques
atypiques.
L’évolution est la plupart du temps spontanément favorable en 10 à
15 jours.
Chez l’adulte, la symptomatologie peut être plus sévère,
avec une atteinte cutanée plus importante et des signes généraux
plus marqués.
Des formes bulleuses ou hémorragiques peuvent
survenir chez le sujet immunocompétent, mais sont le plus souvent
retrouvées en cas d’immunodépression sous-jacente.
Une seconde
varicelle chez un même patient est très rare, mais peut survenir en
particulier chez l’immunodéprimé.
Après contage varicelleux,
certains auteurs ont également mis en évidence des réinfections
asymptomatiques caractérisées par une augmentation de la
réplication virale.
D - FORMES GRAVES ET COMPLICATIONS :
La proportion de formes compliquées est évaluée à 5 %.
Chez
l’adulte et sur certains terrains (immunodépression, grossesse,
nouveau-né) des formes graves et/ou compliquées peuvent
survenir.
Le risque de décès chez l’adulte est d’environ 25 % et est
multiplié par 25 par rapport à l’enfant.
1- Formes graves :
Les formes graves sont les formes très extensives et/ou
hémorragiques et celles avec des localisations viscérales immédiates
tels qu’une pneumopathie, une méningoencéphalite, un purpura
fulminans, une pancréatite, une myocardite, une thrombopénie
aiguë.
2- Formes compliquées
:
* Surinfections cutanées
:
Ce sont les complications les plus fréquentes.
L’utilisation de talc et
la présence d’une dermatite atopique seraient des facteurs de risques
de surinfection cutanée.
Il s’agit de surinfections bactériennes qui
sont dues principalement au Streptococcus pyogenes et au
Staphylococcus aureus.
On note une augmentation de l’incidence des
infections à streptocoque A bêta hémolytique chez les enfants ayant
la varicelle.
La présence de signes cutanés inhabituels (pustules,
collections sous-cutanées, placard inflammatoire), la persistance
d’une fièvre élevée ou une recrudescence fébrile et la présence de
signes systémiques doivent orienter vers une complication
bactérienne cutanée et nécessitent une prise en charge adaptée.
Plusieurs types de surinfection cutanée sont observés tels que
l’impétigo, les abcès sous-cutanés, les dermohypodermites
bactériennes non nécrosantes.
Les dermohypodermites bactériennes nécrosantes (DBNH) sont des
complications rares. Cependant, leur incidence est en
augmentation.
Cette recrudescence pourrait être expliquée par
l’émergence récente de souches de streptocoque A particulièrement
virulentes.
Chez l’enfant, la varicelle est un des plus importants
facteurs de risque d’infection sévère à streptocoque du groupe A.
Les DHBN sont surtout observées avant l’âge de 5 ans.
L’agent
causal le plus fréquemment retrouvé est le streptocoque A.
Zerr et
al ont pu isoler un streptocoque A bêta hémolytique dans 84 % des cas.
Le Staphylococcus aureus seul ou associé au Streptococcus
pyogenes, certaines bactéries anaérobies associées au streptocoque A
peuvent également être responsables de DHBN.
À l’instar d’autres
infections cutanées, le rôle aggravant des anti-inflammatoires non
stéroïdiens est discuté. Ils pourraient être un facteur favorisant
l’apparition des dermohypodermites bactériennes nécrosantes au
cours de la varicelle.
Le diagnostic clinique de DHNB est souvent difficile.
La présence
d’un placard inflammatoire douloureux induré, plus ou moins
associé à des lésions bulleuses hémorragiques et a fortiori lorsque
les signes cutanés sont accompagnés de signes systémiques (fièvre,
tachycardie, polypnée, hypotension, oligurie, désorientation) font
évoquer le diagnostic.
La prise en charge des DHBN nécessite le traitement du choc s’il est
présent, une antibiothérapie adaptée ainsi qu’une prise en charge
chirurgicale.
* Complications pulmonaires :
La pneumopathie varicelleuse survient dans un cas sur 400.
Elle
est plus fréquente chez l’adulte, chez l’enfant de moins de 6 mois et
chez l’immunodéprimé (27,6 % des décès liés à la varicelle).
Elle débute environ au 3e ou 4e jour de l’éruption par une
fièvre élevée, une altération de l’état général, des signes respiratoires
cliniques (toux, dyspnée, cyanose, râles bronchiques) et
radiologiques (opacités nodulaires de grande taille bilatérale).
L’évolution peut être rapidement fatale surtout en cas d’atteinte multiviscérale.
Le seul facteur de risque identifié chez l’adulte sain pour la
pneumopathie varicelleuse est le tabagisme.
* Complications neurologiques :
L’ataxie cérébelleuse (cinq cas pour 1 000) atteint préférentiellement
l’enfant entre 2 et 4 ans ; elle survient entre le 3e et le 15e jour, mais
peut précéder l’éruption.
Elle évolue toujours favorablement en une
quinzaine de jours, sans séquelles.
La méningoencéphalite est la complication neurologique la plus
grave (un cas sur 40 000), elle est une cause significative de mortalité
ou de séquelle chez le nourrisson comme l’adulte.
