Fractures de l’extrémité supérieure de l’humérus (Suite)

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Clinique :

Les patients consultent habituellement pour une impotence fonctionnelle douloureuse de l’épaule et présentent l’attitude caractéristique des traumatisés du membre supérieur.

L’interrogatoire fait préciser l’âge, le côté dominant, les circonstances du traumatisme, d’éventuels antécédents locaux et les besoins fonctionnels professionnels ou sportifs.

Il s’agit le plus souvent d’accidents de la voie publique ou même domestiques, parfois de traumatismes sportifs ou de polytraumatismes.

Il faut s’efforcer de déterminer le mécanisme.

Le traumatisme est souvent minime, notamment chez les sujets âgés et ostéoporotiques.

À l’opposé, chez les sujets jeunes victimes de traumatismes à haute énergie, les fractures-luxations avec lésions nerveuses sont plus fréquentes.

La notion de crises convulsives, d’électrocution, d’électrochoc est à elle seule évocatrice de luxation ou fracture-luxation postérieure de l’épaule, parfois même bilatérale.

La douleur est le symptôme dominant.

Elle peut être localisée mais elle est souvent diffuse, avec des irradiations cervicales et vers le bras.

L’invalidité peut être totale, mais peut être parfois relative dans certaines fractures parcellaires ou non déplacées.

La recherche d’antécédents, parfois signalés spontanément, doit être systématique (antécédents de luxation récidivante glénohumérale, douleurs nocturnes ou mécaniques de l’épaule évoquant une atteinte de la coiffe des rotateurs).

Fractures de l’extrémité supérieure de l’humérus (Suite)

Un important hématome brachiothoracique d’apparition rapide doit faire rechercher une complication vasculaire.

La classique ecchymose brachiothoracique de Hennequin apparaît fréquemment 24 à 48 heures après le traumatisme.

Elle inquiète souvent les personnes âgées en raison de son ampleur et elle est parfois le motif qui les pousse à consulter.

Elle se résorbe spontanément en 2 à 3 semaines sans aucune séquelle.

Il est difficile de diagnostiquer les fracturesluxations en raison de l’hématome et l’oedème.

Dans les fracturesluxations antérieures, il existe une saillie antérieure et la face postérieure de l’articulation est aplatie.

À l’inverse, dans les fractures-luxations postérieures, il existe un aplatissement antérieur et une saillie postérieure.

Un examen vasculonerveux soigneux doit être pratiqué systématiquement.

Il existe en effet des lésions vasculonerveuses dans 5 à 30% des fractures complexes de l’humérus en raison de la proximité du plexus brachial et de l’artère axillaire.

Les lésions nerveuses et notamment du nerf axillaire ne sont souvent décelées que secondairement, ce qui pose le problème de savoir si la lésion préexistait au traumatisme ou est due au traitement (ostéosynthèse, manoeuvres de réduction, immobilisation dans un appareillage).

Ces lésions sont beaucoup plus fréquentes qu’on ne l’imagine, surtout dans leurs formes purement électromyographiques.

Chez les polytraumatisés, le traumatisme de I’épauIe peut même être totalement méconnu initialement.

Imagerie :

Il existe de nombreuses incidences permettant d’étudier l’extrémité supérieure de l’humérus.

Certaines nécessitent idéalement l’aide de la radioscopie.

La face en double obliquité, le profil transthoracique, le profil dans le plan de l’omoplate, le profil axillaire et la vue apicale oblique sont parmi les incidences les plus utilisées.

La plupart prennent l’omoplate comme plan de référence afin d’enfiler l’interligne articulaire et de dégager l’humérus de la cage thoracique.

Ainsi, le cliché de face stricte, le patient le dos contre la plaque et le rayon perpendiculaire à la plaque, n’a guère d’intérêt et favorise la méconnaissance d’une luxation postérieure.

Il en est de même du profil transthoracique qui analyse l’épaule blessée à travers la cage thoracique sur un patient de profil dont le bras opposé est en élévation.

Les superpositions sont nombreuses rendant l’interprétation difficile.

Le cliché de face classique en double obliquité, obliquité de 20° du patient par rapport à la plaque (épaule opposée soulevée sur un patient en décubitus) et obliquité de 20° du rayon vers les pieds du patient pour enfiler la voûte acromiale, doit être pris en rotation neutre.

Il peut être complété par des clichés en rotation interne puis en rotation externe.

Il est plus difficile de choisir entre les nombreux profils.

Le cliché de profil de l’omoplate de Neer ou profil de Lamy enfile horizontalement l’écaille de l’omoplate.

Il se distingue du profil de coiffe, plus approprié à la pathologie de la coiffe des rotateurs, obtenu sous scopie dont le rayon, également postéroantérieur, est incliné par rapport au plan horizontal de 15° en bas et en avant.

Le cliché de profil axillaire est réalisé l’épaule en abduction, en position assise avec un rayon vertical ou en décubitus dorsal avec un rayon entrant par l’aisselle, horizontal et oblique, perpendiculaire à la plaque placée au-dessus du moignon de l’épaule.

L’épaule traumatisée peut être mise en abduction beaucoup plus facilement qu’on ne le pense en écartant doucement et prudemment le bras du corps.

L’importance des renseignements apportés par cette incidence, à tort peu pratiquée en urgence, suffit à justifier la présence du traumatologue en radiologie.

Néanmoins, la douleur reste un obstacle et a fait proposer le cliché suivant.

La vue apicale oblique, cliché dit « profil de Garth », repose sur le même principe que l’incidence de Velpeau.

Tous les deux ont l’avantage de pouvoir être réalisés le bras en écharpe en rotation interne coude au corps.

Pour le profil de Velpeau, l’incidence est verticale sur un patient ayant le tronc incliné en arrière de 45° vers une plaque horizontale.

Pour le profil de Garth, le rayon est incliné de 45° vers le bas sur un patient debout vers une plaque verticale.

Le profil glénoïdien de Bernageau, destiné à l’étude de la partie antéroinférieure de la glène, n’est pas utilisé dans les fractures de l’extrémité supérieure de l’humérus.

Enfin, le cliché de profil de Bloom et Obata, réalisé avec un rayon ascendant de 35° et qui a été présenté comme l’incidence élective des luxations postérieures, n’est pratiquement plus utilisé.

Dans la pratique quotidienne, les clichés demandés sont encore trop souvent une face et un profil transthoraciques d’intérêt médiocre, en dehors du cas particulier du polytraumatisé où ce sont parfois les seuls clichés réalisables.

