Coxopathies chroniques de l’adulte : diagnostic et traitement

0
4769

Introduction :

Convenons d’appeler coxopathies chroniques les atteintes de hanche qui durent plus de 6 mois et qui touchent un ou plusieurs des trois tissus constitutifs de l’articulation : le cartilage ; la synoviale et/ou la capsule ; l’os épiphysaire si son atteinte crée des signes articulaires.

Sortent de ce cadre :

– les coxopathies et pseudocoxopathies aiguës et subaiguës qui n’évoluent que pendant quelques mois : coxites à germes banals ; algodystrophie de la hanche ; fractures de contrainte du cadre obturateur, du col ou de la tête du fémur, voire du toit du cotyle, métastase osseuse.

Il faut cependant avoir ces diagnostics à l’esprit puisque, devant une hanche douloureuse depuis quelques semaines, on ignore s’il va s’agir d’une évolution assez courte ou chronique ;

– les atteintes chroniques non articulaires : bursites, tendinites, périarthrite à rechutes, paraostéoarthropathies, douleurs de hanches d’origine lombaire ou artérielle.

Elles sont envisagées au dernier paragraphe en tant que diagnostic différentiel.

Étapes de l’examen et choix d’imagerie :

L’interrogatoire est essentiel.

Coxopathies chroniques de l’adulte : diagnostic et traitement

Outre les antécédents, le terrain, les habitudes alimentaires, il faut s’enquérir du début de la douleur : date, cause déclenchante éventuelle, rapidité ou lenteur d’installation, et faire préciser si elle a été intermittente au début et/ou depuis quand elle est quotidienne.

Sa topographie doit être désignée du doigt par le patient en position debout (cf « coxarthrose »).

La douleur « mécanique » est, grosso modo, proportionnelle aux dépenses locomotrices, ou survenant pour telle posture, tel mouvement. Elle est calmée par le repos et le « dérouillage » matinal ne dépasse pas quelques minutes à 1 demiheure.

Ce dernier dure de 1 à plusieurs heures dans les atteintes inflammatoires, qui créent souvent aussi une résurgence algique nocturne durable ; toutefois, la simple stase veineuse ou l’hydarthrose au sein de lésions non inflammatoires peut réaliser un horaire douloureux analogue.

Enfin, le recueil de l’indice algofonctionnel ou du WOMAC (Western Ontario and Mc Master universities osteoarthritis index) permet d’évaluer le degré de la gêne quotidienne, qui est l’un des éléments du choix thérapeutique.

L’examen physique comporte la recherche d’une attitude vicieuse irréductible, d’une perte de l’arrière-pas au cours de la marche et d’une limitation des mouvements qui est notée avec ou sans douleur, dans les sept directions habituelles : flexion, flexion croisée, rotations externe et interne, abduction, adduction et extension.

Avant de faire passer en décubitus ventral, on fait exécuter la manoeuvre du salut coxal, qui a pour but la reproduction de la douleur et se fait en trois temps dits « maintenu, résisté et cranté » : le patient est prié de maintenir le membre inférieur tendu à 30° au-dessus du plan du lit pendant 10 à 15 secondes, puis de résister ainsi à la pression de la main de l’examinateur sur la face antérieure de la cuisse, puis de céder par petits crans « comme une roue dentée ».

On n’omet pas la mesure de l’amyotrophie de cuisse éventuelle et la palpation de l’aine et de la région trochantérienne.

Si l’on palpe une tuméfaction inguinale ou si l’on soupçonne un épanchement intraarticulaire, l’échographie est électivement indiquée ; c’est un examen non irradiant, peu coûteux, encore insuffisamment utilisé.

Dans tous les cas, la radiographie est indispensable comme premier examen, et l’on voit trop souvent la tomodensitométrie (TDM) ou l’imagerie par résonance magnétique (IRM) prescrites en première intention, alors qu’elles sont coûteuses et peu ou pas contributives dans la coxarthrose, laquelle représente 80 ou 90 % des cas….

Le cliché du bassin de face debout (faible coût, irradiation modeste) est le minimum incontournable.

S’il ne suffit pas, il faut demander un profil différent suivant l’orientation diagnostique : pour la coxarthrose incipiens, ou postérieure, invisible de face, le faux profil est indispensable, toujours comparatif, bilatéral, le pincement débutant se jugeant par rapport au côté sain.

Si l’on soupçonne une nécrose fémorocapitale, c’est le profil urétral ou le profil de Cochin qui est indiqué, puis l’IRM, décisive en la matière.

Diagnostic positif, étiologie et traitement :

A – LES « DEUX GRANDES » :

L’arthrose et la nécrose fémorocapitale sont regroupées ici du fait de leurs fréquences, certes différentes (environ une nécrose pour sept à dix arthroses), mais très supérieures à celles des autres coxopathies chroniques.

1- Coxarthrose :

La fréquence de la coxarthrose dans la population occidentale est de l’ordre de 3 à 6%chez les sujets de plus de 55 ans.

Elle est au moins deux fois plus rare que la gonarthrose.

La coxarthrose est un peu plus fréquente chez la femme que chez l’homme.

L’âge moyen au début des douleurs est de 61 ans dans la coxarthrose primitive, et de 51 ans dans les formes secondaires.

Elle est bilatérale dans près de 45 à 50 % des cas, au moins après quelques années d’évolution.

* Diagnostic de la forme typique :

La facilité de ce diagnostic est une notion classique qui reste vraie.

Cependant, on connaît mieux aujourd’hui certaines formes débutantes infraradiographiques ou atypiques et certains pièges qui sont décrits plus loin.

+ Signes fonctionnels :

C’est essentiellement la douleur qui amène à consulter, parfois la boiterie, rarement l’enraidissement.

La douleur débute progressivement.

Elle est très souvent intermittente pendant des mois ou des années, puis quotidienne.

Cependant, un début brusque ou rapide sur quelques jours, évoquant une coxopathie aiguë ou subaiguë, est retrouvé dans quelques cas (environ 5 à 7%).