Des cas de
syndrome de Guillain-Barré ont été décrits au décours d’une
varicelle.
* Syndrome de Reye :
Le syndrome de Reye atteint préférentiellement l’enfant et est
favorisé par la prise d’aspirine lors d’infections virales telles que la
varicelle ou la grippe.
Il associe une encéphalopathie aiguë mortelle
dans 80 % des cas et une stéatose hépatique microvésiculaire.
L’ammoniémie est élevée, l’hypoglycémie fréquente et le bilan
hépatique montre une cytolyse modérée, ainsi qu’une élévation peu
importante de la bilirubine.
En raison des recommandations de nonutilisation
de l’aspirine, notamment au cours de la varicelle, ce
syndrome est devenu exceptionnel.
L’hypothèse physiopathologique
est la présence d’une synergie entre l’infection virale
et l’acide acétylsalicylique via la production d’interféron c et
d’interleukine 1 b.
Ces cytokines augmentent l’expression de l’oxyde
nitrique synthétase, particulièrement au niveau hépatique, à l’origine
des désordres métaboliques du syndrome de Reye.
* Autres complications :
Elles sont beaucoup plus rares : thrombopénie au décours de
l’éruption d’évolution bénigne, arthrite septique, laryngite liée à un
oedème secondaire aux vésicules, kératoconjonctivite précoce
d’évolution favorable ou kératite tardive, pouvant provoquer une
taie cornéenne, péricardite, pancréatite, orchite, thrombose veineuse
profonde.
E - VARICELLE CHEZ L’IMMUNODÉPRIMÉ :
Chez les personnes immunodéprimées, on note une augmentation
de la morbidité et de la mortalité liée à la varicelle.
L’immunité à
médiation cellulaire joue un rôle important en cas d’infection par le
virus VZV.
La défaillance du système immunitaire à médiation
cellulaire favorise les formes sévères de varicelle.
L’immunodépression est un facteur de risque de formes graves et/
ou compliquées de varicelle.
Il peut s’agir d’une primoinfection
ou d’une réinfection exogène ou endogène rendue possible
par l’immunodépression.
En raison d’une virémie persistante, les
signes généraux sont souvent plus intenses et prolongés.
Les lésions
cutanées sont plus extensives et peuvent prendre un aspect purpurique et/ou hémorragique.
Chez l’enfant, la varicelle est particulièrement grave en cas de lymphoprolifération maligne ou, plus rarement, de tumeur solide.
La maladie du greffon contre l’hôte expose le malade à un risque
accru de varicelle, mais seule la forme aiguë augmente le risque de
dissémination virale.
Chez le patient immunodéprimé, il existe des formes atypiques de
varicelle, prenant l’aspect de molluscum contagiosum, rendant le
diagnostic difficile et retardant la prise en charge, notamment en cas
de pneumopathie varicelleuse.
Chez le patient porteur du virus de l’immunodéficience humaine
(VIH) une étude rétrospective sur 421 patients infectés par le VIH a
retrouvé 15 cas de varicelle soit un taux de 3,5 %.
Les auteurs
retrouvaient 14 formes graves ou compliqués (éruption profuse,
éruption hémorragique, hépatite, complications pulmonaires,
coagulation intravasculaire disséminée).
Chez le patient VIH, les
formes compliquées surviennent essentiellement en cas de forte
immunodépression.
Chez l’enfant infecté par le VIH, la diminution
des lymphocytes CD4+ ne semble pas être un facteur de risque de
dissémination virale, cependant, un nombre de CD4+ inférieur à 200
par mm3 et/ou la présence de plus de 400 lésions cutanées par m2
seraient associés à une forme prolongée de l’éruption.
F - VARICELLE CHEZ LA FEMME ENCEINTE :
L’incidence de la varicelle chez la femme enceinte est mal connue.
Elle varie en fonction des études entre trois pour 1 000 et sept pour
10 000.
La fréquence de la maladie est plus faible dans les pays
tropicaux ou subtropicaux qu’en Europe.
Le risque de primoinfection
à VZV est donc augmenté chez les femmes issues de ces
régions et qui ont immigré récemment dans un pays occidental.
La varicelle chez la femme enceinte peut avoir des conséquences
pour elle-même et pour le foetus.
1- Retentissements maternels
:
La varicelle est responsable d’une mortalité et d’une morbidité
significatives chez la femme enceinte.
Le risque de complications
chez la femme enceinte est plus élevé au cours du 3e trimestre.
La pneumopathie varicelleuse semble être la complication la plus
grave et la plus fréquente.
La complication pulmonaire est la cause
essentielle de mortalité chez la femme enceinte (taux de mortalité
pouvant aller jusqu’à 43 %).
Cependant, chez la femme enceinte, le
risque de survenue d’une pneumopathie varicelleuse est comparable
au risque de survenue chez une femme non enceinte.
2- Retentissements foetaux :
Le risque foetal est plus important au cours du 1er et 2e trimestre de
grossesse.
Chez la femme enceinte, une varicelle contractée avant la
24e semaine d’aménorrhée expose au risque de fausse-couche
spontanée, ainsi qu’au risque d’embryopathie, ce qui justifie une
surveillance spécialisée par échographie obstétricale à la recherche d’une malformation chez le foetus.
