Tumeurs cérébrales et grossesse

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Introduction :

La grossesse est un état physiologique qui confère à toute pathologie des aspects spécifiques qui interviennent dans la prise en charge des patientes.

Tumeurs cérébrales et grossesseEn neuro-oncologie, les questions posées par l’état gravide sont de plusieurs ordres :

– épidémiologique : l’état gravide a-t-il, en soi, un rôle révélateur de tumeurs cérébrales jusque-là asymptomatiques, ou aggravant de lésions déjà traitées et stabilisées ?

– oncobiologique : l’état gravide modifie-t-il l’oncobiologie des lésions, favorise-t-il l’évolution vers l’anaplasie de lésions bénignes ou de bas grade ? Si oui, comment ?

Quel en est le niveau de preuve ? Quelles en sont les conséquences ?

– diagnostique : les manifestations symptomatiques cliniques dues à l’état gravide peuvent-elles conduire à des diagnostics retardés ?

Ou simplement à des diagnostics différentiels difficiles ?

Les explorations habituelles sont-elles accessibles, peuvent-elles être répétées ?

– thérapeutique : quelles sont les conséquences sur la prise en charge de la tumeur, la surveillance de la grossesse, la conduite de l’accouchement et de ses suites ?

Ces questions ont pour la plupart des réponses empiriques, basées sur des cas ponctuels ou de petites séries rétrospectives.

Quatre aspects complémentaires doivent aussi être abordés, en raison de leurs liens avec l’état gravide :

– les métastases cérébrales des tumeurs trophoblastiques, incidence, attitude ;

– les tumeurs cérébrales du foetus, diagnostic et conséquences ;

– les facteurs de risque, encourus durant la grossesse, de développement postnatal de tumeurs neuroépithéliales ;

– la procréation assistée chez les patientes porteuses de lésions hypophysaires.

L’élargissement à ces questions a pour objectif de ne pas laisser dans l’ombre des aspects rapportés dans la littérature, et d’ouvrir des discussions d’ordre nouveau concernant le diagnostic prénatal en particulier.

Incidence et fréquence :

La fréquence de l’association tumeur cérébrale et grossesse est difficile à établir.

L’étude des quelques séries et des cas isolés que l’on trouve dans la littérature permet seulement de savoir que, même si cette fréquence est sous-estimée car beaucoup de cas ne sont pas rapportés, cette association est rare.

Depuis une décennie, les publications de cas ponctuels se font plus nombreuses, mais une seule publication a apporté des données chiffrées nouvelles.

– 1960 : Tarnow réunit 97 cas, en rassemblant quelques cas personnels et ceux documentés dans la littérature.

– Kempers et Miller signalent 16 cas survenus de 1950 à 1963 à la Mayo Clinic.

– 1965 : Toakley trouve six tumeurs cérébrales sur 13 000 femmes ayant accouché au cours des quatre années précédentes.

– 1974 : Carmel évalue à environ 200 le nombre de cas publiés dans la littérature.

– 1978 : Faguer et al relèvent 10 femmes enceintes ayant une tumeur cérébrale sur 10 710 ayant accouché de 1970 à 1977, soit 0,9 ‰.

– 1984 : Haas et al rapportent 10 cas enregistrés au National Cancer Registry pour 359 cancers diagnostiqués chez la femme enceinte, sur plus de 2 millions de naissances, pour un nombre attendu de 26 tumeurs cérébrales.

– 1997 : Isla et al publient sept cas de tumeurs cérébrales (six avec confirmation histologique : deux méningiomes, deux épendymomes, deux astrocytomes de bas grade), entre 1983 et 1995 sur 126 413 grossesses, ce qui pourrait être rapproché de la prévalence générale des tumeurs du système nerveux de 5 à 8/100 000, toutes histologies confondues.

Depuis 1997, la base de données Medline ne permet pas de trouver d’autres séries, mais plusieurs observations isolées ont été publiées dans les revues liées aux méthodes de diagnostic échographique ou en résonance magnétique.

Interactions entre grossesse et tumeur cérébrale :

A – EFFETS DE LA GROSSESSE SUR LES TUMEURS CÉRÉBRALES :

Étant donné la faible incidence de cette situation clinique, il est peu étonnant de constater l’absence de données établies sur les conséquences d’un état gravide sur une tumeur déjà développée, quiescente ou non.

La plupart des publications sont des commentaires spéculatifs, et en aucun cas elles ne font état de faits statistiquement ou scientifiquement établis.

On demeure toujours au niveau du conditionnel, du vraisemblable, du possible.

Il semble bien que la grossesse n’ait en elle-même aucun rôle dans la genèse d’une tumeur cérébrale primitive ; la fréquence relative des différentes variétés histologiques des tumeurs rapportées, hors les métastases de tumeurs trophoblastiques, demeure la même que chez les femmes d’une même tranche d’âge, qu’il y ait ou non grossesse en évolution.

En revanche, tous les auteurs s’accordent pour reconnaître le rôle de l’état gravide sur l’expression clinique des tumeurs cérébrales.

De nombreuses observations font état, chez des femmes présentant une tumeur intracrânienne, essentiellement des méningiomes, de l’installation de troubles neurologiques au cours d’une grossesse, souvent au début du troisième trimestre.

