Amaigrissement isolé

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Amaigrissement isoléIl s’agit d’un motif de consultation moins fréquent que l’asthénie, mais qui l’accompagne souvent et fait suspecter son organicité. La perte de poids n’est pas toujours objective chez les patients alléguant ce symptôme, il faut, si possible, se référer à un poids antérieur. Bien que les causes psychiques soient les plus fréquentes, la crainte sera de négliger une cause organique. Cela justifie souvent des bilans invasifs et coûteux, dont la hiérarchisation doit absolument être guidée par la clinique.

CLINIQUE :

La cause d’une perte de poids est souvent évidente dès l’évaluation initiale (clinique et biologie simple).

– Le contexte est important : sexe, état général, antécédents, contexte psychologique, les médicaments.

Le problème se pose différemment selon âges de la vie. Il faut avoir une particulière attention au sujet âgé, chez qui, quelle qu’en soit la cause, une dénutrition est toujours préoccupante. Les conduites à risque de sida et de MST doivent être recherchées chez l’adulte et l’adolescent ainsi que l’alcoolisme chronique.

– L’appétit est-il conservé ? Existe-t-il des signes digestifs ?

– Le mode de début, brutal ou progressif, l’importance de l’amaigrissement sont les éléments qui indiqueront l’urgence ou non d’un diagnostic et donc du bilan à réaliser.

– L’enquête alimentaire est indispensable, en particulier le régime sans sel ou sans sucre (sujet âgé) ou les déviances alimentaires et le régime sans graisse (anorectiques).

– Le moindre signe noté à l’interrogatoire ou à l’examen clinique est précieux et guidera bien sûr les investigations.

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES :

Si l’amaigrissement est objectif, sans point d’appel précis, un premier bilan recherchera un point d’appel biologique. Il est souvent indispensable devant la demande pressante du patient.

Le bilan biologique  de première intention peut comprendre :

– une formule numération sanguine ;

– la recherche d’un syndrome inflammatoire : VS, CRP ;

– la glycémie, la calcémie, le ionogramme sanguin, la créatinine ;

– le bilan hépatique ;

– les hormonémies thyroïdiennes ;

– la bandelette urinaire.

Les autres examens : une radiographie thoracique, une échographie abdominale.

Certains bilans sont dirigés :

– si conduite à risque : sérologie HIV ;

– si sujet âgé : bilan nutritionnel minimum.

Dans la majorité des cas, le contexte, l’examen clinique et ce bilan suffiront à évoquer le diagnostic.

DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE :

Amaigrissement des troubles des conduites alimentaires : en particulier l’anorexie mentale

C’est une situation fréquente, évoquée le plus souvent chez une adolescente ou une jeune femme, devant la triade classique :

– anorexie (ou vomissements, évidents ou cachés) ;

– amaigrissement, souvent extrême ;

– aménorrhée depuis au moins trois cycles (grossesse éliminée).

Il faut insister sur le déni de la maigreur (consultation à la demande d’un tiers), sur les signes fréquents: lanugo, acrocyanose, constipation et extrême frilosité.

La prise en charge psychiatrique est capitale, souvent difficile à faire accepter. Il faut traiter l’ostéopénie induite par la carence estrogénique souvent prolongée.

Les formes de la femme plus âgée (30 ans) et de l’homme sont de diagnostic plus difficile : il existe toujours une perturbation de l’image du corps, une peur phobique de devenir obèse et l’investigation plus poussée du comportement alimentaire doit faire évoquer ce diagnostic.

Amaigrissement des endocrinopathies et des troubles métaboliques :

  L’hyperthyroïdie est le plus souvent de diagnostic facile, mais certains cas sont plus trompeurs et justifient la réalisation systématique des dosages hormonaux :

Dans l’hyperthyroïdie par surcharge iodée (cordarone), l’amaigrissement peut être important et isolé ;

L’hyperthyroïdie prolongée des nodules toxiques peut être longtemps discrète, traduite par quelques palpitations et un amaigrissement progressif ;

Le plus grand piège est la forme pseudonéoplasique de l’hyperthyroïdie du sujet âgé, qui s’accompagne d’une anorexie paradoxale.

