Les aliments sont une cause fréquente d’urticaire, surtout chez le
jeune enfant.
Ils peuvent intervenir par histaminolibération non spécifique : il s’agit de pseudoallergies alimentaires, ou réactions
allergomimétiques, dont le profil évolutif est plus volontiers aigu
lorsque l’aliment est immédiatement identifié et non réingéré ou
qu’il s’agit d’un accident (aliment mal conservé), plutôt récurrent
que chronique lorsque l’aliment fait partie des habitudes culinaires
du malade.
Il faut bien entendu évoquer le caractère seulement
déclenchant ou aggravant d’une telle alimentation et envisager la
possibilité d’une autre cause à cette urticaire avant de se limiter à
cette étiologie alimentaire.
Il peut s’agir d’un mécanisme d’hypersensibilité IgE dépendant,
finalement peu fréquent contrairement à l’impression des malades
qui rapportent souvent leur urticaire à telle ou telle « allergie »
alimentaire.
L’allergie aux protéines du lait de vache est la cause
dominante d’urticaire chez le nourrisson.
L’atopie est associée dans
deux tiers des cas.
Mais il ne faut pas ignorer les causes plus rares.
Le diagnostic d’une urticaire alimentaire est toujours difficile car
l’enquête doit être minutieuse.
Il faut rechercher des antécédents
familiaux d’atopie ou d’allergie aux aliments, la notion d’allergie
personnelle aux pollens ou d’urticaire de contact au latex, car il
existe des réactions croisées avec les aliments.
La recherche de signes
digestifs d’accompagnement, a fortiori postprandiaux, peut aider.
L’interrogatoire est rigoureux, d’autant plus difficile que l’urticaire
est chronique, car le délai de survenue entre la prise alimentaire et
la réaction cutanée est souvent plus long que dans l’urticaire aiguë.
Il s’appuie sur l’enquête catégorielle alimentaire qui consiste à faire
remplir au malade un relevé qualitatif et semi-quantitatif de tous
ses repas y compris des boissons et des additifs, durant
habituellement 1 semaine.
Elle permet d’incriminer ou au
contraire d’innocenter un aliment grâce aux recoupements avec les
épisodes d’urticaire.
L’exploration allergologique est réalisée grâce aux prick-tests
aux aliments et grâce au dosage des IgE spécifiques.
Les méthodes
de dépistage par mélanges de trophallergènes sont peu utiles car
plus ou moins fiables.
Le rôle des boissons alcoolisées dans le déclenchement ou l’entretien
d’une urticaire est évoqué depuis quelques années et plusieurs
mécanismes seraient impliqués : une intolérance aux multiples
composants et contaminants de la boisson, notamment aux sulfites
(qui induisent plus volontiers un asthme ou une rhinoconjonctivite
et pour lesquels il s’agirait d’une réaction non IgE dépendante);
une absorption accrue d’un antigène en présence d’alcool ; un effet
direct de ce dernier sur les basophiles et mastocytes ; enfin une
hypersensibilité immédiate à l’éthanol, IgE dépendante qui reste
encore discutée.
La survenue d’une urticaire à l’effort fait plus volontiers évoquer
une urticaire cholinergique.
Mais il faut savoir suspecter une
anaphylaxie induite par l’effort devant l’existence de lésions
cutanées en grandes plaques (bien que des formes à petites plaques
aient été décrites, différentes cependant des lésions micropapuleuses
de l’urticaire cholinergique), d’un oedème, de manifestations
d’accompagnement pouvant aller jusqu’au choc.
La sensibilisation
aux céréales est fréquente, le soja et les arachides ont été aussi
impliqués.
Généralement, le repas allergisant précède l’effort qui
doit être très important (le plus souvent course à pied).
Les tests de
provocation à la chaleur, à l’exercice modéré ou en cabine de PUVA
sont négatifs.
D - URTICAIRES DES PNEUMALLERGÈNES :
Les pollens et les allergènes non polliniques (acariens, poils
d’animaux...) sont surtout responsables de rhinite, d’asthme et
d’eczéma ; ils peuvent rarement être à l’origine d’urticaire aiguë ou
chronique, parfois isolée notamment par ingestion.
On décrit
également des réactions urticariennes après inhalation de fumée de
cigarettes résultant d’une hypersensibilité à la nicotine.
Il existe
en outre des réactions allergiques croisées entre aliments et pollens
(pomme/bouleau, noisetier, aulne ; persil/herbacées ;
céleri/bouleau, armoise).
La réalisation de tests aux
pneumallergènes oriente le diagnostic.
E - URTICAIRES ET ANGIO-OEDÈMES DE CONTACT
:
L’urticaire de contact se définit comme une réponse érythématopapuleuse survenant moins de 30 minutes après
l’application sur la peau saine d’une substance rapidement absorbée
à travers l’épiderme, de mécanisme allergique ou non
(histaminolibération).
L’urticaire peut rester localisée ou s’associer à un angiooedème,
ou encore se généraliser, se compliquer d’une réaction anaphylactique (lors de réaction immunologique) ou de
manifestations extracutanées (rhinite, conjonctivite, asthme, signes
buccaux, laryngés ou digestifs).
La liste des allergènes possibles s’allonge régulièrement.
La dermite de contact aux protéines réalise un tableau clinique
particulier : elle se caractérise par une dermite érythémateuse
prurigineuse persistante évoquant un eczéma de contact par sa
topographie prédominant aux mains et son évolution chronique
mais, contrairement à lui, la seule exploration positive est le pricktest
aux protéines végétales (endive, laitue) ou animales (poisson,
poulet ; le prick à la viande de boeuf n’est plus réalisé depuis
l’épidémie d’encéphalopathie spongiforme bovine à prions) et aux
enzymes (alpha-amylase de la farine de boulanger, hévéine du
latex).
