Aérosols de médicaments

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Introduction :

Le principal avantage de l’ administration de médicament par aérosol est l’obtention d’effets thérapeutiques avec peu ou pas d’ effet secondaire systémique.

Mais cet avantage n’a pas toujours été aussi clairement identifié.

En effet, le traitement des affections respiratoires par inhalation de vapeurs et fumées a une longue histoire qui a débuté il y 4 000 ans et s’est poursuivie ultérieurement en Inde, en Égypte , en Grèce et à Rome.

Les vapeurs des sources chaudes et la fumée de plantes comme Atropa belladone et Datura stamonium étaient inhalées.

Aérosols de médicamentsL’intérêt pour cette modalité thérapeutique s’est ravivé au XIXe siècle.

En 1817, Sir Alexander Crichton , médecin britannique travaillant à la cour de Russie , a rapporté des essais de traitement de la tuberculose pulmonaire par les vapeurs de résines , approche également expérimentée à Berlin au même moment, approche toujours utilisée aujourd’hui dans certains pays.

En 1845, Lallemand , travaillant à Vernet en France , redécouvrait l’inhalation des vapeurs de sources chaudes, ce qui accrut l’intérêt porté aux inhalations à visée thérapeutique et aboutit à la mise au point de nombreux dispositifs d’aérosolisation.

La première mention d’un aérosol est due à Schneider etWaltz en 1829 : leur dispositif fut le premier à transformer un liquide en une suspension de fines gouttelettes.

Les progrès vont dès lors se faire dans la mise au point de dispositifs de nébulisations de plus en plus élaborés et de systèmes portables d’aérosolisation.

Le premier vrai dispositif d’aérosolisation fut fabriqué par Jean Sales-Girons près de Paris en 1859 : l’eau sous pression était projetée contre un maillage de fins fils de fer.

La même année, Sales-Girons réalisa le premier dispositif portatif qui générait un aérosol de résine liquide utilisé pour traiter la tuberculose.

Au XXe siècle , de rapides développements sont survenus. Les nébuliseurs en verre, soit de grande taille , soit portatifs, apparaissaient avant la Seconde Guerre mondiale.

L’ère de l’aérosol doseur pressurisé débuta en 1955 quand George Maison, président des laboratoires Riker, devant sa fille asthmatique qui éprouvait des difficultés à utiliser un nébuliseur en verre portatif, imagina de pulvériser le bronchodilatateur qu’elle utilisait de la même manière que de la peinture.

C’est ainsi que fut développé un système d’AD (Medihalert) tout d’abord en verre en 1956, puis en aluminium en 1962.

D’autres progrès ont permis de rationaliser le traitement par aérosols des maladies respiratoires : le principe actif peut se déposer selon la taille des particules et de l’ affection que l’on souhaite traiter, soit dans les voies bronchiques, soit dans les unités respiratoires terminales.

Les bronchodilatateurs et les corticostéroïdes sont largement utilisés dans le traitement des affections des bronches, et les agents anti-infectieux dans la prévention des infections.

Mais les affections non respiratoires pourront probablement bénéficier de l’aérosolisation de principes actifs diffusant après dépôt dans les unités respiratoires terminales à travers l’épithélium respiratoire.

Aérosols :

A – Définitions :

Un aérosol est constitué d’une phase dispersante gazeuse et d’une phase dispersée liquide ou solide qui, dans le cas d’un médicament, contient le principe actif.

Un aérosol est caractérisé par la distribution des diamètres des particules.

Si la mesure du diamètre de particules sphériques est simple, ce n’est pas le cas pour les particules non sphériques.

C’est la raison pour laquelle le diamètre aérodynamique est utilisé : c’est le diamètre d’une sphère de densité 1 qui a la même vitesse terminale de sédimentation que la particule étudiée.

La distribution des diamètres permet de distinguer les aérosols monodispersés caractérisés par des diamètres de même dimension , une distribution normale (diamètre moyen, déviation standard ), et les aérosols polydispersés caractérisés par une distribution log-normale (diamètre massique médian [DMM], déviation géométrique standard [DGS]) des diamètres qui varient de 10–3 à 10 µm avec une DGS inférieure à 1,2.

La fraction inhalable est la fraction de la masse de solution ou suspension à aérosoliser qui est finalement aérosolisée.

La masse respirable est classiquement considérée comme celle d’un aérosol dont le diamètre des particules est compris entre 1 et 5 µm ; la masse respirable ne doit pas être cependant confondue avec la masse déposée.

B – Caractérisation :

Différentes techniques autorisent la détermination des concentrations et des diamètres des particules.

Ce sont certaines propriétés des aérosols qui permettent de caractériser la distribution de la taille de leurs particules dans des limites variables : les propriétés inertielles sont utilisées par les impacteurs en cascade qui sont fiables dans l’intervalle 0,5-10 µm, diffusionnelles par les batteries de diffusion (0,03-0,2 µm), optiques par les compteurs optiques automatiques (0,1-10 µm), et électriques par les analyseurs électriques (0,01-1 µm).

Les mesures peuvent être obtenues avec des dispositifs très sophistiqués qui n’exonèrent pas de l’interprétation toujours délicate des résultats.

Pénétration et dépôt :

A – Destinée de l’aérosol :

Un aérosol de médicament a des destinées variées : persistance dans l’ appareillage après aérosolisation, élimination avec l’air expiré, dépôt dans les voies aériennes.

Une fraction des particules qui pénètrent dans les voies aériennes s’impacte dans la bouche et le pharynx, avant d’être déglutie, de transiter et/ou d’être absorbée dans l’ appareil digestif.

Une fraction se dépose dans les bronches ou les unités respiratoires terminales où elle rejoint le tractus gastro-intestinal via l’escalator mucociliaire, et/ou exerce localement une action thérapeutique.

Les médicaments déposés dans les bronches, les alvéoles, le tractus digestif, la bouche ou le pharynx, peuvent passer dans la circulation systémique et ainsi atteindre d’autres organes.

1- Dépôt total :

Celui d’un aérosol reflète la probabilité moyenne de ses particules d’être déposées dans les voies aériennes ; il dépend de la taille des particules, du débit ventilatoire, de la disposition géométrique des voies aériennes (variations anatomiques et pathologiques des voies aériennes), du volume inhalé et de la durée du cycle ventilatoire.

Les mécanismes du dépôt des particules entraînées dans une phase gazeuse sont de trois types : l’impaction, la sédimentation et la diffusion.

L’impaction est liée à l’inertie des particules et croît avec la taille et la vitesse des particules à l’ occasion des variations de direction du flux aérien.

La sédimentation est liée à l’action de la gravité quand le débit aérien diminue, et la diffusion aux mouvements browniens qui affectent les petites particules.

