Introduction à l’immunologie

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Introduction :

L’immunologie est la science qui étudie la discrimination entre le soi et le non soi, c’est-à-dire les processus de reconnaissance, par les cellules lymphoïdes, des autoantigènes (soi) et des antigènes étrangers (non soi) qui représentent un danger pour l’individu, et l’ensemble des conséquences de cette reconnaissance, qui aboutit à la réponse immunitaire.

Cette dernière peut revêtir plusieurs aspects.

Elle est soit positive (immunisation), soit négative (tolérance spécifique).

La réponse positive est soit non spécifique, reposant sur des mécanismes très anciens dans l’évolution, soit spécifique, s’appuyant sur le répertoire des lymphocytes et engendrant une mémoire immunologique.

La réponse positive s’exprime sous la forme soit d’une réponse humorale (anticorps spécifiques présents dans les liquides biologiques), soit d’une réponse cellulaire (lymphocytes sensibilisés), soit, le plus souvent, sous les deux formes.

La réponse immunitaire aboutit soit à des phénomènes inflammatoires, soit à une cytotoxicité (lyse cellulaire).

Enfin, la réponse immunitaire est soit bénéfique pour l’individu (protection), soit défavorable car générant un état d’hypersensibilité ou des lésions auto-immunes.

Cellules et organes :

Le système immunitaire s’appuie sur deux grandes catégories de cellules : les lymphocytes, capables de reconnaître les antigènes, et les « cellules présentant l’antigène » (CPA).

A – LYMPHOCYTES :

Les lymphocytes sont les cellules centrales du système immunitaire. Ils possèdent une membrane lipidique dans laquelle sont réparties des structures mobiles, surtout glycoprotéiques, caractéristiques d’un phénotype donné.

Introduction à l’immunologie

Le génome des lymphocytes est principalement consacré à la synthèse des molécules de reconnaissance du système immunitaire et à la production de substances solubles (cytokines) qui remplissent des fonctions de messagers intercellulaires.

Les lymphocytes sont présents dans la circulation générale et dans des organes lymphoïdes.

1- Organes lymphoïdes :

Ils se répartissent classiquement en deux groupes : les organes centraux et les organes périphériques.

Les organes lymphoïdes centraux sont les premiers à apparaître chez le foetus.

Ils jouent un rôle d’induction pour les cellules lymphoïdes qui en sortent et qui n’y reviennent plus. Leur présence est indépendante de toute stimulation antigénique.

Chez l’homme, les organes lymphoïdes centraux sont la moelle osseuse et le thymus de structure lymphoépithéliale.

Les organes lymphoïdes périphériques sont distribués dans tout l’organisme, souvent au niveau des grands carrefours.

Ces organes effecteurs de la réponse immunitaire hébergent des lymphocytes et des CPA.

Les premiers recirculent sans cesse entre ces organes, le sang veineux et les vaisseaux lymphatiques.

Leur développement et leur structure dépendent de la stimulation antigénique.

On distingue les ganglions lymphatiques, la rate, les amygdales, et le tissu lymphoïde associé aux muqueuses intestinales et bronchiques, où la majorité des lymphocytes constitutifs sécrète des immunoglobulines (Ig)A.

2- Recirculation des lymphocytes entre les organes lymphoïdes :

Les lymphocytes, T en particulier, recirculent sans cesse entre les organes lymphoïdes, les vaisseaux lymphatiques et le sang, en traversant l’endothélium des veinules postcapillaires.

Ce mécanisme fait appel à des molécules d’adhésion (contact lymphocyteendothélium), à des chimiokines (activation), et à un ciblage (ou écotaxie) très précis qui conditionne la présence des lymphocytes dans les différents tissus.

Ce phénomène correspond à la nécessité pour les lymphocytes de venir reconnaître les antigènes étrangers partout dans l’organisme.

3- Phénotypes membranaires des lymphocytes :

Si les deux grandes populations de lymphocytes ne sont pas distinguables morphologiquement, elles possèdent des structures membranaires qui permettent de différencier les B des T et même d’identifier des sous-populations à l’intérieur de ces classes.

