Insuffisance rénale aiguë

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Physiopathologie :

L’obstruction de la voie excrétrice provoque une augmentation de la pression intraluminale de l’uretère jusqu’à un niveau équilibrant la pression de filtration glomérulaire.

La valeur de cette pression dépend de l’état hémodynamique du patient.

L’atteinte lésionnelle rénale concerne essentiellement la médullaire ce qui explique les troubles de concentration après reprise de la diurèse.

Étiologie :

Insuffisance rénale aiguëLes obstacles peuvent être trigonaux atteignant les orifices urétéraux, ou urétéraux sur le trajet des uretères.

Les obstacles trigonaux sont dus à des tumeurs pelviennes : cancer de la prostate, de la vessie, de l’utérus qui atteignent la vessie.

Les obstacles de l’uretère sont soit des obstacles intrinsèques dont les principaux sont des calculs (radio-opaques ou radiotransparents), soit une tumeur de la voie excrétrice, une nécrose papillaire.

Les obstacles extrinsèques sont dus à des compressions : néoplasiques (fibrose rétropéritonéale maligne, adénopathies métastatiques, lymphome), ou bénigne (fibrose rétropéritonéale bénigne, fibrose postradique, fibrose périanévrismale aortique).

Il peut s’agir plus rarement de lésion iatrogénique (ligature des uretères) au cours d’intervention chirurgicale.

Diagnostic positif :

Cliniquement, une insuffisance rénale aiguë est diagnostiquée lorsqu’il n’y a pas d’urine dans la vessie.

L’anurie est définie par une diurèse inférieure à 100 cm3, et l’oligurie par une diurèse inférieure à 400 cm3.

Des signes cliniques non spécifiques sont communs à l’ensemble des causes de l’insuffisance rénale aiguë.

Ils témoignent des conséquences de la rétention hydrosodée : vomissements, asthénie, dyspnée, oedème aigu du poumon, troubles de la conscience ou troubles hydroélectrolytiques, troubles du rythme cardiaque.

Des signes urinaires font suspecter certaines causes : hématurie (tumeur de vessie), douleurs de la fosse lombaire, crise de colique néphrétique (calculs).

  • Les examens biologiques montrent une augmentation de la créatinine plasmatique supérieure à 150 µmol/L, de l’urée plasmatique supérieure à 17 mmol/L, la clairance de la créatinine, si elle était faite, serait inférieure à 5 mL/min
  • Le bilan est essentiellement radiologique : l’échographie montre des cavités rénales dilatées ; c’est un examen essentiel qui montre des reins de taille normale, une dilatation des cavités rénales peut apparaître après plusieurs jours d’obstruction urinaire. Elle permettra de voir s’il existe deux reins fonctionnels, ou un rein foncttionnellement unique.
  • L’évolution comporte 3 phases : une phase où s’établit l’insuffisance rénale avec une augmentation de la créatininémie ; une phase d’insuffisance rénale aiguë constituée, les perturbations biologiques sont les plus importantes. Il existe une augmentation régulière de la créatinine et de l’urée sanguine avec un risque d’hyperkaliémie favorisé par l’acidose métabolique.

Puis s’établit ensuite une hyponatrémie par inflation hydrique, une hypocalcémie, une hypophosphorémie.

Puis si l’obstacle est levé, une phase de reprise de diurèse qui se traduit par une perte hydrique et électrolytique importante (levée d’obstacle) nécessitant une surveillance attentive et une compensation hydrique adaptée.

Diagnostic différentiel :

L’insuffisance rénale aiguë obstructive doit être différenciée d’une rétention aiguë d’urine où il existe des urines dans la vessie. Elle doit être différenciée des autres insuffisances rénales aiguës, pré-rénales et rénales.

Elle doit être différenciée d’une insuffisance rénale chronique méconnue qui peut être suspectée selon les antécédents.

L’échographie est importante, elle montre en cas de rétention aiguë d’urine une vessie dilatée.

En cas d’insuffisance rénale aiguë pré-rénale ou post-rénale, les cavités rénales sont fines.

En cas d’insuffisance rénale chronique, des reins de petite taille avec dédifférenciation cortico-médullaire.

Diagnostic étiologique :

Le diagnostic étiologique repose sur l’examen clinique, l’échographie et l’opacification des cavités rénales.

  • L’examen clinique

– en particulier les touchers pelviens [toucher rectal et (ou) toucher vaginal]

– permet de séparer 2 types d’anuries obstructives : les anuries par atteinte trigonale (méats urétéraux) au niveau vésical d’origine tumorale ; dans ce cas, les touchers pelviens peuvent mettre en évidence une infiltration néoplasique évoquant un cancer de la prostate, un cancer de la vessie, un cancer du col de l’utérus ou un autre cancer pelvien.

