Traumatismes cranioencéphaliques

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Introduction :

Dans les pays de l’Ouest (Europe et continent américain), les traumatismes de tous ordres représentent la première cause de mortalité avant 45 ans.

Traumatismes cranioencéphaliquesEnviron la moitié des décès de causes traumatiques sont dus aux traumatismes cranioencéphaliques.

Ils constituent la plus fréquente des affections du système nerveux.

Dans l’étude de la Trauma Coma Data Bank portant sur 1 030 patients atteints de traumatismes cranioencéphaliques graves, 121 sont d’emblée en état de mort cérébrale, 163 sont victimes de traumatisme balistique avec 88 % de mortalité.

La mortalité calculée sur le nombre de patients restant est de 36 % à 6 mois, 5 % restent végétatifs, 16 % ont des séquelles sévères.

Seulement 43 % ont une bonne récupération ou des séquelles mineures.

Le coût de la prise en charge des traumatismes cranioencéphaliques dans l’armée américaine en temps de paix, en 1992, a été de 43 millions de dollars.

Il s’agit donc d’un véritable phénomène économique et social touchant des sujets jeunes.

L’amélioration de la prise en charge, la recherche de nouvelles molécules à visée thérapeutique sont actuellement des priorités, mais de gros efforts doivent être fournis par les pouvoirs publics pour améliorer et développer la prévention.

Il en va de même pour la prise en charge des états végétatifs et des séquelles lourdes.

Physiopathologie, mécanismes lésionnels :

La gravité d’un traumatisme cranioencéphalique va dépendre de nombreux facteurs tant physiques violence du traumatisme, onde de choc de l’accident, nature de l’agent causal, plaies par armes à feu qu’anatomiques, selon la localisation précise du traumatisme, non seulement au niveau du point d’impact, mais bien plus souvent en profondeur, selon les espaces anatomiques où vont se produire les lésions.

C’est ainsi que l’on distinguera des lésions des espaces cutanés et sous-cutanés, des lésions osseuses et durales, des lésions extradurales, sous-durales, sous-arachnoïdiennes, cortico-sous-corticales, enfin des lésions de la substance blanche.

Dans l’immense majorité des cas de traumatismes graves, ces lésions ne sont pas isolées, mais diversement associées, la triade impact cutané/fracture de la voûte/développement d’un hématome extradural en représentant, sinon l’exemple le plus fréquent, du moins le plus caractéristique.

A – Lésions cutanées et sous-cutanées :

Elles sont toujours présentes au point d’impact du traumatisme.

D’expression variable, elles vont de la simple ecchymose sans effraction cutanée aux plaies cutanées les plus diverses : linéaires, en étoile, déchiquetées, avec perte de substance…

Ce sont ces lésions cutanées et souscutanées qui, notamment chez l’enfant, peuvent être responsables d’une spoliation sanguine importante.

B – Lésions osseuses et durales :

L’os représente le second rempart au traumatisme.

Sa résistance n’est pas homogène et il existe des zones de faiblesse tels que l’écaille temporale ou occipitale, les sinus frontaux.

Le choc direct peut être responsable d’une fracture linéaire ou comminutive, ou encore d’une embarrure (enfoncement d’un fragment de voûte vers l’intérieur du crâne), en fonction de la nature de l’agent vulnérant ou de l’énergie développée par le traumatisme.

Certaines lésions osseuses exposent à des lésions durales sous-jacentes : embarrures, fractures comminutives, fractures de la base du crâne, réalisant alors des brèches ostéoméningées.

Celles-ci peuvent être la source de problèmes septiques secondaires lorsqu’elles réalisent des fractures ouvertes : soit par plaie cutanée en regard, soit par communication avec les cavités pneumatiques de la face lors des fractures de la base.

C – Lésions extradurales :

L’hématome extradural (HED) se constitue à partir d’un saignement entre l’os et la dure-mère.

Il est d’origine artérielle dans la moitié des cas, par lésion de l’artère méningée moyenne ou de ses branches sous-jacentes à une fracture de la voûte. Dans 20 % des cas, il est d’origine veineuse par plaie d’un sinus dural.

Dans 20 % des cas, il est d’origine diploïque, au niveau de la fracture.

Enfin, dans 10 % des cas, on ne retrouve qu’un saignement diffus, en « nappe », dû au décollement de la dure-mère provoqué par l’onde de choc, sans qu’il y ait de fracture ou de lésion dure-mérienne, artérielle ou veineuse.

Le saignement entraîne la formation de caillots dont l’accroissement de volume contribuera à augmenter le décollement de la dure-mère et à venir comprimer le parenchyme cérébral sous-jacent, lorsque le volume de l’hématome sera important.

Ce développement progressif est responsable de la symptomatologie retardée de cette lésion et caractérise l’« intervalle libre » pendant lequel le cerveau n’est pas encore suffisamment comprimé pour exprimer sa souffrance.

D – Lésions sous-durales :

Elles sont dues au développement d’un hématome dans l’espace sous-dural par arrachement d’une veine corticale passant en pont dans cet espace, ou, plus rarement, par plaie d’une artère corticale dont le saignement franchit l’espace sous-arachnoïdien pour atteindre l’espace sous-dural.

Cet hématome est très rapidement progressif, responsable de tableaux cliniques graves.

Il est rarement isolé, associé à des lésions corticales et à un oedème cérébral qui contribue à aggraver l’hypertension intracrânienne, limitant par là même le développement de l’hématome, d’épaisseur parfois modeste, au regard de la gravité des signes cliniques.

Plus rarement, l’espace sous-dural peut être le siège du développement d’un hydrome par l’effraction de l’espace sous-arachnoïdien et l’issue de liquide cérébrospinal (LCS) dans cet espace virtuel.

