Dermatite atopique (Suite)

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Complications :

A – COMPLICATIONS CUTANÉES :

1- Érythrodermie :

Une érythrodermie plus ou moins desquamative, touchant les phanères, s’accompagnant de fièvre et d’adénopathies peut survenir chez l’atopique, en particulier lors du sevrage d’une corticothérapie systémique (à notre avis, à contre-indiquer dans la DA).

Sur le plan biologique, il existe souvent une hyperéosinophilie et une hyper- IgE.

Chez l’adulte, il importe de ne pas méconnaître un lymphome T épidermotrope.

2- Lymphomes cutanés :

Dermatite atopique (Suite)Aussi bien dans les lymphomes T cutanés épidermotropes que dans la maladie de Hodgkin peuvent exister des placards lichénifiés, eczématiformes, infiltrés, identiques à ceux trouvés dans la DA.

On peut retrouver chez des malades ayant un lymphome T épidermotrope des antécédents de DA avec la survenue progressive d’une érythrodermie et d’un syndrome de Sézary.

L’association d’une DA et d’un syndrome de Sézary ou d’une maladie de Hodgkin est rare, mais ce sont des diagnostics à ne pas méconnaître en cas de DA persistante, rebelle, ou à début tardif, ainsi que lors de l’apparition de volumineuses adénopathies.

On peut s’interroger sur le rôle du terrain atopique dans la survenue de ces hémopathies : déficit de l’immunité à médiation cellulaire, stimulation antigénique persistante.

3- Bursite olécranienne et prétibiale :

Plusieurs cas de bursites olécraniennes et prétibiales ont été rapportés chez des sujets adultes souffrant de DA sévères et chroniques.

Le mécanisme de survenue pourrait être plurifactoriel : microtraumatisme répété lié au grattage, état de la peau sus-jacente favorisant les bursites septiques, de même que l’utilisation de dermocorticoïdes, rôle des médiateurs de l’inflammation et en particulier déficit en AMPc.

4- Photosensibilité :

Si dans la majorité des cas la DA s’améliore sous la double influence des bains de mer et du soleil, 10 à 20 % des atopiques s’aggravent au soleil.

L’irradiation solaire peut, par l’intermédiaire des infrarouges, être à l’origine d’un phénomène calorique, d’une sudation et d’un prurit exacerbant la DA.

Il n’y a pas de rapports privilégiés entre photodermatoses idiopathiques et atopie, les deux pouvant cependant coexister.

Il peut exister une photosensibilité d’origine exogène médicamenteuse, réalisant un tableau de photoallergie rémanente, en particulier aux phénotiazines.

Les atopiques se sensibilisent volontiers à ces substances à visée antihistaminique, prescrites par voie générale ou topique.

Certains sujets présentent un tableau de dermatite actinique chronique.

Ce sont des patients jeunes avec une photosensibilité nette.

Les explorations photobiologiques montrent un abaissement de la dose érythémale minimale (DEM) en ultraviolets (UV)A et/ou en UVB et des phototests positifs.

Russell et al notent par ailleurs la coexistence avec des patch-tests et/ou des photo-patch-tests positifs.

Une exploration photobiologique apparaît souhaitable en cas de photodistribution ou de photoaggravation de la DA.

Certains la préconisent avant toute mise en route d’une photothérapie.

Une recherche d’ACAN est également à effectuer.

B – COMPLICATIONS INFECTIEUSES :

La DA expose à des complications infectieuses cutanées à la fois bactériennes, virales et mycosiques.

Outre leur rôle infectant propre, ces agents infectieux, en particulier microbiens, exercent une action patente sur le système immunitaire.

1- Complications bactériennes :

L’impétiginisation fréquente de la DA due à Staphylococcus aureus se traduit par l’apparition de pustules, de croûtes jaunâtres d’impétigo, d’un suintement plus abondant de l’eczéma, d’adénopathies satellites dans les zones de surinfection.

Ce tableau d’eczéma impétiginisé doit toujours faire soulever l’hypothèse d’une greffe virale sous-jacente à l’infection staphylococcique.

Quelquefois, il s’agit de simples pustules superficielles plus ou moins folliculaires.

L’infection peut également s’accompagner d’adénopathies subaiguës plus ou moins douloureuses, ne se ramollissant pas, de taille importante, simulant celles des hémopathies.

Staphylococcus aureus constitue un facteur d’aggravation patent de la DA.

Les infections profondes, tels cellulites, abcès, furoncles, érysipèles, septicémies sont rares.

Leur survenue doit faire rechercher un immunodéficit sous-jacent.

Le staphylococcal scalded skin syndrome (SSSS) est rare chez l’atopique, mais la DA peut se révéler après un SSSS comme conséquence de l’activation immunitaire durant l’exposition aux superantigènes staphylococciques.

Le streptocoque b hémolytique vient beaucoup plus exceptionnellement coloniser la peau de l’atopique.

Des ostéomyélites phalangiennes distales, staphylococciques mais aussi streptococciques, d’installation insidieuse, ont été décrites chez des atopiques sévères et surinfectés.

2- Complications virales :

Elles sont fréquentes et plus sévères que chez les sujets normaux.

Elles sont dominées par le risque d’infections herpétiques.

* Herpes simplex virus :

L’infection peut se manifester sous différentes formes :

– primo-infection herpétique sévère, le plus souvent à type de gingivostomatite ;

– récurrence herpétique en peau saine ou sur placards eczématisés (vésicules plus profuses, suivies d’ulcérations) ;

– pustulose varioliforme de Kaposi-Juliusberg.

La pustulose varioliforme de Kaposi-Juliusberg est la complication la plus redoutée chez l’atopique.

Elle survient lors d’une primoinfection herpétique, ou plus rarement au cours d’une récurrence.

Elle est le fait des DA sévères, persistantes et traitées par des dermocorticoïdes.

Mais, même en cas de DA en rémission ou a minima, une greffe herpétique peut survenir.

Elle se traduit par une aggravation brutale de la DA, avec oedème, suintement, vésicules ombiliquées puis pustulocroûteuses, nécrotiques et hémorragiques, localisées au visage puis étendues parfois au reste du tégument.

L’altération de l’état général est constante avec une hyperthermie à 39-40 °C, des polyadénopathies.

Les complications de la pustulose sont doubles : dissémination virale avec possibilité d’encéphalite, de kératoconjonctivite, de bronchopneumopathie et surinfection staphylococcique avec risque de septicémie.

Il importe de ne pas méconnaître ce syndrome à cause de sa gravité justifiant une thérapeutique d’urgence en centre spécialisé.

Les récidives sont possibles, uniques ou multiples, dans des délais variables, de plusieurs mois à années.

Toute infection herpétique constitue un facteur de déstabilisation de la DA bien que des rémissions temporaires puissent survenir.

Par ailleurs, des taux élevés d’IgE totales à la phase aiguë de l’infection peuvent décroître en phase de rémission.

* Virus varicelle-zona :

L’incidence des infections par le virus varicelle-zona n’apparaît pas vraiment augmentée au cours de la DA, malgré les observations de Strannegard et al notant une incidence plus élevée de zona chez l’atopique par rapport à une population contrôle.

* Vaccine variolique :

C’est une cause classique de pustulose, justifiant autrefois l’interdiction de la vaccination antivariolique chez l’atopique et le contact avec les sujets porteurs d’une pustule vaccinale.

* Virus du papillome humain :

Les verrues sont légèrement plus fréquentes et plus difficiles à traiter.

* Poxvirus :

Le molluscum contagiosum est plus fréquent, plus profus, volontiers surinfecté et disséminé par le grattage et l’application de dermocorticoïdes.

3- Complications mycosiques :

Les infections dermatophytiques sont, au cours de la DA, d’évolution plus chronique et plus difficiles à traiter. Le pied serait une cible préférentielle et de haute susceptibilité.

En revanche, Hanifin trouve que l’incidence générale des infections fungiques dans la DA est diminuée, l’explication résidant peut-être dans la structure non favorable de la peau de l’atopique au développement de l’infection fungique.

Il importe également de ne pas méconnaître le rôle des dermocorticoïdes pouvant masquer la surinfection mycosique et expliquer la pérennisation des lésions.

Enfin Jones dans une mise au point réalisée en 1980 sur le syndrome « atopie-dermatophytie chronique » qu’il a décrit avec Reinhardt et Rinaldi, a suggéré que l’atopie était associée à une prédisposition pour les infections chroniques dans un contexte bien particulier.

Ce syndrome survient de préférence chez des hommes dans la deuxième décennie de la vie et présentant essentiellement des antécédents d’atopie respiratoire dans leur enfance.

Le plus souvent, les signes respiratoires sont résolutifs lorsque la dermatophytie débute.

Sur le plan cutané, l’eczéma, lorsqu’il est présent, est modéré.

La dermatophytie se traduit par des lésions inflammatoires, extensives, chroniques, volontiers récidivantes, touchant les pieds, les fesses, les cuisses, les plis inguinaux et les ongles des pieds et des mains, mais s’étendant parfois à l’ensemble du tégument.

Les lésions généralisées peuvent simuler une maladie dermatophytique.

Le champignon responsable est, dans la règle, Trichophyton rubrum.

Ce tableau clinique s’accompagne d’un profil immunologique particulier fait d’une augmentation des IgE totales sériques minime ou modérée, d’une hyperréactivité immédiate lors d’intradermoréaction à la trichophytine associée à des IgE spécifiques, contrastant avec une diminution in vivo et in vitro de l’immunité à médiation cellulaire vis-à-vis de cet antigène.

Hanifin n’exclut pas que ces réactions positives à la trichophytine résultent d’une sensibilisation croisée avec d’autres espèces, telles Penicillium ou Alternaria.

C – RETARD DE CROISSANCE :

David a constaté un retard de croissance (sous le 3e centile) chez 10 % des enfants présentant un eczéma atopique nécessitant de façon fréquente une prise en charge hospitalière.

Queille-Roussel et al ne l’enregistrent que dans 4,6 % des cas.

Il n’existe pas une cause précise, mais vraisemblablement une combinaison de plusieurs facteurs.

Ce retard de croissance est le fait des DA sévères coexistant avec un asthme, s’accompagnant d’une perte de sommeil, de restrictions alimentaires non contrôlées, d’une carence en vitamine D.

L’utilisation de dermocorticoïdes puissants sur une grande surface et de façon prolongée, ainsi que le recours aux corticoïdes inhalés ou systémiques en cas d’asthme, peuvent participer à ce ralentissement de la croissance.

Une malabsorption digestive, une augmentation des besoins nutritionnels par pertes protéiques, par déperdition thermique, sont d’autres facteurs contributifs.

On peut également évoquer une perturbation du rythme circadien hormonal (hormone de croissance en particulier) suite aux troubles du sommeil.

Ainsi, souvent, la croissance est ralentie jusqu’à la puberté qui est de survenue plus tardive.

Puis, progressivement, l’adolescent rattrape son retard pour atteindre une taille normale.

Les poussées de croissance sont dans la règle concomitantes des améliorations de la DA.

