Avortements criminel et thérapeutique

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Avortements criminel et thérapeutique
Définition – Généralités :

L’avortement criminel est l’interruption volontaire de la grossesse ; c’est-à-dire l’expulsion prématurée volontairement provoquée, sans nécessité médicale du produit de conception.

Les techniques employées sont empiriques sont empiriques et exécutées dans de mauvaises conditions d’asepsie et d’hygiène et ne mettent pas à l’abri des accidents précoces ( mort subite par inhibition) ou tardifs ( infection générale ).

L’avortement criminel est du à des causes morales, économiques et sociales ; manque de ressources, de travail, de logement, la maladie

La mort du mari, la situation sociale ou familiale (célibataire, divorcée, séparée, veuve).

1– LÉGISLATION – RÉPRESSION :

– Le code pénal Algérien prévoit dans son article 304 : « quiconque par aliment breuvage, médicament, manoeuvre violente ou par tout autre moyen a procuré ou tenté de procurer l’avortement à une femme enceinte ou supposée enceinte qu’elle y ait consenti ou non et puni .. »

L’Art 305 du code pénal double la peine si le coupable se livrait habituellement à l’avortement criminel. L’habitude est établie au bout de 2 avortements pratiqués, selon la jurisprudence.

L’art 306 du code pénal cite professions concernées par la répression, ainsi « les médecins, sages femmes, chirurgiens dentistes, pharmaciens, étudiants en médecine ou art dentaire, marchand d’instruments de chirurgie, infirmière, infirmier, masseur, masseuse, qui ont indiqué, favorisé, pratiqué….»

L’Art 309 du code pénal punit de 6 mois à 2 ans la femme qui s’est intentionnellement fait avorter ou a tenté de le faire, qui a consenti à faire usage de moyens à elle indiqués ou administrés à cet effets.

2- MOYENS ABORTIFS :

Substances abortives : ces substances ne sont pas réellement abortives, leur seuil d’action sur le foetus ou sur l’utérus correspondent à une intoxication du sujet, l’avortement est un épiphénomène de l’intoxication.

Toxiques végétaux : ( emménagogues) essence de persil, ergot de seigle….

Toxiques minéraux : plomb ( ingestion, injection intra utérine …) sels de quinine

Substance hormonale : RU 486 antiprogesterone, se fixe sur les récepteurs hormonaux de celle ci.

Manoeuvres abortives :

*manoeuvre indirectes : injection vaginales, traumatisme du col…

*manoeuvre directes :

Sur l’utérus par dilatation du col, prépare la voie aux manoeuvres directes sur l’oeuf

Sur l’oeuf : destruction et expulsion par ponction des membranes, par injection liquidienne intra utérine ( eau, savon, caustique…) pour décoller l’oeuf.

Diagnostic médico-légal de l’avortement :

1- Diagnostic de l’avortement criminel précoce chez la femme vivante :

Le rôle de médecin expert est d’apporter la preuve médicale que l’acte a été tenté ou accompli, la preuve est très difficile à apporter surtout si l’avortement s’est déroulé sans incident.

Les questions auxquelles l’expert peut avoir à répondre sont le plus souvent les suivantes :

La dame X était elle enceinte ?

Y a t’il eu avortement ?

Les manoeuvres avaient elles un caractère abortif ?

Les médicaments utilisés avaient ils un caractère abortif ?

Même s’il y a eu blessure, la cicatrisation des muqueuses est très rapide. Le passage d’un embryon jeune à travers le col laisse peu de traces on retrouve simplement :

une béance de l’orifice cervical

la présence de glaire

les aveux de la femme constituent le principal élément d’information, le médecin doit faire le diagnostic différentiel entre l’hémorragie post – abortum et la menstruation.

La constatation de membrane dans l’écoulement sanguin ne permet pas d’être affirmatif ( dysménorrhée membraneuse )

25 % des avortements sont spontanés, il faut tenir compte des antécédents gynécologiques et obstétricaux de la femme.

L’histologie des débris endométriaux peut différencier une hyperplasie de la muqueuse des débris placentaires.

Dans le cas d’un avortement précoce vu tardivement le diagnostic est impossible à établir.

