Ethmoïdites chroniques de l’adulte. Conduite à tenir devant les ethmopacités

0
2906

Introduction :

L’ethmoïdite, par définition, est une inflammation du labyrinthe ethmoïdal.

Avant le scanner, l’ethmoïdite chronique de l’adulte était diagnostiquée le plus souvent devant des complications.

Actuellement, le scanner permet de découvrir des ethmoïdites asymptomatiques.

Le scanner, premier examen qui a permis de visualiser correctement l’ethmoïde anatomique et son contenu, n’est couramment utilisé en rhinosinusologie que depuis la fin des années 1980.

Autant dire que les ethmoïdites chroniques ne sont correctement diagnostiquées que depuis 15 ans au maximum.

Ethmoïdites chroniques de l’adulte. Conduite à tenir devant les ethmopacitésCe manque de recul explique certainement les flous qui entourent actuellement la définition, le diagnostic et le traitement des ethmoïdites chroniques, et justifie cette tentative de mise au point.

Si le scanner permet de révéler et de préciser les modifications du contenu aérique des cellules ethmoïdales, il ne suffit cependant pas pour affirmer la nature inflammatoire des opacités qui fait le diagnostic d’ethmoïdite.

Seule l’anatomopathologie permet cette affirmation, mais parfois sur la foi d’arguments plus subjectifs qu’objectifs, car les cellules de l’inflammation infiltrent physiologiquement la muqueuse respiratoire et leur densité évaluée sur un fragment biopsique ne reflète par forcément leur répartition d’ensemble.

Le diagnostic d’ethmoïdite chronique est avant tout clinique et repose sur un faisceau d’arguments permettant de rattacher des symptômes rhinosinusiens ou respiratoires à des opacités ethmoïdales.

Analyse scanographique de l’ethmoïde :

Le scanner est l’examen clé du diagnostic d’ethmoïdite chronique.

Les conditions de réalisation de l’examen et la rigueur d’analyse des images relèvent des compétences du radiologue, alors que l’interprétation clinique des images scanner revient à l’oto-rhinolaryngologiste (ORL), qui cherche à établir le rôle des opacités ethmoïdales dans la genèse du dysfonctionnement nasal chronique du patient.

A – ASPECTS TECHNIQUES :

1- Appareils :

La dernière décennie a été marquée, en matière d’appareils tomodensitométriques (TDM), par l’apparition d’un nouveau mode d’acquisition des coupes, appelé hélicoïdal ou spiralé.

Ce mode d’acquisition est caractérisé par la combinaison du déplacement progressif et continu de la table, et de la rotation continue du couple tube-détecteurs, l’ensemble décrivant un mouvement comparable à celui d’une hélice (parfois appelé aussi de façon moins précise, spiralé).

Il permet l’acquisition d’un volume entier, et non plus d’une série de coupes successives (mode d’acquisition « incrémental » traditionnel).

Les principaux avantages en sont d’une part un gain de temps considérable, permettant notamment l’étude d’un organe en une seule apnée et l’exploration rapide des segments corporels de grand volume (avec des applications pratiques essentiellement dans le domaine vasculaire, viscéral et polytraumatologique), et d’autre part le libre choix (a priori ou a posteriori) des paramètres (en particulier l’épaisseur) des coordonnées et de la taille des images, ainsi que l’amélioration des images obtenues secondairement par les reformations multiplanaires et les reconstructions tridimensionnelles.

2- Techniques d’examen :

* Types d’acquisition des coupes :

L’exploration de l’ensemble des cavités sinusiennes, et de l’ethmoïde en particulier, peut faire appel à deux grands types d’acquisition de coupes : acquisition directe et par reformations.

Les coupes directes étaient, en pratique, les seules utilisables jusqu’aux récents progrès techniques des scanners, essentiellement marqués, corrélativement au mode d’acquisition hélicoïdal, par le développement des logiciels de reformation multiplanaire et de reconstruction tridimensionnelle.

Les reformations multiplanaires sont obtenues secondairement, à partir des données de l’acquisition directe, par un travail de console, selon le(s) plan(s) choisi(s) par l’opérateur.