Ces structures membranaires sont des glycoprotéines ayant une fonction soit de reconnaissance, soit de signalisation, soit d’adhésion.

Le phénotype des lymphocytes T humains comporte, le récepteur pour l’antigène (TCR), et des molécules human leukocyte antigen (HLA) de classe I (et des molécules HLA de classe II seulement en cas d’activation). Le phénotype des lymphocytes B humains comporte, le récepteur pour l’antigène (BCR, ou Ig de membrane), des molécules HLA de classe I et HLA de classe II.

Certains grands lymphocytes possédant des granules intracytoplasmiques, et d’origine thymique, sont doués d’une propriété cytotoxique spontanée, appelée natural killer (NK).

4- Maturation des lymphocytes :

Tous les lymphocytes passent par des stades de maturation ou de différenciation qui correspondent à l’expression de phénotypes membranaires nouveaux et discriminants, et à l’acquisition de fonctions biologiques.

Bien entendu, le passage d’un stade à un autre est progressif. Dans le thymus, les lymphocytes acquièrent CD3 et le récepteur des cellules T (TCR a/b et c/d), CD4, et CD8.

Ces dernières cellules vont se différencier en deux sous-populations retrouvées également parmi les lymphocytes périphériques, à savoir : les lymphocytes T auxiliaires (helper en anglais), portant CD2, CD3-TCR, et CD4, et les lymphocytes T cytotoxiques, portant CD2, CD3-TCR, et CD8. Le passage par le thymus éduque les lymphocytes T.

Par un phénomène de sélection positive, ne sont conservées que les cellules T-CD4 interagissant avec les molécules HLA de classe II et les cellules T-CD8 interagissant avec les molécules HLA de classe I exprimées par l’épithélium thymique du sujet.

Puis, par un phénomène de sélection négative, sont éliminés les lymphocytes qui ont reconnu des autoantigènes présentés par les CPA thymiques.

Ces sélections entraînent la mort de très nombreux lymphocytes par apoptose.

Les lymphocytes B expriment successivement des molécules HLA de classe II, CD19, CD20, CD21, des chaînes lourdes µ intracytoplasmiques puis des Ig de membrane de classe IgM, IgD, IgG ou IgA.

Les plasmocytes ne portent plus d’Ig de membrane ni d’antigènes CD19, 20 ou 21, ni de molécules HLA de classe II.

B – CELLULES PRÉSENTANT L’ANTIGÈNE :

On range sous ce terme des cellules qui participent à la réponse immunitaire à côté des lymphocytes en leur présentant l’antigène.

Ce sont essentiellement les cellules dendritiques et les lymphocytes B.

1- Cellules dendritiques :

D’origine hématopoïétique et passant par des précurseurs myéloïdes ou lymphoïdes, les cellules dendritiques sont présentes dans le tissu conjonctif de très nombreux organes et dans la peau (cellules de Langerhans).

Leur phénotype correspond d’abord à leur fonction phagocytaire (cellules dendritiques immatures), puis à leur rôle de présentation de l’antigène (cellules dendritiques matures).

Plusieurs cytokines interviennent dans leur différenciation : granulocyte-macrophage-colony stimulating hormone (GM-CSF), tumor necrosis factor (TNF)a, interleukine (IL)4.

Ces cellules migrent vers le ganglion à la rencontre des lymphocytes T naïfs avec qui elles interagissent longuement.

2- Lymphocytes B :

Ils reconnaissent spécifiquement l’antigène qu’ils internalisent.

Après apprêtement de l’antigène, les lymphocytes B présentent des peptides de celui-ci aux lymphocytes T-CD4.

3- Autres cellules présentatrices d’antigènes :

Exprimant des molécules HLA de classe II, la lignée monocytesmacrophages présente également des antigènes aux lymphocytes T, mais à un stade plus tardif de la réponse immunitaire. Sous l’effet de l’interféron (IFN)c, des cellules endothéliales, des mastocytes et des cellules épithéliales peuvent exprimer des molécules HLA de classe II et se comporter alors comme des CPA.