E – Lésions sous-arachnoïdiennes :

Elles sont représentées par des hémorragies souvent diffuses, d’origine habituellement veineuse.

Elles exposent au risque d’hydrocéphalie aiguë, ou plus souvent retardée par trouble de la résorption du LCS, au niveau des granulations de Pacchioni ou de l’orifice inférieur du quatrième ventricule en cas d’hémorragie intraventriculaire.

F – Lésions cortico-sous-corticales :

Elles sont fréquentes dans les traumatismes sans fracture : l’absence de fracture témoigne de la transmission de la quasi-totalité de l’énergie cinétique à l’encéphale.

Elles siègent en regard de l’impact ou à son opposé, résultant de l’écrasement de l’encéphale sur les structures osseuses.

Il s’agit de lésions hémorragiques délabrantes nécrotiques, génératrices d’oedème cérébral et d’hématomes intracérébraux secondaires générés par l’hypoxie, l’hypercapnie et la congestion veineuse, qui favorisent la diapédèse au sein de tissus délabrés.

Ces lésions peuvent également se rencontrer lors de fractures ouvertes avec grands délabrements cutanés, osseux, méningés et cérébraux, réalisant les plaies craniocérébrales.

G – Lésions de la substance blanche :

Il s’agit de lésions diffuses liées aux différences de densité et de cytoarchitectonie des structures encéphaliques, qui engendrent des vitesses de déplacement variables au cours de la propagation de l’onde de choc.

Les lésions microscopiques au niveau de la substance blanche sont principalement marquées par des ruptures axonales.

Elles réalisent de petites contusions hémorragiques diffuses et, surtout, un oedème cérébral qui gêne le retour veineux, créant un cercle vicieux qui en majore les conséquences.

H – Transport et orientation des traumatisés :

Depuis l’avènement des services mobiles d’urgence et de réanimation, et leur généralisation à l’ensemble des départements français, on assiste à une médicalisation précoce de la prise en charge des traumatismes crâniens sur les lieux de l’accident, du travail ou à domicile.

Il faut d’emblée insister sur le fait que les médecins transporteurs seront les premiers à effectuer un examen qui servira de référence, et qu’ils pourront interroger l’entourage sur les circonstances du traumatisme et sur l’état de la vigilance dans les premiers instants.

Cet examen neurologique sera sommaire :

– existence d’une perte de connaissance et sa durée ;

– état actuel de la conscience avec notification du score de Glasgow (Glasgow coma score : GCS) ;

– existence d’un déficit moteur ;

– état des pupilles.

Ces quatre points fondamentaux seront consignés sur la fiche de transport avec l’heure précise de leur constatation.

S’il s’agit d’un polytraumatisé, cet examen neurologique simple, mais fondamental, ne retarde en aucun cas les gestes vitaux nécessaires à son conditionnement, le ramassage répondant à des critères stéréotypés :

– immobilisation avec respect de l’axe rachidien ;

– maintien d’une fonction ventilatoire efficace (intubation, ventilation, drainage d’épanchements pleuraux…) ;

– maintien d’une efficacité circulatoire par contrôle des hémorragies externes et remplissage pour compensation des pertes sanguines. Trois possibilités d’orientation du blessé s’offriront alors :

– le traumatisme crânien comateux (GCS < 7), ou obnubilé (7 < GCS < 11), ou le traumatisé entrant dans le cadre d’un polytraumatisme, devra être adressé d’emblée dans un centre spécialisé multidisciplinaire incluant un service de neurochirurgie ;

– le traumatisé conscient, mais ayant présenté une perte de connaissance initiale certaine ou très probable, sera orienté vers un centre hospitalier disposant d’un scanner, avec ou sans service de neurochirurgie ;

– le traumatisé bénin sera dirigé vers n’importe quel centre hospitalier où examen clinique et surveillance régulière seront possibles et assurés.

Évaluation clinique :

Le traumatisé crânien est arrivé aux urgences.

L’évaluation clinique sera menée de façon bien différente en fonction des situations auxquelles on se trouve confronté.

Nous l’envisagerons ici la plus exhaustive possible, en sachant qu’elle s’adresse aussi bien au traumatisé conscient qu’au polytraumatisé en coma profond, cela dans le but d’y trouver, pour chaque cas, les éléments nécessaires au diagnostic lésionnel, aux arbres de décisions thérapeutiques, aux évaluations pronostiques.

A – Interrogatoire :

Il reprend toute l’histoire à son début en reconstituant l’ensemble des événements survenus depuis le traumatisme, à partir de l’interrogatoire du patient ou de son entourage et de la consultation des fiches de transport.

On appréciera ainsi l’état général du patient avant le traumatisme :

– prises médicamenteuses éventuelles (anticoagulants, anticomitiaux) ;

– antécédents médicaux (diabète, hypertension artérielle [HTA], insuffisance cardiaque ou respiratoire, intoxications chroniques) ;

– antécédents chirurgicaux (séquelles fonctionnelles au niveau des membres, séquelles neurologiques) ;

– les circonstances précises de survenue du traumatisme ;

– l’existence d’une perte de connaissance initiale ou d’une amnésie des faits ;

– les plaintes fonctionnelles qui orientent vers l’existence de lésions périphériques associées ;

– et, surtout, la notion fondamentale d’une aggravation clinique depuis le traumatisme.

B – Examen clinique :

1- Généralités :

L’examen neurologique sera précédé d’un examen général en insistant d’emblée sur la recherche de troubles hémodynamiques et ventilatoires.

Un traumatisme crânien isolé n’est jamais, chez l’adulte, responsable d’un choc hypovolémique ; en revanche, une plaie du cuir chevelu peut, à elle seule, occasionner une spoliation sanguine importante, notamment chez l’enfant et surtout le nourrisson.