Le rôle d’une atopie sous-jacente est avancé.
L’association à des réactions urticariennes volontiers précessives est
fréquente, notamment lors d’allergie au latex.
Celle-ci concerne
préférentiellement le personnel soignant, les enfants porteurs de spina bifida multiopérés et les travailleurs de fabrique de latex.
La
symptomatologie est très variable, allant du simple prurit à
l’urticaire ou au choc anaphylactique, surtout lors d’exposition
muqueuse (préservatif) ou parentérale (chirurgie).
La poudre
d’amidon de maïs des gants est surchargée en protéines de latex et
peut être à l’origine de symptômes aéroportés (conjonctivite, rhinite,
asthme).
Il existe parfois une sensibilité croisée (par le biais
d’IgE spécifiques des profilines constituants du cytosquelette des
cellules végétales) avec les kiwis, les bananes, les avocats, les
châtaignes et les fruits de la passion, bien que, pour certains auteurs,
il ne s’agisse que d’une polysensibilisation sur terrain atopique.
La
prophylaxie de l’allergie au latex comporte le port de gants en
néoprène, en vinyl ou en polystyrène.
Les tests in vivo lors d’urticaire de contact peuvent déclencher un angio-oedème et surtout un choc anaphylactique, ce qui impose leur
réalisation en milieu hospitalier, sous surveillance médicale, avec
matériel de réanimation à disposition.
Le protocole proposé par Von
Krogh et Maibach consiste à réaliser un open-test en peau saine
préalablement humidifiée (doigt de gant en latex naturel par
exemple) ; en cas de négativité, on répète le test mais en peau lésée.
Si l’open-test est négatif, on effectue un patch-test en peau saine, puis
en cas de négativité, en peau lésée ; si tout est négatif, on effectue
un prick-test, enfin toujours en cas de négativité une IDR (sauf dans
le cas de l’allergie au latex).
Après avoir laissé le produit 15 minutes,
la lecture se fait tous les quarts d’heure pendant 60 minutes.
En cas
de négativité de réaction immédiate, lorsqu’on suspecte une allergie
retardée, on applique une deuxième batterie d’épidermotests
classiques occlus avec lecture à 48, 72 et 96 heures.
Les tests in vitro comportent le dosage des IgE spécifiques (RAST)
(pertinent dans l’allergie au latex), les tests de dégranulation des
basophiles humains n’étant pas réalisés en pratique.
F - URTICAIRE ET ANGIO-OEDÈME APRÈS PIQÛRES
D’HYMÉNOPTÈRES :
Les venins des Apidae (abeilles Apis mellifera, ouvrières, et plus
rarement bourdons) et des Vespidae (guêpes : vespula et poliste en
France, et frelons) comportent des enzymes allergisantes et des
peptides dégranulant les mastocytes ; leurs piqûres déclenchent une
réaction urticarienne locale et des manifestations « toxiques » par
des mécanismes pharmacologiques non spécifiques, mais peuvent
aussi faire intervenir l’hypersensibilité spécifique soit de type I
(réaginique, le plus fréquent), soit de type III (8 à 15 jours après la
piqûre, tableau de maladie sérique par complexes immuns), soit de
type IV (très rares manifestations locales retardées).
Les accidents
allergiques aux venins d’hyménoptères sont aggravés par la
répétition des piqûres et sont responsables de la majorité des
manifestations mortelles par angio-oedème ou choc anaphylactique
qui surviennent surtout lors de piqûres massives et simultanées, de
piqûres céphaliques, de piqûres intravasculaires ou lors de
sensibilisation individuelle anormale.
L’enquête allergologique
comporte les pricks-tests (en cas de négativité l’IDR) constitués par
des dilutions successives des venins servant à la désensibilisation et
le dosage des IgE spécifiques sériques.
À distance de l’épisode
allergique, on effectue une désensibilisation au venin de guêpe
ou/et au venin d’abeille selon l’anamnèse confirmée par les tests allergologiques et/ou le dosage des IgE spécifiques, chez les sujets
les plus à risque (adulte ou enfant ayant fait une réaction sévère
cardiovasculaire et/ou respiratoire).
G - URTICAIRE ET MALADIES INFECTIEUSES :
1- Urticaire et infection virale
:
Une urticaire aiguë peut s’observer à la phase préictérique de
l’hépatite A.
L’association à une fièvre et à des arthralgies réalise
alors la triade de Caroli.
L’histologie met en évidence une vasculite
leucocytoclasique médiée par les complexes immuns circulants.
D’autres maladies virales peuvent être à l’origine d’urticaire plutôt
aiguë lors d’hépatite B, de mononucléose infectieuse, de
rougeole, de varicelle, de rubéole, ou d’infections à coxsackie, parfois
chronique lors d’infection à cytomégalovirus, à VIH ou à parvovirus
B19.
L’hépatite C est liée à l’urticaire essentiellement par
le biais de la production de cryoglobulines mixtes ; cependant, on
rapporte des observations de vasculites urticariennes en l’absence
de cryoglobulines.
2- Urticaire et infection bactérienne
:
La syphilis secondaire, l’infection à Mycoplasma pneumoniae peuvent
s’accompagner d’urticaire (à ne pas confondre avec un érythème
polymorphe) ainsi que la maladie de Lyme (à ne pas confondre avec
l’érythème chronique migrateur), parfois dans le cadre de
cryoglobulinémies.