La série traumatologique de Neer a le mérite de comprendre plusieurs incidences orthogonales : une face vraie, un profil de Lamy et un profil axillaire.

Dans la majorité des cas, ces clichés standards bien réalisés permettent de poser un diagnostic précis. Mais il est des cas dans lesquels une imagerie standard de bonne qualité ne permet pas de conclure.

L’étude de la Sofcot nous a montré que son intérêt principal est de préciser l’état du trochin et d’analyser les luxationsfractures postérieures.

La réalisation de coupes jointives ou l’acquisition hélicoïdale permettent d’obtenir des reconstructions biet tridimensionnelles dont la résolution s’améliore avec les progrès techniques de l’imagerie.

La TDM, toutefois, ne doit en aucun cas se substituer à des clichés imparfaits, d’autant qu’elle ne pallie pas toutes les insuffisances de la radiographie standard.

Elle se heurte à une difficulté qui rend son interprétation parfois délicate : les coupes sont réalisées dans le plan horizontal alors que les fragments ne sont pas en position anatomique.

Il faut encore insister sur la fausse luxation inférieure, fréquemment observée sur les clichés précoces.

Elle est le plus souvent due à la sidération musculaire liée à la fracture, tout comme une épaule normale présente sous anesthésie générale un certain degré de subluxation inférieure.

Il s’agit d’un épiphénomène qui régresse toujours, plus ou moins rapidement, après rééducation des muscles longs.

Elle ne nécessite aucun geste thérapeutique spécifique.

Néanmoins, elle s’observe également en cas de paralysie circonflexe et son évolution dépend de la gravité de la lésion nerveuse.

Traitement :

A – MÉTHODES THÉRAPEUTIQUES :

L’idéal est la restitution complète et indolore des amplitudes articulaires de l’épaule.

Le risque de capsulite rétractile est particulièrement important et commun à toutes les fractures, incitant à la mobilisation la plus précoce possible.

Les cals vicieux et les nécroses céphaliques ont la réputation d’être bien tolérés à l’épaule.

Il existe en fait un certain parallélisme entre la qualité de la réduction à consolidation et le résultat fonctionnel, justifiant des ostéosynthèses exactes.

Par ailleurs, la survenue d’une nécrose est péjorative, même si elle peut être bien tolérée lorsque la réduction est anatomique ou presque.

Les risques de cal vicieux et de nécrose sont plus élevés dans les fractures articulaires, dont le pronostic fonctionnel est donc plus sombre.

Les nombreuses propositions thérapeutiques témoignent des difficultés rencontrées.

Elles vont du traitement orthopédique à la prothèse humérale en passant par différents types d’ostéosynthèse.

Le chirurgien doit garder à l’esprit un certain nombre de considérations propres au membre supérieur :

– il n’est pas porteur, mais suspendu à la ceinture scapulaire et la simple traction due à la pesanteur a tendance à aligner les fragments ;

– la contention d’une fracture ne nécessite pas une stabilité parfaite sous réserve qu’il existe un contact suffisant entre les fragments ;

– le membre supérieur travaille isolément et il n’y a donc pas de problème d’inégalité de longueur ;

– les cals vicieux extra-articulaires de l’humérus sont mieux tolérés que ceux du fémur ;

– les problèmes d’ostéosynthèse du membre supérieur sont différents de ceux du membre inférieur ; à l’épaule, la récupération de la mobilité est plus difficile : il faut donc privilégier les solutions chirurgicales autorisant une rééducation rapide ;

– l’épaule est une articulation particulièrement fragile : toute ostéosynthèse doit être la moins agressive possible ; les abords extensifs et les ostéosynthèses massives peuvent avoir un retentissement fonctionnel grave.

Il est en fait difficile de trouver un compromis entre une ostéosynthèse légère nécessitant une immobilisation et une ostéosynthèse massive autorisant une rééducation précoce.

1- Traitement orthopédique :

La réduction des fractures déplacées par manoeuvres externes ne permet en fait que d’aligner la diaphyse sous l’épiphyse.

On ne peut en effet agir sur les trois autres segments : le trochiter, le trochin et la tête.

Ces manoeuvres doivent être prudentes car elles peuvent aggraver les lésions osseuses ou entraîner des complications vasculonerveuses.

La réduction d’une luxation associée à une fracture, simple en cas de luxation antéro-interne avec fracture du trochiter, est beaucoup plus difficile, voire impossible en cas de fracture avec tête désengrenée, ou dangereuse lorsqu’une fracture comportant un fragment céphalique est engrenée.

Le relâchement musculaire doit être obtenu sous anesthésie générale avec traction lente et progressive dans l’axe du membre en utilisant éventuellement une contre-extension axillaire.

La tête est refoulée manuellement, voire à l’aide d’un poinçon percutané dont le maniement nous paraît dangereux.

La contention des fractures est assurée dans la grande majorité des cas par un bandage de type Dujarier, qui a le mérite de la facilité.

Le positionnement du bras est guidé par l’alignement de la fracture.

L’abduction est en règle nocive et une discrète adduction permise par une antéflexion et une rotation interne amenant le poignet sur la région épigastrique est souvent souhaitable.

Cette immobilisation est effectuée par de larges bandes Velpeaut renforcées par une bande collante circulaire après un contrôle radiographique de la réduction.

Des bandages du même type sont actuellement disponibles dans le commerce ; ils ont le mérite d’un plus grand confort, et permettent de réduire le risque de mycose du creux axillaire, plus fréquente l’été.

L’immobilisation de type Mayo Clinic à l’aide d’un jersey tubulaire est de réalisation rapide et aisée.

Malheureusement, elle est beaucoup moins stricte et trop permissive.

Son inconvénient majeur est la possibilité d’une rétropulsion humérale en décubitus dorsal, source de déplacement secondaire.

Pour diminuer le risque d’enraidissement de l’épaule en adduction, certains utilisent des attelles d’abduction ou l’appareil de Pouliquen, voire un plâtre thoracobrachial, pour immobiliser en élévation de 45 à 80° dans le plan de l’omoplate.

Cette position est parfois incompatible avec un alignement satisfaisant.

Ces appareillages sont en outre générateurs de compression cutanée ou nerveuse, notamment du nerf cubital au coude, mais ont le mérite d’éviter l’enraidissement coude au corps et de faciliter ainsi la rééducation.

La traction continue par broche transcubitale, qui impose une immobilisation stricte au lit, est anecdotique.

Le plâtre pendant brachio-antibrachio-palmaire n’aligne la fracture qu’en position assise et n’immobilise pas l’épaule.