La constatation d’une instabilité tensionnelle, d’une tachycardie, d’une pâleur doit obligatoirement faire rechercher une lésion viscérale (hémothorax, hémopéritoine, fracture du rein, lésion des gros vaisseaux) ou l’existence de lésions périphériques uniques ou multiples (bassin, fémur…).

Les explorations complémentaires seront, bien sûr, guidées par la clinique.

Il faut cependant insister sur la nécessité d’éliminer au moindre doute une lésion intra-abdominale par une échographie.

Les troubles ventilatoires seront corrigés sans délai, car le maintien d’une hématose normale représente la garantie d’une bonne oxygénation cérébrale.

Les traumatismes faciaux associés aux traumatismes crâniens sont parfois responsables d’obstruction des voies aériennes supérieures.

Si une ventilation artificielle avec sédation s’avère nécessaire, pour des lésions thoraciques ou, préventivement, devant un coma profond, il est impératif d’effectuer au préalable un examen neurologique rapide.

Enfin, tout traumatisé crânien doit être considéré comme un traumatisé du rachis cervical potentiel.

Toutes les précautions requises pour la mobilisation du patient seront prises jusqu’à ce que les radiographies visualisant l’ensemble du rachis, de C1 à C7, soient effectuées.

Avant l’examen neurologique, l’inspection et surtout la palpation du crâne permettent de déterminer le lieu de l’impact.

Si le patient est conscient, la palpation du crâne au niveau d’une fracture reproduira une douleur exquise.

L’importance de l’hématome sous-cutané fait parfois poser le diagnostic d’embarrure en percevant un ressaut. Son diagnostic est, en fait, très difficile cliniquement.

Un écoulement de LCS à type de rhinorrhée ou d’otorrhée sera facilement diagnostiqué.

L’issue de matière cérébrale, généralement intégrée dans un état clinique dramatique, est malheureusement facilement décelable cliniquement.

2- Examen neurologique :

Il comporte l’examen de la conscience, la recherche de signes de localisation et la reconnaissance des troubles végétatifs.

* Étude de la vigilance :

Le Glasgow coma score (GCS) est de plus en plus utilisé depuis une vingtaine d’années.

Il est basé sur la quantification des données de la définition du coma par l’International Data Bank en 1976 : absence d’ouverture des yeux (E), absence d’expression verbale (V), absence de réponse motrice (M), aux ordres simples ou à la stimulation nociceptive.

Il s’agit d’un score de vigilance qui ne doit pas tenir compte d’un déficit moteur éventuel.

La réponse motrice sera, dans ce cas, quantifiée sur les membres non paralysés.

Le GCS a l’avantage d’être simple à effectuer, facilement reproductible et à la portée des observateurs non médicaux.

Un langage commun peut ainsi être obtenu entre les différents intervenants et l’évolution de l’état de conscience clairement appréciée.

Malgré les différentes combinaisons possibles entre les trois paramètres (E, V, M), Teasdale a montré que l’utilisation du GCS par des infirmières, des neurochirurgiens ou des chirurgiens non spécialisés donnait 93 % de concordance sur le diagnostic de la profondeur du coma. Le GCS ne permet pas, cependant, de déterminer le niveau de la souffrance axiale (diencéphale + tronc cérébral).

Grâce aux travaux de Plum et Plosner, des classifications du coma profond ont pu être établies.

En s’appuyant sur les réactions motrices à la douleur, les réflexes du tronc cérébral, les anomalies du réflexe photomoteur (RPM), les troubles végétatifs, il est possible de définir trois niveaux de souffrance axiale dans les comas profonds ; ils traduisent les stades de la détérioration rostrocaudale.

L’utilisation d’autres réflexes du tronc cérébral tels que cornéen, ciliospinal, frontopalpébral, cornéoptérygoïdien, oculocardiaque (en général le dernier à disparaître avant la mort cérébrale), permet aussi de situer le niveau de la détérioration axiale.

* Signes de localisation :

Quelle que soit la vigilance du traumatisé, les signes de localisation seront systématiquement recherchés, guidés par le point d’impact.

Ils apportent une orientation clinique du lieu de la souffrance cérébrale, que le mécanisme soit intra- ou extradural.

+ Lésions hémisphériques :

La recherche d’une asymétrie dans les réactions motrices sera effectuée à la demande, ou en s’aidant de stimuli nociceptifs si l’état de vigilance l’impose.

L’hypotonie d’un membre chutant sur le plan du lit, de façon plus lourde que du côté opposé, aura une valeur localisatrice.

On effectuera systématiquement une étude bilatérale et comparative des réflexes ostéotendineux et du réflexe cutané plantaire, à la recherche d’une atteinte pyramidale.

Cet examen neurologique orienté vers l’encéphale permettra parfois de découvrir une lésion médullaire, occasionnée par un traumatisme rachidien associé.

Cela est surtout vrai pour les patients conscients, capables de définir le niveau lésionnel et de participer au diagnostic sous-lésionnel.

La constatation d’un déficit de la motricité d’un membre supérieur associé à une aréflexie orientera d’emblée vers l’existence d’une pathologie du plexus brachial.

+ Lésions des nerfs crâniens :

Elles sont dues à des lésions directes, en particulier par fracture de la base du crâne, ou indirectes, dues à l’existence d’un processus expansif intracrânien.

Fractures sphénoïdales : elles peuvent occasionner des cécités par atteinte du nerf optique dans le canal optique.

L’étude du RPM et du réflexe consensuel permettra de différencier l’existence d’une lésion du nerf moteur oculaire de celle du nerf optique.

Paralysies des nerfs oculomoteurs : elles sont dominées par l’atteinte de la IIIe paire crânienne.

Elles traduisent classiquement l’engagement temporal.

Il existe plusieurs stades cliniques : anisocorie, mydriase réactive, mydriase aréactive, qui signifient l’aggravation de l’engagement de l’uncus de l’hippocampe.