Les infections à Campylobacter jejuni et surtout à Helicobacter pylori
ont été décrites dans le cadre d’urticaires chroniques et, bien que
non statistiquement fiable, le lien entre l’infection et l’urticaire
semble parfois très fort, a fortiori lorsque l’urticaire guérit après
traitement antibiotique et récidive lors d’une réinfestation digestive.
De même, les foyers infectieux localisés à streptocoques (focal sepsis),
le plus souvent dentaires ou oto-rhino-laryngologiques (sinus),
peuvent, dans certains cas, être responsables d’urticaires
chroniques.
3- Urticaire et infection fongique :
Le lien entre foyer infectieux dermatophytique, candidosique ou à
moisissures et l’urticaire est faible comparativement aux allergies de
type retardé (asthme et eczéma notamment).
Les prick-tests et le dosage d’IgE spécifiques ne suffisent pas pour affirmer la relation et
l’urticaire doit disparaître après traitement antifongique.
4- Urticaire et maladie parasitaire :
Toutes les parasitoses peuvent s’accompagner d’urticaire aiguë ou
chronique.
L’éosinophilie sanguine n’est pas un argument
d’orientation suffisant, puisque les protozoaires n’induisent pas
d’éosinophilie.
Les sérodiagnostics parasitaires peuvent être utiles.
Les parasites dont le cycle est limité à la lumière intestinale (oxyures,
trichocéphales, Lamblia, amibes) interviendraient plus rarement que
les parasites intestinaux ayant une phase tissulaire (ascaris,
ankylostomes, anguillules).
Les parasites à répartition corporelle
ubiquitaire (hydatidose, filariose, distomatose, trichinose,
schistosomiase) sont classiques mais rares.
La toxocarose (larva
migrans viscérale à Toxocara canis ou cati) est une étiologie
d’urticaire chronique : la présence d’un chien ou d’un chat au
domicile, la survenue de manifestations cutanées volontiers
polymorphes (urticaire, eczéma, prurit-prurigo) et parfois de signes
pulmonaires (toux fébrile, infiltrat radiographique), l’apparition
d’une éosinophilie transitoire, font évoquer la parasitose et
demander une sérologie enzyme-linked immunosorbent assay (Elisa).
H - VASCULITES URTICARIENNES :
Le syndrome clinique est souvent évocateur : les plaques
urticariennes sont fixes, peu ou non prurigineuses, s’associent à un
purpura papuleux et à de fréquents signes extracutanés à
type d’atteinte de l’état général avec poussées fébriles
contemporaines des poussées urticariennes, d’arthralgies ou
d’arthrites passagères, récidivantes, de myalgies, de fièvre, de
ganglions, d’hépatosplénomégalie, de manifestations digestives,
neurologiques, oculaires, pulmonaires ou rénales.
Il existe une
prédominance franche du sexe féminin (70 % des cas).
L’évolution
peut être sévère, en rapport bien entendu avec l’étiologie
sous-jacente.
Le syndrome inflammatoire est constant et souvent majeur avec
présence de complexes immuns circulants ; l’hypocomplémentémie est
variable dans le temps et souvent contemporaine des poussées.
La
diminution des fractions du complément touche de façon variable le
C1q, le C4, le C3, le C5 et le facteur B (voies classique et alterne).
L’examen histologique montre une vasculite nécrosante
leucocytoclasique aux dépens des veinules du plexus dermique
profond avec en immunofluorescence directe des dépôts d’Ig et de
complément dans la paroi des vaisseaux ou à la jonction
dermoépidermique.
Le syndrome de « vasculite urticarienne » recouvre en fait une série
d’entités se recoupant parfois.
– Le syndrome de Mac Duffie comporte des poussées urticariennes
souvent associées à des crises d’angio-oedème, des arthralgies, des
douleurs abdominales et parfois une atteinte rénale (protéinurie et
hématurie microscopique), une symptomatologie pulmonaire,
neurologique, ophtalmologique (sclérite, uvéite).
Il existe une hypocomplémentémie intéressant le complément total et les facteurs
C1, C2, C4 avec présence d’anticorps IgG anti-C1q, sans anticorps
antinucléaires et sans cryoprotéine.
Pour certains auteurs, il ne
s’agirait que d’une forme particulière de lupus systémique ; la
corticothérapie générale (0,5 mg/kg) s’impose le plus souvent.
– Le lupus systémique serait révélé par la vasculite urticarienne dans
près de 10 % des cas.
Classiquement, on décrit une urticaire retardée à la pression ; en fait, on
observe plus volontiers des éruptions urticariennes plutôt maculeuses
souvent photodistribuées notamment dans le cadre de syndrome Ro-
SSA (à la frontière du spectre lupique et du syndrome de Gougerot-Sjögren) ; des cas d’angio-oedèmes acquis de type I (consommation du
C1INH) ou de type II (sans dysplasie lymphoplasmocytaire ;
autoanticorps IgG ou IgA dirigés contre le C1INH) ainsi que
d’authentiques oedèmes angioneurotiques héréditaires (de type I ou II)
sont décrits également dans le cadre du lupus.
– La sclérodermie, la périartérite noueuse (avec sérologie de l’hépatite
B positive), le syndrome de Sharp peuvent plus rarement
s’accompagner de vasculite urticarienne.
– La maladie de Still est une maladie systémique inflammatoire
de cause inconnue touchant essentiellement l’enfant et l’adulte
jeune.
La fièvre est quasi constante, élevée autour de 39 à 40 °C,
hectique et prédominant le soir.
Les arthralgies d’allure
inflammatoire concernent toutes les articulations y compris les interphalangiennes distales, les articulations temporomandibulaires
ou cricoarythénoïdiennes simulant un trismus ou une pharyngite.