Lorsque le toucher rectal est normal, l’obstacle siège plus probablement au niveau du trajet des uretères, il s’agit alors :

– soit d’un obstacle intrinsèque : calcul radio-opaque ou radio-transparent, nécrose papillaire, tumeur de la voie excrétrice ;

– soit d’un obstacle extrinsèque : fibrose rétropérito-néale néoplasique (cancer du sein, du pancréas, de l’estomac), métastases ganglionnaires rétropéritonéale (testicule), lymphome, ou d’une compression extrinsèque bénigne (fibrose rétropéritonéale bénigne, médicamenteuse par exemple, fibrose périanévrismale).

  • L’abdomen sans préparation couplé à l’échographie, permet de rechercher une opacité sur les voies urinaires évoquant un calcul.

L’échographie peut aider à localiser l’obstacle ; elle montre des cavités rénales et des uretères dilatés, ceux-ci sur une partie de leur trajet en cas d’obstacle sur le trajet des uretères, ou jusqu’à leur termi-naison au niveau du trigone (en cas d’obstacle trigonal).

  • Devant des cavités dilatées il faut faire une opacification des cavités et un drainage : ces deux gestes seront faits en même temps.L’urographie est contre-indiquée en raison de la néphrotoxicité de l’iode.

L’état général du malade, la possibilité que l’on a de pouvoir l’endormir (anesthésie locorégionale, ou générale) (troubles hydroélectrolytiques, acidose, hyperkaliémie) guideront la technique :

– si l’examen clinique n’a pas trouvé une infiltration néoplasique pelvienne, la cystoscopie vérifiera l’état de la vessie et permettra de faire une urétéro-pyélographie rétrograde localisant l’obstacle et permettant demonter des sondes urétérales ;

– s’il existe un bloc pelvien néoplasique évoquant une tumeur du pelvis, une néphrostomie percutanée sous anesthésie locale permet de drainer les urines, tandis qu’un examen endoscopique ou des biopsies permettront de faire le diagnostic de l’obstacle.

Certains par principe dans ces deux cas, préfèrent faire d’emblée une néphrostomie percutanée sous anesthésie locale qui permet de drainer les urines et d’opacifier les cavités rénales, mais repousse la recherche de la cause.

Pronostic :

Le pronostic vital est immédiatement en jeu au cours de la phase aiguë ; il dépend des circonstances associées à l’insuffisance rénale aiguë et du terrain sur lequel elle survient, de l’importance des anomalies hydroélectrolytiques en particulier de l’hyperkaliémie, de l’oedème pulmonaire, des troubles du rythme.

La récupération peut être assez rapide dès qu’il y a eu levée de l’obstacle.

Les causes majeures de la mortalité sont liées à l’hyperkaliémie et à la rétention hydrosodée, aux infections favorisées par la stase urinaire responsable d’une pyélonéphrite sur obstacle.

La morbidité de l’insuffisance rénale aiguë peut être majorée par la prise de médicaments néphrotoxiques (anti-inflammatoires, produit de contraste iodé qui devront être recherchés et arrêtés).

Le pronostic secondaire dépend aussi de la cause de l’obstacle : calcul dont le pronostic est bon, tumeur pelvienne (tumeur de vessie, de la prostate, de l’utérus) dont le pronostic peut être plus sombre.

Traitement symptomatique :

Il a pour but de prévenir les complications directement en relation avec la perturbation des fonctions rénales.

Il comporte une réanimation hydroélectrolytique avec réduction de l’apport de potassium, correction de l’acidose métabolique, et prévention des complications infectieuses.

Le traitement de l’insuffisance rénale aiguë obstructive est fonction du siège de cet obstacle.

Il peut s’agir de néphrostomies percutanées, si les cavités pyélocalicielles sont dilatées, ou d’une montée de sondes urétérales ou mise en place de sondes JJ.

L’abondance de la polyurie après drainage nécessite un apport parentéral puis entéral d’eau et d’électrolytes.

Cette polyurie peut être stoppée par restriction hydrique, sous contrôle médical jusqu’à normalisation de la fonction rénale.

La récupération fonctionnelle après drainage dépend de l’ancienneté de l’obstruction et des lésions parenchymateuses secondaires.

Il faut rappeler la nécessité de drainer en urgence toute insuffisance rénale aiguë obstructive.

Le traitement spécifique dépend du type d’obstacle : ablation d’un calcul de l’uretère par urétéroscopie, ou par lithotripsie extracorporelle.

Le traitement d’une tumeur vésicale, prostatique, ou utérine, dépend de l’histologie.

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