2- diagnostic de l’avortement criminel tardif chez la femme vivante :

Il consiste à rechercher les signes d’accouchement précoce ou de grossesse récente : développement de l’utérus

ramollissement du col

écoulement lochial au niveau de l’orifice cervical béant

rétention placentaire ( expulsion en 2 temps )

si l’examen se fait après la délivrance, il faut rechercher les débris placentaire dans le sang

3- Diagnostic de l’avortement criminel sur le cadavre :

La femme est supposée morte au cours des manoeuvre abortives.

a) La cause de la mort peut entre ailleurs que dans la sphère génitale ( utérus normal, pas de corps gestatif au niveau des ovaires )

b) La femme est bien, enceinte mais il n’y a aucune lésion au niveau des organes génitaux internes et externes, utérus est gravide, il n’y a pas eu d’interruption de la grossesse mais cela n’exclue pas une tentative d’avortement.

Dans ce cas la mort peut survenir par inhibition, par arrêt réflexe des centres cardio–respiratoires suite à une excitation périphérique du système vagal.

La présomption de l’avortement est donnée :

les renseignements cliniques

la congestion polyviscerale constatée à l’autopsie

les constatations de la police à la levée de corps.

La mort peut survenir très rapidement par processus embolique cardiaque, pulmonaire, cérébrale. L’embolie peut être gazeuse ou liquidienne.

c) L’avortement est patent, il existe des lésions témoignant de manoeuvres abortives

Lésion au niveau du vagin, au niveau des culs de sac, par fausse route des instruments ou des substances caustiques

Lésion du col utérin ( ecchymose )

perforation utérine avec présence du corps étranger transfixiant le myomètre, les substances caustiques peuvent entraîner des perforations également. Infection utérine : la porte d’entrée est une plaie utérine ou la rétention placentaire

Infarctus de utérus : partiel ou total, utérus est gros violet foncé les ovaires et les trompes sont noirs, turgescents, par thrombose vasculaire.

Lésion de l’oeuf et du foetus : les blessures du foetus sont rares , si elles existent elles sont d’une grande valeur diagnostique

– on retrouve également des lésions des membranes.

A l’examen histologique on retrouve :

un ovaire gravidique augmenté de volume

utérus est augmenté de volume, gros, ramolli, présence de modification histologique de l’endomètre ( dentelle utérine, tubes glandulaire ), présence du chorion cytogène qui prend l’état de caduque.

Placenta : la présence de villosités placentaires à une valeur diagnostique formelle. La putréfaction les rend peu identifiables.

La seul donnée formelle en l’absence de foetus permettant d’affirmer une grossesse récente est en définitive la présence de villosités placentaire.

L’avortement thérapeutique :

La législation Algérienne prévoit dans les textes du code pénal et de la loi sur la protection et la promotion de la santé la possibilité de procéder à l’avortement thérapeutique dans des conditions précises.

Ainsi l’article 308 du code pénal stipule que l’avortement n’est pas puni lorsqu’il constitue une mesure indispensable pour sauver la vie de la mère en danger et qu’il est ouvertement pratiqué par un médecin ou chirurgien après avis donné par lui à l’autorité administrative.

L’article 72 de la loi sur la protection et la promotion de la santé du 16 fev 1985 dispose que : « l’avortement dans un but thérapeutique est considéré comme une mesure indispensable pour sauver la vie de la mère en danger et préserver son équilibre physiologique et mental gravement menacé – l’avortement est effectué par un médecin dans une structure spécialisée après examen médical conjoint avec un médecin spécialiste »

L’avortement thérapeutique est également autorisé par l’article 33 du code de déontologie. Ainsi pour procéder à un avortement thérapeutique :

*il faut que la mère encoure un danger certain qui menace immédiatement sa vie et non seulement sa santé.

*que ce danger soit sous la dépendance certaine de sa grossesse

*que l’interruption de la grossesse le fasse directement cesser.

*q’il n’existe aucun autre moyen thérapeutique.

En outre, l’instruction ministérielle du 05 mai 98 précise les conditions et les modalités de mise en oeuvre de cet avortement pour les femmes victimes de viols commis par un ou des terroristes.

-> Les conditions :

L’avortement thérapeutique est effectué sur la base préalable de la présentation du document d’affirmation de victime de viol par un ou des terroristes, délivré par les services de sécurité.

Le consentement d’une victime majeure est requis.

Si elle est mineure et sauf cas d’urgence, le médecin doit s’efforcer d’obtenir le consentement des parents ou du représentant légal.

-> Les modalités de mise en oeuvre :

L’avortement peut être effectué par tout médecin inscrit au tableau de l’ordre, quelque soit son régime d’exercice

L’avortement intervient après examen médical conjoint avec un médecin spécialiste dans une structure spécialisée : hôpital public ou clinique privée agrée par l’autorité sanitaire pour les activités relevant de la gynécologie–obstétrique et de la chirurgie générale.

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