Ce mode d’obtention des images présente plusieurs avantages : il diminue l’irradiation du patient en limitant l’acquisition directe à un seul plan, traditionnellement axial transverse ; il permet le choix précis du plan des images produites secondairement ; il autorise en particulier l’exploration d’un plan qui échappe à l’exploration TDM directe : le plan sagittal.

Il connaît cependant des limites : la qualité des images reconstruites varie selon les appareils et les conditions d’examens, et reste souvent assez nettement inférieure à celle des images obtenues par acquisition directe ; il nécessite un travail supplémentaire de console, qui limite finalement le gain de temps réalisé au cours de l’acquisition des données.

En pratique, actuellement, compte tenu de l’hétérogénéité du parc des appareils TDM, il ne peut donc exister de règle absolue pour cette question : chaque radiologue doit adapter sa technique d’examen en fonction des performances de son équipement.

* Épaisseur des coupes. Choix des fenêtres :

Le choix de l’épaisseur des coupes est l’un des éléments les plus importants qui conditionnent la résolution spatiale des images.

En raison de la finesse de certaines structures (lame criblée de l’ethmoïde notamment) et de certaines anomalies ou variantes recherchées (déhiscences des parois orbitaires ou des toits), il est nécessaire de pratiquer des coupes fines, si possible de type millimétrique.

La réalisation de coupes jointives imposerait un nombre de coupes très important pour l’exploration de l’ensemble des cavités sinusiennes habituellement pratiquée en routine.

Un espacement de 2 ou 3 mm entre deux coupes successives représente un compromis acceptable en pratique courante, en particulier si on réalise une acquisition directe pour le second plan d’exploration.

Le choix des fenêtres devrait en théorie être spécifiquement adapté à chaque cas particulier, pour choisir le centre et la largeur du fenêtrage qui permettra d’apprécier à la fois les petites différences de densité des parties molles et les fins détails osseux.

Aucune combinaison ne permet, hélas, d’atteindre ce double objectif de façon idéale.

De plus, l’exploration des sinus doit faire face à un autre problème technique particulier, qui est celui de l’interface air-tissus mous ou os, susceptible de générer des erreurs (du fait de la brusque variation de densité entre les deux).

Les fenêtres larges (2 000 à 4 000 UH) présentent le double avantage d’explorer au mieux les structures osseuses, et d’être le plus adaptées aux importantes variations de densité de cette interface ; ce sont donc celles que l’on utilise en routine.

Une étude fine des parties molles (tumeur versus produits de sécrétion, par exemple) bénéficie de la réalisation de fenêtres étroites (150 à 400 UH).

* Plans des coupes :

Ils peuvent faire appel à des plans de référence parfois légèrement différents selon les écoles, mais quels que soient ces plans, l’examen TDM doit systématiquement comporter au minimum deux plans de coupes orthogonaux.

Selon les possibilités techniques, des reconstructions sagittales supplémentaires peuvent également être réalisées.

La technique la plus courante est réalisée selon un premier plan « horizontal » (ou axial transverse, souvent appelé axial) qui, selon les écoles, est soit parallèle au plan dit « OM » (orbitoméatal), soit au plan sous-orbito-sus-méatal.

Un second plan « vertical », perpendiculaire, complète le précédent.

L’intérêt de ce deuxième plan, parfois même considéré comme le plus informatif, a été souligné par plusieurs auteurs.

Certains auteurs ont insisté sur l’intérêt de la réalisation des coupes définies par rapport au canal frontonasal, dans un plan parallèle, puis perpendiculaire à celui-ci.

Ces plans permettent théoriquement une analyse plus précise des cellules ethmoïdales, car l’axe de ce canal est schématiquement celui du drainage de l’ensemble de l’ethmoïde, et le plan le plus proche de la vision endoscopique du chirurgien.

* Injection de produit de contraste iodé intraveineux :

En règle, elle n’est pas nécessaire pour l’exploration de la pathologie inflammatoire ou infectieuse des sinus.