La localisation de la douleur risque d’être ambiguë ou trompeuse si elle n’est indiquée que verbalement : il faut toujours demander au patient debout d’en désigner du doigt le siège et les irradiations.

Elle est habituellement inguinale et/ou postéroexterne, rétrotrochantérienne, mais rarement située en pleine fesse.

Elle irradie à la cuisse (face antérieure ou externe, rarement interne ou postérieure) jusqu’au genou et même à la face antérieure ou externe de la jambe.

Elle peut se limiter au seul genou (5 à 10 % des cas), d’où la règle classique : « toute douleur du genou sans atteinte décelable de ce dernier doit faire examiner la hanche ».

La douleur revêt un rythme mécanique, selon l’activité ou tel mouvement, telle posture ; à ce titre, elle peut survenir brièvement la nuit, ou encore en position assise prolongée (20 % des cas).

Une douleur nocturne durable est possible dans la coxarthrose assez évoluée (stase vasculaire).

+ Signes physiques :

Il faut examiner le patient en position debout, en marche, en décubitus dorsal puis ventral.

L’attitude irréductible dite vicieuse de la cuisse sur le bassin n’apparaît généralement qu’après quelques années d’évolution et se fait le plus souvent en flexum et rotation externe, rarement en abduction ou adduction légère (ces dernières pouvant créer un apparent raccourcissement du membre inférieur).

La perte de l’extension ou de la légère hyperextension normale (5° à 10°) et plus encore le flexum entravent le pas postérieur ou arrière-pas.

La boiterie peut aussi être créée par la douleur à l’appui.

En décubitus, les trois mouvements passifs le plus précocement limités sont la flexion croisée (qui rapproche le genou du mamelon du côté opposé), la rotation interne et l’extension (recherchée en décubitus ventral).

La douleur en fin de course est habituelle, mais non constante.

La manoeuvre du salut coxal est positive, au moins dans l’un de ses trois modes : maintenu, résisté et « cranté » lorsqu’elle reproduit la douleur connue du patient.

L’amyotrophie de la cuisse se révèle après quelques mois ou années.

+ Radiographie :

Le cliché du bassin en position debout révèle souvent une légère bascule due à une inégalité de longueur des membres inférieurs.

Elle n’est pathogène qu’au-delà de 2,5 à 3 cm de décalage.

Le diagnostic de coxarthrose est généralement facile parce qu’en règle la douleur est en retard sur les lésions ; celles-ci sont de quatre types, se combinant en proportions très variables (un, deux, ou même trois d’entre elles pouvant manquer) : l’ostéophytose, le pincement de l’interligne, l’ostéocondensation, les géodes.

Théoriquement, la lésion du cartilage est première en date et il devrait en être de même de sa traduction radiographique, le pincement de l’interligne.

En fait, celui-ci est souvent soit discret, à évaluer au 1/2 mm, par comparaison avec le côté opposé s’il est sain, soit antérosupérieur ou postérieur (faux profil seul probant), soit même réellement absent, de sorte que la réaction osseuse en marge de la chondropathie, c’est-à-dire l’ostéophytose, apparaît plus nette et beaucoup plus précoce.

C’est ce qui a été bien intégré dans les critères de l’American College of Rheumatology (ACR) pour la classification de la coxarthrose.

Cependant, ces critères sont critiquables parce qu’ils ne comprennent que les pincements visibles de face et parce que les formes atypiques, souvent, n’y satisfont pas.

Un seul, en principe, suffit au diagnostic ; cependant, l’avant-toit et la corne bordante sont souvent incertains.

De plus, il semble pouvoir exister, surtout chez les sujets âgés, un ou plusieurs ostéophytes modestes, sans pincement de l’interligne, indolores, stables au fil du temps, qui sont interprétés, soit comme un signe de sénescence, soit comme un processus arthrosique ayant tourné court.

Le pincement de l’interligne est, de face, supéroexterne, supérieur global ou supéro-interne.

Il est abusif de parler de pincement interne, comme dans les critères de l’ACR : l’interface contour interne de la tête fémorale-arrière-fond du cotyle (celui-ci dépourvu de cartilage) ne constitue pas un interligne.

Sur le faux profil, le pincement est antérosupérieur (plus précoce) ou postérieur.

Ce faux profil est utile même dans la coxarthrose avérée de face pour préciser le degré de migration antérieure de la tête fémorale, très fréquent, et surtout pour saisir avant le stade douloureux une coxarthrose débutante controlatérale, qui pourrait modifier le pronostic et le traitement.

L’ostéocondensation et les éventuelles géodes (inconstantes : 30 à 50 % des cas) se forment dans la zone d’hyperpression osseuse, de part et d’autre du pincement de l’interligne.

* Diagnostic des formes débutantes et atypiques :

+ Coxarthrose débutante :

Pour assurer le diagnostic, il est plus confortable de constater, associé à une ostéophytose non toujours probante, un pincement de l’interligne ; or, ce dernier est douteux ou absent sur le cliché de face dans près d’un tiers des cas au début : 22 cas sur 58 dans une étude récente.

Sur ces 22 cas, le faux profil révélait le pincement 16 fois, soit dans trois cas sur quatre.

Il est le plus souvent antérosupérieur, plus rarement postérieur.

Il ne manquait que dans 10 % des cas (six fois sur 58) si l’on combinait face et faux profil.

Pour interpréter correctement le pincement de l’interligne, il faut toujours comparer avec le côté sain.

Si cette référence manque (coxarthrose ou prothèse totale controlatérale), il est utile de retenir que l’interligne normal forme habituellement un segment de croissant :

– de face, son épaisseur croît généralement peu ou prou de dedans en dehors ; toutefois, cela n’est pas constant : il est des interlignes supérieurs à limites osseuses curvilignes parallèles ;

– sur le faux profil, son dessin en segment de croissant est plus net et habituel : il s’épaissit régulièrement de sa partie postérieure à sa partie antérosupérieure.