Complexe majeur d’histocompatibilité :

Élément essentiel du système immunitaire, le complexe majeur d’histocompatibilité humain, ou système HLA est traité par ailleurs dans ce traité (cf JF Eliaou).

Réponse immunitaire non spécifique :

Par définition, les moyens de défense non spécifiques de l’organisme interviennent quel que soit l’antigène étranger en cause.

A – BARRIÈRES NATURELLES ET PREMIER CONTACT ENTRE L’ANTIGÈNE ET L’HÔTE :

La première ligne de défense est formée par les barrières naturelles que sont la peau et les muqueuses.

Outre l’obstacle qu’elles représentent, plusieurs autres phénomènes physiques et chimiques concourent à éliminer les antigènes étrangers : desquamation, cils vibratiles, mucus, larmes, pH acide, enzymes, etc.

Dans la majorité des cas, ces barrières ainsi que la flore bactérienne saprophyte empêchent les agents pathogènes de pénétrer.

Interviennent également à ce niveau les IgA sécrétoires.

Les germes pathogènes expriment des motifs moléculaires particuliers (lipopolysaccharides, peptidoglycanes, séquences CpG, etc) qui interagissent avec des cibles spécifiques portées par l’hôte (récepteurs Toll-like, protéines du complément, sucres, etc).

Il existe même un ciblage préférentiel de groupe de pathogènes qui conditionne le mode de réponse immunitaire qui va se développer.

Tout ceci concourt à provoquer un signal de danger, entraînant la réponse inflammatoire.

B – RÉACTION INFLAMMATOIRE AIGUË :

L’inflammation aiguë se déroule en trois phases classiques : phase d’initiation, phase vasculaire et phase cellulaire.

Plusieurs protéines plasmatiques sont activées en cascade : la coagulation, le complément, la fibrinolyse, les kinines, entraînant augmentation de perméabilité vasculaire, attraction et activation des polynucléaires et des monocytes sanguins, et signes cliniques de l’inflammation.

Partenaire particulièrement important de la réponse immunitaire non spécifique, le complément est un ensemble de vingt protéines qui peuvent interagir avec les membranes biologiques et s’activer de façon séquentielle pour donner naissance à plusieurs activités biologiques.

Le complément joue un rôle particulièrement important dans l’immunité anti-infectieuse et dans la pathogénie des lésions de certaines maladies auto-immunes.

Les interactions entre les polynucléaires et l’endothélium vasculaire font intervenir des molécules d’adhésion (sélectines et intégrines) et des facteurs chimiotactiques (chimiokines et leurs récepteurs) qui favorisent le roulement des polynucléaires sur l’endothélium, leur activation, leur adhérence et leur pénétration dans les tissus.

Plusieurs cytokines ont un rôle majeur dans ces phénomènes.

Il s’agit de l’IL1, du TNFa et de l’IL6. Le système est hautement régulé par des cytokines anti-inflammatoires (IL1ra, IL10, IL4) et par le récepteur soluble du TNF.

Les polynucléaires accumulés au site de pénétration de l’antigène étranger phagocytent, détruisent les bactéries extracellulaires, et libèrent des radicaux libres oxygénés, des dérivés de l’acide arachidonique et de nombreuses protéinases.

L’inflammation chronique est le plus souvent la perpétuation d’une période aiguë qui dure normalement de quelques heures à quelques jours lorsque l’agresseur est éliminé.

Dans certains cas, la réaction inflammatoire peut démarrer sur le mode chronique.

C – CYTOTOXICITÉ « NATURAL KILLER » :

Les lymphocytes NK sont cytotoxiques de façon non spécifique de l’antigène.

À l’état normal, des récepteurs membranaires reconnaissant les molécules HLA de classe I empêchent toute activité cytotoxique.

À l’inverse, le défaut d’expression de molécules de classe I (lors d’infections virales ou sur des cellules tumorales par exemple) active les cellules NK et leurs capacités cytotoxiques.

Captation, manipulation et présentation de l’antigène :

La réponse spécifique se déroule selon trois phases successives : une phase de captation, de présentation et de reconnaissance de l’antigène, une phase d’induction et d’interactions cellulaires, et une phase effectrice caractérisée par des anticorps (réponse humorale) et/ou des lymphocytes sensibilisés (réponse cellulaire).