D – COMPLICATIONS OCULAIRES :

Les complications oculaires au cours de la DA sont multiples : cataracte, blépharite, kératoconjonctivite, kératocône, iritis et décollement de rétine.

La cataracte atopique est de type antérieur, sous-capsulaire.

Elle survient parfois chez un sujet jeune, s’installe rapidement et est bilatérale.

Elle accompagne les DA sévères.

L’abus de dermocorticoïdes dans la région périorbitaire augmente le risque de voir se développer une cataracte postérieure et une augmentation de la pression intraoculaire.

Enfin, la mise en route d’une PUVAthérapie doit s’accompagner d’une prévention adéquate.

Le décollement de rétine est une complication oculaire sévère de la DA.

Il est souvent bilatéral et touche des sujets ayant un eczéma facial à prédominance orbitaire.

Surtout rapporté chez les Japonais, il est le fait d’adultes jeunes entre la deuxième et la troisième décennie.

Il précède la chirurgie de la cataracte dans la majorité des cas et n’apparaît donc pas comme une complication de l’intervention.

L’étiologie du décollement de rétine dans la DA n’est pas connue : oedème rétinien, maladie du vitré, uvéite chronique, anomalies vasculaires rétiniennes, traumatisme chronique lié au grattage.

Le kératocône (ectasie en forme de cône de la cornée), bien que cité dans les critères mineurs par Hanifin et Rajka, reste une exception.

Dans la blépharoconjonctivite, la peau périorbitaire est sèche, squameuse, érythémato-oedémateuse, croûteuse et parfois très lichénifiée.

Une surinfection staphylococcique n’est pas impossible, de même qu’un ectropion.

Enfin, une conjonctivite allergique saisonnière peut venir accompagner la DA.

La greffe herpétique oculaire est une complication redoutable sur un tel terrain, justifiant une prise en charge en urgence.

Facteurs aggravants :

A – PNEUMALLERGÈNES :

Les premières constatations cliniques concernant les relations entre DA et PNA datent des années 1930 où il est rapporté des aggravations de DA pendant les saisons polliniques, des améliorations de DA lors de séjours en altitude, dans des ambiances sans poussières.

Puis, considérés comme sans importance dans le profil évolutif de la DA, un regain d’intérêt à leur égard provient de la réalisation de patch-tests aux PNA, en particulier aux acariens de la poussière de maison reproduisant une lésion eczématiforme, et de la découverte à la surface de cellules de Langerhans épidermiques de molécules d’IgE par Bruynzeel-Koomen et al.

À partir des années 1980, les travaux se multiplient pour essayer de comprendre le rôle exact des PNA dans la DA.

La sensibilisation se traduit par la positivité des tests cutanés en lecture immédiate (prick-tests) et/ou RAST chez un grand nombre d’atopiques.

Dans une sous-population de DA, les patch-tests aux PNA donnent des réactions d’hypersensibilité retardée. Enfin, outre la voie percutanée, les PNA peuvent agir par inhalation sur la DA.

1- Patch-tests aux PNA :

Les patch-tests aux PNA donnent des résultats d’une extrême variabilité, allant de 10 à 100 % de positivité comme l’a mis en évidence Cabon et al dans une étude de la littérature.

Cette grande divergence dans les résultats est due à l’absence de standardisation de ce qui est appelé l’atopy patch-test.

* Technique :

Les patch-tests sont réalisés, soit en peau saine, soit en peau préalablement scratchée ou strippée.

Les concentrations sont variables selon les équipes. Les antigènes testés sont le plus souvent les acariens de la poussière de maison (Dermatophagoides pteronyssinus [Der p], farinae, antigène P1 purifié), mais aussi les pollens, voire les antigènes des animaux domestiques.

Il peut s’agir d’extraits standardisés du commerce utilisés pour les prick-tests, de fractions allergéniques préparées par les auteurs.

Le test est réalisé en solution saline ou glycérinée, voire dans de la vaseline.

Par ailleurs, selon les études, sont testés, soit des sujets avec DA pure, soit des sujets avec DA et allergie respiratoire.

Un autre biais de sélection est la réalisation de patch-tests uniquement chez les atopiques présentant une réaction d’hypersensibilité immédiate (prick-test et/ou RAST).

La topographie de la DA peut être prise en compte pour la définition d’un sous-groupe de patients basée sur l’existence de lésions eczématiformes dites « prédictives », situées sur les zones découvertes.

Enfin, la population testée est quelquefois à prédominance pédiatrique.

La lecture du test est effectuée à 48 et 72 heures.

Bruynzeel-Koomen et al réalisent également des lectures précoces à 20 minutes, 6 heures et 24 heures.

Castelain et al conseillent une deuxième lecture tardive à 4 jours pour éliminer les réactions faussement positives disparaissant en 3 jours.

* Résultats :

Ainsi, les biais introduits dans la réalisation des patch-tests expliquent des résultats souvent extrêmes.

Si ces derniers sont exclus, on peut considérer qu’un peu moins d’un tiers des atopiques ont des patch-tests positifs aux PNA.

Les patch-tests aux PNA peuvent être positifs dans des populations contrôles, mais l’incidence des patch-tests positifs reste plus forte chez les sujets avec DA.

Lorsque la DA prédomine sur les zones exposées, le pourcentage de patch-tests positifs est plus important.

Par ailleurs, pour Tanaka et al, les DA s’accompagnant d’une allergie respiratoire ont une incidence supérieure de patch-tests positifs par rapport aux DA pures.

Les patch-tests aux PNA sont trouvés positifs aussi bien dans des populations d’adultes que d’enfants.

La sensibilisation peut exister à un PNA, voire à plusieurs, mais ceci est moins fréquent.

L’allergène le plus fréquemment retrouvé positif (peut-être parce que le plus testé) est la poussière de maison.

Il existe des réactions d’autant plus importantes que la concentration allergénique est plus forte, la réaction devenant alors folliculaire.

Des réactions de flare-up de la dermatite dans ses localisations classiques sont possibles.

On ne retrouve pas de corrélation entre un patch-test positif et le taux d’IgE totales.

Il semble, pour Darsow et al, exister une bonne corrélation entre prick-test-RAST et patch-test.

Pour Tanaka et al, la concordance prick-patch-test est le plus souvent mauvaise, et celle RAST-patch-test est bonne en fonction de l’allergène utilisé.

2- Hyperréactivité bronchique spécifique aux PNA :

Peu de travaux concernent l’hyperréactivité bronchique aux PNA et son rôle éventuel dans l’évolution de la DA.

Tupker et al ont fait subir, au cours d’une étude en double aveugle versus placebo chez 20 atopiques présentant des tests cutanés positifs à la poussière de maison, une inhalation à des concentrations différentes d’extraits standardisés de poussière de maison.

C’est ainsi que, chez neuf d’entre eux, une réaction cutanée aux PNA inhalés a pu être constatée sous forme d’aggravation de lésions préexistantes et/ou d’apparition de nouvelles lésions.

C’est dans un délai de 1,5 à 7 heures après le test que la réaction est manifeste.

Elle perdure 6 heures à 5 jours. Par ailleurs, les réactions cutanées sont observées chez les atopiques ayant une histoire d’asthme et on relève le plus souvent une réaction bronchique précoce précédant l’éruption cutanée.

Il faut souligner que tous les sujets ayant une DA induite par la poussière de maison ont un taux élevé d’IgE spécifiques vis-à-vis de la poussière de maison.

3- Effets des mesures préventives :

Si les patch-tests et l’inhalation de poussière de maison semblent démontrer le rôle de celle-ci dans l’aggravation ou la genèse de la DA, l’effet des mesures préventives a été étudié le plus souvent sur des cas ponctuels et dans des études en ouvert.

Ainsi, Sanda et al ont étudié les effets sur la DA d’une hospitalisation de 3 à 4 semaines en chambre hypoallergénique (clean room), c’est-à-dire disposant d’un système d’évacuation de l’air avec un filtre HEPA (high-efficiency particulate air) arrêtant 99,97 % des particules inférieures à 0,3 µm.

En 2 à 4 semaines, les atopiques avec un RAST spécifique au Der p1 de classe inférieure à 3 présentent une nette amélioration du prurit et des signes cutanés.

La rémission obtenue dure en moyenne 8,4 mois après la fin de l’hospitalisation.

L’amélioration clinique s’accompagne d’une diminution de l’éosinophilie, de la basophilie, des lacticodéshydrogénases (LDH) sériques et des IgG spécifiques.

Le taux des IgE spécifiques demeure inchangé.

Chez les atopiques non soumis à des mesures préventives, on constate une amélioration clinique, mais les rechutes sont rapides, en 1 à 2 mois.

L’étude de Tan et al, menée pendant 6 mois en double aveugle versus placebo chez 60 sujets (30 adultes et 30 enfants), montre que les mesures préventives (housses en Gore-Text, sprays acaricides, système de nettoyage à haute filtration) et les mesures non préventives (housses en coton, sprays aqueux, aspiration avec filtre conventionnel) améliorent les scores de sévérité et de surface corporelle atteinte.

Cependant, il existe une différence plus significative dans le groupe préventif.

L’amélioration est plus nette chez les enfants que chez les adultes.

Pour les auteurs, l’analyse des covariances suggère que l’amélioration pourrait résulter d’une diminution de la concentration en Der p1 dans le matelas et les tapis des chambres.

Chez les atopiques, la densité en acariens vivant dans les matelas est nettement plus importante que chez les nonatopiques.

Ricci et al, dans un travail personnel conduit chez 41 enfants âgés de 2 à 10 ans présentant une DA extrinsèque, confirment l’intérêt des mesures d’éviction vis-à-vis de la poussière de maison, bien conduites pendant 2 mois.

En effet, l’amélioration significative du score de sévérité clinique, apprécié par le SCORAD, va de pair avec la diminution de la concentration en allergènes majeurs de la literie (Der p1 et Der f 1).

En expliquant bien leur utilité aux parents, il est possible de maintenir cet effet favorable sur des périodes prolongées de 1 an. Pour Guillet et al, l’imputabilité des PNA dans la DA reste faible.

C’est seulement dans 6 % des cas que les effets de l’éviction permettent de retenir leur responsabilité dans les poussées de DA.

4- Principales modalités d’éviction des PNA :

Des mesures préventives vis-à-vis des PNA semblent donc parfois souhaitables, mais souvent difficiles à appliquer de façon stricte et rigoureuse.

Elles consistent en :

– éviction de l’introduction dans l’habitat d’un animal ;

– éviction du contact avec des animaux domestiques tels que chiens et chats, mais aussi hamsters, cobayes, chevaux, animaux de la basse-cour ;

– éviction des moisissures (maisons humides, vieillies, plantes, lieux de stockage des denrées alimentaires, étables…) ;

– éviction des activités de plein air mettant le sujet en contact brutal avec des pollens (couper le gazon, faire les foins…) ;

– mesures prophylactiques vis-à-vis de la poussière de maison et de ses acariens. Certaines apparaissent indispensables, comme :

– envelopper le matelas d’une housse en polyuréthane, ainsi que l’oreiller (ou de le laver une fois par semaine) ;

– laver les draps et couvertures à 55 °C chaque semaine ;

– éviter de dormir ou de s’allonger sur des canapés rembourrés ;

– enlever les moquettes et tapis, en particulier de la chambre à coucher.