Atteinte de la VIe paire crânienne : elle peut traduire des lésions caverneuses ou de la fissure orbitaire, ou encore simplement sa contusion sur l’axe pétreux.

En fait, la constatation d’une paralysie du VI n’a, en général, aucune valeur localisatrice.

Atteinte du paquet acousticofacial : elle est rare au niveau du conduit auditif interne.

La VIIe et la VIIIe paires sont plus fréquemment atteintes lors des fractures de l’os pétreux avec otorrhée et otorragie.

La reconnaissance précoce d’une paralysie faciale périphérique, témoin d’une lésion du nerf facial dans son trajet intrapétreux, peut permettre d’envisager une décompression chirurgicale.

Atteinte du bulbe olfactif : elle est très fréquente lors des fractures de l’étage antérieur.

Elle peut cependant survenir, par des lésions de cisaillement dans la gouttière olfactive sans lésion osseuse associée, simplement en raison de l’énergie du traumatisme, le plus souvent à point d’impact postérieur.

+ Troubles neurovégétatifs :

Ils sont associés aux comas profonds.

Les troubles respiratoires sont le plus souvent secondaires aux inhalations dues aux troubles de la conscience.

Plus rarement, ce sont des rythmes respiratoires à type de dyspnée de Cheyne-Stokes, de Kussmaul, ou anarchiques, traduisant une souffrance axiale.

Les troubles cardiovasculaires, la bradycardie et l’HTA, sont les témoins de l’hypertension intracrânienne (HTIC), l’HTA tendant à maintenir une pression de perfusion cérébrale suffisante.

L’hypotension artérielle ne s’intégrant pas dans le cadre d’un choc hypovolémique est un signe péjoratif d’atteinte du tronc cérébral (bulbaire).

Les troubles de la régulation thermique s’intègrent dans le tableau d’une souffrance axiale basse dont l’évolution fatale est proche.

* Tableaux d’engagement :

Le tableau le plus fréquent est celui d’engagement temporal qui correspond, le plus souvent, au développement d’un hématome intracrânien expansif.

Sa reconnaissance et son traitement précoces ont des conséquences vitales.

Il est marqué par une dilatation pupillaire unilatérale aboutissant à la mydriase aréactive, une hémiplégie controlatérale, des troubles de la conscience aboutissant au coma profond, accompagnés de troubles respiratoires.

Quelquefois, l’hémiplégie peut être « paradoxale », homolatérale à la lésion par déplacement global de tout l’hémisphère et contusion du pédoncule controlatéral écrasé contre le bord libre de la tente.

Les autres engagements, principalement centraux, se traduisent par les signes d’atteinte et de souffrance du tronc cérébral, de plus en plus graves selon leur distribution rostrocaudale.

* Autres tableaux neurologiques :

+ Syndrome méningé :

Il est impératif d’être certain du contexte traumatique de sa survenue pour ne pas méconnaître une rupture d’une malformation vasculaire.

L’hémorragie sous-arachnoïdienne est un tableau typique représenté par des céphalées, des vomissements, des troubles de conscience à type d’agitation, obnubilation, une raideur méningée, un signe de Babinski bilatéral.

Le diagnostic clinique est simple, mais impose une confirmation tomodensitométrique.

Sa constatation isolée n’a jamais de connotation péjorative immédiate.

Seules les éventuelles conséquences tardives (hydrocéphalie par trouble de résorption du LCS) méritent qu’on s’y attarde.

+ Crises convulsives :

Elles sont rares et témoignent d’une atteinte corticale.

L’association d’un déficit neurologique focalisé avec des troubles de la vigilance peut parfois représenter un état postcritique.

Ce n’est qu’après la constatation de la normalité du scanner que le diagnostic sera éventuellement confirmé par un électroencéphalogramme.

C – Conclusions de l’évaluation clinique, hiérarchie des examens complémentaires :

Au terme du bilan clinique complet, l’association des données concernant les circonstances du traumatisme, l’examen sur les lieux de l’accident, l’examen du médecin de garde, permettent d’avoir une orientation sur la gravité et la potentialité chirurgicale du traumatisé crânien.

Il faut encore insister sur l’aspect dynamique temporel de l’évaluation clinique, principalement sur l’existence d’une aggravation secondaire après un intervalle libre (lucide ou non) constaté par l’entourage ou par les transporteurs.

Il sera alors possible de déterminer plusieurs classes de patients et, à partir de celles-ci, de définir les examens complémentaires utiles à chaque situation selon le stade de gravité clinique et le degré d’urgence neurochirurgicale.

1- Place des radiographies du crâne et du scanner :

Lors de la VIe conférence de consensus en réanimation et médecine d’urgence, dont l’objectif principal était de déterminer la place des radiographies simples du crâne dans la prise en charge thérapeutique des traumatisés crâniens, un arbre décisionnel a été proposé à partir des groupes de Masters.

Le médiocre apport des radiographies du crâne dans l’arbre thérapeutique décisionnel et le coût de santé qu’elles engendrent, amènent à réfléchir sur leurs indications.

Masters le montre bien dans son arbre décisionnel.

Beaucoup de patients s’étonnent encore de ne pas bénéficier d’une radiographie dite « de contrôle » qui, à leurs yeux, est utile, voire médicolégale.

En ce qui concerne le groupe 1, ces patients n’ont besoin ni de radiographies du crâne ni de scanner.

Une surveillance à domicile peut être instaurée.

Il est obligatoire d’informer, par un texte donné à l’entourage, des possibilités évolutives immédiates (céphalées, somnolence) et tardives (constitution progressive d’un hématome sous-dural chronique).

Au moindre doute sur la possibilité d’une surveillance efficace à domicile, une hospitalisation brève sera imposée.