Le taux de foetopathies varicelleuses augmente au cours de la grossesse pour atteindre 2 %
entre la 13e et la 20e semaine d’aménorrhée.
L’atteinte foetale
est caractérisée par des lésions musculosquelettiques (hypoplasie des
membres), des atteintes neurologiques (dilatation ventriculaire
cérébrale, atrophie corticale et cérébelleuse, paralysie des membres,
atteinte des nerfs crâniens, troubles sphinctériens), des lésions
oculaires (choriorétinite), une hépatosplénomégalie, des cicatrices
cutanées (lésion cutanée unilatérale en zig-zag, plages atrophiques,
troubles pigmentaires) et un excès de liquide amniotique.
Au-delà de la 24e semaine d’aménorrhée, la contamination foetale
par le VZV est possible, elle peut être asymptomatique ou être
responsable d’accouchements prématurés, mais il existe
essentiellement un risque de zona survenant dans les premières
semaines ou les premiers mois de vie.
Le nombre de morts in utero
et d’accouchements prématurés est modérément augmenté.
Ils
peuvent survenir en particulier au cours des formes graves avec
atteinte pulmonaire.
La mort in utero peut résulter de l’infection
directe du foetus par le VZV ou d’un effet toxique dû à la fièvre, à
l’anoxie ou aux modifications métaboliques provoquées par la
maladie maternelle.
3- Prise en charge d’une varicelle
chez une femme enceinte
:
Avant la 24e semaine, une surveillance échographique doit être
réalisée en milieu spécialisé.
La mise en évidence du VZV dans le compartiment foetal ne
renseigne pas sur son activité de réplication et donc sur son caractère
pathogène.
Actuellement, il n’existe aucun marqueur prédictif d’une
varicelle congénitale.
La ponction de liquide amniotique afin de
rechercher le virus VZV par culture virale ou PCR ne semble pas
justifiée, compte tenu du manque de sensibilité et du risque élevé
lié au geste.
Si l’éruption survient dans les 8 à 10 jours avant l’accouchement, il
faut retarder l’accouchement si cela est possible et administrer par
voie intraveineuse l’aciclovir à la dose de 15 mg par kg toutes les 8
heures pendant 8 à 10 jours (indication hors autorisation de mise
sur le marché [AMM]).
En cas de varicelle compliquée, en
particulier de pneumopathie varicelleuse, un traitement identique
est conseillé.
En dehors de ces indications, une varicelle survenant au cours de la
grossesse ne justifie pas de traitement antiviral.
G - VARICELLE NÉONATALE :
Elle est grave en l’absence d’immunisation maternelle, c’est-à-dire
en cas de varicelle maternelle dans les 5 jours précédant ou les
2 jours suivant l’accouchement.
Les lésions sont parfois très
étendues, ulcéronécrotiques ou hémorragiques et accompagnées
d’un syndrome septique.
Les complications viscérales sont
fréquentes (bronchopneumopathies, méningoencéphalite,
ulcérations digestives, hépatite) avec une évolution spontanée
mortelle dans 30 % des cas.
Chez tout nouveau-né, le danger de
forme grave justifie une hospitalisation et un traitement antiviral
adapté.
En cas de contamination d’un nouveau-né, dont la mère est déjà
immunisée, en postnatal, la varicelle chez l’enfant est en général
minime et n’expose au risque ultérieur de zona qu’en raison d’une
immunisation insuffisante.
H - EXAMENS COMPLÉMENTAIRES :
Le diagnostic est le plus souvent clinique.
Cependant, dans les
formes atypiques, on peut avoir recours à des examens
complémentaires.
1- Diagnostic indirect
:
Le cytodiagnostic de Tzanck et l’histologie cutanée mettent en
évidence l’effet cytopathogène du groupe des virus herpès, mais ne
permettent pas de différencier une infection par les virus herpès
simplex d’une infection par le virus VZV.
Le cytodiagnostic de Tzanck, par frottis, est un examen simple et rapide qui met en
évidence une altération des kératinocytes traduite par un gonflement
de leurs cytoplasmes qui devient clair homogénéisé entourant un
noyau monstrueux (dégénérescence ballonisante de Unna).
L’histologie d’une vésicule montre des vésicules intraépidermiques,
des kératinocytes ballonisés (cellules ballonisées de Unna) qui
flottent dans la sérosité dans la vésicule, les kératinocytes altérés
sont le siège d’inclusions intranucléaires et sont associés à des
cellules multinuclées géantes.
Un infiltrat leucocytaire polymorphe
est présent dans le derme.
2- Diagnostic virologique :
En raison de la fragilité du virus VZV, un prélèvement riche en
virus, inoculé au lit du malade ou transporté immédiatement en
milieu de transport pour virus au laboratoire est nécessaire.
Les
prélèvements les plus intéressants sont la ponction du liquide
vésiculaire, l’écouvillonnage du plancher de la vésicule.
Le VZV
peut également être détecté dans le pharynx dans les 3 premiers
jours de la varicelle, dans le liquide céphalorachidien, dans le sang
chez l’immunodéprimé, dans le liquide amniotique et dans les
biopsies.
L’isolement se fait uniquement en cultures cellulaires
humaines ou simiennes.