  Dans la maladie diabétique un amaigrissement est le fait :

dans le type 1, d’une décompensation, parfois lors du diagnostic chez l’adulte jeune, il est rare que le syndrome polyuropolydypsique soit occulté ;

dans le type 2, d’une infection, d’une décompensation, d’une atteinte du système nerveux autonome.

– Les autres endocrinopathies sont plus rares, toutefois,  l’insuffisance surrénalienne est souvent de diagnostic tardif ; de même  l’hyperparathyroïdie, quand l’hypercalcémie est importante peut entraîner un amaigrissement massif accompagné de troubles digestifs.

Amaigrissement des maladies infectieuses :

Toutes les maladies infectieuses, bactériennes, virales, parasitaires et mycosiques sont susceptibles d’entraîner un amaigrissement, surtout si elles sont graves et prolongées. Cependant, la fièvre est rarement absente.

Il faut penser essentiellement à la tuberculose et au VIH.

Amaigrissement des malabsorptions ou maldigestions :

Il faut y penser même quand les troubles digestifs sont modestes ou absents et réaliser systématiquement les examens de dépistage d’une malabsorption :

– hémogramme ;

– cholestérolémie ;

– taux de prothrombine ;

– électrophorèse des protéines, voire dosage de la préalbumine ;

– dosage de la vitamine B12, de l’acide folique, de la ferritine ;

– dosage de la calcémie et de la vitamine D.

Les causes sont nombreuses et nécessitent des explorations morphologiques à confier au spécialiste ; auparavant, il faut évoquer des affections fréquentes :

– les parasitoses : Taenia, Giardiase, etc. et réaliser plusieurs examens parasitologiques des selles, voire, un traitement d’épreuve ;

– la maladie coeliaque, chez l’adulte jeune, mais aussi plus tard dans la vie. Actuellement le dosage des anticorps (anti-transglutaminase) peut permettre de sélectionner les malades à explorer ;

– les maladies digestives du sujet âgé sont peu parlantes : l’ulcère, voire le cancer gastrique, la pancréatite, les pathologies ischémiques ou néoplasiques.

Autres causes d’amaigrissement :

– Les cancers : c’est l’obsession du médecin lorsqu’il est isolé et important et qu’il n’a pas fait sa preuve malgré le bilan clinique et biologique. L’amaigrissement est plus souvent le fait de cancers évolués, métastasés. La prévalence des cancers occultes ne paraît pas justifier des bilans invasifs sans élément d’orientation clinique ou biologique.

– Les maladies neurologiques graves : une SLA peut être révélée par un amaigrissement, en principe, les troubles de la déglutition sont évocateurs. La maladie de Parkinson évolue, les AVC multiples sont susceptibles d’entraîner des maigreurs importantes.

– Les maladies psychiatriques : mélancolie, démences, états maniaques, délires.

– Les grandes défaillances de l’organisme (insuffisance rénale, cardiaques, respiratoires, hépatiques),

les syndromes inflammatoires prolongés (quelle qu’en soit la cause), l’alcoolisme, certains médicaments (interféron, métothrexate, etc.).

Au terme d’une première approche, clinique et biologique, ayant souvent entraîné un bilan, parfois hospitalier, le tableau 1 permet de voir la fréquence des pathologies mises en évidence. Il faut y remarquer la fréquence des cancers dans la série la plus récente, ce qui justifie le bilan.

ce symptôme, il faut, si possible, se référer à un poids antérieur. Bien que les causes psychiques soient les plus fréquentes, la crainte sera de négliger une cause organique. Cela justifie souvent des bilans invasifs et coûteux, dont la hiérarchisation doit absolument être guidée par la clinique.

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