Les rares exceptions concernent la protrusion acétabulaire non arthrosée, dans laquelle l’espace interosseux peut être à peu près équivalent d’une extrémité à l’autre.

Ce cas mis à part, un interligne isoépais en faux profil est généralement déjà pathologique, signifiant un début de pincement antérosupérieur ou supérieur.

Ceci est particulièrement net en cas de dysplasie ou de cotyle limite, car l’hyperpression qui en résulte, et qui se concentre en haut et en avant sous le toit cotyloïdien insuffisant, induit en ce site, pendant la croissance, une surépaisseur de cartilage hyalin qui renforce la silhouette en segment de croissant.

Le pincement de la coxarthrose secondaire ultérieure commence par annuler cette surépaisseur.

Quant à l’ostéophytose, dans la coxarthrose incipiens, elle fait défaut dans la même proportion (10 %) que le pincement de l’interligne tel que défini ci-dessus.

Dans la majorité des cas, l’ostéophytose est présente au début et nous l’avons ainsi dénombrée : périfovéale (58 %) ; double-fond, au moins ébauché (52 %) ; marginale péricapitale supéroexterne (43 %) et inféro-interne (31 %) ; corne bordante (33 %).

L’avant-toit était présent dans un tiers des cas, mais souvent douteux du fait que la saillie externe du cotyle est normalement très variable, parfois pseudo-ostéophytique.

L’ostéophytose est donc fréquente mais non constante ; en particulier, elle manque souvent dans la coxarthrose destructrice rapide (CDR).

Elle n’est pas non plus spécifique : chez 100 sujets témoins de plus de 65 ans, nous avons trouvé 11 % d’ostéophytose stable restant isolée avec 5 à 10 ans de recul.

Souvent péricapitale ou périfovéale, modérée, elle semble manifester soit la sénescence, soit une ébauche d’arthrose ayant tourné court (?).

Dans les cas douteux, l’ostéocondensation et/ou les géodes peuventelles venir au secours du diagnostic de coxarthrose débutante ?

Oui. Elles doivent être évaluées dans les zones de charge souschondrales.

Isolées, elles sont parfois le premier signe de la coxarthrose.

Elles sont en règle mieux vues sur les coupes TDM.

+ Coxarthrose infraradiographique :

Dans quelques rares cas, la hanche est douloureuse, le terrain ou les facteurs de risque sont ceux de l’arthrose, mais les signes radiographiques manquent ou sont si pauvres que le doute persiste, même après complément (indispensable) par le faux profil dûment comparatif.

Nous en avons observé plusieurs exemples, notamment chez les sportifs de haut niveau.

L’examen essentiel est alors l’arthrographie couplée à l’arthroscanner.

Les deux temps sont aussi importants l’un que l’autre :

– arthrographie avec incidences coronales et de faux profil, ce dernier étant parfois seul probant, à la recherche d’une chondrose : amincissement du cartilage supérieur ou ulcération chondrale circonscrite que la substance de contraste pénètre d’autant mieux que l’on a mobilisé la hanche et fait marcher le patient avant de prendre les derniers clichés en position debout ;

– puis, après le délai le plus court possible, arthroscanner avec reconstructions dans différents plans.

Malgré les progrès techniques (acquisition spiralée ou hélicoïdale), les images reconstruites demeurent encore assez souvent inférieures à de bonnes vues arthrographiques.

Il arrive que ces deux examens couplés révèlent une autre lésion, soit associée à la chondrose attendue, soit isolée : fissure, rupture ou désinsertion du bourrelet cotyloïdien, qui n’est pas rare dans la dysplasie, ou pénétration du contraste dans une géode sous-chondrale méconnue.

Si l’on soupçonne une arthrose infraradiographique et si la douleur de hanche est peu marquée ou intermittente, on peut choisir d’éviter l’arthroscanner et de se contenter d’un suivi par radiographies échelonnées.

+ Coxarthrose destructrice rapide :

S’il est une forme débutante à reconnaître le plus tôt possible, c’est bien la CDR, pour laquelle Amor a proposé la mise en décharge précoce. Elle touche des sujets de 45 à 80 ans (moyenne 65 ans) et prédomine chez la femme : 70-80 %.

La douleur est généralement disproportionnée (par exemple, cotée entre 50 et 80 sur l’échelle visuelle de 100 mm) par rapport à une mobilité passive encore peu limitée, ce qui étonne, et à une image de coxarthrose quelquefois encore absente ou douteuse, le plus souvent présente mais peu ou moyennement évoluée : pincement de l’ordre d’un quart à trois quarts de l’interligne supérieur, supéroexterne ou supéro-interne, ostéophytose pauvre ou absente.

Cette poussée algique peut survenir au cours de la coxarthrose commune (coxarthrose secondairement destructrice rapide).

Elle est beaucoup plus fréquente comme modalité évolutive d’emblée, et doit faire soulever en priorité l’hypothèse de CDR ; dès lors, il faut demander une vitesse de sédimentation pour éliminer la coxite (elle est cependant accélérée au-dessus de 20 mm dans 20 à 30 % des CDR), et surtout un nouveau cliché de face et faux profil 2 à 3 mois plus tard.

La CDR, qui représente environ 5 % des cas de coxarthrose, regroupe aujourd’hui la forme rapide : pincement de 2 mm/an et davantage, et la forme demi-rapide : pincement de 1 à 2 mm/an.

Sur le cliché à 3 mois du précédent, il faut demander une mesure minutieuse de l’interligne au site le plus pincé pour déceler, grâce à une loupe intérieurement gravée au 1/10 mm, une dégradation de 1/4 à 1/2 mm, constituant le minimum de chondrolyse rapide attendue pour un trimestre.

Elle est souvent beaucoup plus importante.

Dès lors, on peut faire une ponction si l’échographie montre un épanchement et prescrire avec conviction la privation d’appui grâce à deux cannes anglaises.

La recherche de la chondrocalcinose articulaire (CCA) s’impose devant une CDR.