Il est également souhaitable d’abaisser l’humidité relative à moins de 50 % et d’employer des bombes acaricides au minimum deux fois par an.

Le lit a un sommier à lattes.

Les oreillers, couettes en plumes, les couvertures en laine sont remplacées par du matériel synthétique.

Le matelas est aspiré, brossé sur toutes ses faces, exposé au soleil.

Le ménage doit être fait tous les jours, en l’absence de la personne allergique, en proscrivant les plumeaux.

Les filtres d’aspiration donnent des résultats variables.

Il importe de laisser les fenêtres ouvertes dans les 2 heures qui suivent l’aspiration.

Les doubles-rideaux, les tissus et les moquettes aux murs sont évités.

Les voilages sont lavés une fois par mois. Des peintures antiacariens peuvent être utilisées.

Les murs sont nettoyés avec un chiffon humide, de même que les surfaces des meubles (si cela est possible).

Il est préférable d’éviter les nids à poussière comme les peluches (ou de les laver tous les 15 jours), les plantes, les livres.

Il faut se méfier de l’emménagement dans un nouveau logement, de séjours dans une maison de campagne ou dans une chambre d’amis longtemps fermées.

Les activités sportives poussiéreuses sont à éviter (tapis de sol des gymnases, du judo).

Les séjours en altitude ou au-dessus de 1 500 mètres peuvent améliorer certaines DA.

En conclusion, il existe un certain nombre d’arguments démontrant le rôle des PNA dans l’aggravation de la DA par contact percutané ou par inhalation.

Les mesures préventives s’accompagnent d’un bénéfice réel dans une fraction de la population atteinte de DA qu’il importe de mieux définir.

B – TROPHALLERGÈNES :

1- Données préalables :

Le rôle des aliments dans la DA est un sujet très controversé.

Dès 1915, Schloss a mis en évidence le rôle pathogénique possible de l’allergie alimentaire dans la DA. En 1978, Atherton, dans une étude en double aveugle, a montré que l’éviction de l’oeuf et du lait permettait dans deux tiers des cas une amélioration de la DA.

Depuis, les travaux contradictoires n’ont fait que se multiplier. Nous citons à titre d’exemple trois études dont les résultats sont discordants.

Sampson a recherché chez 220 DA sévères, âgés de 3 mois à 24 ans, une allergie alimentaire par un test de provocation orale (TPO) en double aveugle versus placebo, orienté par les prick-tests et les RAST. Sur un total de 761 TPO pratiqués, il a pu enregistrer 238 positivités.

Ces TPO entraînent dans 69 % des cas une réaction cutanée (prurit, urticaire, rash morbilliforme), dans 40 % des cas des signes digestifs, dans 30 % des cas des signes respiratoires. Les réactions sont essentiellement immédiates dans les 2 premières heures, parfois semi-retardées mais exceptionnellement retardées de façon isolée.

Les sujets réagissent dans 83 % des cas à un seul ou deux aliments.

Dans 86 % des cas où les TPO sont positifs, les allergènes sont l’oeuf, le lait, le blé, le soja, l’arachide et le poisson. Ainsi, l’auteur conclut que dans 60 % des DA sévères existe une réaction d’hypersensibilité alimentaire IgE médiée.

Dans une étude française menée par Guillet et al chez 251 atopiques, il est possible d’imputer indiscutablement chez 68 % des malades le rôle de l’allergie alimentaire dans l’évolution de la DA.

C’est dans les DA sévères, et plus particulièrement de l’enfant (96 % des cas), que le rôle des aliments est à prendre en compte. L’aliment en cause varie avec l’âge.

Chez l’enfant de moins de 2 ans, vient par ordre décroissant l’allergie à l’oeuf, à l’arachide, au lait, au poisson, aux crustacés, au soja et à la farine.

Dans les DA minimes ou modérées, l’allergie alimentaire est exceptionnelle, voire nulle.

Paupe et Scheinmann, dans une étude rétrospective sur 40 enfants nés entre 1967-1988 et porteurs d’une atopie sévère (DA asthme-allergie alimentaire), montrent l’indépendance des trois allergies, l’absence de disparition des signes cutanés après une éviction alimentaire stricte, l’absence de réveil de la DA après les réintroductions alimentaires, l’atténuation de la DA au fil du temps, mais la persistance de l’allergie alimentaire, même si elle se restreint à un petit nombre d’aliments.

Au terme de ces trois études données à titre d’exemple, l’étude de l’influence des aliments sur la DA reste difficile à appréhender car la DA est une maladie polyfactorielle.

Il existe une tendance à la résolution spontanée avec l’âge.

Les populations étudiées varient volontiers (recrutement de dermatologues, de pédiatres ou d’allergologues, populations d’âge différent, sévérité variable de la DA, critères d’évaluation différents).

Nous ne disposons pas de tests de dépistage fiables, standardisés.

Les tests de provocation restent difficiles à réaliser, en particulier chez l’enfant.

2- Circonstances cliniques devant faire évoquer une allergie alimentaire au cours de la DA :

Le rôle des aliments est évoqué chez l’enfant plus que chez l’adulte devant :

– une DA associée à un eczéma péribuccal ou périorbitaire ;

– une DA s’accompagnant d’épisodes de prurit et d’oedème labial ou laryngé (syndrome d’allergie orale chez des sujets présentant une sensibilisation pollinique), de rashs urticariens, voire des manifestations anaphylactiques avec ou sans effort concomitant ;

– une DA avec des signes d’accompagnement de la sphère digestive (diarrhée en particulier) ou respiratoire lors de la manipulation ou l’inhalation de vapeurs de cuisson d’aliments ;

– une DA étendue, sévère, résistant à un traitement bien conduit ;

– une DA d’aggravation brutale lors de l’introduction de nouveaux aliments, ou d’évolution cyclique, rythmée par les ingestats ;

– un dégoût ou un refus alimentaire de l’enfant.

3- Approche diagnostique :

* Enquête alimentaire :

Le recours au carnet journalier permet souvent d’établir une corrélation entre la DA et les aliments et de définir les aliments suspects.

* Prick-tests cutanés :

Les prick-tests cutanés aux aliments standardisés ou natifs constituent une des premières démarches diagnostiques.

Cependant, l’hyperréactivité immédiate des atopiques gêne bien souvent leur interprétation.

En revanche, un prick-test négatif élimine souvent une hypersensibilité alimentaire immédiate.

Le prick-test peut être réalisé quel que soit l’âge, à condition que le témoin positif soit réactif.

* Patch-test :

Le patch-test aux trophallergènes (atopy patch-test) reproduit une lésion eczématiforme. Pour certains allergènes (lait et oeuf), ce test a une excellente valeur prédictive positive lorsqu’on le compare aux tests de provocation en double aveugle versus placebo.

Pour le lait, quand il est associé à un prick-test positif ou à la présence d’IgE spécifiques, la valeur prédictive avoisine 100 %.

Ce test, facile à réaliser, pourrait permettre avec certains trophallergènes d’identifier une allergie sans avoir recours aux tests de provocation.

* RAST :

Il permet la recherche d’IgE spécifiques en orientant sa demande en fonction du prick-test.

Outre le RAST unitaire orienté, il est possible de disposer de multi-RAST.

Quant au MAST-cutaneous lymphocyteassociated antigen (CLA) permettant une identification et une quantification simultanées de 36 trophallergènes, son intérêt dans la DA reste très aléatoire car ce test cher, non pris en charge par la Caisse d’assurance maladie, expose à de trop nombreuses positivités liées au taux élevé d’IgE totales.

* Test de provocation orale :

Il consiste en une épreuve de réintroduction de l’aliment suspecté par le prick-test ± le RAST positifs, et l’effet bénéfique d’une éviction de 15 jours à 3 semaines.

Il peut être précédé par un test en ouvert, le test labial de mise en contact de la muqueuse labiale avec l’aliment, afin de reproduire les manifestations locales du syndrome d’allergie orale.

Ce test peut s’accompagner de manifestations systémiques.

Le TPO est lui réalisé en simple aveugle, voire en double aveugle versus placebo.

Il est de préférence conduit en milieu hospitalier.

Il est contre-indiqué en cas de choc anaphylactique.

Le test en simple aveugle est réalisé lorsque plusieurs aliments (plus de trois) sont suspectés et en cas d’amélioration clinique équivoque lors de l’éviction.

Quant au test en double aveugle versus placebo, il s’agit d’un test diagnostique d’exception non standardisé.

Sa technique est lourde, longue, coûteuse (recours à des capsules de lyophilisats de protéines à différentes concentrations).

Il n’est mis en route qu’après un test en ouvert ou en simple aveugle ayant montré une positivité à plus d’un allergène majeur (lait, soja, oeuf, blé) ou à plus de quatre allergènes alimentaires au total.

Les réactions sont cutanées, immédiates (prurit, urticaire et/ou exanthème), semiretardées ou retardées (lésions eczématiformes).

Elles intéressent également les sphères digestives et respiratoires.

Il n’existe pas de corrélation entre la sévérité de la réaction ou la dose minimale déclenchante, et d’une part les IgE spécifiques, d’autre part la réactivité aux prick-tests.

Souvent inapplicable, surtout chez l’enfant, en pratique on préfère les tests en ouvert et en simple aveugle.

Deux tests positifs en ouvert et en simple aveugle permettent bien souvent d’incriminer un aliment dans l’aggravation de la DA.

* Couplage des méthodes d’exploration de la perméabilité intestinale :

Le couplage des méthodes d’exploration de la perméabilité intestinale avec deux sucres non métabolisables, le mannitol et le lactulose, ou par technique EDTA-Cr 51, et du TPO alimentaire, montre une augmentation de l’hyperperméabilité de base.

Au terme de l’enquête allergologique, on peut dégager les enseignements suivants :

– des tests cutanés d’allergie immédiate et des TPO positifs ont une signification clinique ;

– des tests cutanés négatifs et des TPO positifs traduisent de préférence un mécanisme d’intolérance non immunologique ;

– des tests cutanés positifs et des TPO négatifs ont une signification incertaine.

4- Allergènes alimentaires :

La nature des allergènes alimentaires en cause varie avec l’âge.

Parmi les différents trophallergènes, outre le lait de vache, le poisson et l’oeuf, une mention particulière doit être faite pour l’arachide, allergène ubiquitaire bien souvent masqué.

En France, l’incidence de cet allergène tend à augmenter avec une apparition de plus en plus précoce (2 premières années de vie).

L’arachide est allergisante par l’intermédiaire de ses protéines retrouvées en faible quantité même en phase huileuse.

Elle est à l’origine d’aggravation de la DA, mais aussi de réactions immédiates, parfois sévères (choc anaphylactique).