La plupart des antigènes étrangers arrivent par voie respiratoire et digestive où ils sont captés par des cellules dendritiques qui les transfèrent jusqu’au ganglion locorégional.

Au moins lors de la première pénétration d’un antigène dans l’organisme, sa captation est très rapidement réalisée par les CPA (cellules dendritiques et lymphocytes B).

Comme dans la phase non spécifique de la réponse immunitaire, il existe un ciblage préférentiel de groupe de pathogènes, en fonction des motifs moléculaires qu’ils expriment (lipopolysaccharides, peptidoglycanes), vers certains récepteurs des cellules dendritiques (récepteurs Toll-like, en particulier).

Celles-ci assurent des fonctions essentielles de manipulation et de présentation des antigènes, et induisent le déclenchement de la réponse immunitaire.

A – APPRÊTEMENT DES ANTIGÈNES : COUPURE EN PEPTIDES

Au point de pénétration de l’antigène affluent des cellules phagocytaires tissulaires ou qui ont traversé la paroi vasculaire.

Les cellules dendritiques arrivent au contact de l’antigène qui va adhérer sur leur membrane.

Cette adhésion est soit directe (motifs propres aux pathogènes-récepteurs de l’hôte), soit facilitée par l’opsonisation due aux fragments du complément activé par la voie alterne.

Dans un deuxième temps, la membrane cellulaire englobe la particule qui se retrouve à l’intérieur d’une vacuole.

La dernière phase est une phase de digestion, due à l’accolement des lysosomes intracytoplasmiques autour de cette vacuole.

Les enzymes lysosomiales sont alors capables de découper l’antigène en petits peptides de dix à 25 acides aminés.

En effet, la phagocytose complète, détruisant les antigènes, est surtout l’apanage des polynucléaires.

Elle n’a qu’un rôle immunologique très limité, dans la mesure où ce type de cellules finit par succomber à son tour (formation de pus), sans avoir informé le système immunitaire.

En revanche, les cellules dendritiques manipulent les antigènes permettant de retrouver dans les compartiments endosomaux des peptides correspondant aux épitopes antigéniques.

On distingue classiquement deux voies : la voie exogène dans laquelle les bactéries à développement extracellulaire sont phagocytées et coupées en peptides qui se retrouvent dans l’endosome, et la voie endogène dans laquelle les virus pénètrent par eux-mêmes dans les cellules présentant l’antigène, se multiplient de façon endogène (comme les bactéries à développement intracellulaire) et après avoir été coupés en peptides (protéasome) se retrouvent au niveau du réticulum endoplasmique.

Leur transfert dans ce compartiment est assuré par un système de transporteur de peptides, codé également par des gènes HLA de classe II.

B – PRISE EN CHARGE DES PEPTIDES PAR LES MOLÉCULES HLA ET PRÉSENTATION :

Les peptides antigéniques sont liés dans le réticulum endoplasmique par des molécules HLA de classe I (peptide de neuf acides aminés), ou dans les endosomes par des molécules HLA de clase II (peptide de 20-25 acides aminés).

Lorsque la cellule présentant l’antigène exprime ses molécules HLA, elle présente ainsi au système lymphoïde des épitopes antigéniques chargés dans le site de liaison peptide en fonction du polymorphisme allélique de l’individu.

Reconnaissance de l’antigène et conséquences :

Certaines cellules lymphoïdes vierges sont capables de fixer un antigène étranger qu’elles n’ont jamais rencontré auparavant, et de le reconnaître.

Ce phénomène obéit à des règles différentes selon que la reconnaissance est assurée par des lymphocytes B ou T.

A – SÉLECTION CLONALE :

Il existe dès la naissance des familles de lymphocytes, ou clones, dont chacun est porteur de récepteurs spécifiques pour un antigène donné.

Un antigène donné ne peut être fixé et reconnu que par un lymphocyte prédéterminé qui donne naissance à un clone responsable de la réponse contre cet antigène.

La base moléculaire de la sélection clonale est représentée par les structures de reconnaissance que portent les lymphocytes B et T.