Leur régression, parfois complète, survient au décours de l’accouchement, et, en cas de lésions laissées en place pour des raisons de non-opérabilité, la réapparition des symptômes lors de grossesses ultérieures a aussi été rapportée.

Le mécanisme de ces aggravations symptomatiques liées à l’état gravide n’est pas scientifiquement établi, mais trois facteurs principaux sont régulièrement incriminés ou au moins discutés de façon hypothétique :

– l’accélération de la croissance tumorale ; – la majoration de l’oedème cérébral vasogénique ;

– l’immunotolérance liée à l’état gravide.

1- Accélération de la croissance tumorale :

Les modifications hormonales de la grossesse et la présence de facteurs de croissance circulants pourraient théoriquement rendre compte d’une accélération de la croissance tumorale, mais, en dehors des adénomes à prolactine, aucun travail ne documente cette affirmation : aucune étude de cinétique tumorale, aucune imagerie métabolique ou de résonance magnétique, aucune étude prospective sur cellules gliales in vitro de l’influence du sérum de femmes gravides, aucun cas confirmé de transformation anaplasique d’une lésion gliale bénigne.

Dans les méningiomes, la découverte des récepteurs aux stéroïdes avait ouvert des perspectives physiopathogéniques qui paraissaient pouvoir expliquer à la fois la prédominance de survenue chez les femmes, les cas associés à des néoplasies mammaires et lors de la grossesse, les poussées évolutives de lésions préalablement quiescentes.

De nombreux travaux ont montré que les taux de récepteurs aux oestrogènes étaient trouvés dans un faible pourcentage de tumeurs, et que ceux à la progestérone l’étaient dans 50 %, mais leur rôle oncogénique n’a pas été établi.

La littérature récente rapporte encore des cas isolés, qui font itérativement évoquer un lien de causalité possible entre l’expression clinique de la lésion et l’état gravide :

– Saitoh décrit un cas de croissance rapide au cours de deux grossesses, et lie cette croissance à la présence de récepteurs hormonaux ;

– Juarez Azpilcueta rapporte un cas isolé et fait les mêmes commentaires ;

– Ismail fait état de la révélation au troisième mois de grossesse d’un méningiome de la faulx avec récepteurs positifs à la progestérone ;

– Cioffi signale, sur 122 méningiomes spinaux diagnostiqués entre 1962 et 1994, deux cas révélés au moment de la grossesse ; il suggère le rôle possible d’un mécanisme hormonal dans le développement de ces lésions, mais il n’écarte pas non plus, en raison de la localisation intrarachidienne, la possibilité d’une décompensation par mécanismes hydrodynamiques liés à l’hyperpression veineuse abdominale.

Roelvink, sur les données de la littérature, et Lambe, sur une étude cas-témoins portant sur 2 745 femmes atteintes d’une tumeur cérébrale, ont remis en cause le rôle des hormones stéroïdes dans la croissance des méningiomes. Les essais thérapeutiques par antagonistes hormonaux tels la mifépristone ou le RU 486 n’ont pas été concluants.

2- Majoration de l’oedème cérébral vasogénique :

La majoration de l’oedème cérébral péritumoral et de l’infiltration oedémateuse tumorale est une explication alternative, qui pourrait rendre compte de ces variations du « volume tumoral » en cours de grossesse et de l’expression symptomatique transitoire des lésions.

Cet oedème a été confirmé histologiquement, mais les mécanismes à l’origine restent à préciser : engorgement des vaisseaux sanguins et « hypervascularisation gravidique », rétention hydrosodée et inflation hydrique au niveau de la tumeur, modifications de la perméabilité membranaire maximum au troisième trimestre de grossesse.

3- État d’immunotolérance lié à la grossesse :

Le troisième facteur théorique qui pourrait conduire à attribuer à l’état gravide l’aggravation évolutive d’une tumeur intracrânienne, est l’état d’immunotolérance aux antigènes tissulaires étrangers qui caractérisent la grossesse.

Cette immunotolérance dont bénéficie le foetus est bien établie, et les études d’hétérogreffes de tumeurs ont montré l’influence favorisante de facteurs sériques immunomodulateurs présents en cours de grossesse sur la « prise tumorale ».

Le rôle favorable de la grossesse sur les manifestations cliniques des maladies auto-immunes est une donnée empirique maintenant bien établie.

Les observations, exceptionnelles, d’apparition de métastases systémiques et placentaires de lésions neuroépithéliales primitives, comme dans l’observation de médulloblastome rapportée par Bellezza, font aussi soulever la question du risque potentiel d’une immunotolérance gravidique, libérant les mécanismes supposés de veille immunologique.

A contrario de ces cas remarquables mais ponctuels, les études épidémiologiques apportent le constat que la fréquence de survenue d’une tumeur cérébrale dans une population de femmes enceintes est inférieure à l’incidence attendue dans une population du même âge.

L’hypothèse d’une immunotolérance induite par la grossesse et facilitant la croissance tumorale demeure donc théorique, et sans conséquence pratique actuelle.

B – EFFET DES TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX SUR LA GROSSESSE ET SUR LE FOETUS :

Bien que la tumeur cérébrale n’ait, en elle-même, aucun retentissement direct sur le déroulement de la grossesse, ni sur la qualité, cliniquement décelable, du produit de conception, il n’en reste pas moins que le pronostic maternel et foetal est directement lié à la gravité de la tumeur cérébrale.