Dans le groupe 2, nous insisterons sur la surveillance clinique de 24 heures qui doit être efficace et rapprochée.

L’existence d’une détérioration de l’état clinique est un argument nettement supérieur à celui de l’existence d’une fracture du crâne pour décider du transfert en milieu spécialisé, ou de la réalisation d’un scanner.

Pour ces deux groupes de malades, le GCS est coté à 15, mais il peut exister néanmoins un signe de localisation ou des signes d’HTIC, ce qui implique alors la réalisation d’un scanner et le transfert en neurochirurgie.

Une étude intéressante a été réalisée au centre hospitalier régional d’Orléans, sur 2 195 traumatisés crâniens.

Un scanner a été systématiquement réalisé pour les patients du groupe 2 (294 cas), avec retour au domicile en cas de normalité de cet examen.

Aucun patient n’a été réhospitalisé dans les suites. L’économie par rapport à une hospitalisation de 24 heures a été chiffrée à 600 kF sur 1 an.

Dans le groupe 3, il nous paraît important de communiquer rapidement avec le service de neurochirurgie de garde le plus proche, et cela même pour des patients dont l’état de vigilance ne paraît pas alarmant (13 < GCS < 15).

Des décisions de transfert avant la prescription du scanner pourront être prises en fonction de l’état clinique et de l’éloignement du centre d’accueil.

De même, devant une situation rapidement évolutive, un scanner et une intervention d’urgence pourront être réalisés sur place, en accord et en collaboration téléphonique avec le neurochirurgien de garde.

La généralisation des systèmes de télémédecine entre les hôpitaux généraux et les services de neurochirurgie contribue nettement à améliorer la prise en charge de ces patients.

La visualisation du scanner permet de discuter du transfert ou de guider un geste chirurgical urgent « à distance ».

2- Autres examens complémentaires en urgence :

* Biologiques :

L’existence de troubles de la vigilance doit impérativement faire rechercher des causes métaboliques ou toxiques.

Un ionogramme sanguin et une alcoolémie sont des examens indispensables qui doivent être intégrés au bilan préopératoire systématique.

* Radiographies du rachis cervical :

Chez le traumatisé conscient, elles seront guidées par les signes fonctionnels décrits comme une douleur localisée, une attitude vicieuse, une symptomatologie radiculaire.

Chez le traumatisé inconscient, elles seront effectuées systématiquement, sans retarder la réalisation d’un scanner.

Dans le cadre du polytraumatisé inconscient, il est impératif d’effectuer un rachis complet, en tenant compte des priorités dans le temps des différents examens complémentaires.

Polytraumatisé :

Le patient sera évalué cliniquement dans sa globalité et la hiérarchie des examens complémentaires dictée par l’urgence thérapeutique des lésions mettant en jeu le pronostic vital.

Les examens en urgence en salle de déchocage seront dominés par la recherche d’une lésion viscérale : radiographie du thorax, échographie abdominale.

L’appréciation clinique de l’état neurologique (examen et anamnèse des faits) permet souvent une orientation sur l’existence d’une lésion potentiellement neurochirurgicale.

La décision d’une intervention abdominale ou thoracique avant le scanner sera prise sur des arguments d’urgence vitale.

L’apparition de troubles végétatifs ou d’une anisocorie pendant une intervention donne des indications cliniques sur la nécessité d’intervenir en double équipe en urgence.

En dehors de cette situation, le scanner doit être effectué en premier lieu.

Ce n’est qu’après avoir écarté l’ensemble des lésions potentiellement chirurgicales en urgence que le bilan radiographique complet pourra être effectué.

Examens complémentaires :

A – Tomodensitométrie (TDM), scanner :

La prise en charge thérapeutique des traumatismes cranioencéphaliques a été nettement facilitée par la TDM.

La généralisation de son installation dans les structures hospitalières permet un diagnostic précoce, anatomique, des lésions encéphaliques.

Nous ne reviendrons pas sur les indications du scanner.

L’examen sera réalisé sans injection de produit de contraste, par coupes jointives de 5 à 9 mmd’épaisseur s’étendant du foramen magnum au vertex.

Des coupes plus fines seront effectuées à la demande, en fonction des images obtenues.

Il ne nous semble pas souhaitable d’effectuer d’emblée des coupes coronales à la recherche de lésions de la base du crâne, car elles nécessitent une mobilisation de la tête et n’impliquent pas une intervention chirurgicale immédiate.

En revanche, la suspicion clinique d’une lésion du rachis cervical devra faire pratiquer des coupes sur le rachis, en utilisant éventuellement des reconstructions en trois dimensions.

La détection de lésions hémorragiques est aisée, leur densité varie de 60 à 90 unités Hounsfield alors que celle du cerveau ne dépasse pas 45 unités.

La TDM permet de visualiser le siège de la lésion et le retentissement sur les structures avoisinantes.

Parfois, les lésions sont diffuses, microscopiques ou invisibles au scanner.

On s’attachera à rechercher des signes indirects, tels que l’aplatissement des ventricules, la taille des citernes de la base, des sillons corticaux.

Le travail simple et rapide à la console permet également d’obtenir des coupes en « fenêtres osseuses », qui donnent de parfaits renseignements sur les fractures, leur siège exact, leur direction, leur irradiation à la base.

Enfin, la facile reproductibilité de l’examen permettra un suivi dynamique de l’évolution des images, en corrélation avec la clinique et éventuellement la mesure de la pression intracrânienne (PIC).

B – Radiographies du crâne :

Nous ne reviendrons pas sur les indications décrites aux chapitres précédents en fonction de l’état clinique.

Certaines indications nous paraissent encore utiles :

– les suspicions de fracture de la base du crâne avec visualisation d’une pneumencéphalie ; – les impacts occipitaux nécessitant une incidence de Worms.