2- Traitement chirurgical :

* Ostéosynthèses :

Il faut opposer les ostéosynthèses classiques à foyer ouvert et celles plus récentes à foyer fermé.

+ Ostéosynthèses à foyer fermé :

Les plus récentes, elles s’appliquent essentiellement aux fractures extra-articulaires ou à des fractures articulaires peu complexes, telles que les fractures céphalotuberculaires de type II.

Elles ont deux mérites essentiels : réduire le risque infectieux et éviter l’abord direct et ses conséquences (dévascularisation osseuse et des parties molles, adhérences postopératoires).

Pratiquées sous amplificateur de brillance, elles comportent une réduction le plus souvent manuelle mais parfois à l’aide de crochets, spatules ou poinçons introduits par voie percutanée, suivie de fixation par clou centromédullaire, broches ascendantes centromédullaires, voire brochage direct.

Un enclouage centromédullaire par clou de Postel, de Seidel ou de Rush peut être pratiqué par un court abord externe, à travers la coiffe, en sachant son retentissement possible sur la mobilité de l’épaule, notamment en cas de saillie immédiate ou secondaire du clou dans l’espace sous-acromial.

L’embrochage ascendant, à l’aide d’au moins trois broches divergeant en « palmier » dans l’épiphyse, lui est préféré car il n’expose pas à ce risque.

Pour obtenir cette divergence qui assure une plus grande stabilité, les broches doivent être incurvées à leur extrémité.

Il existe plusieurs modalités d’introduction des broches.

Au niveau du coude, Vichard a recommandé un double abord par l’épitrochlée et l’épicondyle, et Hackethal un abord médian sus-olécranien.

Les deux peuvent retentir sur la mobilité du coude et notamment limiter l’extension.

L’abord à la pointe du V deltoïdien proposé par Kapandji met à l’abri de cet inconvénient.

En revanche, il est plus difficile d’obtenir une bonne divergence épiphysaire des broches, en raison du trajet moins direct des broches qui « rebondissent » sur la corticale interne.

Enfin, il expose, en cas d’abord trop postérieur, à la lésion du nerf radial, lors de la pose des broches comme de leur ablation.

Plus récemment, certains ont proposé le brochage direct à l’aide de deux ou trois broches croisées dans l’espace pour assurer une stabilité suffisante.

On peut même les remplacer par des vis canulées guidées par ces broches.

Il s’agit d’interventions difficiles nécessitant le contrôle radioscopique peropératoire de face et de profil de la réduction, parfois instable ou imparfaite, et de la bonne position des broches.

Celles-ci peuvent faire issue dans l’articulation ou par un trait de fracture, d’emblée ou secondairement, par migration des broches ou impaction de la fracture.

Elles peuvent également reculer, toutes complications qui nécessitent l’ablation précoce des broches en cause.

La stabilité du foyer fracturaire obtenue est souvent imparfaite et en tout cas insuffisante pour permettre une mobilisation précoce, surtout en rotation.

Une immobilisation complémentaire est habituellement nécessaire.

En cas de difficultés de réduction ou d’introduction des broches, il ne faut pas s’obstiner à foyer fermé et aborder le foyer, ce que l’installation doit permettre.

+ Ostéosynthèses à foyer ouvert :

Voie d’abord : la voie d’abord deltopectorale, la plus utilisée, permet l’ostéosynthèse de la grande majorité des fractures.

Elle ne procure qu’un jour limité sur le tubercule majeur, qui peut être amélioré en portant le bras en abduction et rotation interne.

Elle peut être élargie à son extrémité inférieure en désinsérant la branche antérieure du V deltoïdien.

La désinsertion haute du deltoïde antérieur est déconseillée.

L’ostéosynthèse du tubercule majeur ne nécessite qu’une courte voie transdeltoïdienne externe.

En cas de nécessité, ces deux voies peuvent être associées mais on peut également, par une incision cutanée un peu plus latérale que l’incision deltopectorale, accéder en dedans au sillon deltopectoral et en dehors à la partie moyenne du deltoïde pour un abord complémentaire du tubercule majeur.

D’autres voies sont employées comme la voie supéroexterne avec détachement du deltoïde acromial, la voie transacromiale ou la voie deltotrapézienne.

Elles procurent une bonne exposition de l’épiphyse mais un accès limité à la diaphyse.

Des voies postérieures ont été proposées pour les fractures-luxations postérieures.

Elles n’offrent qu’un jour limité, notamment sur la diaphyse.

Abord du foyer : il doit dévasculariser le moins possible les fragments osseux et notamment le fragment porteur du segment céphalique.

Les sections musculaires et capsulaires doivent être évitées ou réduites au strict minimum.

Il faut également proscrire les ostéotomies tuberculaires qui dévascularisent le fragment céphalique.

La règle pour exposer le foyer est d’écarter les fragments osseux en respectant les parties molles qui s’y insèrent.

Ainsi, dans les fractures céphalotuberculaires, l’abord du fragment céphalique est intertubérositaire en écartant les deux tubérosités séparées l’une de l’autre, ou plus rarement sous-tubérositaire lorsqu’elles sont situées sur le même fragment.

Les fragments osseux, souvent fragiles et refendus, doivent être manipulés avec précaution.

Ostéosynthèses : plusieurs types d’ostéosynthèse sont utilisés depuis la synthèse a minima par ostéosutures au fil non résorbable jusqu’à la plaque épiphysaire ou ses dérivés (clous-plaques ou lamesplaques de petite taille), en passant par les clous, cerclages, broches, haubans, vis, agrafes.

Les cerclages au fil métallique sont déconseillés en raison du risque de rupture et de migration, parfois intra-articulaire.

Ces ostéosynthèses peuvent être diversement associées.

Citons encore le remodelage du moignon diaphysaire encastré dans le fragment épiphysaire en « bilboquet » ou l’enchevillement diaphysoépiphysaire à l’aide d’un greffon iliaque.

Le plus difficile est d’assurer le raccordement épiphysodiaphysaire, surtout lorsque le fragment proximal est peu volumineux et fragile.

La plaque et ses dérivés sont des ostéosynthèses extensives nécessitant une large exposition qui risque d’aggraver la dévascularisation osseuse.

Elles exposent à l’issue intra-articulaire de vis trop longues.

Leur point faible est la prise parfois médiocre du matériel dans le spongieux épiphysaire et, en cas de nécrose céphalique, ce matériel peut faire issue dans l’articulation et entrer en conflit avec la glène.