Elles peuvent comporter des épanchements synoviaux et s’associent
souvent à des myalgies parfois intenses avec déficit volontiers
proximal simulant une polymyosite.
L’éruption cutanée, peu ou non
prurigineuse, comporte un rash maculeux de couleur rose ou
saumonée, volontiers fugace et en regard des articulations
douloureuses et des placards urticariformes plus papuleux
touchant le tronc et les membres.
L’histologie cutanée est non
spécifique à type de vasculite urticarienne avec infiltrat
lymphocytaire périvasculaire ou bien d’urticaire neutrophilique.
On peut également observer des adénopathies (d’histologie
proche de la maladie de Kikuchi ou lymphadénite nécrosante), une
hépatosplénomégalie, une pleuropéricardite, une protéinurie et/ou
une hématurie.
L’hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles est
un critère biologique majeur : elle est souvent élevée, supérieure à
20 000/mm3, s’accompagnant d’une élévation des autres lignées
granuleuses et parfois d’une myélémie.
L’hyperferritinémie est un
important marqueur diagnostique, reflet de l’activité de la maladie,
pouvant atteindre des taux supérieurs à 80 000 ng/mL (normale
< 300) avec un pourcentage de ferritine glycosylée qui reste bas,
entre 20 et 60 %.
Le syndrome inflammatoire est constant et
s’accompagne souvent d’une augmentation modérée de
transaminases, des lacticodéshydrogénases, sans élévation des
enzymes musculaires.
1- Syndrome de Muckle et Wells
:
Cette affection héréditaire très rare, à transmission autosomique
dominante, comporte dès l’enfance des poussées récidivantes
d’urticaire non prurigineuse, durant 1 à 2 jours, accompagnées de
fièvre et d’arthrites, compliquées d’une surdité de perception
bilatérale et progressive à partir de la deuxième décennie et
inconstamment d’une amylose rénale.
Le mécanisme physiopathologique est inconnu mais l’on retrouve à l’histologie
cutanée un aspect d’urticaire neutrophilique ou bien de vasculite
urticarienne.
2- Urticaire des cryopathies :
*
Cryoglobulinémies :
L’urticaire au froid est moins souvent révélatrice de
cryoglobulinémies que le purpura, le livedo, le syndrome de
Raynaud.
Leur recherche doit être systématique lorsque ces
symptômes sont associés, lorsque la biologie est évocatrice (vitesse
de sédimentation fluctuante, sérologie rhumatoïde dissociée, C4
abaissé) ou lorsque l’on retrouve une des pathologies sous-jacentes
suivantes : dans les types I (IgM monoclonales) et II (IgM
monoclonales et IgG polyclonales), on observe des hémopathies
lymphoplasmocytaires malignes, des syndromes lymphoprolifératifs
et des affections auto-immunes ; dans le type III ou mixte (IgG, IgM
polyclonales), on trouve essentiellement des maladies infectieuses
telles la syphilis récente primosecondaire, la mononucléose
infectieuse, l’hépatite C...
* Cryoagglutinines :
La maladie des agglutinines froides s’accompagne plus souvent
d’une acrocyanose paroxystique déclenchée par le froid que d’une
urticaire.
Ce syndrome rare est soit idiopathique (IgM
monoclonales), soit secondaire (IgM polyclonales transitoires) à une
infection virale (mononucléose, rubéole ou VIH), à une infection
mycoplasmique ou rickettsienne, à une parasitose.
On observe une
anémie hémolytique : l’agglutination des hématies est maximale
à 4 °C.
* Cryohémolysines :
L’hémoglobinurie paroxystique a frigore de Marchiafava-Micheli
comporte une hémolysine biphasique de Donath-Landsteiner (se
fixant sur les hématies à 4 °C mais activant suffisamment le
complément pour favoriser l’hémolyse à 37 °C) ; elle peut
accompagner la syphilis congénitale et la syphilis tertiaire.
3- Urticaire et angio-oedème des hémopathies
et néoplasies
:
* Urticaire des hémopathies, des lymphomes et des cancers
:
L’urticaire et l’angio-oedème accompagnent rarement les syndromes
lymphoprolifératifs et les révèlent encore plus exceptionnellement,
sauf en présence de cryoglobulines.
Leur survenue est possible au
cours des polyglobulies, des lymphadénopathies angioimmunoblastiques,
des leucémies aiguës ou chroniques, des
lymphomes hodgkiniens et non hodgkiniens, de la maladie de
Waldenström ou des cancers viscéraux.
Un angio-oedème de type I
par déficit acquis en C1INH (synthèse normale, catabolisme accru) a
été décrit au cours ou avant l’apparition de lymphome B, de
leucémie lymphoïde chronique, de maladie de Waldenström, de
myélome.
Quant aux cancers viscéraux, leur incidence n’est pas
significativement augmentée au cours des urticaires chroniques qui
ne peuvent pas être considérées comme des syndromes
paranéoplasiques.
* Syndrome de Schnitzler :
Il s’agit d’une urticaire chronique très rare, de caractère récidivant
avec des lésions fixes, non prurigineuses avec parfois angio-oedème,
qui s’associe à des épisodes fébriles avec altération de l’état général,
à des douleurs osseuses et articulaires invalidantes avec parfois
ostéocondensation radiologique, hyperfixation à la scintigraphie.
Il existe un syndrome inflammatoire majeur, on retrouve une IgM
monoclonale le plus souvent à chaînes kappa parfois lambda à des
taux faibles (< 10 g/L) ; le myélogramme et la biopsie
ostéomédullaire sont sans anomalie.