La totalité des particules de plus de 10 µm se déposent dans les voies aériennes supérieures en cas de respiration nasale, la totalité des particules de plus de 20 µm en cas de respiration buccale ; à l’inverse, toutes les particules inhalées de moins de 0,5 µm sont présentes dans l’air expiré.

Le dépôt pulmonaire concerne donc les particules de diamètre variant entre 0,5 et 10 µm.

2- Dépôt régional :

Les aérosols de médicaments se déposent dans les voies aérodigestives supérieures, les voies aériennes de conduction et les unités respiratoires terminales.

– Le dépôt laryngé est de 1 % pour les particules de 3 à 5 µm, de 6 % pour celles de 8 µm et 9 % pour celles de 10 µm ; il dépend de l’impaction et de la morphologie des cordes vocales.

– Le dépôt, selon le diamètre particulaire dans les voies aériennes de conduction (les 16 premières générations bronchiques et bronchiolaires), peut être décrit par une courbe en « cloche », avec un dépôt maximal d’environ 20 % pour les particules de 7 µm et un dépôt négligeable pour les particules de diamètre inférieur à 2 µm.

Le dépôt est peu influencé par la durée du cycle, ce qui indique un dépôt avant tout par sédimentation.

– Le dépôt dans les unités respiratoires terminales (générations 17 à 23) est également décrit par une courbe en « cloche » : les particules de taille supérieure à 15 µm n’y pénètrent pas, les particules inférieures à 2 µm s’y déposent exclusivement.

Il existe des conditions ventilatoires de dépôt maximal de médicament : le dépôt diminue en deçà ou au-delà d’une valeur seuil de ventilation.

Le dépôt cumulatif croît de la trachée aux unités respiratoires terminales ; l’appareil respiratoire se comporte comme un filtre où les particules se déposent de façon d’autant plus proximale qu’elles sont de grande taille.

B – Effets de l’hygroscopie :

L’hygroscopie des médicaments aérosolisés n’a probablement pas suffisamment été prise en compte pour expliquer les variations du dépôt des médicaments aérosolisés.

Si des aérosols de médicaments hygroscopiques sont inhalés, une augmentation de la taille des particules du médicament se produit dans les voies respiratoires, ce qui est responsable d’un dépôt plus proximal dans les voies aériennes que celui, prévisible, des particules à la sortie du générateur de l’aérosol.

C – Effets des maladies respiratoires :

Les maladies interviennent dans la pénétration et le dépôt des substances aérosolisées car elles peuvent provoquer des modifications de la ventilation et de la géométrie des voies aériennes ; ces modifications peuvent être à l’origine de modifications des mécanismes usuels de dépôt dans un site donné de l’appareil respiratoire.

Chez les sujets présentant une affection bronchique chronique obstructive, le dépôt des solutés aérosolisés est très hétérogène.

La pénétration des médicaments aérosolisés (DMM 3 µm) diminue de 50 %chez les fumeurs et de 75 %chez les malades présentant une affection bronchique chronique obstructive ; le dépôt croît au lieu d’accumulation des sécrétions et des sténoses des grosses bronches.

L’existence d’un foyer pneumonique est un obstacle à la pénétration des aérosols (DMM 3,5 µm), comme cela a été démontré chez le lapin et dans les zones pulmonaires sièges d’une fibrose pulmonaire.

Dispositifs d’aérosolisation :

A – Génération des aérosols :

Les aérosols polydispersés sont produits à partir de solutions, de suspensions ou de poudres ; ils sont surtout utilisés pour traiter les affections bronchiques.

Les générateurs d’aérosols liquides utilisent soit la pulvérisation pneumatique, soit la pulvérisation ultrasonique.

Les aérosols obtenus par ces appareils sont composés de gouttelettes (si le liquide dispersé a une faible tension de vapeur), de particules solides (les résidus de l’évaporation des gouttes) ou de matière solide en suspension dans un liquide.

Selon les générateurs, les DMM varient de 1,5 à 6 µm, et la DGS est de l’ordre de 2.

Ces générateurs sont à l’origine d’aérosols contenant de 105 à 107 particules/cm3.

Les aérosols monodispersés de médicaments sont obtenus par nébulisation soit à partir d’une suspension de particules ayant d’emblée la monodispersion requise, soit à partir d’une solution par la production d’un aérosol polydispersé dont on ne conservera que les particules aux dimensions requises.

Les aérosols monodispersés sont avant tout utilisés pour la prévention et le traitement des affections pulmonaires.

Les principaux dispositifs d’aérosolisation sont les nébuliseurs qui restent encombrants et nécessitent électricité et/ou gaz comprimé, et les dispositifs portables que sont lesAD ou les inhalateurs de poudre sèche.

B – Nébuliseurs :

Ce sont des appareils où le médicament en solution ou suspension aqueuse est introduit dans une chambre de volume variable avant aérosolisation par nébuliseur soit pneumatique, soit ultrasonique.

Ce sont des systèmes encombrants, bruyants, d’utilisation malaisée, de mise en oeuvre nécessitant plusieurs minutes.

La nébulisation par nébuliseur pneumatique résulte de l’effet Bernouilli induit par le courant de gaz à haute vitesse.

La température baisse à 15 °C dans les conditions usuelles en raison de l’évaporation liée au courant d’air.

Le DMM des aérosols générés par les nébuliseurs pneumatiques est inversement proportionnel au débit d’air qui peut varier de 5 à 12 L/min.

Grâce à des valves, les nébuliseurs pneumatiques peuvent produire des aérosols monodispersés dont le DMM est de 1 µm en éliminant les particules les plus grosses des aérosols polydispersés.

La nébulisation par nébuliseur ultrasonique est due à la cavitation produite par un cristal piézoélectrique ; les suspensions ne peuvent pas être aérosolisées de façon satisfaisante par les nébuliseurs ultrasoniques, seule la fraction liquide étant aérosolisée.

C’est l’inspiration du sujet qui produit le débit qui véhicule l’aérosol généré au-dessus du cristal.

Le DMM des aérosols générés par les nébuliseurs ultrasoniques est inversement proportionnel à la fréquence d’oscillation du quartz ; pour générer des particules suffisamment fines pour un dépôt pulmonaire profond, la fréquence doit être au moins égale à 2 MHz.

La solution dans un réservoir en contact soit direct avec le cristal, soit indirect par l’intermédiaire d’eau, prévient une augmentation de température pendant la nébulisation et les modifications par choc thermique de la structure et des propriétés de peptides.

Avec les deux types de nébuliseur, l’aérosol est inhalé par l’intermédiaire d’une tuyauterie, et d’un masque ou d’un embout buccal.