La sensibilisation du nourrisson se fait par plusieurs voies : in utero ( ?), par l’allaitement maternel chez les mères fortes consommatrices d’arachide, par l’intermédiaire des laits maternisés, par les préparations à base de vitamine D.

Il est recommandé de ne pas introduire l’arachide avant 36 mois.

Quant aux aliments responsables d’allergie orale, il s’agit des légumes et des fruits.

5- Devenir de l’allergie alimentaire :

L’allergie alimentaire chez les enfants avec DA tend à s’estomper au fil des années, comme le démontre le travail de Sampson.

En réalisant des TPO de façon répétitive chez des enfants atopiques avec sensibilisation alimentaire, et après 1 à 3 ans d’éviction spécifique, il démontre qu’un tiers des sujets perdent spontanément en 3 à 4 ans leur allergie alimentaire.

Le lait de vache est toléré vers l’âge de 3 ans.

La reprise se fait en petites quantités, en milieu hospitalier.

En cas d’allergie au lait de vache, on se méfie de l’introduction précoce du boeuf dans l’alimentation.

L’allergie à l’oeuf persiste jusqu’à 5-7 ans.

La sensibilisation au poisson, au soja, à l’arachide et autres oléagineux est tenace et disparaît rarement.

Sampson conseille de refaire des TPO pour le soja après 12 mois d’éviction, puis tous les 2 ans en cas de positivité ; pour l’oeuf, le lait et le blé, après 12 à 18 mois, puis tous les 2 à 3 ans en cas de positivité ; pour l’arachide, le poisson et les autres oléagineux, après 3 ans, puis tous les 2 à 3 ans en cas de positivité.

Avec les autres trophallergènes, les réintroductions sont conduites tous les 12 à 18 mois.

Guillet et al constatent qu’avec l’âge, le nombre moyen de sensibilisations alimentaires augmente.

6- Régimes alimentaires :

Les régimes alimentaires empiriques ont pour but d’améliorer la DA sévère après une restriction alimentaire n’autorisant que quelques aliments.

Il n’existe pas d’études contrôlées démontrant l’effet bénéfique de tels régimes.

Ils sont à éviter et il est donc préférable de conseiller des évictions orientées par l’enquête alimentaire.

Des incertitudes persistent sur la nécessité de supprimer l’aliment seul ou la famille alimentaire, car bien souvent la réaction n’est le fait que d’un aliment ou de quelques aliments de la famille.

L’échec des régimes peut être dû à une mauvaise observance liée à leur coût, à la difficulté de leur application, à des allergies alimentaires multiples dont certaines sont passées inaperçues, à la présence d’allergènes en réactivité croisée avec les allergènes végétaux, à l’existence d’allergènes alimentaires dans la composition de certains cosmétiques (oeuf, sésame, avoine, amande douce, blé, soja, avocat…).

7- Laits de substitution :

Le choix d’un lait de substitution en cas d’allergie aux protéines du lait de vache constitue une étape importante dans la prise en charge de la DA.

Le lait de soja est évité (10 % de double allergénicité), de même que les laits de brebis, d’ânesse ou de jument.

Des substituts industriels sont disponibles, préparés à partir d’hydrolysats de protéines à hydrolyse poussée.

Ils sont coûteux et peu appétissants.

Leur totale innocuité n’est pas évidente.

Des réactions anaphylactiques sont possibles.

Nous citons les hydrolysats de caséine (Nutramigent, Pregestimilt, Galliagènet), du lactosérum (Pepti-Juniort, Alfa-Rét), et ceux à partir de protéines animales et végétales (Prégominet).

Tous ces hydrolysats contiennent dans leur composition des huiles végétales dont on ne connaît pas la nature exacte ou qui sont manifestement du soja (lécithines en particulier).

En cas d’allergie aux hydrolysats à hydrolyse poussée, une substitution par des formules à base d’acides aminés de synthèse est désormais possible (Néocatet).

La teneur en acides aminés reproduit la composition du lait maternel.

Nutritionnellement complet, il contient lui aussi du soja. Délivré sur prescription médicale dans les pharmacies des hôpitaux, son prix est prohibitif.

Chez les enfants nourris par des laits de substitution, le gain staturopondéral et le métabolisme protéique sont réduits par rapport à ceux des enfants nourris au lait maternel.

Il est donc important de se faire aider par une diététicienne.

Les hydrolysats utilisés à titre préventif n’ont pour seule conséquence que de diminuer, ou du moins de retarder, les manifestations atopiques (DA en particulier) chez des enfants à haut risque non nourris au sein, ce qui constitue un facteur limitant leur intérêt.

8- Mesures préventives :

Le rôle préventif de l’allaitement maternel constitue un sujet très controversé.

De nombreux travaux ne démontrent pas son rôle protecteur dans l’atopie.

Cependant, dans une étude prospective avec un suivi sur une période de 17 ans, Saarinen et al ont démontré que l’allaitement au sein prolongé pendant plus de 6 mois permettait de diminuer la prévalence de la DA à 1 an et 3 ans.

À l’âge de 17 ans, la prévalence de l’atopie est inférieure dans ce groupe à celle observée dans les groupes d’enfants ayant bénéficié, soit d’un allaitement maternel de 1 à 6 mois, soit d’un allaitement de 1 mois ou de son absence totale.

Il apparaît de toute façon souhaitable que la mère allaite son enfant dans les premiers mois de vie.

L’absence de totale innocuité du lait maternel résulte de la présence d’allergènes alimentaires natifs en très petites quantités, de l’ordre du picogramme ou du nanogramme.

À la maternité, si la mère a décidé d’allaiter son enfant, il est conseillé, avant la montée de lait, d’avoir recours à des préparations hypoallergéniques, voire à du sérum glucosé.

Des manipulations diététiques, empiriques, ont été faites dans des familles à risque atopique, chez la mère pendant le dernier trimestre de la grossesse, pendant l’allaitement, combinées ou non à des programmes préventifs chez l’enfant.

Ainsi, Falth-Magnusson et al, dans une étude prospective et randomisée chez 86 mères, ont supprimé de leur alimentation l’oeuf et lait de la 28e semaine de gestation jusqu’à la délivrance, en poursuivant ces évictions selon le choix de la mère durant les 6 premières semaines.

À 5 ans, l’auteur ne peut conclure à l’effet bénéfique de ces évictions sur l’incidence de la DA.

La positivité pour les prick-tests à l’oeuf et au lait de vache, et le taux des IgE totales sont identiques dans les deux groupes.

L’élimination pendant les 3 premiers mois de lactation chez la mère du lait de vache, de l’oeuf et du poisson permet uniquement pendant les 6 premiers mois de vie de diminuer l’incidence de la DA.

Zeiger et al ont proposé de faire une double éviction alimentaire chez la mère et l’enfant.

Dans le groupe contrôle (185 sujets), l’allaitement au sein est encouragé avec à défaut des préparations infantiles à base de lait de vache.

Dans le groupe prophylactique (103 sujets), le lait de vache, l’oeuf et l’arachide sont supprimés chez la mère pendant le troisième trimestre de grossesse et l’allaitement.

L’enfant est nourri au sein ou soumis à un hydrolysat de caséine.

La diversification alimentaire est tardive (après 6 mois) et très progressive, étalée sur 36 mois.

À 1 an, on constate 27,1 % de prévalence cumulée d’atopie dans le groupe contrôle et 16,2 % dans le groupe prophylactique.

En revanche, à 2 ans, il n’existe pas de différence dans les deux groupes, ce qui est confirmé lors d’un suivi à long terme jusqu’à 7 ans.

Il n’existe pas de différence dans la survenue de la DA ni dans une autre des manifestations de l’allergie.

Ces études tendent à démontrer le peu d’intérêt de mesures préventives alimentaires empiriques dans les manifestations atopiques chez les familles à risque.

De plus, de telles évictions sont à risque sur le plan nutritionnel pour la mère et l’enfant.

Récemment, une équipe finlandaise s’est intéressée à l’effet préventif des probiotiques, bactéries issues de la microflore intestinale, dont la souche Lactobacillus rhamnosus.

Dans une étude en double aveugle versus placebo conduite dans des familles à risque atopique, 159 mères ont été randomisées.

Lactobacillus (S1 x 1010 CFU/j) a été administré en période prénatale chez la mère (pendant 2 à 4 semaines) et en période postnatale pendant 6 mois (soit directement chez l’enfant, soit chez la mère allaitante).

Après un suivi de 2 ans, dans le groupe probiotique, la fréquence de la DA est réduite de moitié par rapport au groupe placebo.

En revanche, il n’existe pas de différence significative entre les deux groupes dans le taux des IgE totales, des IgE spécifiques et dans la positivité pour les prick-tests.

Le mode d’action des probiotiques n’est pas connu et purement spéculatif.

Une de leurs principales cibles d’action serait le tube digestif (action sur la perméabilité, la microécologie et les réponses IgA).

Chez les sujets immunodéficients, les probiotiques peuvent se révéler particulièrement délétères (septicémie, abcès du foie).

9- Autres manifestations liées aux aliments au cours de la DA :

Les aliments peuvent intervenir dans la DA selon d’autres modalités que celles précédemment décrites.

Les aliments riches en histamine, en histaminolibérateurs, en tyramine, sont susceptibles d’aggraver la DA par l’intermédiaire d’une fausse allergie alimentaire.

Les nombreux additifs et conservateurs de notre alimentation peuvent également intervenir par le biais, plus d’une fausse allergie alimentaire que d’une allergie vraie.

L’introduction précoce d’arômes naturels (extraits de vanille…) dans l’alimentation de l’enfant atopique pourrait avoir un effet délétère sur la DA.

Nous rappelons que le baume du Pérou, sensibilisant de contact, est source de réactivation par voie interne de l’eczéma, justifiant l’éviction d’un certain nombre d’aliments dont la vanille, la cannelle, les agrumes…

Le contact direct avec les aliments est à l’origine, outre du syndrome d’allergie orale, de réactions d’irritations péribuccales, en particulier chez les enfants mangeant à pleine bouche agrumes, tomates, gruyère…

Il favorise la survenue d’une dermite de contact aux protéines.

Il est source d’urticaires de contact diagnostiquées par le Skin Application Food Test (SAFT-test), préconisé par Orange et al et consistant à appliquer une compresse imprégnée d’une quantité standardisée d’aliment pendant 10 à 30 minutes.

La lecture peut être plus précoce si nécessaire. Toute positivité interrompt immédiatement le test.

Une grande variété d’aliments peut être testée par cette technique.

Il existe une corrélation positive entre SAFT et RAST.

Pour terminer, nous rappelons que dans le syndrome de Netherton existent, outre la DA, la trichorrhexis invaginata, l’ichtyose linéaire circonflexe, une allergie alimentaire aux oléagineux dont l’arachide mais aussi au poisson, à l’oeuf, au lait.

Ainsi, il existe vraisemblablement un sous-groupe d’atopiques (DA sévère, DA de l’enfant) présentant une sensibilisation alimentaire et pouvant bénéficier à court terme des mesures d’éviction orientées.