L’histologie cutanée objective
une vascularite parfois leucocytoclasique avec des dépôts
inconstants d’IgM en immunofluorescence directe. L’évolution est
chronique (l’urticaire résistant aux antihistaminiques, aux AINS, aux
immunosuppresseurs et même aux Ig intraveineuses ; seule la
corticothérapie générale aurait une action), auparavant présumée
bénigne, mais la transformation maligne (maladie de Waldenström,
myélome ou lymphome) est de plus en plus souvent observée
lorsque le recul est suffisant.
* Syndrome d’hyperimmunoglobulinémie D :
Débutant dans l’enfance (quatre cas sur cinq avant 1 an), de
caractère familial dans plus d’un tiers des cas (probable transmission
autosomique récessive), le syndrome d’hyperimmunoglobulinémie
D consiste en des poussées urticariennes durant 3 à 7 jours,
récidivantes, de fréquence très variable (une fois par semaine à deux
fois par an) comportant des macules érythémateuses suivies par des
papules parfois pétéchiales, annulaires, des nodules hypodermiques
sans biligénie locale ou des lésions muqueuses (aphtose buccale
dans deux cas sur trois).
Elles sont accompagnées d’une fièvre
supérieure à 40 °C précédée de frissons, de polyarthralgies ou
d’arthrites symétriques non destructrices touchant les grosses
articulations, de polyadénopathies, parfois d’hépatosplénomégalie,
de douleurs abdominales (avec diarrhée, vomissements, parfois
pseudochirurgicales).
Le diagnostic différentiel se fait avec la
maladie de Still, le rhumatisme articulaire aigu, les autres urticaires
familiales, la maladie périodique (ou fièvre méditerranéenne
familiale), les dermatoses neutrophiliques et le CINCA (chronic
infantile neurological cutaneous and articular syndrome) ou NOMID
(neonatal onset multisystem inflammatory disease) ou encore syndrome
méningo-cutanéo-articulaire chronique de l’enfant (affection
d’étiologie inconnue, associant des poussées fébriles néonatales, une
éruption maculopapuleuse urticarienne, des arthralgies avec ou sans
pseudotumeurs osseuses et une méningite chronique s’exprimant
par des céphalées ou des crises convulsives).
Le taux d’IgD (parfois d’IgA) est élevé (> 100 UI/mL) ; il existe un
syndrome inflammatoire avec polynucléose neutrophile sans
anomalie des facteurs du complément.
L’histologie retrouve un infiltrat dermique polymorphe
(lymphocytes et polynucléaires neutrophiles), volontiers périvasculaire autour des capillaires et des veinules postcapillaires
avec parfois leucocytoclasie ; l’immunofluorescence objective des
dépôts d’IgM, de C3 et de façon inconstante d’IgD le long de la
membrane basale et autour des vaisseaux.
L’évolution est généralement bénigne sans production d’amylose ; il
n’y a pas de traitement efficace hormis la colchicine et les AINS en
cas d’arthrites.
Le syndrome d’hyper-IgD résulterait d’un déficit de la mévalonate
kinase codé par un gène du chromosome 12, défaut enzymatique
entraînant une acidurie mévalonique, maladie métabolique
pédiatrique en fait déjà répertoriée.
* Angio-oedème et urticaire récidivants avec hyperéosinophilie ou
« syndrome hyperéosinophilie-oedèmes cycliques » de Gleich :
Le syndrome de Gleich est une affection exceptionnelle débutant dans l’enfance
dans la moitié des cas.
Elle se traduit par un angiooedème
aigu récurrent de la face, du cou, du tronc et des extrémités,
associé à des placards d’urticaire, accompagnés d’une fièvre et suivis
d’un syndrome oedémateux généralisé s’exprimant par une prise
pondérale spectaculaire de plusieurs kilogrammes en quelques jours
allant parfois jusqu’à 30 % du poids corporel.
L’éosinophilie est
constante, atteignant 60 à 90 % du chiffre des leucocytes, avec parfois
réaction leucémoïde (60 à 100 000 globules blancs par mm3) ; on note
plus rarement des taux élevés d’IgM.
À l’histologie, il existe un
oedème dermique avec un important infiltrat cellulaire de
polynucléaires éosinophiles en périvasculaire et le long des fibres
collagènes, éosinophiles pour la plupart dégranulés (ayant donc
libéré leurs constituants dont la protéine majeure basique).
La physiopathologie demeure mal comprise bien qu’une franche
élévation de l’interleukine 6 corrélée au taux d’hyperéosinophilie ait
pu être objectivée lors des crises et puisse constituer un des
médiateurs de l’affection comme dans l’urticaire retardée à la
pression.
L’évolution est régressive spontanément ou après
instauration d’une corticothérapie générale.
Le syndrome de Gleich
s’intègre dans le spectre des syndromes hyperéosinophiliques et se
distingue du syndrome hyperéosinophilique idiopathique par une
évolution relativement bénigne sans atteinte viscérale.
I - URTICAIRES ET HORMONES :
1- Dysthyroïdies :
Une auto-immunité thyroïdienne (anticorps antithyroglobuline et
antithyroperoxydase) est volontiers retrouvée lors d’urticaire
chronique, avec ou sans hypothyroïdie patente, avec une large
prédominance féminine.
Lors de résistance aux antihistaminiques
ou à la corticothérapie générale, certains auteurs préconisent des
doses modérées d’hormone thyroïdienne.
Une hyperthyroïdie peut
aussi être associée à une urticaire chronique souvent diffuse,
caractérisée par sa résistance aux antihistaminiques, par l’absence
de vascularite et par l’association possible à un myxoedème
circonscrit prétibial et/ou à un vitiligo.