Ainsi, Tarnow et de nombreux autres auteurs depuis, retiennent comme facteur pronostique péjoratif l’existence d’une tumeur maligne, ou d’une tumeur infratentorielle, du fait du risque de développement rapide d’une hypertension intracrânienne, mettant en jeu le pronostic vital de la mère, et justifiant des décisions d’interruption de la grossesse.

C – CAS PARTICULIERS DES TUMEURS HYPOPHYSAIRES :

Les interactions grossesse-tumeur hypophysaire sont particulières, du fait de leurs influences hormonales réciproques :

– d’une part, les tumeurs de la région sellaire peuvent être source de stérilité par insuffisance hormonale directe (adénome hypophysaire) ou indirecte (effet compressif) ;

– d’autre part, les modifications hormonales de la grossesse, en particulier l’élévation des oestrogènes, sont ici responsables d’une hypertrophie fonctionnelle de l’hypophyse, plus marquée lors de grossesses renouvelées, par multiplication des cellules à prolactine et hypervascularisation.

Ainsi, la survenue d’un syndrome chiasmatique au cours de la grossesse, sa régression après l’accouchement, puis sa réapparition lors de grossesses ultérieures (phénomène retrouvé dans de nombreuses publications), ont pu être attribuées à cette hypertrophie fonctionnelle réversible de l’hypophyse.

En fait, il semble maintenant bien établi que cette hypertrophie fonctionnelle ne puisse entraîner, à elle seule, une compression du chiasma, en dehors de conditions anatomiques exceptionnelles ; même si l’évolution est régressive au décours de l’accouchement, la survenue d’un syndrome chiasmatique au cours de la grossesse doit faire rechercher une tumeur de la région sellaire.

Des cas d’hypophysite lymphocytaire ont été décrits dans ces circonstances ; ils sont caractérisés par la nature inflammatoire des lésions en histologie, et par leur remarquable régression sous stéroïdes.

D’une façon analogue, chez des femmes porteuses d’un adénome à prolactine méconnu (source classique de stérilité), l’élévation du taux des oestrogènes, liée à la survenue d’une grossesse après induction de l’ovulation par gonadotrophine d’origine humaine (HMG), peut être responsable d’une décompensation aiguë de l’adénome jusque-là quiescent.

Problèmes du diagnostic :

La conduite diagnostique d’une possible tumeur cérébrale chez une femme enceinte s’est notablement simplifiée au cours des dernières années, grâce à l’imagerie par tomodensitométrie (TDM) et surtout par résonance magnétique (IRM).

A – TABLEAUX CLINIQUES :

Une tumeur cérébrale peut s’exprimer cliniquement par trois mécanismes :

– soit par des symptômes liés à l’hypertension intracrânienne induite par le volume tumoral, et à l’oedème périlésionnel ;

– soit par une souffrance focale de l’encéphale, de nature déficitaire ou critique épileptique, d’expression dépendant de la topographie de la lésion ;

– soit par un syndrome général d’asthénie majeure, lenteur idéatoire.

Une grossesse à son début peut comporter un ou plusieurs de ces symptômes, et leur interprétation comme signes révélateurs de tumeur intracrânienne peut occasionnellement être faite avec un certain retard.

– Les vomissements sont très fréquents en début de grossesse.

S’ils sont isolés, au cours du premier trimestre, ils égareront constamment le diagnostic : leur prolongation au-delà du premier trimestre, leur résistance aux traitements symptomatiques, leur association, en règle, à d’autres signes neurologiques feront rechercher une cause figurée. Van Calenbergh rapporte une telle situation de « hyperemesis in pregnancy ».

– La céphalée est le signe clinique initial le plus fréquemment retrouvé dans les tumeurs intracrâniennes.

En début de grossesse, elle sera parfois trop rapidement banalisée ou rapportée à une pathologie migraineuse, éventuellement connue chez la patiente, et dont l’évolution peut être aggravée au cours du premier trimestre de grossesse.

Sa persistance, son intensité, son aggravation progressive et sa bilatéralité feront redresser l’orientation diagnostique.

– Des modifications du caractère, des troubles psychiques et de la vigilance peuvent survenir au cours des états gravides, mais ils restent habituellement minimes.

Plus marqués ou persistant, ils ne doivent pas être sous-estimés.

– Les altérations du champ visuel ne devront pas non plus être trop facilement attribuées à l’augmentation de volume hypophysaire lié à la grossesse, mais bien faire rechercher une tumeur de la région sellaire.

– La survenue de crises épileptiques au cours du troisième trimestre posera le problème diagnostique de crises d’éclampsie.

L’absence des autres signes de toxémie gravidique (hypertension artérielle, oedème, albuminurie) fera redresser le diagnostic.

– Enfin, certains auteurs soulignent la fréquence relative du syndrome d’hypertension intracrânienne bénigne au cours de la grossesse, mais, que ce soit au cours ou en dehors de toute grossesse, ce diagnostic ne sera retenu qu’après avoir éliminé par IRM une thrombophlébite cérébrale.

Au total, le problème du diagnostic de tumeur cérébrale lors d’une grossesse est celui du diagnostic différentiel de symptômes auxquels il convient de donner toute leur valeur et de ne pas banaliser au titre de l’état gravide.