Elle est en cause dans près d’un tiers des cas pour Menkès et al.

On recherche le liseré opaque caractéristique sur la hanche controlatérale, le pubis, et surtout les genoux (en général, les premiers atteints) et le poignet, ainsi que les microcristaux calciques dans le liquide synovial ponctionné.

Sur cinq liquides de CDR, nous avons trouvé dans quatre cas des cristaux banals d’hydroxyapatite, associés une fois à des cristaux de pyrophosphate de calcium, et un seul prélèvement sans cristaux.

Dans cette même étude, nous avions trouvé d’autres facteurs favorisants de CDR dans les trois quarts des cas : surmenage locomoteur (50 %) et excès pondéral associé ou isolé (25 %).

L’évolution de la CDR comporte une ostéolyse rapide qui suit la chondrolyse et ovalise la tête fémorale et/ou rehausse le toit du cotyle. On a accusé l’indométacine de favoriser cette évolution.

Le pronostic de la CDR est mauvais.

Certes, nous avons personnellement observé des CDR qui tournaient court, devenant des formes communes après quelques mois à 1 an, sans traitement particulier.

Dans l’ensemble, plus le pincement de l’interligne est rapide, plus grandes sont les chances d’aggravation obligeant à une prothèse totale dans les 3 ans qui suivent, ce qu’a bien montré l’étude prospective de Dougados et al sur 428 coxarthroses.

Les résultats des prothèses totales de hanche (PTH) pour CDR semblent très proches de ceux obtenus dans la coxarthrose commune.

À l’examen anatomique, les lésions sont celles de l’arthrose, avec une synoviale hyperplasique, macrophagique, très vascularisée.

Un cas particulier est celui de la nécrose fémorocapitale avec chondrolyse rapide presque contemporaine, de très mauvais pronostic fonctionnel.

+ Coxarthrose postérieure :

Elle compte pour 7 à 10% des coxarthroses, prédomine chez la femme et peut débuter dès 35-50 ans. Elle est soit primitive, soit secondaire à une protrusion acétabulaire franche ou fruste (coxa profunda) ou à une rétroversion du col fémoral.

Elle est volontiers plus enraidissante que la forme commune et entraîne souvent un flexum prononcé. Sur le cliché de face, le pincement est soit absent, soit supéro-interne et l’ostéophytose paraît prédominante.

Il existe parfois un élargissement de l’interligne supéroexterne.

En fait, ce sont là des images tardives.

Dans la série princeps, l’image de face était subnormale, non probante ou même normale dans plus de la moitié des cas.

Or, le faux profil révèle dès le début le trait majeur : le pincement de l’interligne postéro-inférieur ou postérieur et/ou l’ostéophytose de la corne postérieure.

Il permet aussi de soupçonner une rétroversion du col qui induit l’hyperpression et l’arthrose postérieure, et qui doit être mesurée par TDM.

L’évolution de la coxarthrose postérieure est, dans un tiers des cas, émaillée de douleurs fulgurantes plus ou moins espacées avec parfois sensation de blocage.

Mais le « fond douloureux » est en règle moins marqué que dans les coxarthroses à pincement supérieur, et l’évolution y est souvent plus lente, longtemps ou parfois définitivement non chirurgicale.

+ Coxarthroses à douleurs atypiques :

Outre la douleur disproportionnée, il convient de retenir :

– les douleurs posturales insolites.

La douleur en position assise à court terme oblige certains patients à terminer leur repas debout.

Chez d’autres, c’est l’adduction qui est intolérable, ou une autre position plus complexe ;

– les douleurs fulgurantes. Les patients parlent souvent de blocage ou de « paralysie ».

De fait, la douleur fulgurante, brusque, brève (habituellement quelques secondes à moins de 1 min) déclenche une sidération musculaire par réflexe proprioceptif.

Tantôt fréquente, tantôt espacée, elle survient généralement au cours de la marche rapide ou d’un faux-pas, ou encore en se relevant de la position assise, ou debout lors d’une rotation du tronc.

Elle est parfois inopinée.

Les douleurs fulgurantes n’ont pas d’explications biomécaniques précises.

Elles sont parfois limitées dans le temps, disparaissant après quelques mois ou années.

Les blocages vrais sont très rares.

Ils sont quasi indolores, résultant peut-être d’un réflexe proprioceptif hyperprécoce d’évitement de la douleur fulgurante, car les causes déclenchantes sont analogues.

Le patient se « débloque » généralement au prix de quelques mouvements précautionneux.

* Diagnostic étiologique Facteurs de risque :

Depuis les années 1980, on parle de facteurs de risque plutôt que de « causes », la coxarthrose étant souvent multifactorielle.

Les facteurs nouvellement acquis ou mieux connus sont le surmenage locomoteur (divers sports de compétition, travaux en charge sur les membres inférieurs) et l’héritabilité.

Les facteurs de risque doivent être recherchés systématiquement devant toute coxarthrose ; ils sont la base du diagnostic étiologique, mais peuvent aussi aider au diagnostic positif dans les formes atypiques ou douteuses et orienter fondamentalement la décision thérapeutique.

Presque tous sont lisibles sur la radiographie, quelques-uns ressortissent à l’interrogatoire et un seul à l’examen.

+ Dysplasie et subluxation congénitales :

Elles restent la cause majoritaire : près de 30 % des cas.

C’est la seule qui peut faire l’objet d’un traitement d’arrêt de l’arthrose : butée et/ou ostéotomie (fémorale et/ou cotyloïdienne), si certaines conditions sont remplies : arthrose peu ou moyennement évoluée, mais déjà douloureuse, âge inférieur à 45-50 ans, bilan précis des vices architecturaux corrigibles.

Les formes modérées de dysplasie sont difficiles à affirmer sans coxométrie.

Nous avons construit et fait éditer un nouvel instrument, le fémorocoxomètre(1) qui s’applique aussi bien aux clichés réduits (numérisés) que classiques et permet la mesure de tous les paramètres de la dysplasie.