La constatation d’une fracture est un argument pour confirmer la violence du traumatisme chez les sujets conscients avec fracture occipitale, chez qui il est fréquent de découvrir, au scanner, des contusions frontales asymptomatiques ;

– les embarrures ;

– les plaies craniocérébrales où les radiographies simples permettent de visualiser les dégâts osseux, et surtout l’existence de corps étrangers métalliques, générateurs d’artefacts à la TDM.

C – Artériographie :

Ses seules indications actuelles sont :

– les suspicions de fistules carotidocaverneuses, avec éventuellement traitement endovasculaire dans le même temps ;

– les lésions des vaisseaux du cou (dissection carotidienne ou vertébrale) ;

– les suspicions de thrombophlébites des sinus duraux.

D – Électroencéphalogramme (EEG) :

Les principales indications sont :

– la recherche d’une crise comitiale infraclinique devant une aggravation neurologique (après avoir réalisé au minimum une TDM cérébrale) ;

– la surveillance des traitements barbituriques, car ils induisent des modifications stéréotypées de l’activité électrique avec une relation directe dose-effet ;

– le diagnostic médicolégal de la mort cérébrale, dans l’hypothèse d’un prélèvement multiorganes ;

– le diagnostic d’une épilepsie lésionnelle post-traumatique retardée.

E – Imagerie par résonance magnétique (IRM) :

L’IRM est très peu utilisée en France pour le diagnostic des lésions encéphaliques en urgence parce que sa généralisation dans les hôpitaux est moins importante que celle du scanner, et que beaucoup de machines permettent difficilement l’examen de patients intubés et ventilés artificiellement.

Il en est de même aux États-Unis.

Elle apporte néanmoins d’excellents renseignements anatomiques, en distinguant substance blanche et substance grise dans les trois plans de l’espace.

Il est parfois possible de découvrir, chez un patient ayant un scanner normal, des hypersignaux précoces en T2 qui évoluent vers la constitution d’un hématome intracérébral secondaire.

Récemment, James a proposé de réaliser une angio-IRM dans les traumatismes susceptibles d’engendrer des atteintes artérielles cérébrales pour sélectionner les patients devant bénéficier d’une artériographie.

L’IRM est un excellent examen pour dépister les lésions ostéodurales responsables de fuites de LCS, d’autant plus qu’elle peut être couplée à une cysternographie.

L’IRM est actuellement surtout utilisée pour la recherche de lésions anatomiques chez des patients porteurs de séquelles neuropsychologiques, après un traumatisme crânien, même modéré.

Hématome extradural :

A – Généralités :

L’HED se constitue à partir d’un saignement entre la dure-mère et l’os.

L’aspect macroscopique de l’HED est tout à fait comparable à celui du placenta.

Son caractère compact, plus ou moins épais, explique les nombreux échecs des tentatives d’évacuation par drainage aspiratif à partir d’un simple trou de trépan.

L’HED est la plus rare des complications du traumatisme crânien (1 à 4 %), mais la facilité de sa reconnaissance et de son traitement précoce, opposée à la gravité de ses conséquences s’il est méconnu, en fait la hantise de tous les cliniciens.

Hippocrate préconisait déjà, en son temps, la craniectomie du côté opposé à l’hémiplégie.

Ce n’est qu’au XVIIIe siècle que l’HED a été décrit, cliniquement et chirurgicalement, par Hill et Pott.

À l’aube du XXIe siècle, la mortalité de l’HED reste élevée mais régresse d’année en année.

Jones, sur une série rétrospective de 35 ans, constate une régression de la mortalité de 29 à 8,5 %.

Cette diminution de la mortalité est en partie due à la médicalisation précoce des accidents de la voie publique, des accidents du travail et de tous les traumatismes dont la violence est susceptible d’engendrer une aggravation secondaire des lésions cliniques constatées initialement.

Inéluctablement, la mortalité est d’autant plus importante que les blessés sont opérés au stade de coma, avec ou sans mydriase.

L’HED est très fréquemment associé à des lésions parenchymateuses « par contrecoup » qui vont déterminer, à elles seules, le pronostic.

Si on ne considère que l’HED isolé, Bricolo, avec une série de 107 patients, obtient une mortalité de 5 % en 1984.

B – Clinique :

La forme de description clinique typique est la forme la plus fréquente de topographie temporale, ou temporopariétale, survenant chez un adulte jeune de moins de 30 ans.

Lors du traumatisme (accident de la voie publique, chute…), le patient perd connaissance de façon brève, puis retrouve une conscience normale.

C’est le début de l’intervalle libre.

Progressivement, et avec un délai variable, des troubles secondaires de la conscience vont apparaître, témoignant de l’installation d’une HTIC.

L’évolution vers un coma profond et la mort cérébrale sont alors quasi inéluctables en l’absence de traitement chirurgical.

Parallèlement, des signes de localisation neurologique apparaissent : syndrome pyramidal d’un hémicorps avec hémiparésie, puis hémiplégie controlatérale à l’hématome et mydriase homolatérale.

L’examen médical devra s’attacher à retrouver la séquence décrite, en s’aidant de l’entourage, du rapport du médecin transporteur éventuel.

L’examen clinique en lui-même sera répété pour apprécier l’évolution dynamique des symptômes.

La durée de l’intervalle libre est une notion clinique importante.

Elle est, dans cette forme, comprise entre 6 et 24 heures.

À partir de l’aggravation secondaire, la durée de l’intervalle libre représente grossièrement le temps dont on dispose pour intervenir avant la mort cérébrale.

Il existe de très nombreux autres aspects de l’HED.

La perte de connaissance initiale n’est présente que dans 75 % des cas.

La durée de l’intervalle libre est très variable : quelques minutes à 1 mois.