B – MOYENS DIAGNOSTIQUES :

L’IRM constitue l’examen de référence en pathologie cérébrale tumorale, et est parfaitement réalisable durant la grossesse. Actuellement, quel que soit l’âge de la grossesse, tout tableau clinique faisant suspecter une lésion intracrânienne doit conduire à la réalisation rapide d’une IRM.

Cet examen, sans danger connu pour la mère et le foetus, sera répété à quelques semaines d’intervalle, si le premier était normal, alors que le tableau clinique persiste et fait craindre un processus expansif intracrânien.

En règle, l’IRM écarte ou confirme le diagnostic, et donne des indications importantes quant à la nature parenchymateuse ou extracérébrale, bénigne ou maligne, de la tumeur, sur sa topographie et son retentissement sur les structures avoisinantes (effet de masse avec déplacement ou non des structures médianes, dilatation éventuelle des cavités ventriculaires par compression par une tumeur de fosse postérieure).

Les données IRM sont essentielles pour la planification neurochirurgicale.

La TDM cérébrale est également réalisable chez la femme enceinte, avec protection abdominopelvienne par tablier plombé.

Elle constitue un outil diagnostique rapidement disponible dans le cadre de l’urgence.

Le fond d’oeil, qui devrait être systématiquement pratiqué lors de tout examen neurologique, a perdu la place qu’il tenait en neurologie, en raison des difficultés d’interprétation qu’il comporte.

Il pourrait confirmer le syndrome d’hypertension intracrânienne, et révéler des hémorragies rétiniennes dans les tableaux d’éclampsie.

L’électroencéphalogramme (EEG) ne comporte aucun risque, mais il ne conserve que peu d’indications en dehors de la documentation objective de crises focales itératives, de leur contrôle médicamenteux, et du diagnostic différentiel entre processus tumoral et lésions encéphalitiques ou encéphalopathiques, si le contexte clinique oriente vers de telles éventualités.

Prise en charge :

Elle comporte deux aspects, neuro-oncologique et obstétrical, et les décisions concernant l’un et l’autre seront guidées par la recherche du meilleur compromis entre deux objectifs : traiter de façon adéquate la tumeur qui conditionne le pronostic maternel, et assurer une suite favorable à la grossesse jusqu’à la délivrance d’un enfant viable et vis-à-vis duquel les traitements prescrits durant la grossesse n’auront pas eu d’effets iatrogènes compromettant son devenir.

Un algorithme décisionnel complexe peut être proposé, basé sur le stade de la grossesse lors du diagnostic de tumeur, sur la nature et la topographie lésionnelle, sur les conséquences cliniques des symptômes liés à la tumeur, et sur la place de la grossesse dans le processus existentiel de la mère et du couple.

Aussi, l’application de cet algorithme dépendra-t-elle pour une grande part des options parentales, de ce que la patiente et son entourage auront saisi des divers aspects du problème médical et de son pronostic.

A – RÈGLES GÉNÉRALES :

Prise en charge de la tumeur :

Elle sera double : symptomatique et oncologique.

* Traitements symptomatiques :

+ Crises comitiales :

La survenue de crises comitiales justifie la mise en route d’un traitement antiépileptique au long cours.

Les médicaments antiépileptiques ont été incriminés dans la survenue de malformations chez le nouveau-né, en particulier syndromes dysraphiques étendus ou limités : fentes labiales et/ou palatines, malformations cardiaques, malformations du tube neural.

Le niveau de risque d’un état de mal ou de crises répétées est plus élevé pour l’enfant que celui lié au traitement antiépileptique.

Il convient donc de prescrire chez la femme enceinte le traitement nécessaire et suffisant, de préférence en monothérapie, aux doses minimales efficaces en s’aidant des dosages plasmatiques des molécules qui le permettent.

Le recours à des médicaments sans conséquences tératogènes connues est préférable et actuellement possible, étant donné l’élargissement de la pharmacopée antiépileptique.

Les molécules le plus souvent utilisées seront le clobazam (Urbanyl), la carbamazépine (Tégrétol), l’oxcarbazépine (Trileptal), la lamotrigine (Lamictal), le topiramate (Epitomax). Une supplémentation en acide folique est conseillée de façon systématique.

Par ailleurs, le risque de syndrome hémorragique du nouveau-né de mère traitée par barbituriques ou hydantoïnes, sera prévenu par la prescription de vitamine K1 en fin de grossesse et lors du travail. Un état de mal épileptique focal devra être traité selon le protocole habituel, en gardant à l’esprit la plus grande dangerosité de la prolongation des crises, par rapport aux faibles risques de complications foetales liées aux traitements médicamenteux ponctuels.

Non contrôlé par les thérapeutiques habituelles mises en route en urgence, l’état de mal pourra conduire à une interruption thérapeutique de grossesse.

+ Hypertension intracrânienne :

Le mécanisme de l’hypertension intracrânienne devra être reconnu en urgence par l’imagerie : hydrocéphalie par blocage sur les voies du liquide céphalorachidien (LCR), dont le tableau ne répond pas aux antioedémateux et qui impose la mise en place d’une dérivation ventriculaire externe, avant éventuelle résection ; ou, effet de masse lié directement à la tumeur et à l’oedème vasogénique, qui doit conduire rapidement à un geste décompressif direct sur la lésion chaque fois que cela est réalisable, et à l’instauration des thérapeutiques antioedémateuses cérébrales classiques : corticoïdes à doses suffisantes (méthylprednisolone intraveineuse 60-120 mg 1 jour sur 2 ou Médrolt 16 per os).