B – RECONNAISSANCE PAR LES LYMPHOCYTES B :

Les lymphocytes B lient l’antigène par les récepteurs spécifiques (BCR) que sont les Ig de surface (IgS).

On estime habituellement qu’un individu peut synthétiser jusqu’à 2.106 anticorps différents.

Cette diversité très importante semble couvrir toutes les spécificités antigéniques possibles.

Les Ig sont codées par des centaines de segments de gènes, répartis sur trois chromosomes différents, et qui peuvent présenter des millions de combinaisons possibles.

En effet, à partir de l’acide désoxyribonucléique (ADN) des cellules germinales, il y a un réarrangement somatique qui se produit au cours de la maturation des lymphocytes B.

Les propriétés des BCR permettent aux lymphocytes B de fixer un antigène particulaire entier, non manipulé ni présenté par les cellules dendritiques. De plus le BCR ne reconnaît pas les molécules HLA.

La fixation de l’antigène entraîne une activation cellulaire par transduction du signal assurée par les molécules Igb et Iga associées au BCR. Puis, le complexe BCR – antigène est endocyté par le lymphocyte B qui se comporte comme une cellule présentant l’antigène via les molécules HLA de classe II qu’il exprime naturellement.

La reconnaissance de l’antigène par les lymphocytes B est nécessaire toutes les fois qu’une réponse humorale doit se mettre en place.

C – RECONNAISSANCE PAR LES LYMPHOCYTES T :

La fixation et la reconnaissance de l’antigène étranger sont sous la responsabilité essentielle des cellules T lors des réponses humorales et cellulaires.

Les lymphocytes T possèdent deux types de structures qui participent à la reconnaissance : les récepteurs TCR et des corécepteurs. Les TCR (dont l’expression est liée à la présence de CD3) reconnaissent spécifiquement un peptide étranger et le soi, représenté par les molécules HLA de l’individu (phénomène de restriction syngénique).

Le TCRa/b, le plus fréquemment rencontré, est un hétérodimère formé de deux chaînes glycoprotéiques a et b, dont les gènes disposés sur plusieurs chromosomes sont très nombreux et sont réarrangés selon de multiples combinaisons (environ 106) au cours de la maturation intrathymique des lymphocytes T.

Des corécepteurs se lient à la partie monomorphique des antigènes HLA. CD4 (caractéristique des T auxiliaires) se fixe aux molécules HLA de classe II ; CD8 (caractéristique des T cytotoxiques) se fixe aux molécules HLA de classe I.

Lors de la réponse cellulaire à un virus, celui-ci est reconnu par les lymphocytes T auxiliaires (reconnaissance conjointe des antigènes HLA de classe II) et les lymphocytes T cytotoxiques (reconnaissance conjointe des antigènes HLA de classe I).

La transduction du signal induit par la fixation du complexe peptide – molécule HLA est assurée par les portions intracytoplasmiques de CD3 et de CD4 ou de CD8.

D – ACTIVATION DES LYMPHOCYTES :

La reconnaissance de l’antigène par les lymphocytes T est absolument nécessaire dans tous les types de réponse immunitaire.

Se rencontrant dans un ganglion ou dans une plaque de Peyer, les lymphocytes T et les cellules présentant l’antigène rentrent en contact assez longuement, formant une véritable « synapse immunologique » où plusieurs signaux sont échangés dans les deux sens et de façon séquentielle.

Outre les molécules de reconnaissance indiquées ci-dessus, interviennent des molécules d’adhésion (CD2 – CD58, CD11a/CD18 – CD54) et des molécules de costimulation (CD154 – CD40 et CD28 – CD80).

L’ensemble des signaux membranaires aboutit à l’activation du lymphocyte T à la suite d’une cascade d’événements intracytoplasmiques (phosphorylation de protéines kinases) provoquant la synthèse protéique et la multiplication de la cellule.

Une signalisation insuffisante provoque une anergie.

L’activation lymphocytaire est contrôlée dans le temps et le clone qui a proliféré subit une contraction liée à de nouveaux signaux limitants (CD80 – CD152, CD45).