L’identification repose sur la mise en
évidence d’antigènes en 48 heures ou d’un effet cytopathique qui
apparaît en 3 à 12 jours.
Le VZV peut être mis en évidence
directement par immunofluorescence grâce à des anticorps
monoclonaux ou polyclonaux qui détectent les antigènes viraux sur
le frottis des lésions cutanées.
La sensibilité de cette technique
dépend de la fraîcheur du prélèvement et du nombre de cellules
analysées.
La PCR est une méthode rapide, permettant de mettre en évidence
de faibles quantités d’ADN viral au niveau du liquide des vésicules,
dans les cellules mononuclées du sang périphérique.
Sa sensibilité
dépasse celle des cultures et de la détection de l’antigène sur lame
et nécessite peu de matériel de prélèvement.
La sérologie, trop
tardive, n’a pas d’intérêt.
I - TRAITEMENTS :
1- Traitements symptomatiques
:
Le but est de limiter au maximum le grattage et d’éviter les
surinfections bactériennes.
Les antihistaminiques sédatifs sont
indiqués tel que l’hydroxyzine et la dexchlorophéniramine.
Les
ongles propres et coupés courts réduisent le risque de surinfection
bactérienne.
Les douches ou bains quotidiens avec un savon
dermatologique sont recommandés.
La chlorhexidine en solution
aqueuse est utile pour prévenir la surinfection cutanée.
Aucun autre
topique de type talc, pommade, colorant aqueux, antibiotique et
antiviraux ne doit être appliqué.
L’application de talc sur des
lésions de varicelle serait un facteur de risque de complications
infectieuses cutanées chez l’enfant.
Une antibiothérapie par voie
orale est indiquée en cas de surinfection cutanée.
En cas d’hyperthermie, l’aspirine est contre-indiquée en raison du
risque possible de syndrome de Reye, il est donc recommandé
d’utiliser du paracétamol.
L’utilisation d’anti-inflammatoire non
stéroïdiens type ibuprofène est controversée.
En effet, les antiinflammatoire
non stéroïdiens pourraient être un facteur de risque
de dermohypodermites bactériennes nécrosantes.
2- Traitement antiviral :
À l’heure actuelle, un certain nombre de molécules antivirales sont
à notre disposition.
Ce sont tous des inhibiteurs de l’ADN polymérase viral, enzyme assurant la réplication virale des chaînes
d’ADN.
Ce sont des virostatiques qui n’agissent que sur les
populations virales en phase de réplication active.
L’aciclovir est un analogue nucléosidique qui inhibe, après triple
phosphorylation, l’ADN polymérase viral.
Cette molécule a une
biodisponibilité médiocre de 10 à 20 %, et une demi-vie courte.
Le valaciclovir est l’ester de la L-valine et de l’aciclovir.
Son avantage
est d’être mieux absorbé par voie orale.
Il est métabolisé dans le foie
en aciclovir qui est le principe actif de la molécule.
La
biodisponibilité de l’aciclovir à partir du valaciclovir est de 54 %
donc trois à cinq fois plus élevée que pour l’aciclovir.
Le famciclovir est la prodrogue du penciclovir qui est l’antiviral
actif.
Il est absorbé rapidement et de façon importante après
administration (biodisponibilité de 77 %).
Le foscarnet est un analogue du pyrophosphate, il entraîne un
blocage de l’ADN polymérase au site de fixation du pyrophosphate,
il est utilisé en cas de résistance du VZV à l’aciclovir.
3- Indications thérapeutiques :
L’aciclovir intraveineux est indiqué dans la varicelle de
l’immunodéprimé.
En cas d’hémopathie, d’infection à VIH, de chimiothérapies
anticancéreuses : aciclovir par voie intraveineuse à la dose de 10 mg
par kg toutes les 8 heures chez l’adulte et 250 à 500 mg par m2 chez
l’enfant pendant 8 à 10 jours (indication AMM).
Cependant, la conférence de consensus sur la prise en charge des
infections à VZV de 1998 a permis de poser un certain nombre
d’indications dépassant le cadre de l’AMM :
– chez le nouveau né : en cas de varicelle déclarée chez le
nouveau-né avant toute éruption lorsque la mère a débuté une
varicelle dans les 5 jours précédents et les 2 jours suivant
l’accouchement, un traitement par aciclovir intraveineux à la dose
de 20 mg par kg toutes les 8 heures est indiqué pendant 8 à 10 jours
(indication hors AMM) ;
– formes graves chez l’enfant de moins de 1 an (indication hors
AMM) : aciclovir par voie intraveineuse à la dose de 250 à 500 mg
par m2 pendant 8 à 10 jours ;
– varicelles compliquées, notamment la pneumopathie varicelleuse
(indication hors AMM) : aciclovir par voie intraveineuse à la dose
de 10 mg toutes les 8 heures chez l’adulte et 250 à 500 mg par m2
chez l’enfant pendant 8 à 10 jours.
4- Mesures de prévention :
* Mesures d’isolement
:
L’éviction scolaire jusqu’à la guérison clinique est réglementaire.
La
contagiosité étant maximale dans les jours encadrant l’éruption, le
retour en collectivité est recommandé en l’absence de toute poussée
vésiculeuse.