Devant un tableau d’hypertension intracrânienne sévère traduisant une évolution rapide de la tumeur, la conduite à tenir vis-à-vis de la grossesse sera fonction de son stade d’avancement.

* Traitement de la tumeur :

+ Attitudes générales :

En théorie, les indications thérapeutiques vis-à-vis de la tumeur cérébrale sont les mêmes que celles posées en dehors de toute grossesse : les progrès réalisés en neurochirurgie et en anesthésie rendent possible une intervention neurochirurgicale quel que soit l’âge de la grossesse, sans effet nocif sur son déroulement ou sur le foetus.

Les indications seront nuancées par le siège, et l’histologie suggérée par l’IRM.

La tendance est de différer la neurochirurgie à la période du post-partum si cela est possible, ou au moins jusqu’à la possibilité d’accouchement naturel d’un foetus viable (24 semaines).

De même, une radiothérapie cérébrale peut être conduite au cours de la grossesse, sans risque foetal notable.

Le retentissement foetal d’une irradiation encéphalique chez la femme enceinte peut être inférieur à 0,10 Gy (0,03 à 0,06 Gy).

Une telle irradiation pratiquée après la quatrième semaine entraîne une augmentation minime du risque ultérieur de leucémie chez l’enfant.

Une méthode d’estimation de la dose d’irradiation foetale lors d’une irradiation de l’encéphale a été proposée et un protocole d’irradiation encéphalique a été rapporté, permettant de réduire l’irradiation foetale à moins de 0,03 Gy, dose totale.

En pratique, chaque cas pose un problème particulier, mais dans l’ensemble, les attitudes actuelles sont plutôt interventionnistes visà- vis de la tumeur cérébrale, et plutôt conservatrices quant à la grossesse.

+ Orientations dues à l’histologie suspectée radiologiquement :

– Méningiomes supratentoriels.

Pour les tumeurs extraparenchymateuses supratentorielles évoquant une lésion histologiquement bénigne, bien limitée comme un méningiome, certains auteurs préconisent, sous réserve d’une surveillance rigoureuse, l’abstention jusqu’à l’accouchement.

Ce n’est qu’après et dans un délai variable (de 1 à 6 semaines) que l’intervention pourrait être au mieux réalisée, lorsque l’hypervascularisation et l’oedème liés à la grossesse auront régressé.

Toutefois, la survenue d’une poussée évolutive, marquée par l’installation d’un tableau d’hypertension intracrânienne aiguë ou par l’aggravation rapide d’un tableau neurologique focal, peut précipiter le moment de cette intervention neurochirurgicale.

Aussi, pour certains auteurs, le caractère imprévisible de l’évolution, les risques majorés que comporterait une chirurgie réalisée en urgence, le risque opératoire actuellement devenu faible pour la mère et quasiment nul pour l’enfant, plaident en faveur d’une intervention neurochirurgicale d’emblée, comme chez une patiente non gravide.

– Neurinomes ou méningiomes de la fosse postérieure.

Pour les tumeurs extraparenchymateuses sous-tentorielles (neurinomes le plus souvent, méningiomes parfois), l’indication opératoire paraît ici formelle, à partir du moment où l’état gravide est retenu comme l’agent pathogénique de l’expression clinique de la lésion, et comporte le risque évolutif d’une hypertension intracrânienne de haute gravité au niveau de la fosse postérieure.

S’il existe une hydrocéphalie par blocage, le geste opératoire sur la tumeur sera parfois précédé d’une dérivation externe du LCR.

En dehors de cette situation d’urgence, l’intervention sera différée après l’accouchement.

Dans la maladie de Recklinghausen, la grossesse peut entraîner l’apparition de nouvelles tumeurs ou une poussée évolutive de lésions déjà connues.

– Hémangioblastomes et tumeurs vasculaires.

Plusieurs publications font état d’une augmentation de la taille de la tumeur, documentée en radiologie et sur la symptomatologie clinique en cours de grossesse.

– Tumeurs gliales malignes primitives.

Le pronostic de ces tumeurs est dans tous les cas très réservé, et peut être aggravé par la grossesse.

Les décisions sont d’autant plus difficiles qu’elles doivent souvent se prendre sur les seules données radiologiques qui, bien que fortement évocatrices, ne permettent pas de diagnostic de certitude.

– Au cours du premier trimestre, tous les auteurs s’accordent pour conseiller l’interruption de grossesse ; l’attitude thérapeutique vis-àvis de la tumeur elle-même devient alors identique à celle prise en dehors de toute grossesse : si possible, exérèse neurochirurgicale optimale ou au moins partielle ; sinon, biopsie stéréotaxique pour confirmation histologique.

Le temps neurochirurgical sera suivi de radiothérapie ou de traitements combinés avec chimiothérapie adjuvante ou néoadjuvante suivant les protocoles en cours dans l’institution.

Si la patiente et son entourage désirent maintenir la grossesse en dépit des informations objectives qui leur auront été fournies sur le haut grade de la lésion et son histoire naturelle, seules les thérapeutiques symptomatiques seront utilisées. Un suivi très régulier du développement foetal sera assuré.