Les nébuliseurs générant un aérosol en continu (ce qui est à l’origine d’une non-inhalation d’une fraction de l’aérosol), des optimisations ont été conçues pour accroître la fraction inhalable : les nébuliseurs pneumatiques à effet Venturi actif ont un débit qui augmente au cours de l’inspiration ; les nébuliseurs dosimétriques, pneumatiques ou ultrasoniques, ne génèrent l’aérosol que pendant l’inspiration.

Des recommandations pour optimiser la nébulisation ont été récemment établies ; elles proposent de classer les nébuliseurs en trois catégories selon la granulométrie : plus de 5 µm pour un dépôt dans les voies aériennes supérieures ; entre 2 et 6 µm pour un dépôt trachéobronchique ; entre 0,5 et 3 µm pour un dépôt pulmonaire profond.

Il est toujours nécessaire de déterminer la distribution des tailles particulaires, l’efficacité du système de génération des particules et la quantité réelle de médicament administré dans les conditions usuelles d’utilisation du matériel.

C – Aérosols doseurs :

Les AD ou MDI (metered dose inhaler) contiennent un mélange du principe actif à aérosoliser et de gaz qui représente environ 80 % du contenu d’un flacon.

Ces gaz sont des fréons, ou CFC, utilisés comme propulseurs (CFC 12), mais aussi comme surfactants ou dissolvants (CFC 114, CFC 11) ; les CFC sont progressivement remplacés par des HFA.

CFC et HFA sont ininflammables et non toxiques pour les muqueuses respiratoires ; ils sont expulsés à plus de 100 km/h et 20 cm sont nécessaires avant qu’ils ne se déplacent à une vitesse inférieure à celle de l’air inhalé.

Les gaz liquéfiés sont introduits dans le récipient sous pression, réalisant une suspension ou une solution avec le principe actif. Des excipients accroissent la stabilité de l’ensemble.

Les conditions d’inhalation d’un aérosol issu d’un AD vont déterminer les fractions déposées dans la bouche, l’oropharynx, l’estomac, l’appareillage ou les poumons. Les modalités d’utilisation d’un AD doivent donc être enseignées aux malades avec une particulière attention.

Sans explication préalable ou malgré les explications, un grand nombre de malades utilisent les AD de façon peu satisfaisante.

Trente pour cent des asthmatiques de Saunders n’utilisaient pas correctement leurADet 23 % ne recevaient pas, de ce fait, une thérapeutique adéquate. Les sujets de 74 ans ou plus n’inhalent l’aérosol d’unAD convenablement que dans 60 %des cas ; cela est lié à leur état mental et aux informations qui leur sont fournies ou pas.

La nature des erreurs d’utilisation est variée.

Certaines peuvent être triviales : 2 % des sujets oublient d’ouvrir l’AD ; 10 % des mêmes sujets ne tiennent pas l’AD verticalement, ce qui ne permet pas de remplir le réservoir de l’appareil ; 31 % n’agitent pas l’AD avant l’utilisation.

Certains sujets arrêtent l’inhalation de l’aérosol en raison d’une sensation buccale de froid due à l’évaporation des CFC et continuent à inspirer par le nez.

La vitesse d’inhalation est trop rapide et la pause respiratoire en fin d’inhalation trop courte : 58 % des asthmatiques étudiés par Epstein inhalent trop rapidement l’aérosol et 44 % seulement ont une pause respiratoire de fin d’aspiration supérieure ou égale à 10 secondes.

Mais c’est la synchronisation entre l’inhalation et la génération de l’aérosol qui reste le problème essentiel, car c’est l’inspiration qui transporte le médicament aérosolisé dans les voies aériennes.

La proportion de malades incapables de synchroniser inhalation et génération de l’aérosol (mauvais coordinateurs) varie de 30 à 38 %.

Pour prévenir les effets d’une mauvaise coordination entre inspiration et déclenchement de l’AD, des systèmes activés par l’inspiration ont été mis au point (AutohalerTM) ; ils améliorent le dépôt intrapulmonaire des médicaments, particulièrement chez les mauvais coordinateurs.

Les CFC sont accusés de détruire l’ozone stratosphérique et de participer à l’effet de serre.

En effet, une diminution de la couche d’ozone stratosphérique située à 50 km d’altitude a été constatée aux pôles.

Les CFC, sous l’action des rayons ultraviolets, libèrent du chlore qui initie un cycle destructeur de l’ozone.

Si les CFC ne sont pas les seuls gaz à réduire la couche d’ozone, ils sont considérés comme particulièrement dangereux en raison d’une demi-vie atmosphérique longue de 70 ans.

Or, l’ozone stratosphérique protège contre les rayonnements solaires capables d’induire des cancers de la peau et des affections de l’oeil, de modifier les défenses immunitaires, et de réduire la croissance de la végétation.

Les CFC induisent un réchauffement global de la terre en absorbant et réfléchissant la chaleur ; ils contribuent à 25 % du réchauffement global direct.

C’est en raison du caractère dangereux des CFC pour l’écosystème et la santé, que plusieurs accords internationaux ont été promulgués sous les auspices des Nations unies.

Le protocole de Montréal (1987) fut révisé ultérieurement et le bannissement de la production de CFC a été avancée de 2000 à 1996, 1995 pour la Communauté européenne.

Les CFC utilisés dans les AD ne représentaient que 1 % des CFC produits en 1987 mais furent cependant inclus dans l’embargo.

Mais l’utilisation des AD contenant des CFC pour traiter les affections bronchiques reste possible tant que desAD sans CFC ne seront pas disponibles, sous réserve d’autorisation du comité exécutif du protocole de Montréal.

Le développement d’AD sans CFC, dans lesquels les CFC sont remplacés par des HFA, devrait s’achever dans les prochaines années.

C’est un processus industriel complexe qui ne se limite pas à une simple substitution des HFA aux CFC.

Ces modifications nécessitent des études toxicologiques et cliniques pour évaluer équivalence d’efficacité et tolérance.

Certaines reformulations sont difficiles, voire impossibles.

Les HFAont un effet de serre bien moindre que les CFC, mais néanmoins un effet ; leur bannissement interviendra donc probablement dans les deux ou trois prochaines décennies.

D – Chambres d’inhalation :

Elles sont des réservoirs en plastique ou en papier (spacer), de capacité variable (quelques millilitres à quelques décilitres), se terminant à une extrémité par un embout buccal et à l’autre extrémité par un orifice où s’adapte l’AD (AeroChambert,Aeroscopict, Babyhalert, Jett, Nebuhalert, Volumatict).

Certaines chambres sont munies d’une valve antiretour qui ne permet que l’inspiration.