Si l’alimentation au sein n’a pas fait ses preuves sur le plan préventif, elle est à conseiller de toute façon sans soumettre la mère à des mesures restrictives.

La diversification tardive, bien qu’ayant un retentissement minime, est souhaitable.

C – IRRITATION ET DERMATITE ATOPIQUE :

La peau de l’atopique présente une réponse anormale aux substances irritantes.

L’utilisation de lauryl-sulfate de sodium à différentes concentrations, en patch-test lu à 48 heures ou en badigeons répétitifs sur 4 jours, montre que le seuil de déclenchement de la réponse irritative est plus bas chez les sujets avec une DA active.

En peau lésée, la réaction irritative se produit avec des concentrations inférieures à celles nécessaires en peau normale.

Pour Nassif et al, chez les atopiques respiratoires sans signes cutanés, le seuil réactionnel est plus bas que chez les sujets normaux.

Seidenari et al n’ont pas confirmé cette anomalie fonctionnelle chez les atopiques respiratoires, mais les concentrations de lauryl-sulfate de sodium n’étaient pas identiques.

Avant et après exposition à l’irritant, les modifications concernant les pertes d’eau transépidermiques, la capacitance et l’échographie cutanée sont semblables à celles des sujets sains.

L’interprétation des résultats souvent contradictoires doit tenir compte des concentrations mais aussi du mode d’appréciation de l’irritation, score visuel ou analyse de paramètres tels que les pertes d’eau transépidermiques, la capacitance, l’échogénicité.

Ces réponses irritatives anormales pourraient être dues aux taux élevés de cytokines et autres médiateurs présents dans le sang, la peau et les muqueuses de l’atopique augmentant la réponse aux irritants.

Cependant, les pertes d’eau transépidermiques excessives avant toute exposition aux irritants témoignent d’une altération de la barrière épidermique.

Il existe une corrélation entre la gravité de la DA et la susceptibilité aux irritants.

L’irritation de la peau favorise la pénétration d’allergènes et donc le développement d’un eczéma de contact.

Pour certains, l’irritation constituerait le meilleur facteur prédictif de la sensibilisation au nickel.

De nombreux agents irritants sont reconnus chez l’atopique comme aggravant leur dermatose.

Le climat constitue un de ces facteurs. La DA s’aggrave volontiers l’hiver.

Le temps froid, la diminution de l’humidité relative, l’absence d’exposition aux UV contribuent à la faible hydratation de la peau, à l’augmentation des pertes d’eau transépidermiques et donc à la susceptibilité aux irritants de notre environnement.

Le vent est également un facteur climatique aggravant.

Nous citons aussi des irritants connus comme le port de vêtements occlusifs, en laine ou en tissu synthétique, le contact avec les solvants des lipides, de fortes concentrations en urée et en propylène glycol, les désinfectants (produits chlorés des piscines), la friction de la peau, l’utilisation de topiques occlusifs, l’hypersudation quelle qu’en soit la cause.

En ce qui concerne la sueur, les mécanismes par lesquels elle entraîne une exacerbation du prurit et secondairement de l’eczéma sont mal connus car, outre d’éventuels agents irritants contenus dans la sueur, interviendrait une sensibilité exacerbée du système parasympathique par blocage adrénergique.

Quant à l’eau, elle peut constituer un irritant au niveau des mains, parfois au niveau du corps, aboutissant quelquefois à des comportements aberrants où l’atopique se lave le moins possible.

D – ECZÉMA DE CONTACT ET DERMATITE ATOPIQUE :

La question classique et souvent posée de la moindre fréquence des eczémas de contact dans la DA en raison d’un profil immunologique particulier nous apparaît sans véritable intérêt sur le plan clinique.

La sensibilisation de contact survient chez l’atopique dans près de 40 à 50 % des cas.

Pour Guillet et al, la sensibilisation de contact est plus fréquente lorsque la DA est modérée que quand elle est sévère.

Elle touche aussi bien l’enfant que l’adulte.

Elle peut prendre tous les aspects connus : eczéma de contact, dermite aéroportée, eczéma par réactogènes internes.

La dermite de contact aux protéines, combinant sur le plan physiopathologique des mécanismes de types I et IV, survient dans près de 40 % des cas chez l’atopique.

Les tests de contact doivent toujours être interprétés avec prudence, vu la fréquence des tests irritatifs, pustuleux, en particulier avec le nickel, et donc non reproductibles.

L’atopique peut se sensibiliser à n’importe quel allergène ubiquitaire.

Les allergènes le plus fréquemment retrouvés sont les métaux, en particulier le nickel, les parfums, le baume du Pérou, la colophane, les conservateurs.

Chez le jeune enfant, il importe de se méfier de la sensibilisation au nickel secondaire au percement des oreilles.

Il apparaît indispensable de tester en phase de rémission les sujets atopiques lorsque la DA est localisée (pieds, mains, visage), mais aussi rebelle à un traitement sensé être bien suivi.

L’enquête allergologique permet également de dépister des allergies aux principes actifs et excipients des nombreux topiques prescrits dans la DA et donc de corriger souvent favorablement la prise en charge.

Dans le milieu professionnel, l’eczéma des mains est plus fréquent chez les sujets ayant des antécédents de DA dans l’enfance ou ayant déjà eu un eczéma des mains.

Certaines professions sont à risque car elles induisent des dermites irritatives et favorisent ainsi la sensibilisation : coiffure, travaux de ménage, professions médicales et paramédicales, vétérinaires, travaux de mécanique, professions du bâtiment, de l’agriculture et de l’alimentation.

La sensibilisation de contact à des allergènes professionnels n’est pas plus importante chez l’atopique, voire moindre, par une sélection précoce des professions.

Une information adéquate de tout atopique est indispensable quant au choix de son orientation professionnelle.

E – FACTEURS PSYCHOLOGIQUES :

Les sujets atopiques ne présentent pas de perturbations psychiques bien particulières, ni une prédisposition de leur personnalité.

Cependant, il s’agit souvent de sujets anxieux, d’autant qu’ils sont atteints d’une affection chronique affichante dans la relation avec l’autre rendue ainsi difficile.

La DA subit des poussées évolutives et des exacerbations secondaires aux différents événements stressants de la vie du patient.

La prise en charge psychologique, le changement de milieu, peuvent améliorer la DA.

Chez l’enfant atopique, les facteurs stress n’ont pas été clairement étudiés, mais le prurit incessant, les soins fastidieux, l’insomnie à caractère familial, pendant et quelquefois en dehors des poussées, rendent souvent l’ambiance difficile à gérer avec une agitation des enfants, une agressivité et une fatigue des parents.

Il n’est pas rare de retrouver une séparation parentale à l’origine des poussées de DA de l’enfant.

Il importe d’apaiser et de ne pas culpabiliser.

L’amélioration de l’état cutané est le meilleur moyen de régler les problèmes psychologiques.

Physiopathogénie :

A – GÉNÉTIQUE :

1- Histoire familiale :

Une histoire familiale de DA ou de maladie atopique est fréquente chez un sujet atteint de DA.

Ainsi, Diepgen estime à 58 % la prévalence de l’atopie chez les apparentés du premier degré dans un groupe de 428 sujets atteints de DA.

Chez les malades avec DA, on retrouve dans 42 % des cas des antécédents familiaux de DA et dans 28 % des cas une atopie respiratoire.

En revanche, chez les atopiques respiratoires, une histoire familiale de DA est présente dans 12 % des cas, contrastant avec la fréquence de l’atopie respiratoire (43 %).

Diepgen a démontré, par une analyse des odds ratio dans une étude cascontrôle, que l’association familiale est plus forte parmi les membres d’une même fratrie qu’entre parents et fratrie (OR : 3,86 versus 1,9).

Ceci pourrait être le résultat de facteurs environnementaux inhérents à l’enfance agissant comme des promoteurs de la maladie.

Les études menées chez les jumeaux montrent une concordance de DA plus forte chez les monozygotes (72 %) que chez les dizygotes (23 %), confirmant que la génétique s’intrique avec des facteurs d’environnement.

Le risque de développer une DA chez les dizygotes est équivalent à celui observé dans une fratrie non gémellaire. Le rôle d’une influence maternelle supérieure à celle du père dans le développement de la DA est controversé.

Les travaux allant dans le sens d’une influence maternelle prépondérante montrent des différences peu significatives et où seule la DA est concernée et non l’asthme ou la rhinite allergique.

Mais là aussi, le rôle de l’environnement est-il peut-être essentiel (transmission maternofoetale de la sensibilisation allergénique, importance de l’habitat…).

Uehara, dans une étude chez les descendants de sujets avec une DA et s’étant mariés, soit à des sujets normaux, soit à des atopiques respiratoires, soit à des atopiques cutanés, montre une prévalence de la DA respectivement de 56 %, 59 % et 81 %.

Si seul le père ou la mère est atopique cutané, on trouve chez les enfants 53 % et 60 % de DA, soit une différence non statistiquement significative réfutant l’hypothèse d’une influence maternelle majoritaire.

2- Transmission :

Le mode de transmission de la DA n’est pas clairement établi.

Il pourrait s’agir d’une affection à transmission autosomique récessive (en faveur de laquelle plaide l’absence, dans certains cas, d’histoire familiale), ou plus vraisemblablement dominante.

Mais la transmission pourrait être dominante, avec une hétérogénéité génétique et une expression variable révélée par des facteurs d’environnement.

Plus de 20 gènes pourraient être impliqués dans le développement de l’atopie.

Dans l’atopie respiratoire, on a pu individualiser un gène prédisposant localisé sur le chromosome 11q-13, chez des patients atopiques ayant un asthme ou une rhinite allergique et présentant une réponse IgE excessive.

Une transmission maternelle de l’atopie liée au chromosome 11q-13 a été évoquée.

Au cours de la DA, ce lien génique n’a pas été démontré.

Le gène codant pour la sous-unité b du récepteur à haute affinité (FceRI-b) est situé sur le chromosome 11q et il pourrait ainsi exister un lien génique étroit avec le gène prédisposant à l’atopie respiratoire.

Shirakawa et al ont identifié chez des atopiques, dans un faible pourcentage de cas, un variant de la sous-unité b du FceRI, avec une substitution Ile181Leu au niveau du quatrième domaine transmembranaire de la molécule codée sur le chromosome 11q-13.

La stimulation de ce récepteur variant pourrait favoriser la libération de médiateurs pro-inflammatoires par les mastocytes ou augmenter l’expression de l’IL4 et du ligand CD40, permettant ainsi une production locale d’IgE par les lymphocytes.

Au niveau du chromosome 5 (5q 31-33), se trouve un cluster génique codant pour de multiples cytokines régulant la réponse IgE, et en particulier l’IL4.

L’expression du gène de l’IL4 semble jouer un rôle essentiel dans le développement de l’atopie, avec des différences génétiques dans l’activité transcriptionnelle du gène de l’IL4.

Des mutations au niveau de la chaîne a (Q576R) du récepteur de l’IL4, variables selon les groupes ethniques, ont été identifiées par certaines équipes et contestées par d’autres.