Elle n’est donc pas à réaliser en première intention.

Elle peut parfois devenir indiquée dans le cadre du diagnostic différentiel éventuel avec une pathologie tumorale, de découverte inopinée au cours de l’examen, pour lequel elle est alors réalisée dans un deuxième temps.

* Présentation des images :

+ Paramètres :

Les variables alphanumériques indiquées sur les images sont habituellement nombreuses, souvent obscures pour les cliniciens, d’autant qu’il n’existe pas de convention pour l’ensemble des sigles utilisés, ni même pour leur place dans le cartouche.

De plus, il est possible de les faire figurer ou non, en totalité ou en partie.

Les informations les plus utiles en pratique sont, outre les « données patient » et la date de l’examen, l’épaisseur des coupes (parfois désignée par le sigle « th » [thickness]), leur niveau (qui permet de connaître l’espacement), le centre et la largeur du fenêtrage (respectivement C et W), l’injection éventuelle de produit de contraste (qui peut être désignée de façon très diverse).

Les autres paramètres techniques (kilovoltage, milliampérage, valeur éventuelle du pitch pour une acquisition hélicoïdale, filtres utilisés…) sont plus complexes, et en réalité du domaine des imagiers.

+ Format :

Les images TDM sont à l’heure actuelle, en France, la plupart du temps, présentées sur des films de format 36 X 43 cm, réalisés grâce à des reprographes laser, qui permettent de choisir aisément entre différents formats ou tailles d’images, allant habituellement (avec des variations possibles en fonction des modèles) de 1 à 24 images par film.

Le choix du formatage repose sur un compromis entre la taille des images et le nombre de films.

La présentation de 20 ou de 12 images par film est la plus souvent utilisée.

* Renseignements cliniques et compte rendu :

L’optimisation des informations que peut apporter l’examen TDM repose sur la qualité du dialogue entre le radiologue et son correspondant.

Bien que cela ne soit pas toujours réalisé, il est en fait très important que soient mentionnés dans le compte rendu de l’examen radiologique l’état clinique du patient au moment de l’examen, et surtout les traitements récents ou en cours, en particulier corticoïdes, antibiotiques, anti-inflammatoires, vasoconstricteurs, etc, qui peuvent modifier les opacités sinusiennes.

Ces informations reposent à la fois sur la précision des renseignements cliniques communiqués par le prescripteur, et ceux recueillis grâce à l’anamnèse par le radiologue au moment de l’examen.

* Archivage :

La comparaison des images d’examens TDM successifs présente souvent un intérêt évident.

En pratique, elle se heurte à des difficultés courantes (examens égarés, « conservés » par d’autres praticiens, d’autres centres…).

Sur le plan juridique, pour un examen d’imagerie réalisé à titre externe, dans le domaine libéral en particulier, le patient est propriétaire de ses documents et aucun archivage n’est requis.

Dans le domaine public, en revanche, le centre hospitalier est propriétaire des dossiers des patients qu’il prend en charge, et des examens d’imagerie qu’il fait pratiquer.

En contrepartie, un archivage de ces documents est obligatoire.

B – ANATOMIE SCANOGRAPHIQUE ETHMOÏDALE NORMALE :

1- Coupes TDM axiales transverses :

Elles vont intéresser, de haut en bas :

– les sinus frontaux et les plafonds des orbites ;

– les cellules ethmoïdofrontales et les toits des masses latérales, pour l’analyse desquelles les coupes TDM frontales sont beaucoup mieux adaptées ;

– le niveau supérieur des labyrinthes ethmoïdaux, séparés par le processus crista galli, médian, flanqué de chaque côté par les gouttières olfactives (de densité normale de type tissulaire, qu’il ne faut pas confondre avec un éventuel comblement ethmoïdonasal localisé), puis par la lame criblée, qui est beaucoup mieux individualisée par les coupes frontales ;

– la partie moyenne des labyrinthes ethmoïdaux, dont la paroi médiale est marquée en avant par la soufflure de l’agger nasi, puis par la partie supérieure du processus unciforme, en arrière duquel se place la bulle ethmoïdale ; tous reliefs limités en dedans par le cornet moyen, parfois pneumatisé, en arrière duquel se place la partie inférieure du cornet supérieur ;