Il est essentiel que le bord supérieur de la plaque ne dépasse pas le bord supérieur du trochiter.

Son positionnement doit encore tenir compte de la proximité de la berge externe de la coulisse bicipitale où chemine l’artère ascendante antéroexterne. Les enclouages ou embrochages descendants ont l’inconvénient de fragiliser la coiffe et de pouvoir entrer en conflit avec la voûte, notamment en cas de recul.

Il est possible de leur associer un cerclage en huit prenant appui sur le matériel en haut et sur la diaphyse en bas, réalisant un hauban.

* Arthroplasties humérales :

La prothèse humérale simple scellée est le recours ultime en cas d’ostéosynthèse impossible techniquement ou de fracture exposant à un risque de nécrose important.

L’abord articulaire se fait en règle par écartement des tubérosités en sectionnant la capsule entre supraspinatus et subscapularis (abord intertubérositaire) ou en soulevant les deux tubérosités ensemble (abord sous-tubérositaire) lorsque les deux tubérosités sont situées sur un même fragment ou solidarisées par des attaches périostées.

Cet abord facilite peut-être la reconstruction métaphysaire mais il nécessite la rupture des attaches périostées à la diaphyse et donne un jour limité sur l’articulation.

La reconstruction humérale doit être la plus exacte possible.

Ceci nécessite le rétablissement de la longueur humérale, une rétroversion prothétique correcte, le rétablissement de la largeur épiphysaire, une fixation prothétique stable et une ostéosynthèse solide des tubérosités.

Certaines lésions associées nécessitent des gestes spécifiques comme la suture d’une rupture de coiffe, le cerclage d’une extension diaphysaire de la fracture, voire un geste vasculaire dans d’exceptionnelles lésions artérielles.

Dans une fracture-luxation, il est logique de pratiquer l’ostéosynthèse d’une fracture de la glène, la suture d’une déchirure capsulaire ou la réinsertion d’un décollement capsulopériosté, afin de réduire le risque de luxation postopératoire.

Il est en revanche illogique d’augmenter la rétroversion en cas de luxation antérieure et de la diminuer en cas de luxation postérieure, ce qui modifie la position des tubérosités et sollicite exagérément la fixation de celle qui se trouve attirée trop en avant ou en arrière, exposant aux démontages, pseudarthroses et cals vicieux.

Certaines fractures glénoïdiennes comminutives posent un problème particulier.

En effet, l’impossibilité de fixer les fragments détachés expose à l’instabilité prothétique et on peut, dans ce cas, discuter une butée ou la totalisation de la prothèse.

Cependant, ces gestes alourdissent l’intervention et il vaut mieux les éviter dans ce contexte traumatique.

Hormis ce rare cas ou celui d’importantes altérations du cartilage glénoïdien préexistantes au traumatisme, la prothèse totale n’est pas justifiée dans les fractures récentes.

2- Rééducation :

Elle est capitale et conditionne en partie le résultat final.

À l’issue du traumatisme et d’une éventuelle intervention, toutes les conditions sont réunies pour aboutir à une raideur de l’épaule : hémarthrose, source de fibrose intra-articulaire ; hématome périarticulaire, source de coalescence des bourses séreuses ; contusion musculaire, source d’hypotonie et ensuite de rétraction ; parfois déchirure capsulaire, source d’instabilité et ensuite de fibrose capsulaire.

Le chirurgien doit expliquer au rééducateur et au patient le principe et les buts de la rééducation.

Les doigts, le poignet et le coude doivent être mobilisés activement le plus tôt possible mais la mobilisation de l’épaule ne peut être que passive jusqu’à obtention de la consolidation :

– elle commence par les exercices pendulaires brefs mais répétés dans la journée ;

– l’élévation est rééduquée par une automobilisation en décubitus dorsal, le coude tendu, avec des élévations lentes de la plus grande amplitude possible ;

– les rotations sont travaillées les coudes au corps fléchis à 90°, à l’aide d’un bâton tenu dans les deux mains mais seulement mobilisé par le membre supérieur sain.

Les séances doivent être répétées dans la journée.

L’idéal est de rééduquer passivement l’épaule le plus tôt possible, dans des secteurs de mobilité précisés par l’opérateur en fonction de la stabilité de l’ostéosynthèse.

Une rééducation précoce et agressive peut être néfaste dans les ostéosynthèses a minima ou insuffisamment stables, par le biais d’un déplacement secondaire.

Cette règle s’applique également aux prothèses humérales où les modalités de la rééducation dépendent de la solidité de l’ostéosynthèse tuberculaire.

Chaque fois qu’une ostéosynthèse paraît insuffisante, la rééducation est débutée plus tardivement, après une période d’immobilisation, au mieux en abduction aux alentours de 45°.

Les exercices actifs sont différés jusqu’à constatation radiographique de la consolidation, soit habituellement à 6 ou 8 semaines.

Un programme complet d’exercices d’étirement et de renforcement musculaires est alors débuté.

Les exercices quotidiens doivent être poursuivis pendant au minimum 6 mois, pour corriger les déficits résiduels de mobilité ou de force.

Cette rééducation idéale ne peut cependant s’appliquer à tous les cas.

Certains patients très âgés ou à l’état général et intellectuel altéré ne peuvent coopérer à ce programme.

En cas d’ostéoporose et de comminution importantes, la mobilisation précoce expose au démontage et à la pseudarthrose.

Dans ces cas, la rééducation doit être prudente et au besoin débuter une fois la fracture consolidée.

B – INDICATIONS :

Elles sont discutées.

Nos orientations découlent de l’analyse statistique des résultats de la série du symposium de la Sofcot 1997.

1- Fractures extra-articulaires :

* Fractures tuberculaires :

+ Fractures du tubercule majeur ou trochiter :

L’indication dépend de l’importance du déplacement supérieur ou postérieur.

La limite du déplacement acceptable est de 10 mm, le traitement orthopédique restant indiqué en deçà.

La position d’immobilisation est discutée. L’abduction et la rotation externe détendent les muscles insérés sur le fragment détaché.

Toutefois, il n’est pas prouvé que cette position permette de réduire le déplacement.

En cas de luxation antéro-interne associée, il faut privilégier la cicatrisation capsuloligamentaire antérieure par une immobilisation en rotation interne et éventuellement légère élévation.

Cette position expose à une aggravation du déplacement postérieur qu’il est impossible d’apprécier sur des clichés standards.

Dans de rares cas, une TDM peut être nécessaire.