Interactions cellulaires et cytokines :

La mise en jeu d’une réponse immunitaire, humorale et/ou cellulaire, nécessite de multiples contacts cellulaires et émission de signaux intercellulaires qui favorisent la coopération entre lymphocytes T-CD4 et B et entre lymphocytes T-CD4 et T-CD8.

Les contacts ont lieu dans les follicules lymphoïdes.

La coopération T-B fait intervenir le complexe trimoléculaire TCR-peptide-HLA de classe II, dans lequel le lymphocyte T reconnaît le même peptide que celui qu’il a fixé sur une cellule dendritique.

Les molécules de costimulation CD40 – CD154 sont particulièrement utiles à la différenciation des lymphocytes B et à la commutation isotypique.

L’autre signal est assuré par la production de facteurs de communication intercellulaires que sont les cytokines.

Constituant une nouvelle grande famille de messagers solubles, elles interviennent dans la réaction inflammatoire, la réponse immunitaire, l’hématopoïèse et la circulation des cellules du système immunitaire.

Elles ont en commun un certain nombre de propriétés.

Ce sont de petites glycoprotéines synthétisées par une cellule activée et se liant à des récepteurs membranaires de haute affinité.

Elles agissent à très faibles concentrations (entre la nanomole et la picomole).

Très fréquemment, une cytokine exerce ses effets sur la cellule productrice (effet autocrine) ou sur une cellule voisine (effet paracrine).

Quelques cytokines agissent à distance (effet endocrine comme l’IL1 ou le TNFa).

Une même cytokine peut être produite par plusieurs cellules ; une même cellule peut produire plusieurs cytokines ; une même cytokine peut avoir plusieurs effets, et un même effet peut être obtenu par plusieurs cytokines, tout ceci avec une grande redondance.

Enfin, les cytokines ont des effets en cascade et en réseau. Parmi les cytokines, on distingue les IL, les IFN, le TNF, les facteurs stimulant les colonies (CSF) et les chimiokines (CCL ou CXCL).

Les récepteurs des cytokines appartiennent à quatre familles : récepteurs de la famille du TNF, récepteurs de type Janus-kinases, récepteurs de la superfamille des Ig, récepteurs à sept domaines transmembranaires (pour les chimiokines).

La fixation d’une cytokine sur son ou ses récepteurs provoque la transduction d’un signal dans la cellule qui exprime le récepteur en question.

Régulation Th1 – Th2 :

Les lymphocytes T-CD4 ont deux profils fonctionnels différents, appelés Th1 et Th2.

Les lymphocytes Th1 produisent essentiellement de l’IFNc, de l’IL2 et du TNF et sont responsables de la réponse à la médiation cellulaire.

Les lymphocytes Th2, qui synthétisent principalement l’IL4, l’IL13, l’IL5, l’IL6 et l’IL10, sont à la base de la réponse humorale.

Certaines de ces cytokines ont non seulement un effet inducteur mais aussi suppresseur. Ainsi, l’IL4 et l’IL10 inhibent la réponse Th1 et l’IFNc bloque la réponse Th2.

La polarisation des lymphocytes T-CD4 naïfs (Th0) vers un profil Th1 ou Th2 est contrôlée à plusieurs niveaux :

– par la nature de l’antigène étranger et son type d’interaction non spécifique avec les cellules phagocytaires.

Par exemple, de nombreux parasites induisent une réponse Th2, tandis que les bactéries à Gram positif provoquent plutôt une réponse Th1 ;

– par le mode de présentation de l’antigène.

Les cellules dendritiques qui présentent des peptides en faible quantité induisent plutôt une réponse Th1, tandis que les lymphocytes B présentant des peptides étrangers provoquent plutôt une réponse Th2 ;

– par des cytokines.

La présence d’IL4 (dans le thymus en particulier) et d’IL6 oriente les lymphocytes T-CD4 vers une polarisation Th2, tandis que l’IL12, produite surtout par les cellules dendritiques, induit les Th1 ;

– par ailleurs, il existe des lymphocytes T-CD4 régulateurs, présents en faible quantité dans le sang circulant (de phénotype CD25) et surtout représentés dans la muqueuse intestinale (produisant de l’IL10 et du transforming growth factor [TGF]b) où ils sont responsables de la tolérance orale en induisant une suppression de proximité.