– le méat moyen, suivi sur plusieurs coupes successives, dans lequel viennent s’ouvrir le canal nasofrontal et l’ostium du sinus maxillaire ; limité en dedans par le cornet moyen dont la partie antérieure est toujours pneumatisée, et en dehors par la paroi médiale du compartiment moyen du labyrinthe ethmoïdal, dont se détache le processus unciné (PU) ;

– la partie inférieure du labyrinthe ethmoïdal, marquée en dedans par le relief de la partie basse du processus unciforme et du cornet moyen, et en dehors par son rapport avec la partie haute du sinus maxillaire.

2- Coupes TDM frontales :

Elles vont permettre d’identifier successivement, d’avant en arrière :

– les sinus frontaux, dans leur portion verticale ;

– les orbites, la jonction frontoethmoïdale, la partie toute antérieure du processus crista galli ;

– la quasi-totalité des constituants de l’ethmoïde dans sa portion antérieure : labyrinthes ethmoïdaux, avec, en particulier, leur toit presque toujours oblique en bas et en dedans, venant surplomber à une hauteur variable la lame criblée ; la crista galli dans sa totalité ; la partie antérieure de la paroi latérale des labyrinthes, constituée à ce niveau par une cellule ethmoïdolacrymale ; la partie antérieure du cornet moyen, qui surplombe le méat inférieur, limité par le cornet inférieur, et où vient s’ouvrir le canal lacrymonasal ;

– la totalité des éléments de l’ethmoïde antérieur : lame criblée, lame verticale, crista galli, labyrinthes avec une paroi orbitaire bien individualisée et une paroi médiale marquée par le PU et le cornet moyen.

Ce dernier délimite le méat moyen marqué par l’ouverture nasale du sinus maxillaire dont la totalité du trajet canalaire est habituellement suivie sur une seule coupe et dont l’ostium est limité par le PU, le cornet inférieur, le maxillaire et l’os lacrymal ;

– la partie moyenne de l’ethmoïde, d’où se détache le cornet supérieur, bombant dans la partie haute de la cavité nasale, surplombant le cornet et le méat moyens, avec la partie postérieure du processus unciforme et la bulle ethmoïdale, située juste audessus, et en bas le cornet inférieur et son processus maxillaire ;

– la portion ethmoïdale postérieure, où sont visibles en particulier le cornet supérieur, ainsi que la partie postérieure des cornets moyen et inférieur ;

– la partie toute postérieure du labyrinthe ethmoïdal et des cornets moyen et inférieur, alors que le vomer s’est articulé avec le bord postéro-inférieur de la lame verticale pour constituer la partie postérieure et inférieure du septum nasal.

B – VARIANTES ANATOMIQUES :

1- Caractères généraux :

Elles sont multiples et d’importance variée.

Certaines présentent un intérêt majeur, à titre préopératoire, car leur connaissance va permettre l’évaluation du risque et des difficultés chirurgicales (variations du « toit » de l’ethmoïde et de la paroi latérale de l’orbite notamment).

D’autres présentent un intérêt pathogénique potentiel, dont l’importance est en fait controversée (variantes de la pneumatisation et du septum nasal en particulier), car ils peuvent rétrécir les voies aériennes de drainage (infundibulum, hiatus semilunaire en particulier) ou retentir sur le mouvement mucociliaire.

Leur découverte inopinée chez un sujet asymptomatique n’a naturellement aucune incidence, alors qu’elle prête à discussion s’il existe une symptomatologie chronique sinusonasale.

2- Principales variantes anatomiques :

* Toit de l’ethmoïde :

Le toit de l’ethmoïde peut présenter, dans le plan frontal, des variétés de forme classées selon trois types.

Dans le type 1, le bord supérieur de chaque masse latérale (ou fovea ethmoidalis) est situé dans un plan horizontal de 1 à 3mm plus haut que celui de la lame criblée.