Dans tous les cas, des radiographies de contrôle sont nécessaires en raison du risque de déplacement secondaire.

L’ostéosynthèse par un abord transdeltoïdien externe est indiquée en cas de déplacement supérieur ou postérieur de plus de 10 mm, de luxation irréductible par interposition du tendon du long biceps ou de luxation incoercible.

Il est difficile de fixer le fragment, souvent fragile et refendu, parfois limité à une fine écaille corticale amincie par l’ostéoporose.

Le choix du matériel est conditionné par le caractère mono- ou plurifragmentaire de la fracture.

Un volumineux fragment monobloc et solide se prête au vissage appuyé sur rondelle.

En cas de fragment refendu et de fragilité osseuse, la tenue des vis est très incertaine.

La suture ou un laçage transosseux au fil non résorbable prenant appui sur le tendon terminal du supraspinatus est une technique plus sûre.

Il faut y associer la suture de la déchirure de la coiffe située entre les muscles supraspinatus et subscapulaire.

Une immobilisation en élévation dans le plan de l’omoplate pour détendre la coiffe et soulager la suture est nécessaire pendant 3 à 4 semaines, avec rééducation passive précoce si l’ostéosynthèse l’autorise.

Le délai de prise en charge chirurgicale est un paramètre important.

Les résultats modestes des traitements chirurgicaux tardifs trouvent une probable explication dans la rétraction rapide de la coiffe rendant difficile la réduction et sollicitant la fixation.

L’intervention doit être pratiquée avant 10 jours, une fois l’indication opératoire posée.

+ Fractures du tubercule mineur ou trochin :

L’ostéosynthèse, par vissage ou suture, est indiquée en cas de déplacement, de fracture détachant une partie importante de la surface articulaire ou de luxation postérieure incoercible.

Les risques de déplacement secondaire, de pseudarthrose, de cal vicieux avec limitation de la rotation interne, de pathologie du long biceps, voire d’instabilité antérieure, justifient d’opérer la quasi-totalité des fractures déplacées.

En cas de luxation postérieure, il peut être nécessaire de relever une fracture-tassement céphalique antérieure associée à la fracture tuberculaire.

L’abord est deltopectoral.

* Fractures sous-tuberculaires :

+ Fractures sous-tuberculaires isolées :

Un grand nombre de ces fractures, souvent engrenées et peu déplacées, est traité orthopédiquement par une immobilisation de 3 semaines, au prix de cals vicieux extra-articulaires modérés en règle bien tolérés.

Les cals vicieux métaphysaires en varus le sont moins, mais il ne nous a pas été possible de déterminer l’importance de l’angulaire acceptable.

L’ostéosynthèse est indiquée en cas d’échec immédiat ou secondaire du traitement orthopédique, de fracture à grand déplacement, de complication artérielle, chez les polytraumatisés et en cas de traumatisme étagé du membre supérieur.

L’ostéosynthèse par plaque épiphysaire permet une réduction anatomique mais elle suppose un os spongieux résistant et un fragment proximal suffisamment volumineux.

Du ciment permet d’améliorer la tenue des vis, mais cette technique ne saurait être utilisée que chez des sujets âgés et fait craindre d’importantes difficultés en cas d’infection.

L’enclouage à foyer fermé est plus sûr en cas de fragilité osseuse ou de fragment proximal peu volumineux. Le matériel est introduit à la jonction de la tête humérale et du trochiter par une courte incision de la coiffe après un abord externe transdeltoïdien vertical.

On peut utiliser un clou de Postel à tête plate ou deux clous de Rush, moins volumineux.

Cette ostéosynthèse ne bloque pas les rotations. Pour pallier ce défaut, on peut y associer un agrafage ou mieux un cerclage en huit appuyé en haut sur le matériel et en bas sur la diaphyse (dans un orifice transversal ou sur la saillie d’une tête de vis), réalisant un hauban d’une grande stabilité.

Le matériel peut reculer lors de l’impaction du foyer et entrer en conflit avec la voûte, nécessitant une ablation de matériel dès la consolidation acquise.

Le clou de Seidel, qui peut désormais être verrouillé à ses deux extrémités grâce à un récent trou de vis plus proximal, est une autre solution.

L’enclouage fasciculé, au mieux à foyer fermé sous contrôle radioscopique, favorise la récupération fonctionnelle.

La technique de Kapandji est souvent préférée aux techniques par voie basse car elle respecte le coude.

Elle est déconseillée en cas de fracture diaphysaire associée située à proximité du point d’entrée des broches. En cas de difficulté, l’abord du foyer facilite la réduction et l’introduction des broches.

+ Fractures sous-tuberculaires avec fracture du tubercule majeur ou mineur :

Fractures sous-tuberculaires et du tubercule majeur : la fracture du tubercule majeur complique l’ostéosynthèse de la fracture soustuberculaire.

La plaque épiphysaire doit fixer les deux fractures ou être associée à une ostéosynthèse séparée du trochiter.

Les enclouages descendants sont critiquables car le clou ou les broches doivent être introduits dans la surface articulaire.

L’embrochage fasciculé est difficile car les broches risquent de sortir par la fracture tuberculaire.

Celle-ci nécessite en outre une réduction et un brochage percutanés difficiles en cas de déplacement.

L’enclouage à l’aide de deux clous de Rush et d’un cerclage en huit nous paraît plus sûr.

Nous n’avons pas l’expérience du laçage de Hawkins, qui ne semble pas assurer une stabilité suffisante.

Chez les sujets âgés ostéoporotiques, les auteurs anglo-saxons ont proposé une prothèse humérale d’emblée ou en cas d’ostéosynthèse difficile.

Cette indication doit être réservée à des cas exceptionnels.

Fractures sous-tuberculaires et du tubercule mineur : la fracture du tubercule mineur ne complique pas l’ostéosynthèse soustuberculaire mais nécessite, par un abord deltopectoral, une ostéosynthèse séparée du trochin.

2- Fractures articulaires :

* Fractures du col anatomique :

Il est bien difficile de codifier le traitement d’une fracture aussi rare.

Les indications suivantes, à défaut d’être basées sur l’expérience, ont le mérite de la logique :

– dans les formes engrenées, le traitement orthopédique est d’autant plus légitime que le contact est important ;

– le traitement doit être en revanche chirurgical en cas de déplacement important dans les fractures désengrenées, les fractures-luxations et peut-être en cas d’engrènement avec contact inférieur à 50 %.

Chez le sujet âgé, le risque de nécrose céphalique incite à la prothèse humérale d’emblée.