Lorsque l’hospitalisation ne peut être évitée
(maternité, service de néonatalogie, oncologie…) un isolement strict
s’impose car le risque de contamination à partir d’un cas index est
élevé.
* Traitement par immunoglobulines
:
Les immunoglobulines polyvalentes n’ont pas d’efficacité démontrée
et ne sont pas indiquées.
Les immunoglobulines spécifiques qui
réduisaient la gravité de la maladie chez les immunodéprimés et le
nouveau-né ne sont plus disponibles en France depuis 1994.
* Vaccination
:
Le vaccin antivaricelleux est un vaccin à virus vivant atténué.
Il est
largement utilisé aux États-Unis.
En effet, il est recommandé à partir
de 12 mois en l’absence d’antécédent de varicelle zona et de contreindication.
Dans 70 à 90 % des cas, ce vaccin prévient la survenue
d’une varicelle et dans 95 à 100 % des cas, il empêche l’apparition
d’une varicelle grave.
Des études ont montré que ces campagnes
de vaccination antivaricelleuse ont permis de diminuer le coût
médical et social lié à la varicelle.
Avant l’âge de 12 ans, une
injection de 2 000 UFP (unité formant plage) est suffisante, après
12 ans, deux injections à 3 mois d’intervalle sont nécessaires.
Il
est, en règle générale, bien toléré. Sa durée de protection est
d’environ 11 à 20 ans.
Le vaccin est contre-indiqué chez la femme
enceinte et chez les adultes gravement immunodéprimés.
En France,
il est réservé aux enfants sans antécédents d’infection à VZV atteints
d’hémopathies malignes ou de cancers solides à distance d’une
chimiothérapie.
Il faut également vacciner la fratrie et le personnel
soignant travaillant au contact de ces enfants en l’absence
d’antécédent de varicelle ou de zona.
En France, ce vaccin n’est pas
généralisé en raison de la bénignité de la varicelle de l’enfant et du
risque, faute d’une couverture vaccinale suffisante, de déplacement
de la varicelle vers l’âge adulte, donc vers des formes cliniques plus
graves.
Zona
:
A - ÉPIDÉMIOLOGIE
:
Le zona est l’expression de la récurrence du VZV.
Le vieillissement et
l’immunodépression favorisent sa survenue.
Sa prévalence est évaluée
à 20%.
Il peut survenir à tout âge de la vie, mais il existe une
nette prédominance chez l’adulte en particulier au-delà de 50 ans.
L’incidence du zona augmente avec l’âge, elle est de 2,05 pour 1 000
et par an entre 20 et 50 ans, de 5,09 pour 1 000 et par an entre 51 et
79 ans et de 10,1 pour 1 000 et par an au-delà de 80 ans.
B - PHYSIOPATHOLOGIE :
Le zona est secondaire à la réactivation du VZV resté latent à
l’intérieur des ganglions sensitifs.
Les ganglions thoraciques et le
ganglion trigéminé sont les sites les plus fréquents de réactivation
virale.
À l’occasion de cette réactivation, le VZV migre le long
des fibres sensitives jusqu’à la peau où il produit l’éruption
vésiculeuse, localisée radiculaire caractéristique du zona. Les
mécanismes maintenant la latence ou induisant une réactivation sont
à ce jour inconnus.
Il existe probablement une interaction
avec le système immunitaire permettant l’expression de médiateurs
viraux entraînant ce phénomène de réactivation.
Chez
l’immunodéprimé, et chez l’immunocompétent, des réactivations
asymptomatiques ont été mises en évidence, le système immunitaire
limitant alors la prolifération du VZV.
C - CLINIQUE :
1- Caractéristiques cliniques
:
Dans sa forme typique, le diagnostic du zona est clinique.
Elle
associe une atteinte cutanée et neurologique.
La phase des prodromes est constituée par des douleurs, des
brûlures d’intensité variable associées en général à une hypo- ou
une anesthésie dans la zone atteinte.
Pendant la phase éruptive, l’éruption qui va apparaître quelques
jours après les prodromes est faite de placards érythémateux sur
lesquels vont apparaître en 24 heures des vésicules groupées en
bouquet, confluant parfois en bulles polycycliques.
Ces
vésicules vont se troubler vers le 5e jour puis former des croûtes
brunâtres vers le 7e jour.
Ces croûtes tomberont vers le 10e jour et
laisseront place à des cicatrices dépigmentées le plus souvent
indélébiles.
La période de contagiosité, plus courte que pour la
varicelle, est d’environ 2 jours.
L’élément caractéristique de cette
éruption est sa topographie unilatérale et sa localisation à un
métamère pouvant déborder sur les métamères contigus.
Cet
élément topographique permet d’orienter le diagnostic dans les
formes débutantes et les formes atypiques.
L’évolution dure environ 2 à 4 semaines et se fait par poussées
successives comme au cours de la varicelle.
Chez l’immunocompétent,
des lésions à distance du dermatome concerné peuvent
être présentes (17 à 35 %), elles sont probablement secondaires à une
dissémination hématogène.
L’éruption est douloureuse avec des accès paroxystiques,
accompagnée de paresthésies et de troubles objectifs de la sensibilité.