Il se rencontre dans environ 10 % des cas.

Dans le type 2, la « dénivellation » entre fovea et lame criblée est de 4 à 7 mm.

C’est l’éventualité la plus fréquente (environ 70 % des cas). Dans le type 3, 8 à 16mm séparent la fovea ethmoidalis et la lame criblée.

Il correspond à environ 20 % des cas.

Il peut aussi comporter des solutions de continuité. Leur fréquence apparaît très variable en fonction des séries, atteignant jusqu’à 10 à 15 % pour certaines séries de pièces anatomiques disséquées, et restant très rares pour d’autres.

Elles seraient plus fréquentes dans un contexte d’antécédents chirurgicaux et de polypose nasosinusienne.

Leur reconnaissance présente un intérêt préopératoire évident.

L’asymétrie des masses latérales de l’ethmoïde a paradoxalement été beaucoup moins étudiée.

Elle présente néanmoins un intérêt pratique préopératoire majeur.

Une variation moins connue, et ayant fait à notre connaissance l’objet de peu de travaux systématiques, est la « pente sagittale » du toit de l’etmoïde, qui présente un intérêt préopératoire évident.

* Lame criblée de l’ethmoïde :

Elle est symétrique (ou presque symétrique) dans la distribution modale (0,53 mm de différence de niveau en moyenne entre moitiés droite et gauche).

Cependant, une asymétrie plus marquée est loin d’être rare.

Cette variation est très aisément reconnue sur les coupes frontales.

Elle doit être signalée, mais présente en fait, sur le plan pratique, un intérêt mineur.

* Paroi latérale ou orbitaire de l’ethmoïde :

Les interruptions de l’« os planum » qui constitue la plus grande partie de la paroi médiale de l’orbite, sont connues de longues date.

Sa dénomination historique de « lame papyracée » témoigne bien de la finesse de cette paroi, et par suite, de sa fragilité.

La fréquence de ces déhiscences varie selon les séries et les ethnies entre 5 et 10%.

Elles siègent avec prédilection dans la partie supérieure de cette paroi.

Elles exposent à l’évidence à d’éventuelles complications orbitaires, intéressant au premier chef les muscles droit médial et oblique supérieur.

Par un simple saignement mal contrôlé, elles peuvent entraîner la constitution d’un hématome orbitaire, qui représente une des complications classiques de la chirurgie de l’ethmoïde.

* Canal optique :

Il est délimité par les deux racines de la petite aile du sphénoïde et mesure environ 10 mm de longueur.

Son orifice orbitaire est dans la moitié des cas au contact de la cellule ethmoïdale la plus postérieure (cellule d’Onodi), dans un quart des cas en regard de la jonction entre celle-ci et le sinus sphénoïdal, et dans le dernier quart seulement au contact du sinus sphénoïdal, ce qui signifie que, dans 75 % des cas, ce canal est en rapport avec la cellule ethmoïdale postérieure, au même titre qu’avec le sinus sphénoïdal sur le reste de son trajet.

En cas de variation de la taille de cette cellule, il peut exister des rapports très étroits et étendus entre celle-ci et le nerf optique, qui méritent d’être bien étudiés avant une éventuelle chirurgie.

* Variantes de la pneumatisation :

Une pneumatisation du cornet moyen (ou concha bullosa), qui peut alors être hypertrophié et entraîner une obstruction du méat moyen ou de l’infundibulum, s’observe dans environ un tiers de la population générale.

Elle peut être uni- ou bilatérale.

La pneumatisation du cornet supérieur est plus rare, celle du cornet inférieur est exceptionnelle.

Un sinus frontal surnuméraire, appelé aussi récessus supraorbitaire, peut parfois s’observer.

Correspondant parfois à une expansion des sinus frontaux, il est le plus souvent formé à partir de cellules ethmoïdales se développant dans le toit de l’orbite.

Sa fréquence est très variable selon les groupes ethniques (de l’ordre de 60 % chez les Japonais, contre 20 % chez les Caucasiens).

Il est presque toujours bilatéral.