Chez le sujet jeune, l’ostéosynthèse paraît licite en raison des incertitudes des prothèses et on a le choix entre ostéosuture, broches et vis, mais dans cette éventualité il faut retirer le matériel intracéphalique rapidement.

Le risque de nécrose est en effet important et le matériel peut entrer en conflit avec la glène.

Une prothèse de seconde intention peut être pratiquée dans de bonnes conditions car les tubérosités sont intactes.

* Fractures céphalotuberculaires :

Le recours à la prothèse peut se justifier dans ces fractures par le risque élevé de nécrose céphalique.

La nécrose peut compliquer l’évolution d’une fracture engrenée de type II ou même I, mais encore plus celle des fractures désengrenées des types III et IV.

L’artère antéroexterne est interrompue par le trait de fracture du col anatomique.

La vascularisation céphalique peut encore être assurée par des connexions capsulaires postéro-internes, insérées sur le fragment céphalique lorsque le trait de fracture passe au moins 1 cm sous le cartilage.

Dans les fractures engrenées, le risque de nécrose est moins élevé car la tête peut être encore vascularisée par des connexions périostées internes avec la diaphyse, respectées lorsqu’il n’existe pas de translation entre la diaphyse et le fragment céphalique.

Dans les fractures désengrenées, il n’y a plus de connexions périostées et les éventuelles connexions capsulaires risquent fort d’être rompues, surtout en cas de luxation.

Dans les fractures-luxations engrenées, les connexions capsulaires risquent de l’être également.

La nécrose céphalique est radiologiquement visible avant 36, voire 24 mois, mais elle peut n’être que partielle et surtout son retentissement fonctionnel est variable.

Parfois invalidante, elle est souvent compatible avec une fonction acceptable lorsque la réduction épiphysaire à consolidation est bonne et lorsque l’effondrement n’est pas massif.

Son évolution à long terme est mal connue mais se fait vraisemblablement vers l’omarthrose avec enraidissement progressif de l’épaule.

Les indications dépendent de l’âge et du type fracturaire.

+ Âge :

Les résultats fonctionnels des prothèses sont inconstants et leur avenir menacé d’usure de la glène, de rupture secondaire de la coiffe, voire de descellement.

Ces incertitudes incitent à les réserver à des patients de plus de 60 ou 65 ans et à traiter les sujets jeunes par ostéosynthèse, au prix d’un risque élevé de nécrose céphalique.

Celle-ci, en effet, peut être bien tolérée, sous réserve d’une réduction épiphysaire exacte.

Cette attitude doit cependant être nuancée.

D’une part, le respect des impératifs techniques permet d’espérer de meilleurs résultats fonctionnels et peut-être une plus grande longévité des prothèses.

D’autre part, l’ostéosynthèse n’est pas dénuée de complications : cal vicieux et raideur qui compliquent une reprise par prothèse dont le résultat est moins bon que celui d’une prothèse de première intention.

La décision dépend de la confiance que l’on a dans les prothèses, et celle-ci est moins importante en Europe que chez les auteurs anglo-saxons, de la qualité et de la comminution osseuses, qui se prêtent mal à l’ostéosynthèse chez les sujets âgés, et du risque de nécrose céphalique, qui dépend du type fracturaire.

+ Type fracturaire :

Formes engrenées

Les fractures du type I, très peu ou non déplacées, relèvent d’une simple immobilisation dans un bandage de Dujarier pendant 3 semaines.

Le traitement des fractures du type II est très discuté.

Le traitement orthopédique a le mérite de la simplicité, diminue pour certains le risque de nécrose céphalique en laissant la tête impactée, mais il laisse persister les déplacements céphalique et tuberculaire.

Le rôle pathogène de l’horizontalisation céphalique n’est pas prouvé.

En revanche, le déplacement postérieur du trochiter peut limiter la rotation externe par conflit avec le bord postérieur de la glène et le déplacement interne du trochin peut limiter la rotation interne, par conflit avec le bord antérieur de la glène.

De plus, l’ascension relative du trochiter fait craindre une limitation de l’élévation par conflit avec la voûte.

Ce cal vicieux peut être bien toléré, mais inconstamment et de manière imprévisible, et son traitement est difficile.

En l’absence de nécrose céphalique, une ostéotomie avec abaissement et avancement du trochiter peut améliorer la mobilité mais elle fait craindre une dévascularisation céphalique.

En cas de nécrose céphalique associée, la prothèse est difficile en raison du cal vicieux tubérositaire associé.

Les résultats de la série du symposium sont en faveur du traitement chirurgical des fractures dont l’angle d’inclinaison frontale du fragment céphalique est inférieur à 20°, le déplacement du tubercule majeur supérieur à 5 mm ou celui du trochin supérieur à 10 mm.

Les rares fractures engrenées en varus sont de mauvais pronostic et grevées d’un taux de nécrose élevé.

Il paraît licite de rétablir l’anatomie chez les sujets jeunes et de recourir d’emblée à la prothèse chez les sujets âgés.

Chez les sujets jeunes, une réduction anatomique laisse espérer la récupération d’une bonne fonction et, en cas de nécrose céphalique invalidante, l’absence de cal vicieux tuberculaire simplifie la reprise par prothèse.

Par voie deltopectorale ou antéroexterne, la réduction consiste à relever le fragment céphalique impacté, autour d’une charnière interne qu’il faut respecter.

La hauteur du relèvement est déterminée par la réduction du tubercule majeur entre la diaphyse en bas et la tête humérale en haut.

Un brochage temporaire maintient la réduction.

Il n’est pas démontré que le relèvement céphalique aggrave le risque de nécrose.

Le vide créé par le relèvement céphalique est effacé en grande partie par les tubercules mais il peut paraître logique de le combler par une greffe osseuse spongieuse ou corticospongieuse.

Cette dernière peut même assurer une stabilité suffisante pour se passer d’ostéosynthèse.

L’ostéosynthèse par plaque est difficile en raison de la taille réduite du fragment céphalique et elle est accusée d’aggraver la dévascularisation céphalique.

L’enclouage à travers le fragment céphalique est critiquable.

L’embrochage fasciculé expose à l’issue des clous par les traits détachant les tubérosités ou même à travers la calotte humérale souvent fragile.

Le resanglage tuberculaire est souvent suffisant pour maintenir le relèvement céphalique.

Le tubercule majeur peut être fixé par vissage mais mieux par un cerclage en huit au fil non résorbable, prenant appui en haut sur la terminaison du supraspinatus et en bas à travers ou autour de la diaphyse.