Toute chimiothérapie sera proscrite ; et la radiothérapie sera, dans la mesure du possible, différée jusqu’au second trimestre.

– Lorsque le diagnostic intervient au début ou en cours du deuxième trimestre, ce qui est le cas le plus fréquent, les difficultés posées par l’interruption de grossesse à ce stade font suggérer une attitude conservatrice vis-à-vis de la grossesse (mais cette attitude doit être discutée en fonction de chaque cas).

Les interventions neurochirurgicales ou les protocoles de radiothérapie pourront être pratiqués en les adaptant à l’état gravide ; la chimiothérapie pourra être discutée en fonction du bénéfice objectif attendu et des risques pour l’enfant, qui dépendent des agents utilisés et de leurs coefficients de passage placentaire (les questions de la responsabilité décisionnelle du maintien de la grossesse devront être abordées dans le contexte des récentes jurisprudences concernant les droits de l’enfant et les éventuels préjudices subis durant sa période prénatale).

– Dès que les critères de maturité foetale sont présents (lorsque le stade de maturité du parenchyme pulmonaire peut assurer une viabilité du foetus, vers la 24e semaine), l’accouchement par voie basse ou par césarienne devra être réalisé avant tout traitement de la tumeur.

L’accouchement spontané par voie naturelle reste préférable, en l’absence de signes de souffrance foetale, mais une césarienne première peut être conseillée, suivie rapidement du traitement habituel de la tumeur.

– Tumeurs de bas grade non chirurgicales, du fait de leur caractère infiltrant et/ou de leur topographie, mais sans prise de contraste au scanner.

Ces tumeurs évoquent radiologiquement un gliome de bas grade : l’IRM et la spectrographie IRM permettent une approche suffisante de la nature de la lésion pour surseoir tout geste biopsique durant la grossesse. Une simple surveillance sera nécessaire, habituellement associée à un traitement de prévention des crises.

Dans ces pathologies de bas grade, il est possible que la survenue des crises qui conduisent au diagnostic soit le résultat d’un abaissement du seuil épileptogène lié à la grossesse, sans que cela ait la signification d’une progression lésionnelle.

Une simple surveillance est donc de mise.

– Adénomes hypophysaires.

Les adénomes à prolactine méconnus peuvent se décompenser de façon parfois aiguë, lorsque survient une grossesse induite par stimulation de l’ovulation.

Cette décompensation peut conduire en urgence à la réalisation d’une hypophysectomie, qui ne paraît pas avoir d’influence néfaste ni sur le cours de la grossesse, ni sur sa conclusion, sauf peut-être par la survenue de problèmes hémorragiques au moment de la délivrance.

Les auteurs insistent surtout sur la nécessité d’une surveillance radiologique étroite de la selle turcique en cas d’aménorrhée secondaire et, après échec des inducteurs à mécanisme d’action centrale, avant toute tentative thérapeutique par les gonadotrophines humaines.

Par ailleurs, des grossesses ont été rapportées chez des patientes sous traitement par bromocriptine pour adénome à prolactine, en dehors de toute induction de l’ovulation ; ces cas nécessitent une surveillance radiologique de la région hypophysaire.

Aucun effet tératogène n’a été rapporté à la bromocriptine.

Quoique rares, quelques observations ont étudié les risques encourus pour la lésion cérébrale et pour l’enfant chez une femme traitée par octréotide pour adénome avec acromégalie. Les éléments de réponse semblent rassurants, quoiqu’il ne s’agisse que de cas ponctuels.

B – PROBLÈME OBSTÉTRICAL :

1- Indications des interruptions thérapeutiques de grossesse :

Pour la plupart des auteurs, les indications d’une interruption thérapeutique de grossesse sont rares en raison de l’amélioration des anesthésies, des traitements neurochirurgicaux durant la grossesse, et de la prise en charge des prématurés.

L’arrêt de la grossesse durant le premier semestre pourra être proposé dans les circonstances suivantes :

– en cas de tumeur maligne découverte au premier trimestre, en particulier si elle est jugée inopérable.

En effet, non opérées, non traitées, ces tumeurs entraînent habituellement la mort de la mère avant que l’enfant soit viable. L’interruption de grossesse ne modifie pas réellement le pronostic mais autorise le traitement « optimal » de la mère ;

– en cas d’hypertension intracrânienne installée dès le premier trimestre, qu’elle soit en rapport avec une tumeur maligne, ou bien avec une tumeur bénigne particulièrement expansive non opérable ou située dans la fosse postérieure ;

– devant un état de mal comitial prolongé ou répétitif qui ne répond pas rapidement aux thérapeutiques spécifiques mises en route en urgence et se prolonge, avec risque d’anoxie foetale.

2- Modalités de l’accouchement :

Il est établi que les contractions utérines lors du travail ne retentissent pas sur la pression du LCR, et donc sur la pression intracrânienne.

En revanche, cette dernière est majorée par les contractions des muscles squelettiques en rapport avec la douleur et l’agitation ; elle est également augmentée par les efforts expulsifs de la deuxième partie du travail.

Pour toutes ces raisons, chaque fois que possible, l’accouchement spontané se fera par les voies naturelles, forceps bas sur tête engagée pour éviter les efforts expulsifs, aidé d’une anesthésie régionale péridurale de niveau D 10.