Il peut atteindre jusqu’à 4 ou 5 cm de grand axe.

Les coupes axiales et frontales se complètent pour préciser ses dimensions et sa topographie exacte.

Le processus crista galli peut aussi être le siège d’une cavité aérique, qui atteint parfois des dimensions très importantes.

Cette pneumatisation inhabituelle est aisément reconnue sur les coupes axiales et documentée au mieux par les coupes frontales.

Elle est toujours de topographie antérieure (puisque la crista galli se développe dans la partie toute antérieure de la lame verticale).

Il est important de la différencier d’une cellule ethmoïdale banale en préopératoire.

Cette cavité aérique peut parfois communiquer avec le sinus frontal.

L’obstruction de son ostium peut entraîner une pathologie inflammatoire chronique et être à l’origine de la formation d’une mucocèle.

La taille de la cellule d’Onodi peut être très variable.

C’est habituellement la plus volumineuse de toutes les cellules ethmoïdales et, dans certains cas, elle peut même dépasser la taille du sinus sphénoïdal lui-même.

Elle peut avoir des rapports très étroits avec le nerf optique, voire la gouttière carotidienne.

La bulle ethmoïdale est, à l’état normal, une cellule aérique volumineuse.

Elle est parfois proéminente (avec une fréquence de 8 %) et peut alors retentir sur le drainage du méat moyen et de l’infundibulum.

Les cellules de Haller sont des cavités aériques qui se développent dans la partie médiale du toit du sinus maxillaire.

Elles intéressent environ 10 % de la population.

Elles peuvent avoir des formes et des tailles variées, et se drainer soit dans l’infundibulum, soit dans le sinus maxillaire.

Lorsqu’elles sont volumineuses, elles peuvent contribuer à rétrécir l’infundibulum.

La pneumatisation du processus unciforme, en revanche, est très rare (environ 0,5 % de la population).

* Variantes des cornets hors pneumatisation :

Le cornet moyen paradoxal est défini par une inversion de sa courbure (à convexité latérale, qui remplace sa courbure habituelle qui se fait vers le septum nasal).

Il se rencontre dans 15 % de la population et peut rétrécir le méat moyen. Variantes du processus unciforme :

– une déviation de son bord supérieur, qui peut se faire soit médialement et obstruer le métat moyen, soit latéralement et retentir sur l’infundibulum, s’observe avec une fréquence de 3 % ;

– le bord libre du processus unciforme adhère parfois au plancher de l’orbite ou au bord inférieur de la lame papyracée, réalisant un méat moyen atélectasique.

Cette anomalie est souvent associée à une hypoplasie du sinus maxillaire par fermeture de son infundibulum, qui s’accompagne d’un abaissement de son plancher, importante à reconnaître en préopératoire.

Il peut exister des cornets surnuméraires : cornet accessoire de Santorini, cornet suprême de Zuckerland, qui n’ont pas de retentissement important sur le plan pratique.

Aspects cliniques :

Les circonstances qui peuvent conduire à un scanner des sinus sont nombreuses.

Pour le clinicien, le problème est d’établir le rôle des opacités ethmoïdales dans la genèse d’un dysfonctionnement nasal chronique et parfois d’une maladie respiratoire chronique.

Le diagnostic d’ethmoïdite chronique repose le trépied symptômes-endoscopie-scanner.

A – OPACITÉS ETHMOÏDALES ASYMPTOMATIQUES : ETHMASYMPOPACITÉS

Elles sont généralement découvertes sur un scanner craniofacial demandé pour une autre pathologie (neurologique, ophtalmologique, maxillofaciale, stomatologique).

Deux questions se posent alors :

– les conditions techniques de l’examen permettent-elles d’analyser et d’interpréter la présence d’opacités intrasinusiennes ?

– le patient est-il réellement asymptomatique ?

Il relève de l’art du clinicien ORL d’évaluer objectivement le dysfonctionnement nasal du patient, en veillant d’une part à ne pas induire une symptomatologie « knockienne », et en évitant d’autre part de se faire piéger par la négligence de certains patients.