Phase effectrice humorale et cellulaire :

A – RÉPONSE HUMORALE :

Après toutes les étapes indiquées ci-dessus, survient la phase effectrice de la réponse humorale pendant laquelle sont produits les anticorps, synthétisés essentiellement dans les plasmocytes.

1- Structure générale des immunoglobulines :

Les Ig sont les protéines qui portent la fonction anticorps et d’autres fonctions biologiques.

Dans une espèce, et même chez un seul individu, les Ig sont très hétérogènes.

Elles sont ordonnées en classes.

Il existe cinq classes d’Ig dans l’espèce humaine, désignées : IgG, IgA, IgM, IgD, IgE.

Certaines classes sont subdivisées en sousclasses : IgG1, IgG2, IgG3, IgG4, IgA1, IgA2. Les Ig sont toutes des glycoprotéines dont la teneur en sucre est variable.

Leur poids moléculaire (PM) est hétérogène : il varie de 150 à 980 kilodaltons (kDa) : les IgG sont les Ig de plus petite taille, les IgM sont les plus grosses.

La molécule d’IgG est constituée de quatre chaînes polypeptidiques : deux chaînes lourdes ou chaînes H identiques, caractéristiques de la classe ; et deux chaînes légères ou chaînes L identiques.

Les chaînes légères sont identiques dans toutes les classes mais peuvent être de deux types j (kappa) ou k (lambda).

L’étude comparative de l’enchaînement des acides aminés des chaînes H et L permet de diviser chaque chaîne en deux parties : une, N-terminale dont les séquences varient beaucoup d’une chaîne à l’autre (région variable ou V) avec trois zones hypervariables, et la deuxième dont les séquences ne varient pas (région constante ou C).

Les IgM sont des pentamères dont les cinq sous-unités constitutives sont liées par des ponts S-S. Les IgA peuvent exister sous forme monomérique (dans le sérum) ou polymérique (dans les sécrétions) avec une chaîne supplémentaire, le composant sécrétoire qui permet le transport et l’excrétion des IgA sécrétoires.

Les IgE sont les Ig dont la concentration sérique normale est la plus faible.

2- Propriétés des immunoglobulines :

La fonction anticorps est assurée par le fragment Fab.

Ce fragment porte le site de liaison à l’antigène ou site anticorps.

Ce site est localisé aux extrémités du Fab : les deux sites d’une même molécule sont identiques. La molécule d’IgG porte deux sites, les formes dimériques (IgA) quatre, et les pentamères (IgM) dix sites potentiels.

La spécificité du site est déterminée par l’ordre des séquences d’acides aminés dans ces régions, c’est-à-dire par la structure primaire.

Le fragment Fc est le support de plusieurs propriétés biologiques importantes : régulation du catabolisme, traversée du placenta (IgG uniquement), propriété de se fixer sur les membranes de certaines cellules (polynucléaires, monocytes-macrophages, lymphocytes, mastocytes et basophiles) qui possèdent à leur surface des récepteurs pour le fragment Fc de certaines classes et sousclasses, fixation et activation du complément par la voie classique (IgM, IgG1-3).

3- Aspects quantitatifs et qualitatifs :

En réponse à un antigène, l’organisme réagit en activant des lymphocytes B qui se différencient en plasmocytes qui sécrètent des anticorps.

On peut différencier deux types de réponse humorale :

– la réponse primaire correspond à la première introduction d’un antigène étranger dans un hôte.

Elle est caractérisée par la production d’IgM, puis, progressivement, d’IgG ou d’IgA.

Ce phénomène est dû à une commutation d’IgM en IgG ou IgA, qui se produit dans la cellule, sous l’effet des cytokines de type Th2.

La spécificité anticorps demeure la même (les portions variables des chaînes H et L restant identiques), mais la cellule produit des chaînes H-µ, puis H-c ou H-a ;

– la réponse secondaire se produit lors du deuxième contact de l’organisme avec le même antigène.