L’état général est habituellement conservé.
Il peut exister un
syndrome infectieux discret et on retrouve fréquemment une
adénopathie satellite.
Un second épisode est rare.
En effet, l’immunité à médiation
cellulaire contre le VZV persiste plusieurs années.
Le zona disséminé est défini par la présence de plus de 20 vésicules
en dehors du dermatome concerné et des dermatomes adjacents.
Ces
formes disséminées sont plus fréquentes chez l’immunodéprimé.
Le zona sans lésions (Herpès sine zoster), notion introduite par
Lewis, décrit des patients présentant des douleurs suivant un
dermatome sans lésions cutanées.
Par la suite, quelques cas
similaires ont été décrit, avec la détection d’ADN viral du VZV dans
le liquide cérébrospinal et les cellules mononucléées du sang
circulant.
Des études complémentaires, bien documentées sur le
plan virologique, sur un nombre plus important de patients sont
nécessaires pour déterminer la fréquence de cette forme clinique.
2- Formes topographiques :
* Zona intercostal :
Il s’agit de la forme topographique la plus fréquente (50 %).
L’éruption débute près du rachis et s’étend en hémiceinture sur un
ou plusieurs métamères adjacents. Il ne dépasse pas ou rarement la
ligne médiane.
Il peut parfois exister des éléments aberrants sur le
côté opposé.
*
Zona ophtalmique :
Il touche plus souvent l’adulte au-delà de 50 ans. Il représente 7 %
du total des zonas.
Il atteint la première branche du trijumeau (nerf
ophtalmique de Willis) qui se divise en trois branches : le nerf frontal
(paupière supérieure et front), lacrymal (moitié externe de la
paupière supérieure, région temporale et conjonctive bulbaire avec larmoiement) et nasal externe (racine du nez, angle interne de l’oeil
et conjonctive), nasal interne (aile du nez, partie antérieure de la
cloison avec coryza).
Ces branches peuvent être atteintes de façon
isolée ou associée.
Une atteinte buccopharyngée est parfois associée
au zona ophtalmique.
Les manifestations oculaires sont à
craindre s’il existe une atteinte du nasal interne.
La gravité de cette
atteinte est liée aux complications oculaires présentes dans 20 à 70 %
des cas.
Précoces ou tardives, aiguës ou chroniques, les atteintes
oculaires peuvent aboutir à la perte anatomique de l’oeil.
Dans 29 %
des cas, il peut persister des séquelles oculaires.
Les complications
oculaires sont liées au virus lui-même et à la réaction inflammatoire,
immunitaire et vasculaire de l’hôte.
Ces réactions inflammatoires
peuvent survenir sur n’importe quel segment de l’oeil.
La
physiopathologie de ces complications n’est pas complètement
connue.
Les études histopathologiques mettent en évidence une
inflammation périvasculaire et périnerveuse dans les tissus
oculaires.
Les réactions de vascularite sont probablement un élément
important dans les complications oculaires et systémiques. les
complications les plus communes sont les rétractions cicatricielles
de la paupière, le ptôsis, la conjonctivite, la sclérite, l’épisclérite, la
kératite, le glaucome, la cataracte, la rétinite, la choriorétinite, la
névrite optique, l’atrophie optique et la névrite rétrobulbaire.
Le VZV peut également être responsable d’une rétinite nécrosante qui
peut survenir au cours d’une réactivation mais également lors de la
primo-infection.
Les autres branches du trijumeau peuvent être
concernées.
* Zona du ganglion géniculé :
Il touche le nerf VII bis.
L’éruption siège dans la zone de Ramsay
Hunt : versant externe du tympan, conduit auditif externe, conque,
tragus, anthelix et atteint parfois les deux tiers antérieurs de
l’hémilangue.
À cette éruption peut s’associer une paralysie faciale
périphérique habituellement de pronostic favorable.
Le zona des racines sacrées peut entraîner des troubles mictionnels.
3- Formes graves et compliquées du zona
:
Il s’agit de zona généralisé ou hémorragique et des formes avec
complications viscérales (pulmonaire, hépatiques, encéphaliques).
Ces formes, rares chez l’immunocompétent, sont plus fréquentes en
cas de cancer et d’immunodépression sous-jacente.
L’immunodépression
favorise la réactivation et la dissémination du VZV.
Le
risque de dissémination cutanée est supérieur à 40 % et 10 % de ces
formes disséminés ont un risque de complications viscérales
(pulmonaire, hépatique, neurologique).
Le zona est volontiers
hémorragique, nécrotique et généralisé.
Les sujets dont
l’immunodépression expose à un zona grave sont principalement
ceux atteints de leucémie aiguë, de lymphome en traitement, de
lupus érythémateux, les greffés d’organes, les patients traités par
chimiothérapie cytotoxique ou un traitement immunodépresseur
(corticoïdes au long cours) et les sujets VIH+ surtout lorsque le taux
de CD4+ est inférieur à 350 par mm3.
Les complications neurologiques liées au zona sont diverses :
neuropathies périphériques, méningoencéphalite, myélite, syndrome
de Guillain-Barré.
Des cas de vascularites cérébrales survenant
quelque semaines à quelque mois après un zona ont été décrits.