Elles peuvent également être découvertes lors d’une recherche de foyers infectieux ou lors du bilan d’une autre pathologie (bilan prégreffe, bilan d’endocardite, bilan d’urticaire, d’asthme…).

Les conditions techniques de l’examen sont alors généralement bien remplies, mais la question de l’interprétation clinique des images devient primordiale.

Le paragraphe suivant aide le clinicien dans la prise en charge des opacités jugées symptomatiques.

B – OPACITÉS ETHMOÏDALES SYMPTOMATIQUES : ETHMOPACITÉS

C’est la symptomatologie qui a motivé la demande d’un scanner des sinus.

Deux circonstances peuvent être rencontrées : la symptomatologie se cantonne à l’organe nasosinusien, ou elle s’associe à d’autres manifestations respiratoires ou générales.

1- Ethmopacités à expression nasosinusienne isolée :

* Concept de dysfonctionnement rhinosinusien chronique :

Le motif de consultation d’un patient se résume en général à un ou quelques symptômes.

La gêne fonctionnelle réelle est souvent plus riche, mais n’est dévoilée que par un interrogatoire méthodique.

La gêne fonctionnelle nasale ou rhinosinusienne représente ce que le patient décrit et ressent de sa maladie.

Le dysfonctionnement rhinosinusien chronique (DRSC) définit l’interprétation médicale de la gêne ressentie en vue d’une solution thérapeutique.

En possession des données scanographiques, la question est de savoir si les opacités ethmoïdales permettent d’expliquer médicalement, en partie ou en totalité, les doléances du patient.

Arrivé à ce stade du diagnostic, l’ORL dispose également, dans tous les cas, des données générales de l’interrogatoire (antécédents, symptômes associés, en particulier respiratoires, traitement(s) en cours, pyschisme, état général…), et des données consignées de l’endoscopie nasale.

D’autres examens complémentaires sont nécessaires, dans de nombreux cas, avant de pouvoir répondre à cette question.

L’organe rhinosinusien exprime les perturbations de ses grandes fonctions physiologiques par un jeu de sept symptômes : obstruction, mouchage, prurit, éternuements, rhinorrhée, dysosmie, douleurs.

On peut schématiquement opposer deux tableaux cliniques : les DRSC monosymptomatiques et les DRSC multisymptomatiques.

* Ethmopacités et DRSC monosymptomatiques :

Le patient consulte pour un symptôme et l’interrogatoire ne retrouve pas de symptômes associés.

+ Obstruction nasale monosymptomatique :

D’un point de vue physiopathologique, l’obstruction nasale monosymptomatique peut s’expliquer par l’existence d’un dysfonctionnement primitif des plexus caverneux et/ou d’anomalies squelettiques.

Le scanner a, dans ces cas, deux buts :

– préciser l’anatomie des structures connues pour boucher le nez (volumineuse concha bullosa, hypertrophie turbinale inférieure, déformations septales).

Ces déformations empêchent parfois tout bilan endoscopique ;

– vérifier l’absence de foyers inflammatoires sinusiens, en particulier ethmoïdaux, qui pourraient entretenir un dysfonctionnement des plexus caverneux secondaire à la libération des médiateurs inflammatoires vasoactifs.

Dans notre expérience, l’obstruction nasale monosymptomatique est exceptionnellement en rapport avec une ethmoïdite chronique.

L’absence d’hyperleucocytose ou d’hyperéosinophilie dans les sécrétions nasales confirme le caractère non inflammatoire du DRSC.

Le traitement de ces obstructions nasales monosymptomatiques non inflammatoires peut être médical ou chirurgical.

Les vasoconstricteurs sont efficaces sur les dysfonctionnements des plexus caverneux, quelle que soit leur cause, mais l’expérience tirée de l’automédication montre que ces médicaments pourraient être utilisés au long cours et sans réaction adverse dans les dysfonctionnements primitifs des plexus caverneux, alors que leur utilisation prolongée dans les DRSC inflammatoires s’accompagne d’effet rebond, d’hypertrophie fibreuse, etc.

Les cautérisations électriques ou laser représentent une alternative.