On distingue ainsi :

– des formes suraiguës, très proches du coma d’emblée, avec un intervalle libre inférieur à 6 heures.

Dans la majorité des cas (61 %), il s’agit d’HED associés à des lésions parenchymateuses ;

– des formes subaiguës, dont l’intervalle libre peut atteindre 7 jours ;

– des formes chroniques, généralement localisées à des zones cliniquement peu parlantes.

En dehors des troubles secondaires de la conscience (agitation, obnubilation, coma), les signes neurologiques sont fonction de la localisation de l’HED avec, par ordre de fréquence :

– temporal : forme typique précédemment décrite ;

– frontal : les troubles de la conscience sont représentés par une agitation, une obnubilation, qui persistent et tendent à réaliser un véritable syndrome frontal ;

– occipital sus-tentoriel : des troubles visuels à type d’hémianopsie sont les premiers à apparaître, mais passent facilement inaperçus car ils sont rapidement masqués par le tableau d’HTIC ;

– occipital sus- et sous-tentoriel : association de troubles visuels et d’un syndrome cérébelleux, surtout cinétique, dont le diagnostic clinique est difficile dans le contexte du traumatisé crânien ;

– fosse postérieure : leur expression clinique est polymorphe, des troubles de conscience par HTIC aiguë (compression du IVe ventricule) sont responsables de morts cérébrales précoces.

Un simple décollement au niveau d’un sinus latéral peut avoir une évolution subaiguë, et le diagnostic est surtout suspecté devant l’existence d’une fracture croisant le trajet du sinus ;

– au niveau du vertex : la symptomatologie est riche si le saignement est limité ; en effet, les lésions du sinus sagittal supérieur peuvent donner des atteintes bilatérales des lobules paracentraux.

Le tableau est parfois dramatique, avec coma d’emblée, compte tenu du débit sanguin du sinus sagittal supérieur.

Formes selon l’âge :

L’HED de l’enfant est classiquement plus rare que chez l’adulte.

La duremère est très adhérente à l’os au niveau des sutures et les vaisseaux méningés ne cheminent pas encore dans une gouttière osseuse.

De plus, chez le nourrisson jusqu’à 10-12 mois, la voûte du crâne est « souple », se déformant plus qu’elle ne se casse.

Cependant, Lévy note une fréquence équivalente à celle de l’adulte (3,7 %).

La symptomatologie clinique peut être identique à celle de l’adulte, mais l’aggravation secondaire à l’intervalle libre a souvent un caractère brutal.

Fréquemment, l’intervalle libre n’est pas pur et l’enfant reste somnolent ou agité, il vomit ; il peut s’installer un tableau d’HTIC sans qu’aucune aggravation ni signe de localisation n’apparaissent pendant 24 à 48 heures.

Chez le nourrisson, la pâleur témoignant d’une spoliation sanguine est un excellent signe clinique d’hématome, qui est à la fois sous-cutané et extradural.

Le spreading depression syndrome mérite d’être décrit à cause de sa ressemblance clinique avec l’HED.

Le traumatisme initial est mineur et la perte de connaissance non obligatoire ; l’intervalle libre est très pur et l’aggravation survient en moyenne 2 heures après le traumatisme.

Dans 90 % des cas, et surtout chez le petit enfant et le nourrisson, surviennent des crises convulsives généralisées ou hémigénéralisées, associées à un tableau d’HTIC.

Il n’y a jamais de mydriase et la présence d’un déficit neurologique est exceptionnelle.

L’évolution se fait vers la stabilisation, puis la régression et la disparition complète des signes en moins de 24 heures.

Le pronostic est excellent, il n’y a aucune séquelle clinique ni épilepsie tardive.

Il va de soi que ce syndrome ne sera évoqué que devant la normalité de la TDM.

Chez le sujet âgé, la dure-mère est plus fine, adhérente à l’os.

Son décollement est moins fréquent et la pathologie intradurale est plus souvent observée.

Au total, l’HED doit être évoqué sur des constatations d’anamnèse et d’examen, mais le polymorphisme de son expression clinique rend parfois le diagnostic, en particulier topographique, difficile ; c’est dire la nécessité de recourir à des examens complémentaires de façon urgente et, en premier lieu, au scanner.

C – Examens complémentaires :

1- Tomodensitométrie :

Elle permet d’effectuer un diagnostic de certitude de l’HED et d’affirmer sa localisation avec précision.

L’HED se présente comme une lentille biconvexe, hyperdense spontanément, dont l’homogénéité reste variable en fonction du délai avec lequel l’examen est réalisé par rapport au traumatisme.

Les angles de raccordement à l’os sont aigus et la fracture, quand elle existe, est visible sur les coupes réalisées en fenêtres osseuses.

Il existe fréquemment un hématome sous-cutané visible en regard de l’HED.

Le retentissement de l’HED est clairement démontré et l’effet de masse qu’il imprime sur les structures ventriculaires est facilement reconnu et mesurable.

Le scanner permet de visualiser les lésions intradurales associées qui sont fréquentes (50 %des cas pour Rivierez).

Il est souhaitable d’effectuer des coupes jusqu’au vertex pour ne pas négliger une lésion haut située.

Le scanner pourra être répété en fonction de l’évolution clinique, permettant de dépister des formes subaiguës ou chroniques, ou de contrôler l’efficacité du geste opératoire.

2- Radiographies du crâne :

Les radiographies du crâne, quand elles sont prescrites et normales, ne peuvent en aucun cas éliminer un HED.

En effet, la fracture est absente dans 20 % des HED de l’adulte et 50 % des HED de l’enfant.

D – Traitement :

Il s’agit d’une urgence neurochirurgicale absolue.