Le tubercule mineur est fixé séparément si nécessaire.

Cette technique se rapproche de celle proposée dans les fractures sous-tuberculaires avec fracture du trochiter, qui recommande un cerclage en huit appuyé en haut sur le sommet du trochiter et en bas sur la diaphyse (dans un tunnel transosseux ou autour de la saillie d’une tête de vis).

Pratiquée sous amplificateur de brillance, l’ostéosynthèse à foyer fermé comporte une réduction à l’aide de crochets, spatules ou poinçons introduits par voie percutanée, suivie de fixation par des broches ou des vis.

Toutefois, la réduction peut être difficile, le matériel n’a que peu de prise dans l’os sous-chondral et peut faire issue par les traits de fracture ou à travers le fragment céphalique très mince.

Chez les sujets âgés, la prothèse humérale permet de rééduquer rapidement l’épaule et assure l’indolence et une mobilité active souvent compatible avec les exigences fonctionnelles.

Elle paraît d’autant plus indiquée que le déplacement est important.

Formes désengrenées et luxées

Le traitement orthopédique semble dépassé.

Il a été utilisé principalement chez le sujet âgé ou en mauvais état général avec des résultats objectifs mauvais mais dont les plus âgés se contentent parfois.

En fait, sa place se discute surtout dans les fracturesluxations.

Des tentatives de réduction de fracturesluxations/ fractures désengrenées ont été proposées par certains.

Les chances de succès sont très incertaines et ces manoeuvres peuvent même aggraver les lésions osseuses ou entraîner des complications vasculonerveuses.

Au mieux, elles permettent d’aligner la diaphyse sous l’épiphyse, aboutissant ainsi à un cal vicieux métaphysoépiphysaire.

La tentative de réduction se discute avant tout dans les fractures-luxations antérieures engrenées.

Si l’on parvient à réduire la luxation sans désengrener la fracture, on se trouve ramené à une fracture céphalotubérositaire de type II dont le déplacement dicte la suite du traitement.

Le risque de désengrènement est majeur et, dans cette éventualité, la nécrose est quasi constante.

Un embrochage à foyer fermé préalable à la réduction de la luxation peut être discuté.

Il peut éviter le désengrènement, mais n’assure pas une réduction satisfaisante de la fracture. Nous n’en avons pas l’expérience.

Le traitement chirurgical est le plus souvent nécessaire.

La difficulté est de choisir entre ostéosynthèse et prothèse.

L’étude des résultats des ostéosynthèses montre que le facteur pronostique essentiel est la qualité de la réduction à consolidation.

Celle-ci est rarement anatomique au-delà de 60 ans, ce qui peut s’expliquer par la mauvaise tenue du matériel et la plus grande complexité des fractures chez les sujets âgés à l’os porotique.

Cette constatation, à laquelle s’ajoute un risque élevé de nécrose céphalique, incite à la prothèse chez les sujets âgés.

L’existence d’une luxation (type IV) ne nous paraît pas être un argument supplémentaire en faveur de la prothèse.

Chez le sujet jeune ou à l’os solide, l’ostéosynthèse paraît légitime sous réserve d’une réduction satisfaisante.

Il est difficile de réduire exactement ces fractures en raison de la perte de substance métaphysoépiphysaire et de la fréquente comminution des tubérosités.

L’instabilité est plus importante que dans les fractures du type II car il n’y a plus aucune connexion entre le fragment céphalique, la diaphyse et les tubérosités, et il est donc nécessaire d’assurer un raccordement épiphysodiaphysaire stable.

La fixation à foyer fermé est difficile et incertaine.

Elle fait appel à l’embrochage ascendant dans les fractures-luxations, après réduction orthopédique ou à ciel ouvert, ou à l’embrochage direct percutané.

La fixation à foyer ouvert est plus sûre.

La voie préférentielle est deltopectorale avec abord intertubérositaire.

Dans les fracturesluxations postérieures, d’autres voies, supérieure ou postérieure, ont été proposées.

Elles procurent un accès satisfaisant aux tubérosités et à la calotte céphalique, mais limité à la diaphyse avec pour conséquence des difficultés de fixation.

Les plaques exposent au déplacement secondaire en raison de la mauvaise tenue épiphysaire des vis.

Un haubanage appuyé sur des broches centromédullaires plutôt que sur un clou de Postel implique une lésion iatrogène du cartilage céphalique et expose à la migration proximale du matériel, mais nous paraît être la moins mauvaise solution.

Le vissage isolé ou le brochage direct, associé à des laçages ou sutures osseuses des tubercules, est souvent insuffisant.

Actuellement, l’évolution se fait vers une fixation stable mais la moins invasive possible.

En cas de nécrose céphalique invalidante, la reprise par prothèse est possible, sous réserve que la réduction à consolidation soit anatomique.

Lorsque la réduction ou une fixation stable s’avère impossible, il vaut mieux passer d’emblée à la prothèse plutôt que d’accepter un cal vicieux dont la reprise par prothèse est difficile et le résultat très incertain.

Cette attitude, nuancée selon l’âge, diffère de celle des auteurs américains, partisans de la prothèse à tout âge en raison de la fréquence des échecs d’ostéosynthèse et des moins bons résultats des prothèses de deuxième intention.

* Fractures issues des encoches céphaliques :

+ Fractures céphalométaphysaires secondaires aux luxations antérieures :

La tête reste vascularisée par ses attaches capsulaires et le muscle subscapularis inséré sur le tubercule mineur.

Le fragment céphalométaphysaire est désolidarisé de la diaphyse et ne peut, en règle, être réduit orthopédiquement.

L’ostéosynthèse est la règle.

La voie d’abord deltopectorale est conseillée, mais ensuite la libération du fragment céphalométaphysaire doit être la moins dévascularisante possible.

Il ne faut pas couper le subscapularis ni dépérioster de façon extensive l’éperon cervical ou en désinsérer la capsule.

Le caractère très vertical expose à un défaut de réduction avec un chevauchement résiduel, donnant un faux aspect de cal vicieux du trochiter.

La pointe de cet éperon guide la réduction.

L’ostéosynthèse doit être stable.

Un vissage ou une plaque sont préférables aux broches. Une immobilisation de 3 semaines coude au corps est nécessaire pour obtenir la cicatrisation des lésions capsuloligamentaires dues à la luxation antérieure.

Moyennant une ostéosynthèse exacte sans dévascularisation du fragment céphalométaphysaire, le pronostic est bon.

Il n’existe pas d’indication de prothèse dans ces fractures.