En dehors des indications purement obstétricales, la césarienne ne conserve que peu d’indications (sauvetage foetal en cas d’état maternel gravissime ; survenue d’une complication aiguë telle qu’une hypertension intracrânienne, près du terme, si les critères de maturité pulmonaire foetale sont présents.

L’extraction de l’enfant par césarienne précède immédiatement le geste neurochirurgical. Certains auteurs conservent à la césarienne des indications plus larges : primiparité, intervention neurochirurgicale datant de moins de 2 mois ou tumeur maligne.

Au total, les problèmes diagnostiques et thérapeutiques de l’association tumeur cérébrale et grossesse se posent en des termes très différents de ce qu’ils étaient avant l’imagerie IRM, les progrès récents de l’anesthésiologie et des techniques neurochirurgicales, et le développement des méthodes d’accouchement avec anesthésie locorégionale.

Ces modifications sont suffisamment radicales pour constater que, mis à part certains cas exceptionnels, les stratégies diagnostiques et thérapeutiques adoptées en cas d’association tumeur cérébrale et grossesse, ne sont pas très différentes de celles qui seraient de mise vis-à-vis d’une tumeur cérébrale et d’une grossesse, prises séparément.

Pathologies neuro-oncologiques liées à l’état gravide :

Dans le souci d’aborder de façon exhaustive les problèmes de neurooncologie en rapport avec l’état gravide, il convient de traiter quatre aspects particuliers :

– les métastases intracrâniennes des tumeurs trophoblastiques ;

– les tumeurs du système nerveux foetal diagnostiquées en cours de grossesse : tumeurs congénitales ;

– les facteurs de risque de développement de tumeur chez l’enfant en raison d’événements survenus durant sa vie embryonnaire et foetale ;

– la prise en charge des tableaux d’hypertension intracrânienne non tumorale ou « pseudo tumor cerebri ».

A – MÉTASTASES DES TUMEURS TROPHOBLASTIQUES :

Les tumeurs trophoblastiques se développent à partir des tissus placentaires ; elles sont rares (1/40 000 grossesses) et se classent sur le plan cellulaire en mode hydatiforme, chorioadénome, choriocarcinome ; les deux premiers demeurant des pathologies locales intra-utérines de bon pronostic.

Les choriocarcinomes, en revanche, se classent sur le plan carcinologique sur la base de leur extension locale et métastatique (20 % de métastases cérébrales).

Les taux de bêta-hCG (human chorionic gonadotrophin) sanguins et urinaires servent au diagnostic et à l’évaluation de la réponse thérapeutique ; ils sont corrélés au pronostic.

La survenue de métastases cérébrales place les patientes dans le groupe de mauvais pronostic « ultra high risk » selon le système de score pronostique de l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) (1983).

Leur prise en charge s’apparente alors à celle des tumeurs malignes primitives du système nerveux.

L’irradiation encéphalique globale avec surdosage conformationnel, associée à une polychimiothérapie systémique et aux traitements des autres localisations lésionnelles, permet d’obtenir des taux de réponses élevés, de durée variable.

Les protocoles de polychimiothérapie nécessitent une prise en charge en milieu cancérologique spécialisé : ifosfamide + carboplatine + étoposide + greffe de moelle autologue ; EMA-CO (alternance hebdomadaire de : étoposide + méthotrexate + dactinomycine/ cyclophosphamide + vincristine), APE (dactinomycine + cisplatine + étoposide), PEBA (cisplatine + étoposide + bléomycine + adriamycine).

Une survie à 5 ans de l’ordre de 90 % est rapportée, à la condition que les lésions extracrâniennes soient contrôlées. Des cas de grossesse viable associée à un choriocarcinome avec métastases cérébrales ont été décrits.

Dans ce cadre, la chimiothérapie peut permettre la survie de la mère et de l’enfant.

B – TUMEURS CÉRÉBRALES CONGÉNITALES CHEZ LE FOETUS :

La survenue d’une tumeur cérébrale chez le foetus durant la grossesse est une éventualité rare et particulièrement sombre.

Dans ce secteur très étroit de la pathologie (celui des tumeurs foetales du système nerveux), une avancée importante a été faite, en raison des progrès des diagnostics échographiques prénataux depuis deux décennies.

La publication de Rickert fait le point sur cette question, et envisage les diverses histologies possibles.

Elle se fonde sur l’analyse des cas publiés dans la littérature et rassemblés par analyse Medline dans les journaux d’obstétrique et d’échographie de 1979 à 1998, et n’en retrouve que 89.

De nombreux cas ne sont manifestement pas rapportés, qu’ils aient donné lieu à une interruption de grossesse ou à un mort-né.

Ces cas de tumeurs congénitales ont essentiellement un intérêt théorique qu’aucun auteur n’a pu conduire au-delà de la simple description histopathologique.

La moitié de ces tumeurs (53,9 %) sont des tératomes qui peuvent aller jusqu’à une organisation organoïde de type foetus in foetu.

Les autres tumeurs se répartissent selon la classification OMS : glioblastomes (14,6 %), papillomes des plexus choroïdes (7,9 %), craniopharyngiomes (5,6 %), lipomes (9 %).

Les nouvelles techniques d’analyse du génome devraient être appliquées sur ces cas, dont la dispersion entre les diverses spécialités médicales rend une analyse systématique aléatoire, en dehors d’une action concertée.