Dans la forme typique de l’HED temporal, l’intervention comporte plusieurs temps : malade en décubitus dorsal, épaule homolatérale surélevée, tête tournée. Incision cutanée en « fer à cheval » à charnière inférieure.

Cette incision sera large, centrée par la fracture ou l’hématome sous-cutané, et surtout guidée par les images de la TDM.

Taille d’un volet pédiculé sur le muscle temporal descendant assez bas, pour pouvoir éventuellement contrôler l’artère méningée moyenne à son émergence de la base du crâne.

Décompression cérébrale par aspiration des caillots.

Recherche de l’origine du saignement et coagulation (ou clipage) des branches de l’artère méningée moyenne ou de son tronc (parfois on ne retrouve qu’un saignement veineux, diffus, en « nappe »).

Hémostase à la cire du saignement osseux.

Suspension de la dure-mère au périoste, en évitant les cloisonnements d’espaces extraduraux en dehors des limites du volet où pourrait se reproduire un nouvel hématome.

Pendant l’intervention, il est fréquent d’assister à la remontée de la dure-mère qui se met à battre, témoignant de la réexpansion cérébrale.

L’ouverture de la dure-mère ne doit pas être de pratique courante.

Elle ne se fera que dans de très rares cas, s’il existe une lésion intradurale, chirurgicalement curable par la voie d’abord.

Mise en place d’un drain de Redon aspiratif dans l’espace extradural. Remise en place du volet osseux après l’avoir ciré.

Fermeture du périoste, fermeture cutanée en parant les éventuelles plaies du scalp.

Particularités chirurgicales en fonction de la localisation :

Localisations sus- et sous-tentorielles : elles révèlent une lésion du sinus latéral : malade en décubitus latéral, tête tournée et fléchie (après s’être assuré de l’absence de lésions du rachis cervical).

Craniectomie sous-occipitale à os perdu, associée à un volet occipital ménageant un pont osseux en regard du sinus latéral.

Réparation du sinus au fil vasculaire (souvent difficile et très hémorragique).

Suspension de la dure-mère périsinusienne, de part et d’autre du pont osseux ménagé en début d’intervention.

Localisations frontales : incision cutanée arciforme à la racine des cheveux.

Taille d’un volet osseux respectant les sinus frontaux (repérés sur le scanner).

Recherche de l’origine du saignement, qui est parfois difficilement individualisable, provenant de l’os ou de la dure-mère qui saigne en nappe.

L’embarrure au niveau du vertex peut être responsable d’une lésion du sinus sagittal supérieur.

Le volet sera réalisé à cheval sur la ligne médiane.

Le saignement, au moment de la levée de l’embarrure, est souvent très abondant.

L’interposition d’un fragment de muscle pour colmater la brèche sinusienne est parfois la seule façon d’obtenir l’hémostase.

Il est impératif de s’efforcer de conserver une perméabilité maximale du sinus.

Il s’agit d’une intervention difficile où les pertes sanguines sont fréquemment importantes.

E – Conduite à tenir :

La généralisation de l’implantation de la TDM amène au diagnostic d’HED dans des établissements ne disposant pas d’une équipe neurochirurgicale prête à intervenir.

Toute suspicion d’HED doit faire transférer le traumatisé dans un centre spécialisé.

Dans des situations d’extrême urgence (intervalle libre très court), malade vu au stade de coma profond, il est parfois impossible d’envisager le transfert du patient dans un service de neurochirurgie, malgré les moyens actuels (hélicoptère), et le geste doit être effectué sur place.

Nous insistons sur le fait que cette décision doit être prise en accord avec le neurochirurgien de garde le plus proche.

C’est dans cette situation que la télémédecine prend toute son importance.

Le transfert d’images interhospitalier permet d’affirmer le diagnostic et de guider le chirurgien généraliste pour une intervention qu’il ne maîtrise pas.

En effet, les principales sources d’échec sont l’erreur de localisation de la craniectomie et l’insuffisance d’évacuation des caillots.

Les chirurgiens généralistes s’attendent à trouver du sang, alors qu’il s’agit d’une masse de caillots compacte nécessitant une large voie d’abord pour son évacuation.

Une fois l’évacuation des caillots effectuée, la mise en place d’un drain aspiratif dans l’espace extradural permet d’organiser le transfert en milieu spécialisé sans reconstitution de l’hématome.

Un nouveau scanner sera réalisé à l’arrivée du patient et un geste complémentaire sera réalisé (persistance d’une collection extradurale, hémostase de l’artère méningée ou d’un sinus veineux, suspension de la dure-mère).

F – Évolution :

Dans les formes typiques, l’évolution est souvent favorable, avec parfois une régression spectaculaire de la symptomatologie neurologique dès la sortie du bloc opératoire.

La persistance de signes neurologiques après l’évacuation chirurgicale de l’HED devra faire pratiquer un scanner de contrôle précoce, à la recherche d’une récidive ou d’une pathologie intradurale « démasquée » ou provoquée par l’évacuation de la collection extradurale.

Le pronostic de l’HED dépend avant tout des lésions associées qui l’assombrissent nettement.

En ce qui concerne les HED purs, la précocité de l’intervention et l’état clinique au moment de l’intervention restent des éléments déterminants.

Il est à l’heure actuelle possible, grâce aux services mobiles de réanimation, de diriger d’emblée la majorité des traumatisés crâniens graves vers un centre spécialisé.

La surveillance clinique rapprochée, dans les premières heures, d’un sujet potentiellement porteur d’un HED, reste la meilleure garantie d’un diagnostic précoce et d’un transfert réalisé dans des délais compatibles avec une bonne récupération neurologique.

Les interventions en urgence effectuées par des chirurgiens non spécialisés ne devront être réalisées qu’en cas d’absolue nécessité.

Malgré les moyens actuels, la mortalité globale des HED purs varie entre 5 et 10 % en fonction des séries.

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