Le traitement chirurgical s’adresse à la correction des anomalies morphologiques (septum, concha bullosa volumineuse…), et peut être associé à la turbinectomie inférieure qui réalise une phlébectomie des plexus caverneux dystrophiques.

La turbinectomie inférieure est l’alternative chirurgicale du traitement médical des dysfonctionnements primitifs des plexus caverneux.

+ Rhinorrhée postérieure monosymptomatique :

D’un point de vue physiopathologique, elle peut s’expliquer par un dérèglement de la fonction mucociliaire, avec en particulier une production accrue d’un mucus dont les qualités rhéologiques et physiologiques peuvent être également perturbées.

Ces anomalies quantitatives et/ou qualitatives sont en général impossibles à objectiver, même avec un examen endoscopique soigneux.

L’inflammation chronique de la muqueuse nasale perturbe constamment la fonction mucociliaire et s’accompagne, entre autres, d’une rhinorrhée postérieure qui reste le symptôme le plus mal contrôlé, malgré l’efficacité actuelle des traitements médicaux ou chirurgicaux des rhinosinusites chroniques.

Dans notre expérience, une rhinorrhée postérieure monosymptomatique est rarement expliquée par des opacités ethmoïdales, et quand des opacités sont retrouvées, leur traitement chirurgical ne supprime pas le symptôme.

+ Douleurs faciales monosymptomatiques :

D’un point de vue physiopathologique, les douleurs faciales et céphalées récidivantes ou chroniques résultent avant tout d’un dérèglement du système de perception de la douleur.

Il n’y a en général pas de relation claire entre l’ampleur de la lésion organique et l’intensité de la douleur chronique.

La découverte d’opacités ethmoïdales dans ce contexte est toujours d’interprétation difficile (de même que le sont les anomalies morphologiques).

Un traitement chirurgical ne devrait a priori jamais être proposé sans tentative de traitement médical préalable, et surtout sans avoir tenté de comprendre le sens que certains patients donnent à leur douleur.

Certaines douleurs représentent en effet un comportement entretenu à la suite d’une expérience vécue dans un contexte émotionnel particulier.

L’art du clinicien consiste à n’être accusé ni d’activisme chirurgical, ni de négligence thérapeutique face à ce type de patient.

+ Anosmie monosymptomatique :

Elle est couramment confondue par les patients avec un trouble du goût.

Schématiquement, deux tableaux cliniques peuvent être rencontrés (l’examen endoscopique n’apporte en général aucune donnée significative) :

– l’anosmie s’est installée brutalement, parfois au décours d’un tableau de rhinite aiguë banale qui a guéri.

Seule l’anosmie persiste. Une cure courte de corticoïdes n’entraîne aucune récupération.

Le scanner cérébral (ou l’imagerie par résonance magnétique [IRM]), à la recherche d’une cause intracrânienne, retrouve parfois des opacités ethmoïdales.

Dans notre expérience, il n’y a pas d’indication à explorer chirurgicalement ces opacités.

Ce sont des ethmasympopacités ;

– l’anosmie, quel que soit son mode d’installation, est variable dans le temps, des épisodes de récupération discrète n’étant parfois retrouvés que par un interrogatoire approfondi.

La récupération reste parfois également discrète après cure courte de corticoïdes généraux.

Dans notre expérience, la probabilité de récupérer l’odorat après un traitement chirurgical est d’autant plus élevée que les opacités ethmoïdales sont importantes, qu’elles se localisent au contact de la paroi turbinale, et que le test aux corticoïdes montre une anosmie franchement réversible.

L’indication opératoire revient au patient qui mettra en balance les possibilités et les risques de la chirurgie, face au handicap que représente son déficit olfactif.

Ce scénario est fréquent dans les ethmoïdites chroniques à éosinophiles traitées par corticoïdes locaux, où l’anosmie reste le seul symptôme non réversible.

Au total, les ethmopacités qui accompagnent les DRSC monosymptomatiques demandent beaucoup de prudence dans l’interprétation de leur rôle étiopathogénique.

Suite

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.