La subluxation congénitale est séparée de la dysplasie par une limite convenue : le cintre cervico-obturateur est disjoint dans l’une, conservé dans l’autre.

Ces malformations sont composées en proportions très variables :

– d’une insuffisance cotyloïdienne : toit trop court, trop oblique en haut et en dehors, couvrant insuffisamment la tête en dehors (angle VCE) et en avant (angle VCA) ;

– d’une malfaçon fémorale : angle col-diaphyse CC’D trop obtus (coxa valga) et parfois antéversion exagérée du col fémoral.

Les travaux anciens sont cohérents entre eux concernant le rôle de la dysplasie : elle est la cause de l’arthrose dans 24 %, 25 %, 30 % et 20 % des cas en Europe et jusqu’à 30 ou 40 % aux États-Unis.

Trente-deux hanches dysplasiques suivies par Cooperman pendant 22 ans deviennent arthrosiques dans 22 cas, mais après un délai très variable, sans corrélation « effet-dose de malformation ».

Certains épidémiologistes ont nié ou minimisé le rôle de la dysplasie, mais sur des clichés d’urographie ou du bassin sans dépister la coxa valga ni explorer le plan antéropostérieur.

Or, le faux profil révèle souvent, d’une part une malcouverture de la tête par le toit plus marquée en avant qu’en dehors et/ou une hyperantéversion du col (à mesurer par coupes TDM appropriées), et d’autre part un pincement débutant antérosupérieur, tous éléments non visibles de face.

Le faux profil est donc indispensable. Rappelons enfin que, même sur le seul cliché du bassin de face, notre série-témoin de 250 sujets sans coxarthrose de 65 à 85 ans atteste bien la responsabilité de la dysplasie chez les arthrosiques, où elle est significativement plus fréquente.

+ Caput varum (ex-coxa vara des adolescents ou coxa retrorsa) :

Il est en règle modéré, sans antécédent douloureux dans l’adolescence, et doit donc être recherché systématiquement avant de tenir la coxarthrose pour primitive, et au besoin mesuré au fémorocoxomètre.

Il est fréquent chez les anciens sportifs ou les travailleurs de force actifs pendant l’adolescence.

Un caput varum modéré (tilt deformity) est retrouvé chez les coxarthrosiques dans 40 % des cas par Murray, 39 % par Harris, 15 % par nous-mêmes.

+ Protrusion acétabulaire congénitale :

Elle comporte une forme franche, mesurable au débord AF-II (> 3 mm chez l’homme, 6 mm chez la femme) et une forme fruste, la coxa profonda (débord AF-II plus restreint), de responsabilité douteuse.

Fruste ou franche, elle comporte souvent une rétroversion du col fémoral.

La coxarthrose est le plus souvent postérieure (et supéro-interne de face).

Elle peut être précoce et très gênante chez la femme jeune.

+ Dysmorphies acquises :

Parmi les dysmorphies acquises, citons la coxa plana facile à reconnaître (tête ovale sur col court) et les séquelles de coxite ou de coxopathie hémophilique, dysmorphies très irrégulières.

+ Traumatisme ancien :

Le traumatisme ancien, dont il faut s’enquérir, est bien mémorisé s’il s’est agi d’une fracture ou d’une luxation, moins bien en cas de simple contusion.

Celle-ci, choc direct trochantérien ou grand écart accidentel, peut engendrer une coxarthrose à douleur différée des années plus tard.

Les conditions médicolégales d’imputabilité doivent être précisées.

Les arthroses survenant après luxation, associée ou non à une fracture du cotyle, ne posent généralement pas de problèmes médicolégaux.

Parmi les cinq conditions proposées, seule la réalité du traumatisme et les conditions 3 et 4 sont exigibles sans réserve.

La condition 2 peu manquer et, concernant les conditions 1 et 5, on peut, si les autres conditions sont remplies, se contenter d’une haute probabilité.

+ Sports de compétition :

Certains sports de compétition, et même d’amateur, pratiqués dès l’adolescence à un bon niveau pendant de nombreuses années, est une cause indiscutable de coxarthrose.

Une revue générale récente l’atteste.

Par rapport à une population témoin non ou peu sportive, le risque relatif (RR) estimé est, en moyenne, dans les sports exposant au risque, le suivant : football, rugby, judo, handball, tennis, basket-ball : 1,5 (amateurs), 2 à 2,5 (joueurs moyens), et 3 à 5 (élite).

Exemple : 14 % de coxarthroses chez les footballeurs d’élite contre 4 % chez les moyens (et 2,8 % chez les témoins appariés en âge).

La course de longue distance touche peu les amateurs, mais les marathoniens professionnels s’exposent à un risque accru d’arthrose.

Ces grandes enquêtes portent sur des sujets de plus de 50 ans, mais la coxarthrose juvénile n’est pas rare : nous en avons observé plus de 25 cas en 10 ans chez des sportifs de 20 à 36 ans, de bon niveau mais non toujours professionnels.

La coxarthrose est plus précoce et plus fréquente s’il existe une dysplasie méconnue, ce qui est fréquent chez les danseurs(euses).

Le RR va jusqu’à 4 et même 8 si un travail de force s’ajoute au sport.

+ Travail à fort impact :

Un travail à fort impact sur la hanche accroît à lui seul le RR : 2 à 8 chez les fermiers, 5 à 7 chez les danseurs professionnels et, en général, 1,5 (femmes) à 3 (hommes) quand les travaux debout comportent charges, escaliers, sauts.

Une autre étude trouve également un RR de 2,5 chez les hommes exposés à un dur travail. Une méta-analyse sur 17 travaux valables ne confirme pas comme certaine la liaison travail-coxarthrose chez les fermiers.

+ Facteur génétique :

Il ressort bien de deux études anglaises récentes.

Dans la parenté au premier degré de 1 402 coxarthrosiques opérés, le RR était, pour les pincements moyens et sévères, respectivement de 2 à 4 pour les femmes, de 5 à 10 pour les hommes.