La thyroxine (T4) est
modérément élevée, la triiodo-thyronine (T3) est très élevée.
La
pathogénie demeure obscure.
Les observations d’urticaire après
prise d’hormones thyroïdiennes seraient plutôt dues à une allergie
aux excipients qu’à une réaction à l’hormone elle-même.
2- Urticaire à la progestérone
:
L’éruption est définie par sa périodicité, apparition 7 à 10 jours avant
les règles, disparition 1 à 3 jours après en moyenne, mais parfois
persistance jusqu’au dixième ou douzième jour.
La symptomatologie
est très polymorphe et l’urticaire n’est qu’un aspect de la
« dermatose auto-immune à la progestérone » qui peut comporter
des lésions eczématiformes ou à type d’érythème polymorphe.
Le
diagnostic est établi par l’IDR à la progestérone (solution alcoolique
à 0,1 mg/mL) avec lecture immédiate (20 minutes) et retardée
(24 heures) en dehors des poussées éruptives (en première partie du
cycle).
Des anticorps sériques antiprogestérone peuvent être
objectivés par immunofluorescence indirecte sur des cellules
lutéinisantes du corps jaune.
La physiopathologie est complexe :
réaction de type I (test de transfert passif positif et réaction
immédiate après injection de progestérone), réaction de type III
(réaction retardée en anticorps anti-corps jaune).
La grossesse peut,
soit jouer un rôle aggravant, soit un rôle temporairement favorable.
J - URTICAIRE ADRÉNERGIQUE :
Affection rare, l’urticaire adrénergique (adrenergic urticaria) se définit
par la survenue, 10 à 15 minutes après un stress émotionnel, de
macules érythémateuses, de micropapules diffuses toujours
entourées d’un halo blanchâtre ischémique, correspondant à une
vasoconstriction ou de grands placards urticariens.
Les
concentrations plasmatiques d’adrénaline, de noradrénaline et de
dopamine sont multipliées par un facteur variant de 2 à 8 et les taux
d’histamine et de sérotonine sont normaux.
L’injection
intradermique d’adrénaline (10 ng/0,02 mL de sérum physiologique)
reproduit les lésions alors que l’injection d’acétyl b-méthylcholine
n’entraîne aucune réaction contrairement à l’urticaire cholinergique.
K - URTICAIRE PSYCHIQUE :
Il est souvent difficile de faire la distinction entre la répercussion
psychologique fréquente de l’urticaire chronique non étiquetée et
un trouble psychiatrique précessif.
Cependant, une telle étiologie est
plausible puisqu’on connaît l’influence des neuropeptides dans les
mécanismes de l’inflammation, notamment cutanée.
Un
dysfonctionnement sérotoninergique par altération de la
biodisponibilité périphérique du tryptophane (du même type que
celui observé dans la dépression) serait impliqué lors de certaines
urticaires chroniques mais sa mise en évidence est complexe.
Aussi
cette hypothèse ne doit être retenue qu’après élimination des autres
causes d’urticaire et lorsque la guérison suit effectivement le
traitement du déséquilibre psychique (tout en sachant que les
antidépresseurs tricycliques ont une action antihistaminique).
L - URTICAIRES CHRONIQUES « AUTO-IMMUNES »
:
Évoquée à partir de la propriété histaminolibératrice du sérum de
certains malades injecté dans leur propre derme, la présence
d’autoanticorps favorisant la libération d’histamine a pu être
objectivée par des méthodes immunologiques sophistiquées ; il s’agit
d’IgG1 et/ou d’IgG3 dirigées contre les récepteurs de haute affinité
pour les IgE (anti-FceRIa) des mastocytes et polynucléaires
basophiles ou plus rarement contre les IgE : ce mécanisme de
découverte récente expliquerait près de 25 % des urticaires
chroniques qualifiées auparavant d’idiopathiques.
L’existence de ces autoanticorps a motivé l’utilisation des Ig intraveineuses et des
plasmaphérèses dans ces urticaires le plus souvent sévères avec des
résultats discutables.
De plus, cette auto-immunité n’explique pas
tout puisqu’on observe des anticorps anti-FceRIa dans le pemphigus
et la dermatomyosite sans pour autant libération d’histamine.
Il semble exister une association significative entre le groupage human leukocyte antigen (HLA) DR4 et l’urticaire auto-immune.
Démarche diagnostique :
La démarche face à une urticaire ou/et un angio-oedème consiste
d’une part à traiter sans délai la poussée, a fortiori en cas de
dyspnée ou de choc (plus fréquent lors de piqûres d’hyménoptères,
après injection d’iode ou prise médicamenteuse), d’autre part à
rechercher l’agent causal, en sachant que les urticaires d’origine
alimentaire ou médicamenteuse et les urticaires physiques sont les
plus fréquentes et qu’il existe souvent une forte participation
psychologique aggravant ou pérennisant les lésions par le biais
probablement des neuropeptides (« nerfs à fleur de peau »)...
En cas d’urticaire aiguë non compliquée, rapidement régressive
après traitement, on se limite généralement à un interrogatoire
détaillé et un examen clinique complet qui orientent d’éventuelles
investigations. En cas d’angio-oedème, il est licite de doser le
complément C4 (et en cas de taux bas, le C1INH ; étude pondérale
et en cas de normalité, étude fonctionnelle).
Devant l’existence d’antécédents familiaux d’urticaire chronique
et/ou récidivante, il faut évoquer avant tout les urticaires physiques
familiales (retardée au froid ou à la pression, de contact à la chaleur,
vibratoire ou aquagénique) ; en présence d’angio-oedème sévère avec
manifestations digestives ou peranesthésiques, on doit rechercher un oedème
angioneurotique héréditaire avec déficit en C1INH.