Un (ou des gènes) localisé sur le chromosome 14 et situé dans la région codant pour la chaîne a du TCR (T-cell receptor) pourrait être impliqué dans la réponse IgE spécifique.

Par ailleurs, les liens existant entre DA et psoriasis pourraient être expliqués par des loci communs telles les liaisons 1q21, 17q25 et 20p identifiées dans la DA et connues dans le psoriasis.

L’analyse du système human leukocyte antigen (HLA) de classe II dans la DA ne permet pas d’individualiser une liaison particulière, alors qu’il existe des liens géniques identifiés entre les aéroallergènes polliniques et le système HLA de classe II qu’il faut interpréter en fonction des prévalences alléliques dans la population étudiée.

Saeki et al, dans une population ciblée japonaise d’atopiques (taux d’IgE totales > 8 000 U/mL) démontrent le rôle important joué dans le développement de la DA du typage HLA-DR b1 71Glu et/ou DQ b1 30Hist/57Val.

En revanche, il n’existe pas de déséquilibre de liaison entre les allèles HLA de classe II et ceux des gènes transporter associate with antigen processing (TAP) codant pour un système transporteur impliqué dans le processing antigénique endogène HLA II réduit.

Il n’est pas retrouvé d’association entre les allèles TAP et la fréquence de certains résidus d’aminoacides.

Il apparaît que l’atopie a une origine multifactorielle avec une interaction évidente de facteurs génétiques et environnementaux. D’une part, des gènes indépendants du système HLA sont impliqués dans la régulation du taux des IgE totales.

D’autre part, un ou des gènes de réponse immune spécifique associés aux gènes du système de classe II sont impliqués dans les mécanismes IgE spécifiques.

B – PHYSIOPATHOLOGIE DE LA PEAU SÈCHE :

La xérose cutanée est un signe essentiel de la DA que l’on peut apprécier cliniquement du fait de sa rugosité au toucher mais aussi grâce aux analyses du relief de surface cutanée.

La sécheresse cutanée s’aggrave sous l’influence de facteurs climatiques (faible humidité ambiante, température basse) et de facteurs irritants pour la peau.

Les mécanismes de cette xérose sont mal connus et vraisemblablement multiples.

1- Anomalies de la teneur en eau :

On constate chez l’atopique une augmentation des pertes d’eau transépidermiques appréciée grâce à un évaporimètre.

Celle-ci est présente en peau lésée mais aussi en peau non eczémateuse (sèche ou cliniquement normale), que le sujet ait ou non des lésions actives associées.

Les pertes d’eau sont d’autant plus importantes en peau non eczémateuse qu’il y a des lésions actives de DA en d’autres points du tégument.

Elle est le fait aussi bien des enfants que des adultes.

Elle persiste à distance de la guérison clinique de l’eczéma.

L’étude de l’hydratation du stratum corneum donne des résultats variables liés à la méthodologie employée (cornéomètre, spectroscopie infrarouge), à l’existence d’un gradient en eau dans le stratum corneum, au site et à l’aspect de la zone testée.

La mesure de la capacitance avec un cornéomètre constitue un des moyens les plus utilisés pour apprécier le contenu en eau du stratum corneum.

La capacitance augmente d’autant que le contenu en eau du stratum corneum est plus important.

Chez l’atopique, la capacitance apparaît diminuée.

Elle est plus basse en cas d’atopie avec peau sèche.

En utilisant des techniques de spectroscopie infrarouge, on constate une augmentation de l’hydratation du stratum corneum en peau cliniquement non lésée chez l’atopique.

Il existe une corrélation inverse entre pertes d’eau transépidermiques et capacitance, mais elle est non significative.

Cette diminution de la capacitance pourrait être attribuée à la diminution du pouvoir hygroscopique (capacité de capter et de retenir l’eau) du stratum corneum de l’atopique.

Les propriétés de friction de la peau, reflet de la microtopographie de surface cutanée et de son élasticité, sont diminuées.

Ces anomalies des propriétés mécaniques de la peau atopique traduisent une altération de la barrière cutanée.

La cohésion intercornéocytaire, appréciée grâce à un cohésographe, est augmentée en peau sèche non eczémateuse.

La peau sèche peut résulter d’un déficit en natural moisturizing factors (NMF) qui interviennent dans la capacité de la peau à retenir l’eau et dans son élasticité.

Un déficit en urée (composant des NMF) a été mis en évidence aussi bien au niveau du stratum corneum normal que lésé.

Par ailleurs, une anomalie dans la distribution des lipides intercellulaires, et en particulier des céramides du stratum corneum, pourrait expliquer cette anomalie de la barrière.

Les céramides sont constitués de six grands groupes structuraux différents.

Ce sont les céramides 1 transporteurs de linoléate qui sont significativement diminués chez les atopiques au niveau du stratum corneum. Higuchi et al ont mis en évidence dans la peau atopique une forte expression de la glucosylceramide sphingomyelin deacyclase (GcSM).

Cette enzyme catalyse l’hydrolyse du groupement N-acyl de la sphingomyéline ou du glucosylcéramide pour donner naissance respectivement à la sphingosylphosphocholine ou au glucosylsphingosine et à des acides gras.

L’activité GcSM deacyclase n’est pas une exclusivité du stratum corneum atopique.

Mais, de par sa forte activité, elle entre en compétition avec la SMase (une des enzymes régulatrices du taux de céramides) dont elle partage le même substrat (la sphingomyéline).

Ainsi, cette activation enzymatique de la GcSM deacyclase, dont on ne connaît pas les facteurs de stimulation, pourrait contribuer au déficit en céramides.

De plus, la flore bactérienne cutanée, en sécrétant des céramidases, pourrait participer au déficit en céramides du stratum corneum.

2- Anomalies des fonctions des glandes sébacées :

Elles sont imputables à une réduction, soit du nombre des glandes sébacées, soit de la sécrétion sébacée.

La composition du sébum est modifiée, avec une plus grande richesse en cholestérol et un appauvrissement en squalènes.

* Anomalies des fonctions sudorales :

L’étude de la réponse sudorale de l’atopique après stimulation par l’acétylcholine donne des résultats divergents.

Si certains trouvent une réponse sudorale exagérée chez l’atopique, Kiistala et al identifient une réponse hypohydrotique, en particulier après stimulation à la métacholine.

De même, les réponses à l’adrénaline sont très variables et aléatoires.

Ces différents éléments se combinent vraisemblablement pour donner la peau sèche de l’atopique.

C – ALLERGÈNES, ANTIGÈNES MICROBIENS ET CELLULES PRÉSENTATRICES D’ANTIGÈNES :

1- Pneumallergènes :

Mitchell et al, en 1982, ont démontré que l’application percutanée de l’antigène P1 extrait par purification de Dermatophagoides pteronyssinus entraînait l’apparition clinique d’une réaction eczématiforme, et en histologie, des modifications épidermiques (spongiose et microvésiculation) et dermiques (infiltrat inflammatoire fait surtout de polynucléaires basophiles, éosinophiles, mais aussi de cellules mononucléées).

La présence de l’infiltrat basophile n’a pas été confirmée ultérieurement.

Les mastocytes, en petit nombre lors d’un patch-test unique, voient leur nombre augmenter de façon nette lors d’applications répétées de l’allergène tous les 2 jours pendant 8 jours.

L’importance de l’infiltrat éosinophile a été confirmée, en particulier par Bruynzeel-Koomen et al.

En effet, l’infiltrat dermique débute 2 à 6 heures après le patch-test.

Les éosinophiles sont activés et dégranulés, marqués par l’AC EG2 reconnaissant la PCE.

Dans l’épiderme, on trouve à la 24e heure des éosinophiles non activés en contact étroit avec les cellules de Langerhans épidermiques.

Tanaka a montré que les éosinophiles exprimant le FceRI, le FceRII/CD23 étaient ainsi capables de « trapper » les antigènes via les IgE de surface.

Les éosinophiles participent activement, de par leur équipement enzymatique puissant, au processus inflammatoire.

Un certain nombre de cytokines interviennent dans le recrutement de ces cellules.

L’IL5 est produite et libérée par les lymphocytes Th2, mais aussi par les éosinophiles (sécrétion autocrine) activés, sanguins et tissulaires.

L’IL5 est un des plus puissants et sélectifs agents de chimiotaxie des éosinophiles, mais elle induit également leur différenciation et module leur cytotoxicité et survie.

L’IL3, l’IL4, le granulocyte-macrophage colony stimulating factor (GM-CSF) participent à la chimiotaxie des éosinophiles, de même que le monocyte chemotactic peptide 3 (MCP3) et les RANTES, dont l’expression de l’acide ribonucléique messager (ARNm) est augmentée après stimulation allergénique.

L’IL4 est chémotactique pour les éosinophiles du sang circulant des sujets atopiques et non des sujets normaux.

La migration transendothéliale des éosinophiles implique la stimulation sur les cellules endothéliales de VCAM-1 interagissant avec le very late antigen 4 (VLA-4), exprimé sur les éosinophiles. L’IL4 stimule VCAM-1.

Le platelet activating factor (PAF)-acéther, dérivé de l’acide arachidonique lors de la dégradation des phospholipides membranaires, attire au foyer inflammatoire les éosinophiles.

Les techniques d’immunomarquage démontrent également la présence dans l’épiderme de cellules dendritiques marquées par l’anticorps anti-IgE.

La présence d’IgE à la surface des cellules de Langerhans n’est pas spécifique de la DA, comme Bruynzeel-Koomen et al l’avaient initialement suggéré.

On peut également en retrouver chez des non-atopiques présentant un taux élevé d’IgE sériques, dans des réactions allergiques de contact, au cours du mycosis fungoides.

Tanaka et al ont mis en évidence, par des techniques immunohistochimiques, que les antigènes des acariens pénétraient l’épiderme et que leur présence était mise en évidence 1 à 6 heures après le test.

Après 24 heures, des cellules de Langerhans porteuses d’antigènes spécifiques sont présentes à la fois dans l’épiderme et le derme.

Après 48 heures, c’est le derme qui en est la localisation exclusive.

De nombreuses cellules dendritiques présentent le double marquage anti-IgE et antiacariens.

Il existe également un afflux de cellules macrophagiques dans les 24 premières heures.

Tanaka et al ont montré la présence de cellules macrophagiques ayant capté les acariens en contact étroit avec les lymphocytes.

L’infiltrat lymphocytaire augmente après le patch-test pour atteindre un maximum à 24 heures pour les lymphocytes CD8 et à 48 heures pour les lymphocytes CD4.

Les lymphocytes jouent un rôle essentiel au cours de cette réaction.

L’existence de clones lymphocytaires T spécifiques d’allergènes a été démontrée en peau lésée et au site de patch-test à la poussière de maison (Der p 1).

Il s’agit surtout de clones Th2.

Mais c’est l’analyse des profils cytokiniques et de leur cinétique qui a mis en évidence une réponse biphasique de la réaction inflammatoire aux aéroallergènes.