L’intérêt des chambres d’inhalation de grand volume est double : d’une part, la simultanéité de l’inspiration et de la génération de l’aérosol n’est pas nécessaire ; d’autre part, de grosses particules qui, sans la chambre d’inhalation, s’impacteraient dans les voies aérodigestives supérieures, se déposent dans la chambre d’inhalation.

Les chambres d’inhalation peuvent aussi être utilisées chez les malades ventilés mécaniquement.

Les modalités d’utilisation d’un AD couplé à une chambre d’inhalation (ventilations spontanée et mécanique).

L’utilisation d’une chambre d’inhalation diminue le dépôt oropharyngé et augmente la fraction déposée dans l’appareil respiratoire, mais n’empêche pas qu’une quantité importante (environ 35 %) soit retrouvée dans l’estomac et qu’environ 10 %soient perdus dans l’appareillage.

Dans les conditions optimales d’utilisation avec chambre d’inhalation, c’est un tiers seulement de la quantité quittant l’AD qui se dépose dans l’appareil respiratoire.

Le dépôt fractionnel d’un aérosol issu d’un AD, sans ou avec chambre d’inhalation.

Les chambres d’inhalation améliorent donc l’efficacité des AD, particulièrement dans les cas de mauvaise utilisation de l’AD, et ceci à tout âge.

L’inhalation est plus simple car l’inspiration peut succéder à la pression sur l’AD.

Les chambres d’inhalation diminuent certains des effets secondaires liés à leur utilisation, notamment la candidose oropharyngée en cas d’inhalation de corticostéroïdes.

Les chambres de taille réduite et de forme discoïde permettent d’obtenir des résultats presque semblables sans être aussi encombrantes, c’est-à-dire plus adaptées à une utilisation ambulatoire.

E – Inhalateurs de poudre sèche :

Les inhalateurs de poudre sèche ou dry powder inhaler (DPI) en anglais aérosolisent sans gaz propulseur des substances par dispersion pneumatique.

L’appareillage idéal devrait permettre une dispersion complète de la poudre grâce à un débit turbulent, mais en minimiser l’impaction dans l’appareillage et l’oropharynx.

La dispersion des agglomérats, la résistance du système d’inhalation et l’inspiration conditionnent en effet la dose inhalée.

Le Spinhalert est l’ancêtre des inhalateurs de poudre sèche : une capsule contenant le médicament micronisé mélangé avec un excipient (le lactose) est perforée dans l’inhalateur où le flux turbulent, généré par une turbine actionnée par l’inspiration, disperse la poudre.

Les autres systèmes fonctionnent sur un principe semblable sans turbine, avec ou sans excipient, en doses simples comme le Cyclohalert, le Diskhalert, l’inhalateur Ingelheimt, le Rotohalert, ou en doses multiples comme le Diskust, le Pulvinalt et le Turbuhalert.

Les avantages des inhalateurs de poudre sèche sont qu’ils ne contiennent pas de CFC ou de HFA et qu’ils ne posent pas le problème de la coordination main-poumon chez les mauvais coordinateurs.

Mais il se produit une diminution progressive des performances en cas d’humidification accidentelle ou climatique de la poudre dans un réservoir qui n’est pas clos et qui contient la poudre à inhaler.

Plus complexe sont les relations qui lient le dépôt de médicament dans les voies aériennes, la résistance au flux aérien du système d’inhalation, le débit inspiratoire au cours de l’inhalation ; mais quoi qu’il en soit, le débit inspiratoire peut être insuffisant pour permettre l’aérosolisation, notamment au cours des obstructions aiguës des voies aériennes.

Ainsi 6 % des obstructifs, 10 % des enfants asthmatiques de plus de 6 ans et 60 % des asthmatiques de moins de 6 ans ne parviennent pas à générer un débit inspiratoire supérieur à 30 L/min.

La toux provoquée par le dépôt des particules solides dans les voies respiratoires peut provoquer l’expulsion de ce qui vient d’être inhalé.

Traitement et prévention des maladies respiratoires :

Dans le cas du traitement et de la prévention des maladies respiratoires, de nombreux médicaments ont été administrés sous forme d’aérosols, dans les maladies de la sphère oto-rhino-laryngologique, des voies aériennes trachéobronchiques et des unités respiratoires terminales.

Certaines modalités thérapeutiques utilisant les aérosols sont d’un grand empirisme et n’ont jamais été l’objet d’études contrôlées ; d’autres, à l’inverse, sont codifiées.

A – Médicaments oto-rhino-laryngologiques :

Les AD contenant des CFC n’étant plus disponibles pour le traitement des affections oto-rhino-laryngologiques, c’est la nébulisation qui est utilisée pour générer les aérosols de médicaments oto-rhino-laryngologiques.

Bien qu’ils soient très fréquemment administrés dans les affections des voies aériennes supérieures, les études contrôlées sont rares.

Il a été démontré que les aérosols semblent pouvoir pénétrer les sinus et que le croup bénéficie de l’inhalation de corticostéroïdes.

Des études non contrôlées rapportent les résultats obtenus par l’aérosolisation de corticostéroïdes, de mucolytique et/ou d’antibiotiques.

Des huiles végétales sont commercialisées comme traitement d’appoint des affections des voies aériennes supérieures.

B – Bronchodilatateurs :

Les médicaments bronchodilatateurs (bêta2-adrénergique, anticholinergique) sont largement utilisés dans le traitement de l’asthme et des bronchopneumopathies chroniques obstructives : l’aérosolisation de bêta2- adrénergique permet une bronchodilatation comparable à celle obtenue par l’administration intraveineuse du même médicament ; l’aérosolisation d’anticholinergique est bénéfique avant tout pour les malades atteints de bronchopneumopathies chroniques obstructives.

C – Corticostéroïdes inhalés :

L’asthme est l’indication majeure de la corticothérapie inhalée, qui est la composante principale du traitement de fond des formes modérées à sévères.

Dans les formes sévères, les corticostéroïdes inhalés permettent une réduction, voire un sevrage de la corticothérapie orale.

Les corticostéroïdes inhalés peuvent être aussi indiqués dans les formes légères persistantes.

Le rôle de la corticothérapie est plus discuté dans les bronchopneumopathies chroniques obstructives : la corticothérapie inhalée est recommandée en cas d’obstruction sévère, dans les formes s’aggravant rapidement, et dans les formes dites spastiques.

D – Iséthionate de pentamidine :

C’est en 1987 que Montgomery et al ont été les premiers à rapporter qu’un aérosol de pentamidine pouvait être actif contre Pneumocystis carinii. Ils ont utilisé une méthode d’aérosolisation considérée comme une méthode de référence : une quantité et une concentration fixes d’iséthionate de pentamidine étaient aérosolisées par un nébuliseur pneumatique à un débit parfaitement défini.