Chez l’enfant, l’existence de
manifestations articulaires fébriles fait évoquer la maladie de Still et
incite également à doser le taux d’IgD (syndrome d’hyper-IgD) et
à effectuer un audiogramme (syndrome de Muckle et Wells).
Lors d’urticaire chronique, les investigations sont très variables selon
les équipes.
Il importe de reprendre en détail l’anamnèse,
de rechercher les prises médicamenteuses occultes, de réaliser une
enquête catégorielle alimentaire soigneuse, d’orienter les
explorations selon le contexte (âge et facteurs de risque du patient,
épisode infectieux, séjour outre-mer, terrain auto-immun...).
Le bilan
non invasif et peu coûteux, comportant une prise de sang, un
examen d’urines et de selles et des tests de stimulation physique,
est réalisé en ambulatoire ou en hôpital de jour.
L’histologie cutanée
avec immunofluorescence directe est effectuée lors de note purpurique à la vitropression, en cas de fixité des lésions ou en
présence d’une symptomatologie associée à type d’arthralgies
fébriles, de syndrome de Raynaud, de livedo, de manifestations
viscérales.
Des examens plus coûteux sont réalisés en cas de
négativité des explorations précédentes ou en fonction du tableau
clinique ; ils permettent d’éliminer des affections qui, bien que
rarement révélées par l’urticaire, bénéficieraient d’un dépistage
précoce (lupus, immunoglobinopathies, parasitoses en cas
d’hyperéosinophilie...).
En l’absence d’étiologie, on parle d’urticaire idiopathique qui est en
réalité une urticaire « en attente de diagnostic » dont la fréquence
varie beaucoup en fonction de la qualité et de la quantité des
investigations ; l’anamnèse est fondamentale et l’interrogatoire d’une
urticaire chronique nécessite généralement plusieurs heures de
consultations à l’aide notamment d’un questionnaire préétabli.
On préconise alors un traitement antihistaminique au long cours
(environ 6 mois) parfois associé à un régime oligoallergénique
(durant 3 semaines environ, éventuellement répété) et l’on assure
un soutien psychologique ainsi qu’un suivi régulier du patient
comportant la reprise de l’interrogatoire, un nouvel examen clinique,
un bilan succinct comportant généralement une numération-formule
sanguine et une vitesse de sédimentation.
La plupart des urticaires chroniques idiopathiques régressent avec
un traitement symptomatique prolongé en quelques mois ou en
quelques années...
Une pathologie sous-jacente méconnue finit
parfois par se révéler ou les progrès de la médecine permettent
l’individualisation d’une nouvelle entité comme ce fut le cas pour
l’urticaire « auto-immune » avec autoanticorps dirigés contre les
récepteurs de haute affinité pour les IgE des mastocytes...
Traitement :
A - MOYENS THÉRAPEUTIQUES :
L’histamine étant le médiateur princeps de l’urticaire, les
antihistaminiques anti-H1 demeurent l’arme thérapeutique de
première intention.
Ils doivent être utilisés par voie générale en
raison du caractère (photo-)allergisant des formes topiques.
L’Hypostaminet (tritoqualine) est un inhibiteur de la L-histidinedécarboxylase
et de ce fait diminue la synthèse de l’histamine
endogène.
Il est utilisé comme adjuvant aux anti-H1 à la dose de 600
à 900 mg/j ; il est autorisé durant le premier trimestre de la
grossesse.
Les antidégranulants, Nalcront, Intercront (cromoglycate
disodique), bloquent la dégranulation des mastocytes et sont plutôt
utilisés lors d’allergie alimentaire vraie.
Les glucocorticoïdes agissent en bloquant la voie de la lipooxygénase
(formation des leucotriènes) mais leur utilisation dans
l’urticaire est toujours discutée.
Ils sont peu utiles à la phase aiguë
de l’urticaire classique et a fortiori lors de formes sévères car leur
action est retardée et peu efficace.
Ils sont déconseillés à la phase
chronique car l’on observe un effet rebond à l’arrêt.
On devrait
les réserver aux urticaires chroniques avec autoanticorps
antirécepteurs des IgE, à certaines vasculites urticariennes et à
certaines urticaires retardées à la pression où les dermocorticoïdes
semblent avoir également une action favorable.
Certains antidépresseurs imipraminiques telle la doxépine
(Quitaxont, Sinéquant comprimés ou solution buvable à raison de
10 à 50 mg/j à doses progressives) ont une action positive sur
l’urticaire chronique, a fortiori, bien entendu, lorsqu’il existe une
composante anxiodépressive.
Ils agiraient par leurs effets sédatif et anticholinergique.
De multiples autres molécules agissant sur les divers médiateurs de
l’urticaire ont été utilisées parfois de façon empirique, parfois dans
le cadre de protocoles scientifiques.
L’adrénaline (injectable ou en inhalation) est d’utilisation reconnue
et permet de lutter contre la vasodilatation suivie de collapsus lors
de choc anaphylactique ou de dyspnée par oedème pharyngolaryngé.
Les antiprostaglandines sont représentées par les AINS et
notamment l’indométacine (Indocidt), qui est utilisée seule ou en
association avec les anti-H1 au cours de certaines formes d’urticaire
chronique notamment lors des vasculites urticariennes et de
l’urticaire retardée à la pression.
Les antihistaminiques anti-H2 (ranitidine Azantact, cimétidine
Tagamett) auraient un effet potentialisateur sur les anti-H1
notamment lors d’urticaire au froid.