+ Fractures céphalométaphysaires secondaires aux luxations postérieures :

En cas de luxation irréductible ou de déplacement inacceptable après réduction, l’intervention s’impose mais elle ne doit pas être systématique.

En effet, la réduction orthopédique de la luxation et en même temps de la fracture peut être obtenue dans certaines fractures simples et, dans cette éventualité, donner un excellent résultat après immobilisation en rotation neutre pendant 4 semaines.

Cette réduction doit être obtenue facilement, sans manoeuvres de force.

Nous ne sommes pas partisans des manipulations percutanées du fragment luxé à l’aide d’un poinçon.

La tentative de réduction orthopédique n’est pas dangereuse dans ces fractures déjà désengrenées par le traumatisme.

Nous n’avons aucune expérience de l’abord postérieur, recommandé par Vichard.

Il permet de réduire la luxation et de réparer les lésions capsulaires mais il ne procure qu’un jour limité qui rend l’ostéosynthèse difficile, voire impossible, en cas de fracture associée du col chirurgical et ne permet pas d’agir sur l’encoche ni sur une fracture du trochin.

Enfin, il n’autorise pas le passage à la prothèse humérale en cas de nécessité.

D’autres ont recommandé un abord supérieur transacromial.

Nous recommandons la voie deltopectorale avec section du subscapularis à proximité de son insertion, sauf en cas de fracture du trochin qui est un équivalent de cette section.

Après réduction du fragment céphalique luxé en arrière selon une manoeuvre de « démonte-pneu », le vissage est souvent possible, sauf en cas de fracture du col chirurgical associée, où la plaque est le plus souvent nécessaire.

L’encoche céphalique des luxations postérieures, quasi constante, est une véritable fracture-tassement.

Elle peut nécessiter à elle seule un traitement chirurgical.

Les indications dépendent de l’importance de l’encoche.

En cas d’encoche intéressant moins de 30 % de la surface articulaire, la réduction orthopédique est suffisante.

Elle est suivie d’une immobilisation en rotation neutre pendant 4 semaines.

De 30 à 50 %, le traitement est chirurgical et conservateur : relèvement avec éventuel comblement par de l’os spongieux, suture du subscapularis dans l’encoche selon Mac Laughlin ou vissage du trochin dans l’encoche selon Neer et Hawkins.

Un fragment d’allogreffe fémorale vissée pourrait être nécessaire en cas de destruction complète d’un croissant ostéocartilagineux, mais cette technique est surtout indiquée dans les cas anciens.

Ce n’est que dans de rares destructions céphaliques de plus de 50 %, très rares, que l’arthroplastie humérale peut être nécessaire.

Dans cette éventualité, il faut veiller à ce que la rétroversion ne dépasse pas 20° pour minimiser le risque de luxation postérieure postopératoire.

Il faut surtout insister ici sur le risque des tentatives de réduction des luxations postérieures pures qui doivent être très prudentes car l’encoche est pratiquement constante et peut être le point de départ d’une fracture du segment céphalique incarcéré derrière la glène.

Il peut même exister un trait de refend céphalique non déplacé que nous avons déjà observé sur une TDM et qui favorise à l’évidence cette complication.

C’est pourquoi il est préférable de réduire à foyer ouvert si l’importance de l’encoche, appréciée par TDM, impose un traitement chirurgical.

Conclusion :

En présence d’une fracture de l’extrémité supérieure de l’humérus, la première étape est diagnostique et repose sur l’imagerie car seule l’identification correcte du type fracturaire et d’une éventuelle luxation associée permet d’établir un plan thérapeutique précis conduisant à un traitement adapté.

Les radiographies réalisées en urgence dans des conditions souvent difficiles, en raison des douleurs, expliquent l’identification souvent imprécise de ces fractures.

Il faut néanmoins exiger la série traumatique complète avec un profil axillaire ou une incidence de Garth.

Si ces clichés ne sont pas assez explicites, un examen TDM avec éventuelle reconstruction tridimensionnelle est demandé.

Il peut être réalisé sans mobiliser le membre supérieur et permet d’apprécier l’état et le déplacement des tubérosités et notamment du trochin, d’affirmer l’existence d’une luxation postérieure, de dépister les encoches et les traits transcéphaliques.

Il pallie au moins une partie des insuffisances des radiographies standards et devrait permettre de réduire la fréquence des erreurs diagnostiques.

La deuxième étape est thérapeutique.

Les éléments du choix entre ostéosynthèse et prothèse sont essentiellement l’âge, le risque de nécrose céphalique, qui dépend directement du type fracturaire et la solidité osseuse.

Les fractures extra-articulaires ne menacent pas la vitalité céphalique.

Elles relèvent de l’ostéosynthèse et la restauration de l’anatomie laisse espérer la récupération d’une fonction normale.

Seules de rares fractures sous-tuberculaires avec fracture du tubercule majeur pourraient nécessiter une prothèse chez les sujets âgés à l’os ostéoporotique fragile.

Les fractures articulaires menacent la vitalité céphalique à des degrés divers.

Leur traitement chirurgical est difficile, les complications plus fréquentes et les résultats souvent imparfaits.

Dans les fractures du col anatomique et céphalotuberculaires, la discussion est ouverte, selon l’âge et l’importance du déplacement, entre la prothèse humérale et l’ostéosynthèse.

Celle-ci doit être anatomique, en raison des difficultés de reprise et des résultats incertains des prothèses de seconde intention.

Dans les fractures issues des encoches céphaliques, l’ostéosynthèse est la règle, sauf dans de rares encoches antérieures compliquées de très rares destructions céphaliques importantes.

La qualité du résultat fonctionnel final dépend non seulement du résultat anatomique après traitement mais également de la qualité de la rééducation postopératoire.

Quelle que soit la fracture et son traitement, l’idéal est une rééducation précoce passive dans des secteurs de mobilité précisés par le chirurgien.

La date de début de rééducation dépend plus de la solidité du montage que de la technique utilisée.

En cas de fragilité osseuse, une orthèse en élévation de 45° peut protéger l’intervention et autoriser une rééducation précoce et, en cas de doute, la rééducation est différée.

Les erreurs diagnostiques, stratégiques et techniques n’en restent pas moins fréquentes, se cumulent et on peut en décrire de nombreuses.

La connaissance de l’anatomopathologie, un examen clinique et notamment vasculonerveux systématique, une imagerie adaptée et analysée avec rigueur, des indications raisonnées et le respect des principes thérapeutiques permettent d’en éviter beaucoup.

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