Dans ces conditions, la pentamidine aérosolisée fut aussi efficace que des traitements par pentamidine intraveineuse ou par triméthoprime-sulfaméthoxazole, et ceci sans les effets secondaires que ces traitements pouvaient générer par voie générale.

Cette méthode de traitement des pneumocystoses n’est pas utilisée en raison de limitations : le médicament ne peut pas accéder aux zones infectées, il s’en échappe trop rapidement, il ne peut être un traitement des pneumocystoses extrarespiratoires.

À l’inverse, l’étude de Leoung et al a parfaitement démontré, avec le même système d’aérosolisation, que l’inhalation mensuelle de 300 mg d’iséthionate de pentamidine avait un effet prophylactique dans les pneumocystoses chez les malades positifs atteints du virus de l’immunodéficience humaine (VIH), puisque 18 mois après l’initiation de la prophylaxie, 30 % des sujets seulement avaient présenté un épisode ou plus de pneumocystose contre 70 % chez les sujets sans prophylaxie.

Cette approche thérapeutique est moins utilisée qu’elle ne l’a été en raison de l’efficacité des traitements antiviraux et de la supériorité de la prévention par triméthoprime-sulfaméthoxazole.

E – Antibiotiques :

Les aérosols d’antibiotiques ont été utilisés de longue date dans le traitement et la prévention des suppurations bronchiques chroniques, tout particulièrement des infections et colonisations chroniques à Pseudomonas aeruginosa et de la mucoviscidose.

Bien qu’en France aucun antibiotique n’ait, en décembre 1998, une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour aérosolisation, les aminosides (gentamicine, tobramycine…) et les polypeptides (colimycine) sont souvent aérosolisés bien qu’il n’existe pas en France de forme galénique adaptée à l’inhalation.

Pourtant les études restent peu nombreuses et les conclusions nuancées, car les conditions d’aérosolisation sont très variables d’une étude à l’autre : systèmes d’aérosolisation différents, aérosolisation quelques jours par semaine ou quelques semaines par mois, posologies très variées des antibiotiques, association d’antibiotiques par voie générale.

Plaident pour l’aérosolisation des antibiotiques l’efficacité de l’injection endotrachéale d’antibiotiques, des études non contrôlées et quelques études contrôlées.

La gentamicine aérosolisée deux fois par jour à la dose de 40 mg pendant trois jours diminue le volume des sécrétions et améliore le débit expiratoire de pointe chez les malades atteints de bronchectasies.

La tobramycine aérosolisée trois fois par jour à la dose de 600 mg pendant 28 jours diminue par 100 la densité de Pseudomonas aeruginosa dans l’expectoration de malades atteints de mucoviscidose.

Une méta-analyse confirme l’effet bénéfique de l’aérosolisation des antibiotiques dirigée contre Pseudomonas aeruginosa dans la mucoviscidose.

F – Antiviraux :

Leur aérosolisation s’est avérée effective dans les viroses respiratoires dues aux virus de la grippe et le virus respiratoire syncytial.

La ribavirine est l’antiviral aérosolisé qui a été le plus étudié : elle est active contre les virus de la grippeA et B et le virus respiratoire syncytial chez le nouveau-né et le jeune adulte ; le rapport entre les effets d’une part, le coût et les effets secondaires chez le personnel soignant d’autre part, en limite les indications.

L’amantadine et l’interféron sont actifs contre le virus de la grippeA.

G – Peptides et protéines :

De nombreuses études expérimentales évaluent l’inhalation de médicaments sous forme d’aérosol, médicament ayant une action respiratoire ou non.

Ciclosporine, alphalpha1-antitrypsine et rhDNase sont aérosolisés pour un effet respiratoire.

L’administration de ciclosporine sous forme d’aérosol a été expérimentée dans le rejet de greffe pulmonaire et dans l’asthme : le rejet semble pouvoir être modulé, mais l’effet dépend de la dose de ciclosporine inhalée ; dans l’asthme, la tolérance est bonne, mais les effets restent à documenter.

L’aérosolisation d’alphalpha1-antitrypsine est bien tolérée et augmente la concentration dans le fluide bronchoalvéolaire ; mais l’efficacité clinique et le coût d’une telle approche thérapeutique restent à évaluer.

La rhDNase aérosolisée fluidifie les sécrétions purulentes de la mucoviscidose, améliore la symptomatologie clinique et la fonction respiratoire sans effet indésirable notable ; mais elle est sans action documentée dans les bronchites chroniques et les dilatations des bronches.

Si l’insuline, la LH-RH (luteinizing hormone-releasing hormone), le GCSF (granulocyte colony-stimulating factor), et la GH (growth hormone) peuvent être aérosolisés pour un effet systémique, un problème qui leur est commun est que le système d’aérosolisation doit permettre un dépôt avant tout dans les unités respiratoires terminales où la fraction qui diffuse est plus élevée que dans les voies de conduction bronchiques.

L’insuline est le candidat le plus sérieux pour l’administration par aérosol d’une hormone à effet systémique.

Il existe en effet des données qui suggèrent que l’insuline inhalée assure un meilleur contrôle de la glycémie que la voie sous-cutanée, et ceci sans effet indésirables notables.

La LH-RH, la GCSF, et la GH peuvent également être administrées par aérosolisation, ce qui est l’objet de nombreux travaux.

Les aérosols permettent aussi d’administrer du matériel génétique dans la perspective d’une thérapie génique de la mucoviscidose, des carcinomes bronchopulmonaires, du mésothéliome et des déficits en alpha1-antitrypsine ; cette approche thérapeutique en est à ses balbutiements et pose de nombreux problèmes dont le choix du vecteur, l’efficacité et la sécurité dans la manipulation du matériel génétique.

Effets indésirables :

L’inhalation de médicaments peut être responsable de complications locales non observées en cas d’utilisation du même médicament par voie générale ; ces complications dépendent des médicaments inhalés.

A – Corticostéroïdes :

Une candidose oropharyngée, une dysphonie, une toux et une diminution des débits expiratoires ont été rapportées.

La fréquence de la candidose et de la dysphonie est proportionnelle à la dose quotidienne inhalée et au nombre de bouffées.

La candidose peut être prévenue par l’utilisation d’une chambre d’inhalation et par le gargarisme après l’inhalation ; elle est plus fréquente chez la femme.

La dysphonie n’est pas prévenue par ces mesures mais semble dépendre des excès vocaux.

Une toux et des sibilances sont observées après l’inhalation de certains corticostéroïdes.

Ces effets secondaires ont été observés chez 20 % des malades inhalant du dipropionate de béclométasone, associés à une diminution réversible sous b2-adrénergiques du volume expiratoire maximal par seconde.