Sa mortalité est de 15 à 25 %.
4- Douleurs liées au zona
:
Les douleurs associées au zona sont les complications les plus
fréquentes.
* Douleurs aiguës :
Elles sont quasi constantes au cours de la phase aiguë.
La douleur
est souvent modérée chez l’enfant et le jeune mais souvent
intolérable chez le sujet âgé.
L’inflammation aiguë du nerf sensitif et
du ganglion, l’existence d’hémorragie intraneuronale, l’altération
directe des neurones pourraient expliquer la douleur aiguë,
l’allodynie et l’hyperesthésie cutanée.
* Algies postzostériennes :
Ce sont des douleurs persistant plus de 1 mois après l’épisode aigu.
Il s’agit de douleurs continues et/ou paroxystiques souvent
intolérables, ayant un retentissement important sur la qualité de vie.
Ces douleurs postzostériennes favorisent l’apparition de syndrome
dépressif.
Les douleurs postzostériennes sont d’autant plus
fréquentes que le sujet est âgé.
En effet, leurs incidences augmentent
avec l’âge : 50 % des cas à 50 ans et 70 % des cas au-delà de 70 ans.
L’existence de douleurs intenses à la phase initiale, la gravité des
lésions, la topographie ophtalmique sont également des facteurs de
risque d’algies postzostériennes.
Au cours du zona, il existe une
inflammation du ganglion et une nécrose hémorragique.
Les séquelles du zona sont secondaires à une inflammation chronique,
une vascularite ischémique en réponse à l’invasion virale.
Les
douleurs seraient liées à des lésions de démyélinisation et de fibrose
cicatricielle au niveau des axones, avec un seuil de stimulation
abaissé, et une hyperexcitabilité centrale entretenue par les nocicepteurs.
5- Formes selon le terrain
:
* Femme enceinte
:
Le risque de varicelle foetale après zona maternel pendant la
grossesse semble exceptionnel.
Chez des nouveau-nés issus d’une
population de 366 mères ayant eu un zona au cours de la grossesse,
aucune preuve sérologique d’infection intra-utérine n’a pu être mise
en évidence.
* Jeune enfant :
La contamination foetale ou une varicelle dans les premiers mois de
vie peuvent être responsables d’un zona dans les premières années
de vie.
La période de latence est plus courte lorsque l’infection à VZV a été contractée précocement au cours de la vie.
La réponse
immunitaire est alors probablement incomplète lors de l’infection
initiale. Avant 4 ans, le zona est rare et il ne présente pas de
caractère de gravité.
Il est en général indolore et de courte durée.
Seul 3 % des zonas pédiatriques sont associés à une immunodépression.
* Immunodéprimé :
Comme cela a été décrit précédemment, les formes graves et les
formes compliquées d’atteintes viscérales sont plus fréquentes chez
l’immunodéprimé.
Le risque de dissémination viscérale chez
l’immunodéprimé varie entre 3 et 15 %.
La survenue d’un zona
chez l’adulte âgé de moins de 45 ans peut être révélateur d’une
séropositivité pour le virus VIH.
Le risque de zona est plus faible
chez les cancéreux en dehors des phases de traitement et chez le
sujet VIH+ dont le déficit immunitaire est modéré.
La réactivation du virus VZV peut s’exprimer sous des formes
cliniques différentes de la forme typique.
La forme atypique la plus
fréquente étant la forme hyperkératosique verruqueuse ou au
contraire ulcérée ou prenant parfois l’aspect de molluscum
contagiosum.
Des lésions lichénoïdes et des lésions à type de
folliculites ont été également rapportées.
Le plus souvent, ces
lésions sont asymptomatiques.
Elles peuvent être uniques ou
multiples et se situer à n’importe quel endroit du tégument.
Elles
évoluent sur plusieurs semaines à plusieurs mois alternant des
phases d’extension et de régression sans guérison complète.
Ces
lésions peuvent se développer à la suite d’une varicelle ou après un
zona ou en dehors de ces deux situations.
Ces formes cliniques sont
souvent méconnues ce qui rend difficile l’évaluation de leur
fréquence.
Ces lésions atypiques sont le plus souvent observées chez
le patient VIH ayant un faible taux de CD4, et parfois chez les
transplantés.
Un cas a été décrit chez l’immunocompétent.
L’histologie de ces lésions est souvent hétérogène.
Il existe une
hyperkératose orthokératosique, l’épiderme est le siège d’une
papillomatose, il existe une hyperplasie épithéliale, l’effet
cytopathogène est présent à des degrés variables mais peut être
aussi absent.
Un infiltrat inflammatoire du derme est rarement
observé.
En l’absence d’effet cytopathogène et afin d’exclure une
infection à herpès simplex virus 1 (HSV1) ou 2, le VZV pourra être
mis en évidence par immunofluorescence.
Sous traitement antiviral, ces lésions guérissent en 2 à 3 semaines et
peuvent laisser place à des cicatrices identiques à celle de la
varicelle.
Des résistances au traitement antiviral sont observées plus
fréquemment au cours de ces formes verruqueuses.
Cette résistance
est variable au cours du temps.