Chez 1 222 jumeaux (167 monozygotes, 449 dizygotes), d’âge moyen 53 ± 7,5 ans, la concordance de coxarthrose était trois fois plus forte chez les monozygotes.

Ceci correspondrait à une héritabilité de l’ordre de 60 %.

Un facteur racial a aussi été étudié avec des résultats disparates suivant les continents.

+ Trouble statodynamique majeur :

Il est retrouvé dans 1 à 2 % des coxarthroses.

L’inégalité de longueur des membres inférieurs semble devoir excéder 3 à 4 cmpendant plus de 30 ans pour être arthrogène.

Il peut s’agir aussi d’une ankylose de l’un des genoux ou de la hanche controlatérale ou d’un autre trouble : l’étude de 44 vétérans américains amputés (guerre de 1941-1945) a montré 61 % de coxarthroses du côté amputé et 25 % controlatérales, versus environ 10 % « attendues » dans la population générale.

Le risque est trois fois plus grand (RR = 3) si l’amputation a été faite au-dessus du genou.

Ceci montre bien l’importance du facteur microtraumatique par perte des fonctions de mobilité et d’amortissement (prothèse) du membre inférieur homolatéral.

+ Excès pondéral :

L’excès pondéral, qui est un facteur favorisant majeur de la gonarthrose, semble moins intervenir dans la coxarthrose.

Cependant, l’excès pondéral vers 40 ans est associé à un risque accru de coxarthrose : RR = 2,3 à 2,9.

+ Coxarthroses multifactorielles :

Trouver deux ou trois facteurs de risque associés peut modifier la stratégie thérapeutique

C’eût été là traiter une seule cause avec de grandes chances d’échec à court terme, les deux autres facteurs ici présents, sport de compétition et hérédité, prenant à coup sûr une part importante dans l’évolution.

Même raisonnement en cas d’antécédent de travail de force, de traumatisme de la hanche, ou d’une autre cause associée.

* Traitement :

+ Stratégie générale :

Il n’y a guère qu’une seule grande cause de coxarthrose corrigible : c’est la dysplasie ou la subluxation congénitale, mais au prix d’une chirurgie assez lourde qu’il ne faut conseiller qu’avant 45 ans et compte tenu d’autres conditions favorables.

Dans les autres formes secondaires ou dans les formes évoluées et dans la coxarthrose primitive, la stratégie est : traitement conservateur médical et physique tant qu’il donne un résultat acceptable, puis PTH lorsque la gêne douloureuse correspond à un handicap important, jugé par l’indice algofonctionnel et l’autoévaluation du patient.

+ Chirurgie correctrice précoce :

– Buts, moyens et résultats

– La butée ostéoplastique vise à améliorer la couverture de la tête fémorale par un double greffon osseux corticospongieux, prélevé sur la crête iliaque et placé à force dans un rail creusé à la partie externe et antérieure du cotyle.

La capsule interposée se transforme progressivement en fibrocartilage.

Les suites sont simples, permettant une reprise complète de l’appui vers le troisième mois et une reprise progressive de l’activité sans boiterie résiduelle après 3 mois ou plus tôt s’il s’agit d’une butée armée.

La butée doit être bien constituée : trop petite ou trop haute, elle est inefficace ; trop massive, elle peut enraidir.

Bien indiquée et bien réalisée, la butée donne le plus souvent une rémission clinique d’une douzaine d’années.

Dans une étude récente, la probabilité du maintien du bon résultat est de 80 % à 10 ans, 60 % à 15 ans et de 40 % à 21 ans.

Une arthrose préopératoire, même moyenne, fait chuter ces résultats.

– L’ostéotomie du bassin de Chiari vise à assurer une meilleure couverture de la tête fémorale et à médialiser la hanche ; il s’agit d’une ostéotomie de l’os iliaque, transversale, sus-cotyloïdienne, extra-articulaire, légèrement ascendante en haut et en dedans, suivie d’une translation interne du fragment inférieur rendue possible grâce à la souplesse relative de la symphyse pubienne.

Elle consolide en 2 mois environ.

La boiterie postopératoire dure généralement de 4 à 9 mois.

Les bons résultats sont en moyenne de 70 % chez les sujets jeunes (< 45 ans) avec des écarts de 55 à 90 %.

Cette ostéotomie remplace avantageusement la butée lorsque le toit dysplasique est trop oblique pour implanter une butée de façon satisfaisante.

Cependant, il s’agit d’une intervention plus difficile que la butée, extrêmement « opérateur-dépendante » et source de plus de complications.

Cela est encore plus vrai de :

– l’ostéotomie de Ganz relativement récente, plus complexe (triple section péricotyloïdienne), qui permettrait de basculer mieux le cotyle en dehors et en avant ;

– l’ostéotomie de varisation de Pauwels est destinée à corriger la coxa valga en soustrayant un coin osseux interne.

Elle doit ramener l’angle cervicodiaphysaire aux environs de 125°.

Elle s’adresse à des arthroses qui peuvent être assez évoluées, dont le pincement de l’interligne est de 50 à 80 % par exemple, à la condition sine qua non que la congruence articulaire soit conservée ou améliorée lors de l’épreuve radiographique de reposition en abduction à 20 et 30°.

C’est un préalable indispensable. Les suites opératoires comportent au moins 3 mois de privation d’appui et 3 à 6 mois de rééducation.

Le moyen fessier est détendu, donc affaibli par la varisation qui rehausse le grand trochanter, ce qui détermine une boiterie.

La récupération de la marche normale n’est souvent obtenue qu’au bout de 12 à 18 mois.

Cette intervention assure l’indolence dans les trois quarts des cas au prix d’un raccourcissement de 1 à 2 cm.

Après 10 ans de recul, les résultats sont bons dans 76 % des cas et moyens dans 12,5 %.

On passe à près de 90 % de succès si l’on se préoccupe de corriger les malfaçons dans le plan sagittal.