La comparaison des effets de l’inhalation de dipropionate de béclométasone dispersé dans de l’acide oléique et des effets de l’acétonide de triamcinolone dispersé dans de l’alcool déshydraté suggère la responsabilité de l’acide oléique dans la symptomatologie observée.

La corticothérapie inhalée à dose supérieure à 1 000 µg/j est associée à une augmentation du risque de survenue d’hématomes sous-cutanés, de cataracte, de diminution de la fonction surrénalienne, et de densité osseuse diminuée, bien que ces deux derniers effets n’ont pas de signification clinique démontrée à ce jour.

B – Bêta-2-adrénergiques :

Les complications sont dominées par la survenue de mort subite après leur utilisation chez l’asthmatique ; l’origine a été et est toujours l’objet d’un vif débat.

Les raisons invoquées sont l’action bêtalpha1-agoniste sur le myocarde, la tolérance aux agents bêta2-adrénergiques, une hypoxémie induite par la modification du rapport ventilation/perfusion et l’inadaptation thérapeutique.

Les CFC ont été incriminés dans l’augmentation transitoire des morts subites qui a été constatée en Grande-Bretagne, entre 1960 et 1967, après l’utilisation d’AD de bêta2-adrénergiques.

D’autres explications ont été avancées et les données expérimentales rendent cette hypothèse invraisemblable.

Il a été en effet suggéré que l’inhalation de CFC augmentait la sensibilité du coeur aux catécholamines.

De fait, des études chez le singe et le chien ont montré que 20 à 35 µg/mL de CFC dans le sang sensibilisent le coeur aux effets arythmisants de l’épinéphrine.

Mais la mesure des concentrations sanguines de CFC chez les asthmatiques a montré que les valeurs maximales observées 10 à 20 secondes après l’inhalation ne dépassaient pas 4 µg/mL, avant de diminuer rapidement.

Compte tenu des données obtenues chez l’animal, il est donc peu probable que les CFC inhalés puissent induire des troubles du rythme dans les conditions usuelles d’utilisation des AD.

L’administration de bêta2-adrénergiques dans les affections bronchiques chroniques obstructives, notamment l’asthme, entraîne souvent une diminution de 10-15 mmHg de la pression partielle en oxygène du sang artériel (PaO2).

Cet effet est dû principalement à l’effet vasodilatateur des bêta2-adrénergiques : ils augmentent le débit cardiaque et la perfusion de régions peu ou pas ventilées du poumon.

Il est donc concevable que l’inhalation sans précaution de bêta2-adrénergiques chez un asthmatique hypoxémique puisse être à l’origine d’une diminution additionnelle de la PaO2 aux conséquences dramatiques.

L’administration immodérément prolongée de bêta2-adrénergiques dans des circonstances de gravité qui font que celle-ci n’est plus de mise, est responsable de décès par insuffisance thérapeutique et de la réputation de danger usurpée des bêta2-adrénergiques de dernière génération.

La pénétration de l’aérosol dans les voies aériennes périphériques peut être incertaine : chez un asthmatique en état stable, l’aérosol pénètre dans les petites voies aériennes ; à l’inverse, chez les patients présentant une maladie asthmatique aiguë avec notamment des bouchons de mucus et une distribution altérée de la ventilation, les effets de cet aérosol sont hasardeux ; il a pu être démontré que s’il était possible d’obtenir le même degré de dilatation des voies aériennes proximales par les aérosols et la voie parentérale, la dilatation des petites voies aériennes pouvait varier avec la voie d’administration.

Le développement d’une tolérance a été décrit pour les bêta2-adrénergiques.

La tolérance est définie comme une réponse diminuée pour une même stimulation des récepteurs. Les études in vitro des lymphocytes ont montré une diminution marquée du nombre des récepteurs bêta2-adrénergiques disponibles.

En fait, ce phénomène a été observé avant tout in vitro et dans un nombre limité d’études in vivo aussi bien en utilisant des bêta2-adrénergiques par voie orale que par aérosol ; cette hyposensibilisation aux substances bêta2-adrénergiques, si elle existe, n’est jamais complète, les bêta2-adrénergiques gardant une action, même si celle-ci est partielle.

En fait, la mortalité liée à l’utilisation des bêta2-adrénergiques en aérosol semble davantage en rapport avec leur utilisation isolée devenue inappropriée en raison de la sévérité de la maladie asthmatique.

C – Agents anti-infectieux :

L’inhalation de pentamidine s’accompagne volontiers de toux, symptôme le plus fréquent ; mais il peut aussi survenir une diminution des débits expiratoires maximaux proportionnelle à la quantité de pentamidine aérosolisée. Le phénomène est particulièrement marqué chez l’asthmatique, pouvant aboutir à une gêne respiratoire sévère.

Plus discutée est la responsabilité de la pentamidine aérosolisée dans l’apparition d’une hyperréactivité bronchique non spécifique avec symptomatologie asthmatique.

Mais la pentamidine ne se déposant pas de façon homogène dans l’appareil respiratoire, elle laisse se développer des foyers de pneumocystoses, des lésions kystiques responsables de pneumothorax.

L’inhalation de solutions d’antibiotiques comme la gentamicine contenant des sulfites peut entraîner des réactions allergiques sévères.

Devenir des médicaments inhalés :

Le devenir d’un médicament déposé sur les surfaces respiratoires conditionne son effet thérapeutique.

Le médicament peut s’accumuler dans le film liquidien de surface bronchique ou des unités respiratoires terminales, se fixer sur une protéine ou un récepteur, pénétrer dans une cellule pulmonaire, ou agir en dehors de l’appareil respiratoire après avoir traversé l’épithélium respiratoire et l’endothélium vasculaire pulmonaire.

Le devenir du médicament inhalé dépendra de ses propriétés physicochimiques : sa masse moléculaire, sa solubilité dans l’eau et dans les graisses, sa charge, et de l’existence de récepteurs pulmonaires pour ce médicament.

A – Lieux du dépôt :

En cas de dépôt sur l’épithélium cilié des voies de conduction, les médicaments peuvent agir sur les cellules bordantes, qu’il s’agisse des cellules épithéliales ou des cellules caliciformes, traverser l’épithélium et agir sur les polynucléaires neutrophiles ou éosinophiles, les mastocytes, les fibres musculaires lisses bronchiques, ou passer dans la circulation systémique par l’intermédiaire des vaisseaux bronchiques.

Il faut également noter que les voies aériennes bronchiques sont entourées par les unités respiratoires terminales et que les médicaments peuvent donc théoriquement accéder à la circulation bronchique, aux cellules musculaires lisses, ou encore aux cellules du chorion bronchique, à partir des unités respiratoires terminales. Newman a estimé la quantité de b2-adrénergiques déposée, après l’inhalation d’une bouffée de 500 µg à l’aide d’un AD.