D - EXAMENS COMPLÉMENTAIRES :
Le diagnostic est essentiellement clinique.
Dans les formes
atypiques, on peut avoir recours de façon similaire à la varicelle aux
examens directs et indirects cités précédemment.
E - TRAITEMENTS :
1- Traitements symptomatiques :
* Soins locaux :
Il s’agit de douches quotidiennes avec un savon dermatologique, et
d’application de chlorhexidine aqueuse pour prévenir les
surinfections cutanées.
En cas de surinfection bactérienne, une antibiothérapie antistaphylococcique et antistreptococcique par voie orale est
indiquée.
2- Indications thérapeutiques :
La conférence de consensus de 1998 a permis de poser un certain
nombre de conduites thérapeutiques dans la prise en charge du
zona.
* Zona ophtalmique :
L’examen ophtalmologique spécialisé est souhaitable.
Il doit être
systématiquement réalisé en cas de zona ophtalmique intéressant
l’aile du nez, d’oedème palpébral, de baisse de l’acuité visuelle,
d’hyperhémie conjonctivale et d’immunodépression.
En prévention des complications oculaires, un traitement antiviral
doit être débuté avant la 72e heure de la phase éruptive (indication
AMM) : aciclovir à la dose de 800 mg cinq fois par jour ou le
valaciclovir à la dose de 1 g trois fois par jour pour une durée de 7
jours.
L’administration de pommade à l’aciclovir doit être décidée
après avis spécialisé.
L’utilisation de corticoïdes locaux doit être limitée au traitement des
kératites immunologiques et des uvéites antérieures.
La
corticothérapie générale est réservée aux zonas ophtalmiques
compliqués de nécrose rétinienne aiguë ou de neuropathie optique
ischémique.
* Chez le sujet âgé de plus de 50 ans
:
En prévention des douleurs postzostériennes, avant la 72e heure de
la phase éruptive, un traitement par valaciclovir à la dose de 1 g
trois fois par jour ou par famciclovir à la dose de 500 mg trois fois
par jour pour une durée de 7 jours doit être débuté (indication
AMM).
* Sujet de moins de 50 ans sans zona ophtalmique
:
Un traitement antiviral est justifié s’il existe des facteurs prédictifs
de douleurs postzostériennes (gravité de l’éruption, intensité des
douleurs à la phase éruptive, prodromes algiques plusieurs jours
avant la phase éruptive) (indication hors AMM) : valaciclovir 1 g
trois fois par jour ou famciclovir à la dose de 500 mg trois fois par
jour pendant 7 jours.
* Immunodéprimé :
Tout zona justifie un traitement antiviral : aciclovir par voie
intraveineuse à la dose de 10 mg par kg toutes les 8 heures chez
l’adulte et à la dose de 500 mg par m2 toutes les 8 heures chez
l’enfant pendant une durée de 7 à 10 jours.
La durée et la dose du
traitement seront plus élevées en cas d’atteinte neurologique
centrale.
Chez le patient VIH+, l’utilisation de l’aciclovir de façon
prolongée favorise l’apparition de résistance au traitement par déficit en thymidine kinase.
D’autre antiviraux tels que le foscarnet
doivent être utilisés.
L’utilisation du famciclovir et du valaciclovir
chez l’immunodéprimé n’a pas été évaluée.
En cas de cancer solide
en dehors des phases de traitement et chez le patient VIH+ ayant un
déficit immunitaire modéré, le même schéma thérapeutique que
chez l’immunocompétent peut être proposé, sous réserve d’une
localisation initiale monométamérique et d’une surveillance clinique
rapprochée.
3- Traitements antalgiques
:
* Douleurs de la phase aiguë
:
Lorsque les douleurs sont modérées, les antalgiques de classe II
(paracétamol-codéine, dextropropoxyphène-paracétamol) peuvent
être prescrits.
En cas d’efficacité insuffisante, il est nécessaire
d’utiliser la morphine sous forme de sulfate chez l’adulte et de
chlorhydrate chez le sujet âgé en adaptant progressivement les
doses.
* Algies postzostériennes :
Leur prévention passe par l’introduction précoce d’un traitement
antiviral chez la personne de plus de 50 ans et chez les sujets ayant
des facteurs de risque de douleurs postzostériennes.
La valeur
préventive de la corticothérapie par voie générale à la phase aiguë
n’a pas été démontrée.
Les algies postzostériennes nécessitent d’autres thérapeutiques.
Les
aspects médicopsychologiques du zona nécessitent une prise en
charge globale de la souffrance du malade.
L’amitriptyline
(Laroxylt) à la dose de 75 mg par jour chez l’adulte a fait la preuve
de son efficacité sur le fond douloureux permanent (indication
AMM).
La carbamazépine (Tégrétolt)est efficace sur les douleurs
paroxystiques (indication hors AMM).
La gabapentine, un analogue
de l’acide gamma aminobutyrique, dont la dose de 900 à 1 200 mg
est atteinte progressivement en 15 jours, peut être utilisée dans les
algies postzostériennes (indication AMM).
L’utilisation locale de capsaïcine qui déplète localement la substance
P, neuropeptide intervenant dans la transmission de la douleur,
semble entraîner une diminution importante des douleurs.