– L’ostéotomie intertrochantérienne de dérotation vise à corriger l’hyperantéversion du col fémoral mesurée par TDM.

Elle s’exécute à partir du même foyer d’ostéotomie que la varisation.

– Indications de la chirurgie correctrice

Il faut retenir deux principes : corriger le vice architectural le plus tôt possible avant l’arthrose avérée, mais ne pas opérer une hanche indolore.

Sont candidates les dysplasies à douleur quotidienne ou à douleur intermittente répétée occupant 30 à 50 % des jours de l’année par exemple, ou gênant telle activité importante.

Quant aux malformations indolores, elles sont surveillées par l’examen clinique annuel et radiographique tous les 2 ans.

L’âge est un élément essentiel de la décision : la chirurgie correctrice est licite avant 45 ans, discutable entre 45 et 55 ans et laisse place à la PTH au-delà de 55 ans.

En effet, à 45 ans, le taux d’échec à 10 ans de recul est de 35 % pour l’ostéotomie de varisation et de plus de 50 % pour l’ostéotomie de Chiari et de Ganz.

L’indication de butée ou d’ostéotomie fémorale peut être soutenue, même parfois entre 45 et 50 ans, au prorata des arguments suivants dûment évalués :

– la dysplasie est douloureuse ;

– l’arthrose est absente ou peu évoluée (par exemple, pincement de 25 à 50 %) ;

– l’arthrose n’est pas multifactorielle, mais semble due à la seule dysplasie ;

– la correction nécessaire n’est pas trop complexe comme le serait, par exemple, l’association d’un Chiari ou d’un Ganz à une varisation ;

– le/la patient(e), dûment informé(e), accepte les suites et la rééducation assez longues.

Quant au type d’intervention indiqué, il dépend de l’inventaire de la déformation : l’insuffisance cotyloïdienne « pure » implique la butée ; cependant, si le toit du cotyle est trop oblique ou si l’arthrose paraît un peu avancée pour une butée, l’ostéotomie de Chiari est indiquée.

De même dans les hanches assez excentrées.

La coxa valga pure ou prédominante conduit à l’ostéotomie de varisation si l’épreuve de reposition en abduction montre une congruence particulière favorable.

S’il y a à la fois insuffisance cotyloïdienne franche et coxa valga, il faut corriger les deux vices par, d’une part une butée, d’autre part une ostéotomie varisante.

Enfin, il faut se préoccuper du plan sagittal ou dit « de profil » : corriger l’insuffisance cotyloïdienne antérieure par une butée en avant et l’excès d’antéversion du col par une dérotation hausse les bons résultats à près de 90 % contre 70 % seulement si l’on ne se préoccupe que du plan coronal comme l’ont montré A Lemoine et al.

+ Traitement médical :

Une prise en charge multifactorielle est nécessaire, qui permet généralement une amélioration de la douleur et une diminution du handicap.

– Éducation des patients et action psychothérapique

C’est un point important du traitement.

La « prise en charge » et le suivi ont une efficacité certaine, qui va jusqu’à rendre moins algiques les arthrosiques à qui l’on a fait téléphoner tous les mois par un auxiliaire médical (J. René et al).

– Économie articulaire

Elle est très importante et comporte les mesures suivantes :

– le repos relatif : il faut réduire la marche, abréger le piétinement et surtout éviter le port de charges lourdes.

Une activité soutenue et prolongée peut être source de douleurs importantes.

Le patient doit apprendre à trouver un juste équilibre, faisant alterner périodes d’activité et de repos, sans « forcer » sa hanche : « peu, mais souvent » comme le suggère Dieppe ;

– le port d’une paire de talonnettes élastiques réduit le choc de l’impact du talon au sol qui se transmet à la hanche ;

– la prévention du flexum vicieux progressif consiste en repos en décubitus ventral 1 demi-heure par jour, la cuisse en extension complète, voire en hyperextension ;

– le port d’une canne, tenue en principe du côté sain, réduit la charge d’au moins 20 à 30 % sur la hanche malade.

C’est probablement le meilleur traitement de fond ;

– la réduction pondérale : chaque kilogramme perdu soustrait 2 à 3 kg à la hanche lors de l’appui à chaque pas ;

– les sports : ils doivent être interdits, à l’exception de la natation et de la bicyclette.

On peut tolérer le golf et la marche raisonnable dans les coxarthroses peu évolutives.

– Traitement médicamenteux

Les thérapeutiques pharmacologiques actuelles sont purement symptomatiques, d’action rapide : antalgiques, anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), ou retardée : antiarthrosiques symptomatiques d’action lente (AASAL).

Il n’existe pas actuellement de traitement structuromodulateur (terme remplaçant « chondroprotecteur ») freinant notablement l’arthrose.

– Antalgiques

– Le paracétamol est le produit de choix à utiliser en première intention.

C’est l’antalgique le plus sûr.

Il est souvent utilisé à doses insuffisantes : 3 à 4 g/j sont généralement nécessaires.

L’insuffisance hépatique et l’hypersensibilité au produit sont les seules contre-indications.

L’association du paracétamol au dextropropoxyphène (Di-Antalvict, Propofant) ou à la codéine permet un certain gain d’efficacité, mais au prix d’assez fréquents effets secondaires, notamment chez les sujets âgés : nausées, constipation, rétention urinaire, somnolence, voire confusion mentale.

– La floctafénine (Idaract) paraît aussi efficace que le paracétamol à la dose de 2 comprimés le matin, 1 au milieu du jour et 1 le soir.

Comme le paracétamol, elle peut être prise hors repas.

Elle expose au risque de réactions allergiques parfois sévères.

– Le tramadol est un antalgique paramorphinique qui peut être tenté à la dose de 50 à 200 mg/24 h.

Les effets secondaires sont fréquents : nausées et même vomissements, somnolence, vertiges, céphalées, constipation. Ils semblent moindres avec la forme à libération prolongée.