Ceci illustre l’optimisation possible de l’utilisation des aérosols de médicaments.

Les médicaments peuvent également accéder directement aux unités respiratoires terminales et là interagir avec les cellules libres présentes dans la lumière (macrophages, lymphocytes) et les cellules bordantes de l’épithélium, les pneumocytes I, les plus nombreux et qui tapissent la plus grande partie des surfaces alvéolaires, mais également des cellules au métabolisme plus actif, comme les pneumocytes II et au niveau des bronchioles terminales, les cellules de Clara.

Les médicaments peuvent traverser l’épithélium respiratoire et, après avoir pénétré dans l’interstitium, agir sur les cellules qui y résident, être drainés dans les vaisseaux lymphatiques ou passer dans la circulation sanguine.

B – Clairance des substances non ou peu solubles :

La clairance dans les voies trachéobronchiques a été mesurée par diverses méthodes.

Des estimations prenant en compte la sécrétion du mucus et la longueur des segments bronchiques déterminée par morphométrie ont été proposées : la vitesse du transport varie de 0,0046 mm/min dans la 15e génération bronchique à 5,5 mm/min dans la trachée.

Les particules provenant des alvéoles sont probablement transportées par les macrophages qui se déplacent de façon non quantifiée dans la phase liquide du mucus, entre les cils.

La clairance dans les unités respiratoires terminales est assurée par la phagocytose.

Si la phagocytose est rapide, le passage des macrophages dans les voies aériennes ciliées ou dans la circulation lymphatique est lent ; la clairance des substances insolubles décroît avec le temps, une fraction ne subissant aucune épuration mesurable.

Les données animales suggèrent une vitesse d’élimination de 10–6 %/j chez l’homme.

Les anti-infectieux comme les aminosides ou la pentamidine appartiennent à cette classe de médicaments : la gentamicine aérosolisée (40 mg) chez l’enfant était à une concentration de 55,2 µg/mL dans les sécrétions bronchiques et à une concentration de 0,13 µg/mL de sang.

Une concentration bronchique élevée persiste pendant plusieurs heures.

Des données encore plus démonstratrices ont été obtenues avec la pentamidine aérosolisée, voie d’administration qui permet d’obtenir des concentrations élevées de façon durable dans les voies aériennes avec des concentrations sériques basses ou indétectables.

C – Absorption des substances solubles :

Les mécanismes possibles d’absorption des médicaments sont la diffusion passive des médicaments hydrosolubles, la diffusion passive des médicaments liposolubles, le transport actif, la pinocytose ou la phagocytose, la diffusion facilitée, la filtration passive, l’absorption au contenu cellulaire et le passage à travers les gap jonctions.

Les données actuelles suggèrent que seuls les cinq premiers mécanismes jouent un rôle dans le poumon, c’est-àdire la diffusion passive des médicaments hydro- ou liposolubles, le transport actif, la pinocytose ou la phagocytose.

En ce qui concerne le passage des médicaments à travers les épithéliums, il existe différentes possibilités.

Le passage paracellulaire à travers les tight jonctions concerne les substances hydrosolubles ; le passage transcellulaire est possible pour les substances liposolubles, les substances hydrosolubles de très petit poids moléculaire et les substances hydrosolubles de gros poids moléculaire par pinocytose ou par phagocytose.

L’absorption des médicaments dépend donc schématiquement de leur poids moléculaire, mais également de leur liposolubilité.

Ainsi, dans le cas de médicaments de même poids moléculaire, le rythme de leur absorption est proportionnel à leur liposolubilité.

Ceci a été démontré chez le rat pour des substances de même poids moléculaire, le transfert transpulmonaire du médicament était proportionnel à leur liposolubilité.

La comparaison des surfaces offertes dans ces conditions au passage des molécules hydro- ou liposolubles explique en partie qu’un passage quasi instantané des substances liposolubles est possible, alors qu’à l’inverse les substances hydrosolubles, en raison de la faible surface offerte pour les échanges dans un appareil respiratoire normal, seront beaucoup plus limitées, la voie transcellulaire jouant un rôle bien moindre.

Dans le cas des substances hydrosolubles, la diffusion de la lumière alvéolaire vers la circulation pulmonaire est limitée par l’épithélium alvéolaire et non par l’endothélium vasculaire.

En effet, ce dernier est approximativement dix fois plus perméable que l’épithélium alvéolaire aux solutés hydrosolubles.

La liposolubilité d’un médicament peut être modifiée par sa charge électrique et éventuellement son métabolisme.

En effet, un médicament, à un pH voisin de son pK, a une liposolubilité maximale ; elle diminuera dans un milieu où le pH s’éloigne du pK, où la molécule se charge et s’entoure de molécules d’eau.

Certaines données suggèrent que le pH du liquide de surface bronchique et alvéolaire soit légèrement acide (pH = 7,30).

En outre, le cytochrome P450, présent dans les pneumocytes II et les cellules de Clara, peut oxyder certains médicaments, produisant ainsi des métabolites dont la liposolubilité est diminuée et l’effet modifié.

D – Métabolisation :

Les médicaments inhalés peuvent être métabolisés localement ; les adrénergiques en sont un exemple.

L’isoprénaline administrée en aérosol est une catécholamine dont 30 % est métabolisé par la catéchol-0- méthyltransférase (COMT) en 3-0-méthylisoprénaline au cours de l’absorption des voies aériennes vers la circulation.

Les bêta2-adrénergiques comme le salbutamol ou la terbutaline ne sont pas des catécholamines et ne sont donc pas des substrats de la COMT.

Les médicaments peuvent être également métabolisés en dehors de l’appareil respiratoire.

C’est le cas des corticostéroïdes inhalés qui sont métabolisés par le foie dans la circulation systémique « en un seul passage », ce qui explique l’absence d’effet sur la corticosurrénale aux posologies inférieures à 1 000 µg.

E – Effets des maladies respiratoires :

Certaines affections respiratoires peuvent modifier l’absorption pulmonaire des médicaments.

C’est le cas du tabagisme qui, en augmentant la perméabilité des épithéliums respiratoires aux solutés, augmente le passage des médicaments à travers la membrane épithéliale, ce qui favorise un effet systémique des médicaments inhalés : cela a été démontré dans le cas de l’aérosolisation d’acétylcholine chez le cochon d’Inde.

Chez le rat, le même phénomène est observé en cas d’oedème pulmonaire lésionnel et de pneumocystose ; cela peut être à l’origine d’une augmentation du transfert de pentamidine, ce qui peut avoir un rôle négatif si l’on considère que l’effet thérapeutique est lié à sa présence dans les espaces aériens.