C – FACTEURS DE RISQUE DE DÉVELOPPEMENT PRÉCOCE DE TUMEUR CÉRÉBRALE LIÉS À DES ÉVÉNEMENTS SURVENUS PENDANT LA GROSSESSE :

Une préoccupation actuelle des épidémiologistes et des responsables de santé publique est l’individualisation des facteurs de risque susceptibles d’intervenir dans le déterminisme d’une pathologie du foetus ou du nouveau-né.

La recherche de tels facteurs à l’origine de tumeurs cérébrales du foetus ou du nouveau-né dans les semaines, mois ou années suivant la naissance, a conduit à incriminer successivement le rôle possible du tabac, des taux de nitrite et nitrates alimentaires, et l’exposition à des champs électromagnétiques.

La variabilité des méthodologies utilisées et surtout des questions posées rend l’interprétation de la littérature difficile, mais dans l’ensemble rassurante.

Le risque lié à l’exposition à des champs magnétiques avant la conception ou durant la grossesse a été récemment largement étudié.

La méta-analyse de Kheifets confirme qu’aucune association n’a été retrouvée entre le développement d’une tumeur cérébrale et l’exposition maternelle.

Le rôle du tabac, qu’il soit le fait d’un tabagisme actif de la mère ou passif de l’environnement, a été incriminé dans de nombreux effets négatifs sur le développement foetal ; Sasco et al ont fait une analyse exhaustive de la littérature et concluaient par des conseils de prudence, plus sur le principe que sur des données scientifiquement établies.

L’étude de Hu et al cherchant à prouver l’effet possible des habitudes parentales dans l’étiologie de tumeurs cérébrales a été négative.

Concernant le rôle de la consommation d’aliments contenant des taux élevés de nitrites et nitrates (viandes fumées) Pogoda établit une augmentation du risque de développement de tumeurs du système nerveux, liée à la consommation de viande fumée contenant des taux élevés de nitrites.

Une étude semblable a été conduite sur les eaux de puits mais n’a pas été concluante en raison de biais méthodologiques, et en particulier le délai entre la grossesse et le moment de l’analyse de l’eau.

Au total, de tous les risques pré- et néonataux suspectés, aucune étude ne vient apporter des données épidémiologiquement solides.

Au contraire, elles confortent les conclusions de l’étude cas-témoins de Schuz et al qui, de 1993 à 1997, a porté sur 466 tumeurs cérébrales de l’enfant et 2 458 témoins ; elle conclut que les facteurs de risque de la période prénatale et néonatale ne jouent qu’un rôle mineur dans le développement de tumeurs du système nerveux.

Prise en charge des tableaux de « pseudo tumor cerebri » :

Ces circonstances sont rares.

Le diagnostic est un diagnostic d’élimination sur la base des critères de Dandy : tableau clinique d’hypertension intracrânienne, pas d’anomalies radiologiques en dehors d’une selle turcique vide, une pression de LCR supérieure à 250 mm d’eau, pas d’anomalies cytochimiques du LCR.

Une IRM devra être pratiquée pour éliminer une thrombophlébite cérébrale.

Ce tableau survient plus fréquemment chez la femme, et a été associé à l’obésité, à des traitements antibiotiques (tétracyclines), hormonaux, vitaminiques A, à des anémies ferriprives, ou à la prise de traitements antalgiques au long cours.

Dans de nombreux cas, la pathogénie précise demeurera méconnue.

En cas de grossesse, le traitement est purement symptomatique, et n’est entrepris que si la symptomatologie est menaçante, en particulier sur le plan visuel : méthylprednisolone (60-180 mg/j).

Des gestes de décompression des voies visuelles par ouverture de la gaine du nerf optique peuvent être la seule solution de sauvetage de la fonction visuelle, mais dans l’ensemble, le pronostic des syndrômes d’hypertension intracrânienne bénigne durant la grossesse est bon.

Conclusion :

Les données rapportées dans la littérature sont concordantes : la survenue de tumeurs cérébrales durant la grossesse est une circonstance rare ; la grossesse n’est pas un facteur de risque de développement de tumeurs cérébrales.

Quand cette coïncidence survient, sa gravité est variable et dépend de nombreux facteurs : le moment de survenue de l’expression clinique de la lésion cérébrale : début ou fin de grossesse ; la nature de la tumeur, bénigne ou maligne, suspectée sur les données neuroradiologiques ; sa localisation parenchymateuse ou extraparenchymateuse, supra- ou infratentorielle ; son opérabilité.

La prise en charge de la patiente devra donc prendre en compte l’ensemble des aspects concernant la mère et le foetus : maintien de la grossesse ou interruption thérapeutique ?

Résection neurochirurgicale ou maintien in situ ?

Traitement radiothérapique de la tumeur avec protection foetale ou attente jusqu’à la possibilité d’une naissance d’un prématuré viable ?

Au-delà de l’adaptation à la femme enceinte des traitements symptomatiques habituels des tumeurs, le clinicien est ainsi confronté à des décisions difficiles.

La littérature permet d’esquisser des attitudes générales appropriées aux principales situations cliniques tout en soulignant le caractère « cas par cas » et éminemment partagé que doivent avoir ces décisions qui impliquent des questions existentielles et juridiques majeures, et dans lesquelles il peut s’avérer approprié de faire intervenir les comités d’éthique institutionnels.

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