– Anti-inflammatoires non stéroïdiens

Les AINS sont un traitement de choix de la douleur arthrosique de la hanche et du genou, mais leur tolérance pose problème en termes d’effets secondaires systémiques, notamment gastrointestinaux.

Les intolérances bénignes (épigastralgies, nausées, abdominalgies, troubles du transit) surviennent dans 10 à 40 % des cas, avec obligation d’arrêt du traitement dans 5 à 10% des cas au moins.

Il a été dit que les antalgiques étaient aussi efficaces que les AINS, ce qui est largement inexact dès que la douleur atteint un certain seuil.

La dose d’AINS doit être adaptée au minimum nécessaire et peut varier selon l’activité.

L’association d’un antalgique peut permettre de la réduire.

En revanche, il ne faut pas associer un AINS et l’aspirine, sauf aux petites doses antiagrégantes.

Les formes « retard » et les oxicams à prise uniquotidienne donnent lieu à une meilleure observance, mais ne sont pas recommandables chez les sujets âgés.

L’arrivée des AINS anti COX-2 spécifiques et, d’ores et déjà, l’association de misoprostol (Cytotect) et mieux encore d’oméprazole (Mopralt, Zoltumt) aux AINS classiques diminue beaucoup l’occurrence des gastralgies, gastrites, ulcères gastroduodénaux et même probablement de leurs complications graves, naguère responsables de 20 à 30 % des hospitalisations et décès pour ulcères peptiques à plus de 65 ans : hémorragie (ne pas associer AINS et anticoagulants), perforation, qui peuvent survenir sans prodromes.

Rappelons l’absence de corrélation entre symptômes et lésions en la matière.

Cette protection gastrique doit être systématique chez les sujets de plus de 65 ans et chez les anciens ulcéreux ou gastritiques avérés.

Les complications rénales possibles : insuffisance aiguë ou subaiguë, contre-indiquent les AINS chez ceux dont la créatininémie est élevée.

Quant à la nocivité sur la vie cartilagineuse (accélération du pincement), elle n’est très probable que concernant l’indométacine.

– Antiarthrosiques symptomatiques d’action lente (AASAL)

Classe relativement récente, les AASAL, actuellement sans vertu structuroprotectrice enregistrée, ont en commun un effet modéré et différé (8 semaines environ) sur la douleur et une rémanence (persistance de l’effet) de quelques semaines.

Trois sur quatre (l’exception est le sulfate de glucosamine) ont leur autorisation de mise sur le marché (AMM) en France.

Ce sont le sulfate de chondroïtine (Structumt 1,5 g/j, Chondrosulft 1,2 g/j), les insaponifiables d’avocat et de soja (Piasclédinet, une gélule par jour) et la diacerhéine (Art 50t, 100 mg/ j).

Ils sont bien tolérés, à l’exception de la diacerhéine qui entraîne souvent, soit des selles molles ou une diarrhée (40 % des cas), obligeant à cesser le traitement dans 12 % des cas, soit des abdominalgies (32 %).

Les chances de succès sont d’environ 45 % (versus 25 % sous placebo).

Au cours du troisième mois d’AASAL, il faut donc impérativement savoir si le patient a pu diminuer ou supprimer l’AINS associé.

Dans le cas contraire, l’AASAL devient sûrement inutile.

– Infiltrations intra-articulaires de corticoïdes

Elles peuvent être faites exceptionnellement en cas de poussée douloureuse rebelle, et uniquement en milieu spécialisé sous écran.

– Rééducation fonctionnelle

Sa place est bien définie : elle n’a pas d’action antalgique, mais lutte valablement contre l’enraidissement, le flexum progressif, ainsi que l’amyotrophie.

+ Chirurgie palliative tardive : PTH

Dans l’ensemble, sauf exception dont la CDR, les traitements médical et physique permettent une fonction acceptable pendant 5 à 10 ans.

La PTH est indiquée, en principe au-delà de 55 ans, dans les coxarthroses résistantes au traitement conservateur.

La clé de la décision n’est pas l’aspect radiographique, mais l’état clinique : degré de la douleur (échelle visuelle analogique) et surtout score de l’indice algofonctionnel des coxopathies (IAFC).

La PTH est justifiée lorsque le score dépasse dix à 12 points sous traitement médical valable.

On peut toutefois y consentir à partir de huit points si l’autoévaluation du patient implique, avec raisons valables, un handicap plus marqué que ne l’indiquait le score de l’IAFC.

L’importance de la raideur, de l’attitude vicieuse, de l’amyotrophie surveillées régulièrement compte aussi.

La PTH cimentée du type Charnley-Kerboull (tête en métal, cotyle en polyéthylène) donne, chez les sujets de plus de 55-60 ans, 95 % de bons résultats à 10-15 ans de recul et 85-90 % à 20 ans.

La longévité de la PTH est un peu moins bonne chez les sujets jeunes, plus actifs (35-55 ans), pour lesquels la prothèse à tête et cotyle en céramique (coefficient d’usure presque nul) paraît spécialement indiquée.

Ses résultats sont bons dans les mêmes proportions, mais le recul n’est que de 10 ans.

La PTH demande 10 à 15 jours d’hospitalisation.

La rééducation est le plus souvent inutile.

La reprise de l’appui est progressive (cannes anglaises) mais précoce, sauf dans les PTH à tige fémorale non cimentée où l’appui complet est différé de 2 à 6 semaines.

La reprise de l’activité habituelle se fait après 2 à 3 mois.

2- Nécrose de la tête fémorale (NTF) :

C’est la plus fréquente et la plus sévère des nécroses épiphysaires.

L’IRM en a facilité le diagnostic au point de faire découvrir de nombreuses formes silencieuses.

La NTF touche surtout l’homme de 40 à 60 ans.

Elle est souvent bilatérale (mais volontiers asymétrique), d’emblée ou secondairement.

La douleur de hanche n’a pas de spécificité ; la limitation de mobilité est habituellement modeste, voire absente au début.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.