Certains anticalciques notamment la nifédipine (Adalatet) ont été
proposés lors d’urticaires chroniques à la dose de 10 à 20 mg/j
associés aux anti-H1 et/ou aux anti-H2, mais les effets secondaires
(céphalées, nausées, flush, hypotension) sont parfois gênants.
Les bêtabloquants, classiquement contre-indiqués dans l’urticaire en
raison de leur interaction avec l’adrénaline lors de choc
anaphylactique, sont utilisés (propranolol Avlocardylt) lors
d’urticaire adrénergique.
Les androgènes (danazol, Danatrolt comprimé à 200 mg) constituent
le traitement préventif classique de l’oedème angioneurotique
héréditaire mais sont prescrits aussi dans l’urticaire à la progestérone
et dans certaines urticaires physiques avec diminution du taux
d’inhibiteur de l’a1-antitrypsine ; leur toxicité n’est pas
négligeable (hépatotoxicité et virilisation).
Les agents antifibrinolytiques, antikallikréine (aprotinine, Trasylolt ;
acide tranexamique, Exacylt) sont proposés lors d’urticaire
chronique mais sont d’utilisation difficile car injectables par voie
intraveineuse.
Les antisubstances P comme la capsaïcine sont à l’étude.
Les immunomodulateurs tels la ciclosporine ou l’interféron c, les Ig
intraveineuses, les plasmaphérèses, ont pu être utilisés lors
d’urticaire chronique idiopathique sévère mais les résultats sont
décevants considérant les risques iatrogènes et le coût de telles
thérapeutiques.
L’induction d’un phénomène de tolérance est une méthode basée
sur l’existence d’une période réfractaire, au cours des urticaires
physiques.
Elle est proposée lors d’urticaires de contact au froid ou
à la chaleur et d’urticaire solaire, et consiste à exposer une partie du
corps au stimulus mais en débutant à une dose infraliminaire, puis
à augmenter progressivement la durée des expositions et la surface
exposée.
Une fois acquise, la tolérance doit être entretenue par des
expositions au stimulus régulières quoique espacées, ce qui est
contraignant.
B - QUELQUES INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES :
Le traitement de l’urticaire retardée à la pression est fondé sur les
anti-H1 en première intention ; les AINS de type indométacine ont une
action favorable mais non durable avec même des aggravations
secondairement.
La corticothérapie est à réserver aux formes résistantes
et aux formes invalidantes ou lorsqu’une étiologie lupique est
découverte et la nécessite.
L’hypersensibilité alimentaire est parfois
discutée : les régimes d’éviction alimentaire ne doivent être instaurés
que pour les aliments dont les prick-tests se sont avérés positifs.
L’urticaire cholinergique est traitée par les anti-H1 qui possèdent des
propriétés anticholinergiques comme l’hydroxyzine mais également
par les anti-H1 de dernière génération telle la cétirizine ; l’urticaire
est inhibée également par l’application de scopolamine (Scopoderm
TTSt).
Le traitement de l’urticaire de contact à la chaleur est basé sur les
anti-H1 et l’induction d’une tolérance à la chaleur, par expositions
répétées de segments de membres, puis de membres entiers, à des
bains chauds selon un protocole rigoureux mais l’effet est le plus
souvent temporaire.
L’urticaire de contact au froid est améliorée par les anti-H1 de
dernière génération progressivement augmentés, parfois en
association avec les anti-H2, ou bien par la doxépine ; les
antiandrogènes peuvent être bénéfiques lorsqu’on découvre un
déficit en antiprotéases.
Le traitement de l’urticaire aquagénique est difficile, basé sur les
anti-H1 ; elle peut être prévenue par l’application d’émollients avant
le contact avec l’eau de la douche ou l’ajout de bicarbonate de
sodium (200 g) dans le bain.
Le traitement de l’urticaire solaire est plus complexe et associe la photoprotection externe couplée au bêtacarotène (Phénorot) et aux
antipaludéens de synthèse (Nivaquinet ou Plaquenilt), qui sont peu
efficaces isolément, les anti-H1 de dernière génération à fortes doses
délivrées 30 minutes avant l’exposition, la puvathérapie ; elle associe
un psoralène aux UVA et est conduite à raison de trois séances par
semaine avec au début 80 % de la dose déclenchante (0,2 à 0,3 joule) ;
les résultats s’observent en 15 séances.
Par la suite, le traitement
d’entretien comprend une séance par semaine (ce qui correspond à 1
heure d’exposition solaire) ; l’induction de tolérance est conduite par
des irradiations itératives soit localisées, soit corporelles totales selon
des protocoles rigoureux ; les échanges plasmatiques proposés quand
il existe un facteur sérique circulant n’ont fait la preuve de leur
efficacité que dans un nombre très limité de cas.
Les poussées d’urticaire adrénergique sont prévenues par le propranolol et l’exclusion du café et du thé.
Le traitement de l’urticaire à la progestérone peut comporter une oestrogénothérapie (éthinyloestradiol 0,05 mg, une à trois fois par
jour, administré les 20 premiers jours du cycle), du tamoxifène
(Nolvadext 10 à 30 mg/j), du danazol (Danatrolt ; mais la fréquence
des effets androgéniques et des complications hépatiques limite son
emploi), une désensibilisation à la progestérone, de l’acétate de
buséréline (Suprefactt ; analogue de synthèse de la luteinizinghormone
releasing-hormone : huit sprays par jour de 100 mg chacun)
ou bien une ovariectomie devant l’échec des autres traitements, en
période de préménopause ou devant la gravité des signes cliniques.