À la phase précoce de la réaction (24 heures), les lymphocytes sont essentiellement Th0-Th2, leur nombre allant en s’accroissant.

La population Th1 est stable, tandis que la population Th non productrice diminue significativement.

À ce moment-là, la production d’IL4 est prédominante.

Entre 24 heures et 48 heures, c’est la population Th1 qui devient prédominante.

La population Th2 diminue, tandis que le pourcentage de Th0 est stable.

Il existe alors une production d’IFNc majoritaire par rapport à celle d’IL4.

C’est donc à une commutation Th2/Th1-Th0 à laquelle on assiste.

Les cellules CD4 positives sont la source exclusive d’IL4.

L’IFNc est produit en majorité par ces cellules, mais aussi par les cellules CD8, les cellules macrophagiques et dendritiques.

On peut donc supposer que l’antigène ayant pénétré l’épiderme est pris en charge par les cellules de Langerhans.

Il se lie sous forme non complexée aux IgE via le récepteur de haute affinité FceRI et sous forme de complexe allergène-IgE au récepteur de faible affinité FceRII/CD23.

L’activation du Fce RI permettrait la libération de médiateurs de l’inflammation et l’activation FceRI/FceRII contribuerait à la présentation antigénique aux lymphocytes CD4.

L’activation des clones Th2 spécifiques permet la libération d’IL4 et d’IL5.

Ainsi assiste-t-on à un recrutement d’éosinophiles libérant leurs médiateurs toxiques. L’activation Th1 permet la poursuite et l’aggravation de l’inflammation.

L’IL12 libérée par les monocytes et les macrophages, comme le suggère l’afflux de ces cellules, pourrait stimuler la production d’IFNc par les cellules Th1.

2- Trophallergènes :

Le mécanisme de l’allergie alimentaire au cours de la DA est mal connu et en particulier celui qui permet de passer de réactions de type immédiat (le plus souvent observées lors des TPO) à la réaction eczémateuse de la DA.

Après exposition allergénique, les mastocytes cutanés seraient activés et libéreraient in situ de l’histamine et d’autres médiateurs responsables de la réaction immédiate.

Outre l’activation directe des mastocytes par les trophallergènes, l’hypothèse émise par Sampson est celle d’une libération, induite par les aliments, d’histamine releasing factors (HRF), produits par de nombreuses cellules (polynucléaires neutrophiles, lymphocytes, monocytes, plaquettes), capables de favoriser la libération d’histamine en se liant aux molécules d’IgE présentes à la surface des mastocytes et des basophiles.

La phase tardive de la réaction IgE dépendante débute 3 à 4 heures après la réaction immédiate.

Elle est caractérisée par l’expression des molécules d’adhésion leucocytaire à la surface des cellules endothéliales des veinules postcapillaires.

Les éosinophiles infiltrent également la peau atopique 4 heures et 14 heures après le test.

Des dépôts de MBP sont observés.

Mais l’éosinophile est capable de libérer bien d’autres substances toxiques.

Cette accumulation progressive d’éosinophiles s’associe à celle de basophiles, de polynucléaires neutrophiles.

Elle atteint son maximum 6 heures et 12 heures après le test.

Elle est progressivement remplacée, 24-48 heures après le test, par un infiltrat mononucléé (monocytes, lymphocytes Th2), source de nombreuses cytokines.

La phase tardive s’accompagne également de la libération d’IL1 et de TNF, qui combinés à l’IL4 favorisent l’expression des molécules d’adhésion leucocytaire. Quant à l’existence d’IgE spécifiques pour les trophallergènes à la surface des cellules de Langerhans, cela reste à démontrer.

Cependant, les résultats des patch-tests et des TPO obtenus par Isolauri et al avec le lait de vache incitent à penser que des réactions médiées par les lymphocytes T interviennent dans la sensibilisation alimentaire.

Par ailleurs, l’hyperperméabilité intestinale constituerait un facteur favorisant le passage des trophallergènes, aussi bien sous la forme native que dégradée.

Il n’est pas impossible qu’un defect intrinsèque des cellules épithéliales soit à l’origine d’une altération de leurs fonctions et du passage transcellulaire des allergènes dégradés.

3- Agents microbiens :

* Staphylococcus aureus :

La peau du sujet atopique, lésée ou apparemment saine, est anormalement colonisée par Staphylococcus aureus.

Sa densité cutanée est plus importante dans les lésions aiguës suintantes que chroniques, lichénifiées.

Il existe une corrélation entre le nombre de Staphylococcus aureus et l’intensité des signes inflammatoires (érythème, oedème, suintement), mais pas entre la densité en germes et l’importance des lésions chroniques (sécheresse, lichénification).

Les scores cliniques de sévérité de la DA sont corrélés à la colonisation de la peau par Staphylococcus aureus.

Le portage nasal de Staphylococcus aureus est plus important dans la DA que chez le sujet sain.

Cette colonisation excessive de la peau lésée et des muqueuses nasales par Staphylococcus aureus fait intervenir plusieurs mécanismes.

L’adhésion bactérienne, élément clé de la colonisation et de l’infection microbienne, est augmentée sur les cornéocytes et les cellules épithéliales nasales.

L’adhésion bactérienne est médiée par les adhésines dont la protéine A de Staphylococcus aureus, jouant un rôle majeur dans le processus d’adhésion, de même que l’acide teichoïque, l’acide ipotechoïque, la fibronectine.

D’autre part, les altérations structurales et fonctionnelles du stratum corneum, les anomalies des lipides de surface, l’inflammation chronique, les brèches épidermiques, participent à cette colonisation exagérée, tout comme les perturbations du chimiotactisme des polynucléaires et la baisse de l’immunité locale (diminution des IgA sécrétoires).

En peau saine, la colonisation bactérienne accrue est due, soit au voisinage avec des zones lésées, soit aux mêmes mécanismes qu’en peau lésée.

On constate parfois une identité biotypique entre d’une part fosses nasales et peau lésée, et d’autre part peau saine et peau lésée.

Staphylococcus aureus exerce son action pathogène directement par l’intermédiaire de la protéine A de Staphylococcus aureus, de ses toxines et enzymes, mais aussi par le biais de réactions d’hypersensibilité immédiate et/ou retardée.

C’est ainsi que des IgE spécifiques anti-Staphylococcus aureus sont observées dans des syndromes hyper-IgE associés à des infections staphylococciques récidivantes, mais aussi dans certaines DA à taux élevé d’IgE totales, sans infection staphylococcique ou sans impétiginisation franche.

Mais l’origine et le rôle de ces IgE spécifiques n’est pas défini, d’autant que les tests cutanés d’hypersensibilité immédiate ne sont pas significatifs.

Quant aux réactions d’hypersensibilité retardée visà- vis des déterminants antigéniques purifiés de la paroi de Staphylococcus aureus, elles sont diminuées et contrastent avec une augmentation in vitro de la réponse lymphocytaire à Staphylococcus aureus.

Plus récemment, on a identifié dans les isolats de Staphylococcus aureus colonisant la peau atopique, la présence d’exotoxines possédant les propriétés de superantigènes, et plus particulièrement des entérotoxines A (SEA) et B (SEB) ou la toxine du toxic shock syndrome (TSST-1).

Strange et al, en appliquant avec et sans occlusion SEB, en peau saine de sujets normaux et atopiques, ont pu démontrer le rôle de ce superantigène dans la survenue d’une inflammation cutanée surtout folliculaire.

De plus, des réactions de flare-up cutanées, localisées ou généralisées, ou à type de conjonctivite, sont possibles.

Les superantigènes sécrétés à la surface de la peau peuvent stimuler les macrophages épidermiques ou les cellules de Langerhans et induire ainsi la libération de médiateurs tels l’IL1, l’IL12, le TNFa.

La production locale de TNF et d’IL1 induit l’expression d’E sélectine sur l’endothélium vasculaire, permettant ainsi l’afflux de cellules mémoires/effectrices cutaneous lymphocyte-associated antigen (CLA) positives. Les superantigènes staphylococciques induisent une activation lymphocytaire T.

Les biopsies réalisées au site d’application de SEB ou de peau colonisée par Staphylococcus aureus démontrent une accumulation sélective de lymphocytes T exprimant le TCR avec un répertoire V b spécifique (Vb 3, Vb 12, Vb 17).

La sécrétion locale d’IL12, ainsi que par les cellules de Langerhans stimulées par les toxines et ayant migré vers les ganglions correspondants, permet l’expression du CLA à la surface des lymphocytes T et ainsi un recrutement supplémentaire de cellules T mémoires/effectrices dépendantes de la peau.

L’inflammation cutanée initiale se trouve ainsi amplifiée et crée les conditions favorables à la poursuite de la colonisation bactérienne.

Chez l’atopique, les cellules mononucléées du sang périphérique, après stimulation, soit par les bactéries, soit par les superantigènes, présentent, à l’inverse du sujet non atopique, des capacités diminuées de produire de l’IFNc, mais en revanche accrues de produire de l’IL4.

Certaines protéines de surface du Staphylococcus aureus, comme la NP-tase, ont des propriétés identiques vis-à-vis de l’IFNc.

Ces réponses altérées en IFNc pourraient expliquer les difficultés qu’a l’atopique à éliminer Staphylococcus aureus.

Enfin, les superantigènes, la toxine a, la protéine A du staphylocoque ont comme cible d’action les kératinocytes porteurs du système HLA de classe II dont l’expression est médiée par l’IFNc.

La liaison directe des toxines entraîne une augmentation d’expression d’intercellular adhesion molecule (ICAM)-1 et une libération accrue de TNFa.

Ils agissent également sur les mastocytes/basophiles par le biais des IgE spécifiques stimulant la dégranulation mastocytaire.

* Virus :

Leur rôle infectant est démontré.

L’immunodéficit de l’atopie constitue un terrain favorable à l’infection herpétique.

Il n’y a pas de différence significative entre les atopiques avec et sans infection herpétique en ce qui concerne la baisse des IgA, le taux des IgE, le nombre de CD4, l’altération des tests à la PHA (phytohémagglutinine), à la concanavaline A, au pokeweed-mitogene. Cependant, des facteurs défectueux comme la production de MIF (migration inhibitory factor) et d’IFNc, la cytotoxicité T, l’activité natural-killer, la production d’IL1 interviennent vraisemblablement. Les infections virales induisent une réaction Th1 forte.

Il est connu que les cytokines Th1 peuvent s’opposer au développement des cellules Th2 et/ou de leur production cytokinique.

Les observations de DA s’améliorant transitoirement au décours d’un épisode viral aigu pourraient s’expliquer par un déséquilibre de la balance Th1/Th2 en faveur de la réponse Th1.

* Pityrosporum orbiculare :

Le rôle potentiellement pathogène de Pityrosporum orbiculare découle des observations cliniques.

Il nous apparaît indispensable de citer au préalable quelques notions fondamentales concernant le Pityrosporum orbiculare pouvant expliquer la variabilité des résultats observés et leur interprétation.