Elle est caractérisée par la production presque exclusive d’IgG ou d’IgA.

Elles seules sont capables d’augmenter leur affinité pour l’antigène (grâce à des mutations somatiques intervenant dans le site anticorps), rendant la réponse secondaire meilleure et mieux adaptée.

La capacité qu’a le système immunitaire de répondre plus vite à un rappel vaccinal ou à la deuxième attaque d’un agent infectieux traduit l’existence d’une mémoire immunologique qui persiste de nombreuses années et dépend des lymphocytes T et B.

La régulation isotypique, c’est-à-dire le choix de la classe d’anticorps produite, dépend étroitement d’un équilibre entre les deux souspopulations de lymphocytes T-CD4 Th2 et Th1.

B – RÉPONSE CELLULAIRE :

À la différence de la réponse humorale, la réponse à médiation cellulaire ne produit pas d’anticorps, mais seulement des cellules lymphoïdes sensibilisées et spécifiques de l’antigène en cause.

Celles-ci sont essentiellement des lymphocytes T, qui agissent par eux-mêmes et/ou par l’intermédiaire de médiateurs solubles de l’immunité cellulaire.

Dans la réponse à médiation cellulaire, le système immunitaire s’exprime selon deux grands modes : soit, il s’agit d’une synthèse et d’une sécrétion de cytokines, véritables médiateurs d’une réaction inflammatoire chronique d’emblée ; soit, il s’agit d’une réponse cytotoxique sous-tendue par plusieurs types cellulaires différents.

1- Réponse inflammatoire par production de cytokines :

Ce premier mode d’expression de l’immunité cellulaire revêt l’aspect d’une réaction inflammatoire chronique, caractérisée par un infiltrat de cellules mononucléées (lymphocytes et macrophages), disposé en manchon périvasculaire.

Cette inflammation chronique peut apparaître d’emblée, en environ 48 heures, sans passage préalable par un stade d’inflammation aiguë.

Cet aspect de l’immunité à médiation cellulaire est sous la responsabilité des lymphocytes T-CD4 auxiliaires qui constituent l’essentiel de l’infiltrat lymphocytaire de ce type de réaction.

Ces lymphocytes T sensibilisés sont capables de produire et de libérer des chimiokines et des cytokines, agissant à plusieurs niveaux.

2- Réponse cytotoxique :

L’autre moyen d’expression de la réponse cellulaire est la cytotoxicité qu’expriment certaines cellules lymphoïdes, en détruisant in vitro comme in vivo des cellules cibles avec lesquelles elles rentrent en contact direct.

La cytotoxicité T-dépendante est due directement à des lymphocytes T, en l’absence de tout anticorps et de tout complément.

Dans la défense antivirale, les lymphocytes T-CD8 cytotoxiques participent à la phase de reconnaissance du virus en même temps que les cellules T-CD4 auxiliaires.

L’activité cytotoxique se produit vis-à-vis des cellules cibles infectées par le virus et dont les antigènes HLA de classe I sont reconnus par les cellules T cytotoxiques.

Les lymphocytes T cytotoxiques tuent la cellule cible après établissement d’un contact létal direct, et la libération de protéines formant un pore dans la membrane de la cellules cible (perforine) et provoquant la lyse (granzymes).

Effets de la réponse immunitaire spécifique :

L’action des anticorps produits par les plasmocytes et celle des lymphocytes sensibilisés doivent entraîner l’élimination de l’antigène, lors de la réponse immunitaire normale.

La plupart des antigènes induisent une réponse double : humorale et cellulaire.

Mais, en fait, l’existence d’anticorps spécifiques et/ou de lymphocytes sensibilisés ne présage en rien de leur efficacité.

Les deux grandes modalités d’expression de la réponse immunitaire sont : la cytotoxicité qui peut être due aux anticorps en présence du complément, aux cellules NK, ou encore aux lymphocytes T sensibilisés, et l’inflammation due à certains fragments du complément, à la phagocytose des complexes immuns, aux infiltrats de polynucléaires ou de cellules mononucléées attirés et activés par les cytokines.

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