F – Pénétration intramacrophagique :

Le macrophage alvéolaire est la cellule majoritaire dans la lumière alvéolaire chez le sujet normal et dans de nombreuses maladies respiratoires : cette cellule joue un rôle très important dans la défense de l’organisme vis-à-vis de nombreuses substances inhalées, mais aussi un rôle néfaste dans d’autres conditions.

Certains micro-organismes se développent dans les macrophages alvéolaires, et il semble légitime de vouloir faire pénétrer des antibiotiques dans les cellules infectées.

La concentration intracellulaire dépend des propriétés physicochimiques de l’anti-infectieux mais aussi d’un éventuel transport actif et d’une absorption intracellulaire du médicament.

Des antibiotiques se concentrent dans les macrophages alvéolaires : clindamycine, érythromycine, éthambutol, josamycine, fluoroquinolones.

Augmentation et diminution des défenses anti-infectieuses (phagocytose, bactéricidie) sous l’effet de ces antibiotiques ont été rapportées.

Il est possible de favoriser l’accès de médicaments aérosolisés à l’intérieur de certaines cellules.

Ceci a été réalisé chez l’animal où il est possible de prévenir les effets toxiques de l’oxygène en administrant, sous forme d’aérosol, des inhibiteurs des radicaux libres à l’intérieur de liposomes.

Administrés sans liposome, les inhibiteurs des radicaux libres ne préviennent pas la mortalité des animaux due à l’oxygénothérapie, alors qu’administrés à l’intérieur des liposomes, la mortalité diminue par la prévention des effets intracellulaires de l’oxygène.

Ce qui se passe après phagocytose reste peu connu.

Le pH, l’ionisation, la formation de complexes biologiques avec des protéines, des acides-alcools, la formation de ponts disulfures, la précipitation de phosphatases sont de multiples possibilités que les différences entre espèces interdisent d’extrapoler à l’homme.

G – Stockage pulmonaire :

L’administration de médicaments par voie d’aérosol permet d’obtenir des effets systémiques retardés.

Si l’on administre de l’héparine par aérosol à des sujets sains, un effet très prolongé du médicament est observé ; ainsi, le temps de coagulation est toujours augmenté de 30 % une quinzaine de jours après l’administration d’héparine sous forme d’aérosol, après une inhalation de 16 mg/kg.

Ceci suggère que le poumon est capable de stocker les médicaments, puis de les relarguer lentement ultérieurement par un mécanisme non élucidé.

Choix d’un générateur d’aérosol :

Le choix d’un système d’aérosolisation et d’inhalation dépend de la molécule à aérosoliser et des formes galéniques disponibles, des caractéristiques techniques du matériel, du malade et de sa maladie, du médecin, du contexte d’utilisation, notamment l’urgence.

Certaines règles s’appliquent, quoi qu’il en soit : si le médicament est sous la forme d’une suspension, le nébuliseur ne doit pas être ultrasonique et l’agitation de l’AD est indispensable ; en cas d’inhalation de plusieurs médicaments, il est préférable d’utiliser le même système d’inhalation ; l’AD est le système portable le plus fiable et le moins coûteux dont l’usage est à privilégier chez les malades capables de l’utiliser de façon satisfaisante ; en cas d’utilisation ambulatoire, le matériel doit être peu encombrant et de mise en oeuvre simple ; une éducation du malade est toujours nécessaire en cas d’utilisation ambulatoire.

Dans certaines circonstances, le choix est restreint ; c’est le cas lorsqu’on souhaite délivrer des médicaments dans les unités respiratoires terminales, ce qui implique d’utiliser des aérosols microniques monodispersés par une aérosolisation prolongée à l’aide d’un nébuliseur adapté (pentamidine dans la prévention de la pneumocystose), et lorsque le médicament n’a été développé qu’avec certains types de système d’aérosolisation (DNase dans la mucoviscidose).

Si l’AD est le système d’aérosolisation indiqué en première intention dans les affections bronchiques, il ne peut pas toujours être utilisé en raison d’une utilisation inadaptée, notamment chez l’enfant ou le sujet âgé.

Il est possible de remédier à la mauvaise coordination par unAD dont le déclenchement est provoqué par l’inspiration, par l’utilisation d’une chambre d’inhalation dont la portabilité doit être acceptable par le malade, ou par un inhalateur de poudre sauf chez les enfants de moins de 6 ans et chez les insuffisants respiratoires dont l’inspiration est insuffisante pour disperser et inhaler la poudre.

La nébulisation pneumatique ou ultrasonique ne doit être considérée qu’en cas d’échec des autres formes d’administration.

Le système d’aérosolisation à utiliser en cas d’obstruction aiguë sévère des voies aériennes est l’objet d’un débat : nébuliseur ou dispositif portable ?

Clairement, l’effet bronchodilatateur des bêta2-adrénergiques et des anticholinergiques inhalés dépend davantage de la dose inhalée que du dispositif utilisé pour l’inhalation ; plusieurs études démontrent que l’efficacité et les effets secondaires du salbutamol nébulisé ne sont pas différents de ceux du salbutamol aérosolisé par unAD couplé à une chambre d’inhalation.

Mais ces études ne permettent pas de conclure définitivement quant à l’équivalence de ces dispositifs dans l’obstruction aiguë des voies aériennes, notamment en raison des petits effectifs de malades et d’une sévérité variable de l’obstruction dans ces études.

D’autres facteurs interviennent dans le choix du système.

Plaident contre le nébuliseur le coût plus élevé et une mise en oeuvre plus longue, et contre l’AD couplé à la chambre d’inhalation, l’inadaptation à l’administration rapide de doses élevées dans les cas les plus sévères, l’assurance du maniement correct du dispositif.

En pratique, le choix du dispositif dépend de trois facteurs : la sévérité de l’exacerbation, l’aptitude du malade à utiliser les dispositifs portables, le contexte dans lequel les soins sont dispensés.

L’aérosolisation de médicaments a considérablement progressé, particulièrement dans le domaine des affections bronchiques dont les modalités de prise en charge ont été totalement reconsidérées à la lumière des résultats obtenus par cette approche thérapeutique.

Les systèmes d’aérosolisation sont de plus en plus élaborés et l’on comprend de mieux en mieux les mécanismes de dépôt et d’action des médicaments.

Des perspectives passionnantes s’ouvrent avec l’administration d’aérosols pour le traitement génétique de certaines maladies respiratoires comme la mucoviscidose, le déficit en alphalpha1-antitrypsine, les carcinomes bronchopulmonaires, et pour l’administration de peptides ayant une action systémique qui devrait permettre de traiter certains déficits endocriniens.

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