Pityrosporum orbiculare est une levure lipophile saprophyte de la peau normale, siégeant dans les parties les plus superficielles de l’épiderme et des follicules pileux.

Les cultures de Pityrosporum orbiculare donnent des résultats variables en fonction du milieu de culture utilisé, du siège du prélèvement, de l’âge du sujet.

Parmi les principaux facteurs favorisant son développement et son pouvoir pathogène, citons les températures chaudes, la forte humidité relative, l’hypersudation, les états d’immunosuppression.

Dans une étude ayant porté sur des sujets atopiques avec et sans DA, sur une population ciblée présentant un head and neck dermatitis (HN) et sur une population contrôle, Broberg a permis d’éclaircir les relations pouvant exister entre DA et Pityrosporum orbiculare.

Les cultures ne montrent pas de différences qualitativement et quantitativement significatives entre groupes apparentés du même âge (DA/atopie respiratoire/contrôle).

Le pourcentage de cultures positives varie avec l’âge et augmente à partir de la période pubertaire.

Dans la DA, le pourcentage de cultures positives est plus important au niveau du front qu’en zone eczémateuse ou en peau saine.

Chez les patients avec un HN (essentiellement les adultes), le pourcentage de cultures positives avoisine 83 % des cas.

Le lien entre HN et Pityrosporum orbiculare pourrait être la localisation préférentielle de Pityrosporum orbiculare à ce niveau.

Les prick-tests au Pityrosporum orbiculare (extrait soluble à la concentration de 5 mg/mL) sont positifs uniquement dans la DA, et plus particulièrement dans la DA avec HN, et respectivement dans 23 % et 55 % des cas.

Waersted et Hjorth notent des prick-tests positifs chez 28 % des DA avec HN, et Kieffer et al chez 79 % de ces patients (comparés aux 45 % de positivités dans les DA sans HN).

Les IgE spécifiques anti-Pityrosporum orbiculare sont, malgré une colonisation fungique identique (DA/atopie respiratoire/contrôle), présentes uniquement dans la DA.

Les RAST sont corrélés à la présence de prick-tests positifs, mais tous les sujets ayant un pricktest positif au Pityrosporum orbiculare n’ont pas un RAST positif.

Les taux d’IgE spécifiques sont d’autant plus importants que la DA est sévère, qu’il existe un HN et que le patient est en poussée.

Chez les enfants, on peut trouver des IgE spécifiques, avec une augmentation, en fonction de l’âge, de la proportion de ceux ayant des RAST positifs et une corrélation avec la sévérité de la DA.

Il existe de possibles réactions croisées entre certains épitopes de Pityrosporum orbiculare et de Candida albicans, c’est-à-dire entre les composants polysacccharidiques de haut poids moléculaire de la paroi de Pityrosporum orbiculare et les mannanes de Candida albicans.

Les patch-tests à Pityrosporum orbiculare réalisés par Kieffer et al ont permis dans un petit nombre de cas d’objectiver des réactions immédiates et/ou retardées, accompagnées de flare-up, dans les DA avec et sans HN.

Les scratch-tests altérant la barrière épidermique donnent un fort pourcentage de positivités non reproductibles.

Les tests d’histamine-release sont plus volontiers positifs chez les sujets avec un HN et il existe une bonne corrélation avec le prick-test.

Les tests in vitro ont permis à Kröger et al de démontrer qu’après stimulation par des extraits antigéniques de Pityrosporum orbiculare, les cellules mononucléées de sujets ayant une DA et des RAST positifs vis-à-vis de Pityrosporum orbiculare synthétisaient des IgE, de l’IL4 et de l’IL5.

L’addition à l’extrait antigénique de l’IL4 permet d’accroître la réponse IgE de façon dose-dépendante.

La spécificité de la réponse IgE est probable, mais non démontrée. Il n’a pas été constaté de synthèse d’IL2 et d’IFNc.

Ainsi, on peut supposer l’existence, chez les atopiques avec RAST positifs, de clones Th2 spécifiques pour Pityrosporum orbiculare.

Cette réaction immune induite par Pityrosporum orbiculare semble propre à l’atopie cutanée, en particulier au sous-groupe de DA avec HN.

Dans la dermite séborrhéique où le pourcentage de cultures positives pour Pityrosporum orbiculare est très fortement positif (90 à 100 % des cas), il n’existe pas de réaction immune développée vis-à-vis de Pityrosporum orbiculare.

Par ailleurs, Broberg ne constate pas, après un traitement antimycosique topique, de corrélation positive entre l’amélioration clinique, la diminution ou la négativation des cultures pour Pityrosporum orbiculare, ainsi qu’entre l’état cutané et les résultats des prick-tests.

Ainsi, il n’existe pas de conclusions formelles concernant le rôle pathogène de Pityrosporum orbiculare dans la DA.

La réaction IgE spécifique pourrait n’être que le reflet d’une sensibilisation rendue possible par l’altération de la barrière cutanée, favorisant la pénétration antigénique.

Le rôle pathogène de Pityrosporum orbiculare dans l’inflammation cutanée est possible, de même que dans la stimulation des clones Th2 et la synthèse d’IgE.

Ceci apparaît vraisemblable pour une certaine catégorie d’atopiques, en particulier ceux présentant des IgE spécifiques.

Les travaux effectués sur Pityrosporum orbiculare sont à rapprocher de ceux bien antérieurs ayant porté sur le rôle des squames humaines dans la DA et vis-à-vis desquelles le même type de réaction d’hypersensibilité immédiate était constaté.

4- Cellules présentatrices d’antigènes :

La cellule de Langerhans appartient au groupe des cellules dendritiques, elle joue un rôle clé dans la reconnaissance antigénique et sa présentation aux cellules effectrices lymphocytaires.

Au cours de la DA, on retrouve des cellule de Langerhans (ou cellules dendritiques apparentées) IgE positives dans l’épiderme et le derme, en peau lésée et en peau saine, surtout en position périvasculaire.

Cependant, cette présence d’IgE à la surface des cellules de Langerhans n’a rien de spécifique à la DA.

En effet, en zone lésée de nombreuses dermatoses (mycosis fungoides…), chez des patients non atopiques présentant un taux sérique élevé d’IgE totales, on retrouve des cellules de Langerhans ou dendritiques épidermiques ou dermiques porteuses d’IgE à leur surface.

La présence de cellules de Langerhans IgE positives est corrélée au taux sérique d’IgE.

Au cours de l’atopie, les cellules de Langerhans expriment trois types de récepteurs liant les IgE : le récepteur de haute affinité FceRI, le récepteur de basse affinité FceRII/CD 23 et la lectine e BP (IgE binding-protein).

L’expression du FceRI est augmentée en peau lésée de DA, mais aussi en dehors de la DA.

Au niveau de l’épiderme, il existe une double population de cellules dendritiques (CDE).

La première présente les marqueurs suivants : CD1 a++/CD1 b-/FceRI+/CD 23-/DR++/CD 36+ et tous les critères classiques des cellules de Langerhans.

La deuxième est constituée de CDE inflammatoires CD1 a++/CD1 b+/FceRI++/CD 23+/DR++/CD 36++ dépourvues de granules de Birbeck.

L’expression du FceRI est corrélée au taux d’IgE totales sériques.

Même en peau normale, chez les atopiques, son expression est plus marquée que chez un nonatopique.

Elle est surtout importante dans la deuxième population de cellules dendritiques.

Dans la DA de type extrinsèque, il existe une forte expression du FceRI sur les cellules dendritiques CD1 a+.

À l’inverse, dans la DA intrinsèque, l’expression est significativement plus faible.

En faisant référence au phénotypage des CDE, le rapport FCeRI/FceRII est élevé dans la DA extrinsèque et diminué dans la DA intrinsèque.

Le rôle et le mécanisme de stimulation du FceRI sont mal connus. Le cross-linkage du FceRI sur les cellules de Langerhans conduit chez le sujet atopique et normal à une phosphorylation tyrosinée des protéines p 72 – p77 et p 95 très précoce (30 premières secondes).

Mais c’est seulement chez l’atopique qu’il s’ensuit une mobilisation calcique.

La chaîne b du FceRI n’est pas exprimée chez les sujets normaux et seulement sur quelques cellules de Langerhans de sujets atopiques.

Cependant, l’internalisation du FceRI par un processus d’endocytose est observée dans les deux populations.

Il apparaît ainsi une différence fonctionnelle du FceRI entre individus atopiques et normaux.

Le FceRII, dont l’expression est stimulée par l’IL4, est impliqué dans la cytotoxicité, médiée par les IgE, des éosinophiles et permet la sécrétion de nombreux facteurs (MBP, érythropoïétine [EPO], IL1, PAF-acéther, lysosyme).

Par ailleurs, les différents fragments solubles du FceRII ont des propriétés et des activités biologiques très diverses : capacité de liaison des IgE même après clivage (IgE binding factors) ; rôle permissif sur la synthèse des IgE indépendante de l’IL4 ; propriétés biologiques proches de celles des facteurs de croissance ; activation des basophiles et libération d’histamine ; différenciation des thymocytes et des précurseurs CD34+ de la lignée myéloïde de façon conjointe avec l’IL1.

Quant à l’e BP, on retrouve l’expression de cette molécule dans les kératinocytes, sur les cellules de Langerhans en peau normale et lésée de DA.

L’e BP permet la fixation d’IgE pauvres en acide sialique à la surface des cellules de Langerhans, mais dotée vraisemblablement d’autres fonctions, celles-ci restent à définir.

Bieber explique la présence de molécules d’IgE à la surface des cellules de Langerhans par le mécanisme suivant.

À l’état normal, les cellules de Langerhans n’expriment pas d’IgE à leur surface.

À la suite du processus inflammatoire (présent même en peau apparemment saine), l’augmentation de perméabilité vasculaire permet l’afflux d’IgE circulantes.

L’augmentation de perméabilité de la membrane basale favorise la diffusion des IgE dans l’épiderme, et donc leur fixation aux récepteurs portés par les cellules de Langerhans, récepteurs dont le nombre augmente avec l’inflammation. L’e BP libérée par les kératinocytes module la fixation des IgE en fonction du degré de glycosylation des IgE.

C’est par la présence de récepteurs pour les IgE à la surface des cellules de Langerhans que certains allergènes (poussière de maison, Pityrosporum orbiculare, toxines staphylococciques) pourraient être présentés aux lymphocytes T après internalisation et processing antigénique.

Par ailleurs, les cellules de Langerhans constituent, en peau lésée d’atopiques, de puissants activateurs des lymphocytes T autologues. Le signal pourrait être la présentation de peptides du soi, d’antigènes étrangers processés ou la liaison de superantigènes microbiens.

L’activation lymphocytaire est antigène spécifique tandis que le deuxième signal est antigène non spécifique.

Un des plus connus est représenté par une voie impliquant les molécules CD28 et le cytotoxic T lymphocyte antigen 4 (CTLA-4) exprimées sur les cellules T et leurs ligands B 7-1 (CD80) et B7-2 (CD86) exprimés sur les cellules présentatrices d’antigènes.

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